Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 171

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : S. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (440448) rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada le 7 décembre 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Charlotte McQuade
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 2 février 2022
Personne présente à l’audience : Appelant

Date de la décision : Le 17 février 2022
Numéro de dossier : GE-22-129

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. Le Tribunal est d’accord avec S. M. (prestataire).

[2] Du 3 mai 2021 au 3 septembre 2021, il n’a pas fait des semaines entières de travail.

Aperçu

[3] En 2021, pendant environ quatre mois, le prestataire a vendu des polices d’assurance comme travailleur indépendant.

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que, du 3 mai 2021 au 3 septembre 2021, le prestataire faisait des semaines entières de travail et n’était donc pas en chômage. Par conséquent, la Commission a décidé qu’il ne pouvait pas recevoir des prestations d’assurance‑emploi pour cette période.

[5] Le prestataire n’est pas d’accord. Il affirme que sa participation au travail indépendant était si limitée qu’il ne travaillait pas vraiment pendant une semaine entière. Il dit avoir investi très peu d’argent dans son travail indépendant et y avoir consacré peu de temps, seulement durant la soirée. Le prestataire affirme qu’il touchait une commission, mais que le montant et le manque de constance des paiements rendaient son travail indépendant non viable. Il explique que c’était une occasion de courte durée qu’il a essayée. Toutefois, les choses n’ont pas fonctionné, alors il a mis fin au travail indépendant avant le 5 septembre 2021. Le prestataire soutient qu’il était disponible pour travailler à temps plein pendant la journée tout au long de la période en question.

[6] Pour les motifs exposés plus bas, j’ai décidé que le prestataire a démontré que sa participation au travail indépendant était si limitée que, normalement, ce travail ne serait pas le principal moyen de subsistance d’une personne. Il ne faisait donc pas des semaines entières de travail du 3 mai 2021 au 3 septembre 2021.

Question en litige

[7] La participation du prestataire à son travail indépendant était‑elle si limitée qu’il ne faisait pas des semaines entières de travail?

Analyse

[8] Si l’on participe aux activités d’une entreprise, on pourrait ne pas avoir droit aux prestations d’assurance-emploi.

[9] La loi prévoit qu’on peut recevoir des prestations d’assurance‑emploi pour chaque semaine de chômageNote de bas page 1. Une semaine de chômage est une semaine pendant laquelle on n’effectue pas une semaine entière de travailNote de bas page 2.

[10] De plus, la loi considère qu’une personne qui est travailleuse indépendante ou qui participe à l’exploitation d’une entreprise effectue des semaines entières de travailNote de bas page 3. Par conséquent, elle ne peut pas recevoir des prestations d’assurance‑emploiNote de bas page 4.

Exception si la participation est limitée

[11] Il y a une exception quand la participation au travail indépendant ou à l’entreprise est limitéeNote de bas page 5.

[12] L’exception s’applique si la participation du prestataire était si limitée que, normalement, ce travail indépendant ou cette entreprise ne serait pas son principal gagne-painNote de bas page 6.

[13] Le prestataire doit prouver que sa participation était si limitée que l’exception s’appliqueNote de bas page 7. Il doit établir sa preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela veut dire qu’il doit montrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) que sa participation était limitée.

Six éléments à considérer pour évaluer le degré de participation

[14] Pour décider si l’exception s’applique, je dois prendre en considération les six éléments suivantsNote de bas page 8 :

  1. a) Combien de temps le prestataire consacrait-il à son travail indépendant?
  2. b) Combien le prestataire a-t-il investi dans son travail indépendant et quels sont ces investissements (sommes d’argent, propriété, biens ou ressources)?
  3. c) Sur le plan financier, le travail indépendant est-il une réussite ou un échec?
  4. d) Était-il prévu que le travail indépendant soit maintenu?
  5. e) Quelle était la nature du travail indépendant?
  6. f) Le prestataire avait-il l’intention et la volonté de trouver rapidement un autre emploi?

Temps consacré au travail

[15] Le temps que le prestataire a consacré à son travail indépendant témoigne d’une participation limitée.

[16] Selon la Commission, le prestataire lui a dit qu’il consacrait plus de 30 heures par semaine à son travail indépendantNote de bas page 9.

[17] Le prestataire a déclaré qu’il voulait trouver un emploi qu’il pouvait effectuer en ligne puisqu’il vit avec son père âgé et craignait de l’exposer à la COVID‑19. Le prestataire a expliqué qu’auparavant, il travaillait dans la vente pour un concessionnaire d’automobiles. Son employeur lui a demandé de revenir en février 2021. Le prestataire a démissionné parce qu’il avait peur de ramener la COVID‑19 à la maison. Un ami lui a parlé de la possibilité de gagner jusqu’à 100 000 $ en vendant des polices d’assurance vie à partir de chez lui, alors il a décidé d’essayer. Il a été embauché en avril ou en mai 2021.

[18] Le prestataire a expliqué qu’il devait obtenir un permis pour vendre des polices d’assurance vie. Cela lui a coûté 200 $. Il a obtenu son permis en ligne à peu près au moment de son embauche.

[19] Le prestataire a déclaré que l’entreprise pour laquelle il travaillait de façon indépendante avait conclu une entente exclusive pour vendre des polices d’assurance vie aux membres d’un syndicat. Il fallait appeler les membres du syndicat le soir et essayer de leur vendre une assurance vie. Le prestataire affirme qu’il n’a jamais dit à la Commission qu’il avait commencé à travailler à son compte le 3 mai 2021. Il lui a dit que les dates qu’il donnait étaient approximatives.

[20] Durant son témoignage, le prestataire a expliqué que, de mai à la mi-juin, il passait seulement jusqu’à cinq heures par semaine, le soir, à écouter d’autres agentes et agents appeler au hasard des membres du syndicat. Il a aussi regardé des réunions en ligne. Le prestataire a déclaré que, même si l’horaire de travail proposé par l’entreprise était de 13 h à 21 h, les membres du syndicat travaillaient pendant la journée, de sorte que toutes les activités avaient lieu le soir. Il dit qu’il n’a pas commencé à essayer de faire lui-même des ventes avant juillet 2021.

[21] Le prestataire a expliqué qu’à compter de la mi-juin et en juillet, il consacrait 15 heures par semaine, toujours le soir, à son travail indépendant. Il a expliqué qu’il n’y avait pas de préparation à faire. Il faisait simplement des appels téléphoniques. Il lisait un texte à l’ordinateur et partageait son écran pour transmettre de l’information.

[22] Le prestataire a raconté qu’en août, il a commencé à réduire ses heures de travail indépendant jusqu’à ce qu’il n’en ait presque plus. Il a complètement arrêté le 5 septembre 2021, le jour où il a avisé l’entreprise que c’était terminé pour lui. Il dit qu’il a fait tout au plus 15 heures de travail indépendant par semaine, toujours le soir.

[23] Le témoignage du prestataire sur le temps consacré à ce travail diffère de l’information que la Commission dit avoir reçue du prestataire. Je dois donc décider quelle information est la plus fiable.

[24] Selon les notes que la Commission a prises le 19 août 2021, le prestataire a déclaré qu’il travaillait plus de 15 heures par semaine à son compte, qu’il considérait que c’était là sa principale source de revenus et qu’il cherchait à en faire sa principale source de revenus. Les notes indiquent que le prestataire a déclaré qu’il n’était pas disposé à travailler plus de 30 heures par semaine en dehors de son travail indépendant. Il a ajouté qu’il avait l’intention de se consacrer uniquement à son travail indépendantNote de bas page 10.

[25] Selon les registres des conversations de la Commission, le 14 octobre 2021, le prestataire a dit à l’agente de la Commission qu’il passait environ 40 heures par semaine à faire du travail indépendant et qu’il pouvait seulement consacrer environ de 11 à 20 heures aux emplois offerts sur le marché du travailNote de bas page 11.

[26] Le prestataire nie avoir dit cela. Il affirme avoir dit à l’agente qu’il était difficile de savoir pendant combien d’heures il travaillait chaque semaine, car ses heures variaient. Selon lui, l’agente n’a pas consigné ses réponses complètes. Le prestataire dit se souvenir qu’il n’a pas pu répondre à plusieurs questions et qu’il a répondu que la question n’avait aucun sens étant donné le genre de travail qu’il faisait, car son horaire n’était pas normal. Le prestataire affirme que l’agente lui a demandé combien d’heures il pouvait travailler, mais il a dit qu’il n’avait pas de réponse à cette question puisqu’il ne pouvait pas généraliser vu la nature unique de son travail indépendant.

[27] Le compte rendu de la Commission sur la conversation du 6 décembre 2021 indique que le prestataire a dit à l’agent responsable de la révision que les renseignements au dossier n’étaient pas tout à fait exacts. Selon les notes, le prestataire a dit que pendant environ un mois, il faisait seulement de la formation et observait une autre personne en train de travailler. Il a ajouté qu’il n’a pas terminé sa formation ni obtenu sa certification avant le début de juin. Il a dit que durant cette période, il passait environ 30 heures par semaine à faire de la formation pour obtenir sa certification. Il a ajouté que, de juin à la mi-juillet, il se donnait entièrement à son travail indépendant, et ce, à temps plein. Les notes indiquent que le prestataire a dit y consacrer plus de 30 heures par semaine et qu’il y aurait passé plus de temps s’il avait eu plus de clientèle. Cependant, de la mi-juillet au 3 septembre, il ne s’impliquait pas beaucoup dans son travail indépendant parce qu’à la mi-juillet, il s’est rendu compte qu’il ne gagnait pas beaucoup d’argent. Il a travaillé moins de 20 heures par semaine durant cette périodeNote de bas page 12.

[28] Durant son témoignage, le prestataire a affirmé qu’il n’avait jamais dit à l’agent responsable de la révision qu’il passait 30 heures par semaine à faire de la formation pour obtenir sa certification. Il dit que l’agent posait des questions suggestives et qu’il essayait de lui répondre selon son souvenir. Il affirme que s’il a dit qu’il passait 30 heures par semaine à travailler, il a été incité à le dire par les questions.

[29] Le prestataire a déclaré qu’aucune des personnes à qui il a parlé à la Commission ne lui a demandé quand il travaillait et qu’il n’a pas pensé à leur dire qu’il travaillait à son compte seulement le soir.

[30] La Commission soutient que la jurisprudence a toujours confirmé le principe selon lequel une déclaration initiale a plus de poids que les déclarations faites à la suite d’une décision défavorable, de sorte que les déclarations initiales du prestataire devraient avoir préséance sur ses déclarations ultérieures. Je suis d’accord pour dire que, de façon générale, cela est vrai.

[31] Cependant, je juge que le prestataire était sincère. Il était direct et répondait franchement aux questions. De plus, il a livré son témoignage sous serment. Je remarque que, lors de la conversation initiale qui a eu lieu le 19 août 2021, le prestataire a dit travailler à son compte plus de 15 heures par semaine, mais être disposé à travailler 30 heures de plus. Cette réponse concorde avec son témoignage au sujet du temps consacré à son travail indépendant.

[32] En ce qui concerne la conversation du 14 octobre 2021, je remarque que le prestataire a mentionné dans sa demande de révision que l’agente n’avait pas bien compris sa situationNote de bas page 13. Il a aussi dit à l’agent qui révisait son dossier, au début de la conversation, que les renseignements au dossier n’étaient pas tout à fait exacts et qu’il voulait clarifier les circonstances entourant son travail indépendantNote de bas page 14. Que ce soit parce que le prestataire s’est mal expliqué ou que l’agente l’a mal compris, à mon avis, il y a lieu de douter de l’exactitude des renseignements consignés dans les notes du 14 octobre 2021.

[33] Il ressort clairement du témoignage du prestataire qu’il a perçu la discussion avec l’agent responsable de la révision comme étant une recherche incomplète des faits. Le prestataire dit que les questions de l’agent étaient suggestives, ce qui a influencé ses réponses. Les notes de la conversation montrent seulement ce que le prestataire a dit, et non les questions qui lui ont été posées. Puisque le prestataire est préoccupé par les questions et que je ne suis pas en mesure de savoir quelles questions ont été posées, j’accorde plus d’importance au témoignage du prestataire qu’aux renseignements figurant dans les notes.

[34] Par conséquent, en ce qui concerne le temps consacré au travail, je préfère le témoignage du prestataire à l’information consignée dans les notes du 14 octobre 2021 et du 6 décembre 2021. Je conclus que le prestataire a consacré de 5 à 15 heures par semaine à son travail indépendant, et ce, toujours en soirée.

[35] Étant donné le temps limité que le prestataire consacrait chaque semaine au travail indépendant et comme il travaillait seulement le soir, en dehors de ce qui serait une journée de travail typique, je conclus que le temps consacré au travail indépendant démontre que la participation était limitée.

Investissements

[36] La nature et le montant des investissements du prestataire (comme l’argent, la propriété, les biens et les ressources) témoignent d’une participation limitée.

[37] La Commission affirme qu’à l’exception de 200 $ pour la formation et le certificat, aucun autre capital n’était requis.

[38] Le prestataire affirme que son seul investissement a été le coût de la formation et de l’accréditation, qui s’élevait à environ 200 $. Il a aussi dépensé 60 $ pour acheter une caméra pour son ordinateur. Il a dit qu’il n’avait aucuns frais de publicité et qu’il se servait de son téléphone personnel, de son ordinateur et de son service Internet. Il travaillait de la maison et n’employait personne d’autre. Tous ses rendez-vous étaient virtuels. Il n’avait aucuns frais de déplacement.

[39] Je juge que ce que le prestataire a investi dans son travail indépendant démontre une participation limitée. Il a juste investi environ 260 $, ce qui est très peu.

Réussite ou échec sur le plan financier

[40] Les retombées financières du travail indépendant du prestataire témoignent d’une participation limitée.

[41] Selon la Commission, le prestataire lui a dit que le revenu brut annuel était estimé à plus de 20 000 $ et qu’il essayait de faire de ce travail indépendant sa principale source de revenus.

[42] Le prestataire a expliqué qu’on lui avait dit qu’il toucherait une commission égale à 50 % de ses ventes. De plus, s’il recommandait d’autres personnes embauchées par le service des ventes, une partie de leur commission serait retenue. Au bout du compte, il n’a reçu que 75 % de la commission de 50 % qu’il était censé obtenir.

[43] Le prestataire affirme qu’à la fin du mois de juin, il a reçu de 700 $ à 800 $ en commission, mais cette somme découlait d’une commission qu’on lui donnait, et non de ses propres ventes. En juillet 2021, il a réalisé deux ventes et a reçu un total d’environ 4 000 $ à 5 000 $. Il n’a pas touché d’autres revenus par la suite. Le prestataire a affirmé qu’il a dû rembourser une partie de la commission qu’il avait gagnée en juillet à cause de l’annulation d’une police d’assurance.

[44] Le prestataire a affirmé que lorsqu’il a parlé à l’agente de la Commission le 19 août 2021 et qu’il a dit que le revenu annuel était estimé à plus de 20 000 $, il était encore optimiste à l’idée d’être travailleur indépendantNote de bas page 15. Il espérait pouvoir gagner après les heures normales de travail un revenu d’appoint de 20 000 $ par année, mais cela n’a pas fonctionné.

[45] Le prestataire a déclaré avoir dit à l’agente de la Commission, le 19 août 2021, qu’il avait surtout l’intention de se concentrer sur le travail à son compte et qu’il voulait en faire sa principale source de revenus parce qu’à l’époque, il venait tout juste de toucher la grosse commission de juillet et qu’il espérait toujours que son projet se réalise. Cependant, raconte-t-il, environ deux semaines plus tard, cette intention a changé parce qu’encore une fois, il ne gagnait plus d’argent.

[46] Je juge que cet élément montre une participation limitée à l’entreprise. Le prestataire a gagné de 700 $ à 800 $ quand une commission lui a été versée. Il a réalisé deux ventes en juillet, ce qui lui a permis de gagner de 4 000 $ à 5 000 $, mais il a dû rembourser une partie de cet argent en raison de l’annulation des polices. Le prestataire n’a touché aucun revenu provenant de l’entreprise après juillet 2021. Son revenu provenait entièrement de ses commissions.

[47] Même si le prestataire avait l’intention de compter sur le travail indépendant comme principale source de revenus, ce travail ne lui donnait pas un revenu assez élevé pour constituer son principal moyen de subsistance. Son travail indépendant lui procurait un revenu imprévisible et changeant. Le prestataire a gagné beaucoup d’argent en juillet, mais il n’a rien gagné au mois d’août. Les paiements étaient irréguliers et les commissions n’étaient même pas garanties, car il se pouvait que les polices d’assurance soient annulées. Le revenu serait peut-être devenu plus stable avec le temps, mais il ne l’était pas durant la période en question. Ce n’était pas une source de revenus pouvant normalement constituer le principal moyen de subsistance d’une personne.

Maintien du travail indépendant

[48] Cet élément est indéterminé.

[49] Durant son témoignage, le prestataire a dit qu’à compter du 19 août 2021, il avait surtout l’intention de se concentrer sur son travail indépendant et voulait en faire sa principale source de revenus. Cependant, environ deux semaines plus tard, cette intention a changé parce qu’encore une fois, il ne faisait plus d’argent. Il a cessé de travailler à son compte autour du 5 septembre 2021.

[50] La Commission affirme que le travail indépendant du prestataire a pris fin le 3 septembre 2021.

[51] Je juge que cet élément est indéterminé. Au cours de la période en question, le prestataire voulait poursuivre son travail indépendant. De plus, l’entreprise serait peut-être devenue viable à long terme. Cela démontre un plus grand degré d’engagement qu’une participation limitée. Cependant, le prestataire a fini par cesser de travailler à son compte durant la période du 3 au 5 septembre. Cela montre que sa participation au travail indépendant était limitée.

Nature du travail indépendant

[52] Le prestataire travaillait à son compte comme vendeur d’assurance. Auparavant, il travaillait dans la vente pour un concessionnaire d’automobiles. Cela démontre une participation limitée parce qu’à l’exception du fait que les deux emplois étaient dans le domaine de la vente, ils n’avaient rien en commun.

[53] Rien ne montre que l’emploi antérieur occupé par le prestataire lui a servi de tremplin vers son travail indépendant.

Intention et volonté de trouver rapidement un autre emploi

[54] Cet élément témoigne d’un engagement plus profond qu’une participation limitée.

[55] Je ne suis pas convaincue que le prestataire cherchait activement du travail du 3 mai 2021 au 3 septembre 2021. La preuve ne montre pas qu’il cherchait activement un emploi. Je ne suis pas convaincue que le prestataire avait l’intention de trouver un emploi à temps plein et de travailler à son compte comme à-côté.

[56] Selon la Commission, le prestataire a dit qu’il n’avait pas commencé à chercher un autre emploi avant le 4 septembre 2021 parce que c’est à ce moment-là qu’il a décidé de cesser son travail indépendant. Il a déclaré qu’il s’est alors rendu compte qu’il ne faisait pas assez d’argent et a donc décidé d’abandonner complètement son projetNote de bas page 16.

[57] La Commission affirme que le prestataire n’a présenté aucune preuve montrant qu’il cherchait un emploi à temps plein ailleurs.

[58] Durant son témoignage, le prestataire a déclaré qu’il était prêt et disposé à travailler 40 heures par semaine de 9 h à 17 h. Il dit qu’il était disposé à trouver un autre emploi et qu’il aurait été prêt à accepter un emploi de 9 h à 17 h tout en exerçant son travail indépendant. Il explique qu’il avait l’intention de travailler à son compte en soirée, comme à-côté.

[59] Le prestataire affirme que la Commission ne l’a pas interrogé sur sa recherche d’emploi. Il affirme qu’il cherchait un emploi de 9 h à 17 h chaque jour. Il a notamment rédigé sa lettre de présentation et son curriculum vitæ, examiné les alertes d’emploi proposées par le site Guichet emplois et discuté avec ses proches et des gens de sa région pour voir s’il y avait des possibilités d’emploi. Il dit qu’il était ouvert aux emplois de type construction, comme la plomberie et l’électricité, mais qu’il cherchait aussi un emploi de vente à distance. Sa petite amie l’a dirigé vers une personne pour un poste de vendeur et il a présenté sa candidature, mais l’entreprise n’avait besoin de personne à ce moment-là.

[60] Le prestataire a expliqué qu’il voulait travailler à distance pour ne pas exposer son père à la COVID‑19. Il affirme ne pas avoir postulé à plus d’un emploi parce que les emplois à distance exigeaient une plus grande expérience que la sienne. Il dit aussi qu’il a cherché à savoir comment obtenir son permis d’agent immobilier au cours de l’été 2021. Il a communiqué avec l’organisme d’aide à l’emploi Job Skills pour voir s’il pouvait s’inscrire à un programme de deuxième carrière, mais il n’était plus offert. Le prestataire a fini par décider de faire les démarches pour obtenir son permis d’agent immobilier en décembre 2021.

[61] Le prestataire reconnaît qu’il aurait pu effectuer une recherche d’emploi plus active. Cependant, il affirme que son travail indépendant n’est pas la raison pour laquelle il ne l’a pas fait. C’est plutôt parce qu’il s’est fixé des critères restrictifs quant au genre d’emploi qu’il accepterait. Il soutient que son travail indépendant n’aurait pas nui à un emploi, car il y consacrait du temps seulement le soir.

[62] Les démarches du prestataire ne montrent pas qu’il cherchait activement du travail. Elles témoignent plutôt d’une recherche d’emploi très passive. Durant une période de quatre mois, il a consulté un seul site Web, il a présenté une seule demande d’emploi et il a posé juste quelques questions.

[63] J’ai de la difficulté à concilier sa déclaration voulant qu’il n’ait pas posé sa candidature à plusieurs endroits à cause d’un critère restrictif favorisant le travail à distance et son témoignage selon lequel il était ouvert au travail de plombier et d’électricien. Je juge qu’il y a plus de chances que le peu de sérieux de la recherche d’emploi du prestataire était attribuable au fait qu’il se concentrait sur son travail indépendant jusqu’au 3 septembre 2021.

[64] Je conclus que cet élément témoigne d’une plus grande participation au travail indépendant qu’une participation limitée.

Somme toute, la participation du prestataire était-elle assez limitée?

[65] Le degré de participation du prestataire était si limité que l’exception s’applique. Normalement, le travail indépendant qu’il exerçait ne constituerait pas le principal moyen de subsistance d’une personne.

[66] La Commission fait valoir que, même si le travail indépendant du prestataire n’a peut-être pas produit un revenu suffisant dès le début, le prestataire a soutenu qu’il essayait d’en faire sa principale source de revenus. Elle affirme que le prestataire n’a présenté aucune preuve montrant qu’il exerçait son travail indépendant dans une mesure limitée et qu’il cherchait un emploi à temps plein ailleurs.

[67] J’ai examiné les six éléments mentionnés ci-dessus. Le temps consacré au travail indépendant, les investissements du prestataire, la nature du travail ainsi que la réussite ou l’échec sur le plan financier sont tous des éléments qui laissent entrevoir une participation limitée. Le maintien du travail indépendant est un élément indéterminé. Par ailleurs, l’intention et la volonté du prestataire de trouver un autre emploi semblent indiquer que sa participation était plus grande que limitée.

[68] Aucun des éléments n’est décisif. Il faut examiner objectivement l’ensemble des éléments pour vérifier si la participation est si limitée que le travail indépendant ne constituerait pas normalement le principal moyen de subsistance d’une personneNote de bas page 17.

[69] Après avoir tout pris en compte, je conclus que l’exception s’applique au travail indépendant du prestataire. Trois des six éléments laissent entrevoir une participation limitée. L’un est indéterminé et l’autre semble indiquer une participation plus grande que limitée. Il est vrai que l’intention et la volonté de trouver rapidement un autre emploi montrent un degré d’engagement plus grand qu’une participation limitée. Toutefois, je juge tout aussi important le fait que le travail indépendant a été un échec financier. À cet égard, les commissions ont varié au cours de la période en question et, même lorsqu’il les recevait, le prestataire ne pouvait pas nécessairement s’y fier. En effet, si une police d’assurance était annulée, il devait rembourser une partie de sa commission.

[70] Comme l’échec financier et l’intention et la volonté de trouver rapidement un autre emploi se retrouvent sur un pied d’égalité et comme les trois autres éléments montrent seulement une participation limitée, je juge que le prestataire a démontré que l’exception s’applique à sa situation. Il a démontré que sa participation était si limitée que, normalement, cet emploi ou cette entreprise ne serait pas le principal moyen de subsistance d’une personne.

[71] Le prestataire n’est pas considéré comme ayant fait des semaines entières de travail du 3 mai 2021 au 3 septembre 2021.

Conclusion

[72] Je conclus que le prestataire participait à son travail indépendant dans une mesure si limitée que l’exception s’applique. Il ne faisait pas des semaines entières de travail du 3 mai 2021 au 3 septembre 2021. Il était donc en chômage.

[73] Ainsi, l’appel est accueilli.

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