Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AN c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 132

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale — Section de l’assurance-emploi

Décision

Parties appelante : A. N.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (441791) datée du 9 décembre 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Angela Ryan Bourgeois
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 11 janvier 2022 et le 16 février 2022
Personnes présentes à l’audience : Personne n’a assisté à l’audience
Date de la décision : Le 21 février 2022
Numéro de dossier : GE-21-2538

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec le prestataire.

[2] Le prestataire a quitté volontairement son emploi. Il n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter son emploi (c’est-à-dire qu’il n’avait pas une raison acceptable selon la loi pour le faire) quand il l’a fait. Le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi parce que le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] Le prestataire a cessé de travailler le 4 novembre 2020. Il a demandé des prestations régulières de l’assurance-emploi le 23 novembre 2020.

[4] Dans son formulaire de demande, le prestataire a dit que son employeur l’a congédié. Mais son relevé d’emploi disait qu’il avait démissionné.

[5] En octobre 2021, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné la divergence entre son formulaire de demande et le relevé d’emploiNote de bas de page 1.

[6] La Commission a décidé que le prestataire a conclu que le prestataire a quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’il a choisi de quitter son emploi) sans justification prévue par la loi. Par conséquent, il était exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi. Puisque la Commission lui avait déjà versé des prestations, elle lui a demandé de les rembourser.

[7] Le prestataire a porté la décision de la Commission en appel devant le Tribunal. Il veut que ses prestations d’assurance-emploi soient rétablies du 26 octobre 2021 au 21 décembre 2021. Il veut également que sa période de prestations soit prolongée parce qu’il affirme qu’il est impossible de trouver un emploi dans le contexte économique actuel.

[8] Je peux seulement instruire les appels concernant des décisions que la Commission a déjà révisées.

[9] En ce qui concerne le prestataire, la Commission a révisé sa décision au sujet du départ volontaire. Il n’y a aucune décision concernant la période de prestations du prestataire au dossier.

[10] Par conséquent, la question que je dois trancher est celle de savoir si le prestataire a quitté volontairement son emploi sans justification. Je n’ai pas le pouvoir d’examiner si l’on peut prolonger sa période de prestations.

Question que je dois examiner en premier

Le prestataire n’était pas présent à l’audience

[11] L’audience peut aller de l’avant sans le prestataire, si ce dernier a reçu l’avis d’audienceNote de bas de page 2.

[12] Le prestataire n’était pas présent à l’audience du 11 janvier 2022. L’avis d’appel a été envoyé par courriel au prestataire. Le Tribunal a tenté de le joindre sans succès. Même s’il n’y avait aucune indication au dossier selon laquelle le courriel n’avait pas été reçu, je n’étais pas convaincue qu’il avait reçu le message.

[13] J’ai organisé une autre audience le 16 février 2022. Cet avis d’appel a été envoyé à la fois par courriel et par messagerie.

[14] Je suis convaincue que le prestataire a reçu l’avis concernant l’audience du 16 février 2022 pour les raisons suivantes :

  • il n’y a aucune indication au dossier selon laquelle le courriel contenant l’avis d’audience n’a pas été livré;
  • le courriel a été envoyé à l’adresse électronique fournie par le prestataire dans son avis d’appel;
  • les documents au dossier montrent que l’avis d’audience a bien été livré au prestataire par Purolator.

[15] L’audience a donc eu lieu à la date prévue, mais sans le prestataire.

Question en litige

[16] Voici les questions que je dois trancher :

  • Le prestataire a-t-il quitté volontairement son emploi?
  • Dans l’affirmative, était-il fondé à quitter son emploi?

Analyse

La preuve

[17] Il y a des éléments de preuve contradictoires au dossier. À titre d’exemple, l’employeur a écrit que le prestataire a quitté son emploi, mais le prestataire affirme que l’employeur savait pourquoi il n’était pas au travail.

[18] Par conséquent, avant de pouvoir trancher la question en litige dans le présent appel, je dois déterminer quels sont les éléments de preuve auxquels j’accorde plus de poids.

Ce que dit le prestataire

[19] Dans son avis d’appel, le prestataire a écrit ce qui suit :

  • Il avait des symptômes de la COVID-19.
  • Il a dû se mettre en quarantaine pendant deux semaines, soit du 4 novembre 2020 au 18 novembre 2020.
  • Il a essayé d’appeler la ligne d’information de l’employeur, mais il n’a pas eu de réponse, pas même une sonnerie.
  • Il a dit à son patron qu’il ne pouvait pas travailler pensant deux semaines et que la ligne d’information ne fonctionnait pas.
  • Son patron a dit d’accord, et lui a dit de revenir au travail pour son prochain quart après la quarantaine.
  • Deux jours avant la fin de sa quarantaine, le 16 novembre 2020, il a reçu une lettre de congédiement.
  • Contrairement à ce que dit la lettre de congédiement, l’employeur n’a pas essayé de communiquer avec lui.
  • Lorsque sa quarantaine s’est terminée le 18 novembre 2020, il est allé voir son employeur.
  • Son employeur a présenté des excuses pour son congédiement, mais a dit que les formalités administratives étaient définitives.
  • Son employeur a accepté d’inscrire que le prestataire avait été mis à pied sur son relevé d’emploi.

[20] Dans sa demande de prestations, le prestataire a choisi l’option selon laquelle on l’a congédié parce que son employeur le considérait comme inapte au travail pour lequel on l’avait embauché. Le formulaire de demande indique que l’employeur n’a pas expliqué pourquoi il n’était pas apte au travail.

[21] Dans sa demande de révision, le prestataire a écrit ce qui suit :

  • Il n’a pas démissionné de son emploi.
  • On l’a mis à pied ou congédié sous prétexte qu’il ne s’est pas présenté au travail.
  • Il a été malade pendant deux semaines.
  • Il a essayé d’appeler la ligne d’information, mais il n’a pu joindre personne.
  • Il a plutôt avisé une ou un collègue pour que l’information soit transmise.

Ce que disent les autres éléments de preuve

[22] La Commission a essayé de communiquer avec l’employeur. L’employeur n’a pas rappelé la CommissionNote de bas de page 3.

[23] Le relevé d’emploi dit que le prestataire a démissionnéNote de bas de page 4.

[24] Dans la lettre de congédiement datée du 16 novembre 2020, l’employeur a écrit ce qui suit :

  • Il n’avait pas vu ni entendu parler du prestataire depuis le 4 novembre 2020.
  • Il a fait plusieurs tentatives pour joindre le prestataire par téléphone et par courriel.
  • Le prestataire n’a pas rappelé l’employeur.
  • Le prestataire n’a pas dit à l’employeur pourquoi il était absent du travail.
  • Le prestataire n’a pas appelé la ligne d’information conformément à la politique de l’employeur sur les présences.
  • L’employeur a tenu pour acquis que le prestataire avait abandonné son poste.
  • Son dernier jour était le 16 novembre 2020.

[25] La lettre de congédiement a été envoyée par courriel.

Éléments de preuve auxquels j’accorde plus d’importance

[26] J’estime que la lettre de congédiement de l’employeur est un élément de preuve plus fiable que ce que le prestataire a écrit.

[27] Les déclarations du prestataire ne sont pas fiables parce qu’elles sont incohérentes. Voici des exemples de ses déclarations incohérentes :

  • La personne à qui il a dit qu’il était malade. Dans le formulaire de demande de révision, il a déclaré l’avoir dit à sa ou son collègue. Dans son avis d’appel, il a déclaré l’avoir dit à son patron.
  • La raison pour laquelle on l’a congédié. Dans son formulaire de demande, il a déclaré qu’on l’avait congédié parce que l’employeur ne le trouvait pas apte à l’emploi. Dans sa demande de révision et son avis d’appel, il a déclaré qu’on l’a congédié sous prétexte qu’il ne s’est pas présenté au travail.

[28] Je n’ai pas pu questionner le prestataire sur ces incohérences parce qu’il n’était pas présent à l’audience.

[29] J’accorde plus d’importance à la lettre de congédiement pour les raisons suivantes :

  • Seules les déclarations incohérentes du prestataire la contredisent.
  • Le prestataire n’a fourni aucun élément de preuve convaincant qui remettrait en question les déclarations faites dans la lettre de congédiement. Par exemple, il n’y a aucun registre d’appels montrant que le prestataire a essayé d’appeler l’employeur concernant son absence.
  • Le relevé d’emploi correspond à ce que l’employeur a écrit dans la lettre de congédiement.

Ce que signifie « quitter volontairement » un emploi

[30] La loi prévoit qu’au moment de décider si le prestataire a quitté volontairement son emploi, je dois me poser la question de savoir s’il avait le choix de rester ou de quitterNote de bas de page 5. S’il avait le choix de rester et qu’il ne l’a pas fait, alors il a quitté volontairement son emploi.

[31] La Commission doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire a quitté volontairement son emploi.

Le prestataire a quitté volontairement son emploi

[32] J’estime, selon la prépondérance des probabilités, que le prestataire a quitté volontairement en abandonnant son emploi. Il a fait cela en ne se présentant pas au travail pendant deux semaines, en n’avisant pas son employeur de son absence et en ne répondant pas aux efforts de son employeur pour le joindre.

[33] Ma constatation est confirmée pas l’inaction du prestataire lorsqu’il a reçu la lettre de congédiement par courriel le 16 novembre 2020. J’estime qu’il est probable que si le prestataire avait voulu conserver son emploi, il aurait communiqué avec l’employeur dès qu’il a reçu la lettre de congédiement du 16 novembre 2020. Une personne désirant garder son emploi aurait, au strict minimum, répondu au courriel et demandé la chance d’expliquer la situation. Mais le prestataire a choisi d’attendre deux jours avant de communiquer avec l’employeur. Son retard montre un manque d’intérêt à essayer de garder son emploi.

Ce que signifie un « départ fondé »

[34] La loi prévoit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 6. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que le départ était fondé.

[35] La loi explique ce que veut dire « être fondé à ». Elle dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 7.

[36] Le prestataire est responsable de prouver que son départ était fondéNote de bas de page 8. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnable. Pour prendre une décision, je dois examiner toutes les circonstances présentes quand le prestataire a quitté son emploi.

[37] Les parties conviennent que le prestataire ne s’est pas présenté au travail. Le différend porte sur la question de savoir si le prestataire a avisé l’employeur de son absence, et si l’employeur a approuvé son absence.

[38] Le prestataire affirme avoir dit à l’employeur qu’il était en quarantaine et que son absence était approuvée.

[39] La Commission affirme que le prestataire a abandonné son emploi en ne se présentant pas au travail.

[40] Puisque j’accorde plus d’importance à la lettre de congédiement qu’aux déclarations du prestataire, j’estime plus probable qu’improbable que le prestataire n’ait pas dit à son employeur qu’il ne serait pas au travail et qu’il n’a pas répondu aux efforts de son employeur pour le joindre.

Le prestataire avait d’autres solutions raisonnables

[41] J’estime que le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle d’abandonner son emploi. Il s’agissait de :

  • Demander un congé à l’employeur, soit par téléphone ou par courriel. Le prestataire n’a fourni aucun élément de preuve convaincant selon lequel il a communiqué avec l’employeur. À titre d’exemple, il n’y a pas de registres d’appels ou de courriels au dossier montrant qu’il a communiqué avec l’employeur.
  • Répondre aux appels téléphoniques et aux courriels de l’employeur. Le prestataire affirme ne pas avoir reçu d’appels ou de courriels. Mais d’après la lettre de congédiement et le refus apparent de l’employeur d’accepter l’explication du prestataire, je trouve qu’il est plus probable qu’improbable que l’employeur a fait les efforts qu’il dit avoir faits pour communiquer avec le prestataire.

[42] Puisque le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter, il n’était pas fondé à le faire.

Conclusion

[43] Le prestataire a volontairement quitté son emploi sans justification. Autrement dit, il est exclu du bénéfice des prestations.

[44] L’appel est rejeté.

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