Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : BS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 920

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : B. S.
Représentante ou représentant : Robert Morrissey
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (418153) datée
du 22 mars 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Raelene R. Thomas
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 6 juillet 2021
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentant de l’appelant
Date de la décision : Le 16 août 2021
Numéro de dossier : GE-21-637

Sur cette page

Décision

[1] B. S. est l’appelant dans le présent appel. Je l’appellerai le prestataire.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada est l’intimée dans le présent appel. Je l’appellerai la Commission.

[3] L’appel du prestataire contre la décision de la Commission selon laquelle il a quitté volontairement son emploi est rejeté. Je ne suis pas d’accord avec le prestataire.

[4] L’appel du prestataire contre la décision de la Commission d’imposer une pénalité pour fausse déclaration dans un relevé de demande de prestations est accueilli en partie. Le prestataire a fait une fausse déclaration en omettant de déclarer qu’il avait cessé de travailler. La pénalité passe de 859 $ à 430 $.

[5] L’appel du prestataire contre la décision de la Commission d’émettre un avis de violation grave est accueilli.

Aperçu

[6] Le prestataire travaillait à l’extérieur de sa province natale à l’automne 2020. La COVID‑19 l’inquiétait et il se demandait si son employeur pouvait le protéger sur le lieu de travail. Il craignait aussi de transmettre la maladie à son père âgé à son retour à la maison. Le prestataire a cessé de travailler et est retourné dans sa province natale. Il n’a pas déclaré avoir cessé de travailler dans son relevé de demande existant. Il a attendu la fin de sa demande de prestations d’assurance-emploi existante, puis il a présenté une nouvelle demande.

[7] La Commission a conclu que le prestataire avait sciemment fait une fausse déclaration en omettant de déclarer dans le relevé de demande de prestations qu’il avait cessé de travailler. Elle a décidé d’imposer une pénalité de 859,50 $ au prestataire et d’émettre un avis de violation grave. L’avis de violation grave signifie que le prestataire doit travailler plus d’heures (ou gagner plus d’argent en pêchant) pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi à l’avenir.

[8] Lorsque le prestataire a présenté une nouvelle demande de prestations d’assurance-emploi, il a déclaré qu’il avait quitté son emploi à cause de ses préoccupations au sujet de la COVID‑19 sur le lieu de travail et de la possibilité de transmettre la maladie à son père, qui est immunodéprimé. Son employeur lui a remis un relevé d’emploi indiquant qu’il avait quitté son emploi.

[9] La Commission a conclu que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi lorsqu’il l’a fait. Le prestataire n’est pas d’accord. Il affirme qu’il n’a pas démissionné. Il dit qu’il a été licencié. Il précise qu’il est retourné à la maison pour les vacances de Noël et qu’il n’a pas été rappelé au travail.

Question que je dois examiner en premier

J’accepterai les documents reçus après l’audience

[10] À l’audience, le représentant a dit qu’il n’avait pas les observations que la Commission avait soumises au Tribunal de la sécurité sociale. J’ai offert un ajournement pour permettre au représentant et au prestataire d’examiner les observations de la Commission. Le représentant et le prestataire ont refusé l’ajournement et ont décidé d’aller de l’avant avec l’audience.

[11] J’ai résumé les observations de la Commission sur la question du départ volontaire, et le représentant y a répondu pendant l’audience. Les observations de la Commission sur la fausse déclaration, la pénalité et la violation étaient trop longues pour être résumées.

[12] Dans l’intérêt de la justice naturelle, j’ai pris les dispositions nécessaires pour que les observations de la Commission sur les deux questions soient envoyées de nouveau par courriel au représentant et je lui ai donné l’occasion de formuler des commentaires écrits après l’audience. Le Tribunal a reçu les commentaires du représentant le 13 juillet 2021. J’admets ces commentaires en preuve parce qu’ils résument la position du prestataire concernant les questions en litige.

[13] La Commission a fourni des observations supplémentaires en réponse aux commentaires écrits du représentant le 22 juillet 2021. Dans ces observations, la Commission a soutenu que sa décision initiale de rendre le prestataire inadmissible était étayée par les déclarations du prestataire et la jurisprudence. La Commission a fait valoir que, malgré le relevé d’emploi modifié, la preuve au dossier indiquait que c’était le prestataire qui était à l’origine de la cessation d’emploi. J’admets ce document en preuve parce qu’il présente le point de vue de la Commission concernant le relevé d’emploi modifié.

Question en litige

[14] Je dois décider si, en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi, le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi. Cette décision comporte deux étapes. Premièrement, je dois vérifier si le prestataire a choisi de quitter son emploi. Deuxièmement, je dois décider si le prestataire était fondé à quitter son emploi.

[15] Je dois aussi décider si le prestataire a sciemment fait une fausse déclaration dans son relevé de demande de prestations en omettant de déclarer qu’il avait cessé de travailler. Si je conclus qu’il a sciemment fait une fausse déclaration, je dois décider si la Commission a agi de manière judiciaire lorsqu’elle a exercé son pouvoir discrétionnaire pour calculer le montant de la pénalité et émettre un avis de violation.

Analyse : départ volontaire

[16] Selon la loi, si une personne quitte son emploi sans justification, elle ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Le prestataire a quitté volontairement son emploi

[17] Pour décider si le prestataire a quitté volontairement son emploi, je dois vérifier s’il avait le choix de rester ou de quitter cet emploiNote de bas de page 2.

[18] J’estime qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire a quitté volontairement son emploi. Voici les motifs de ma conclusion.

[19] Le prestataire a affirmé qu’il n’avait pas quitté son emploi. Il a plutôt quitté le travail pour les vacances de Noël et n’a pas été rappelé à son poste.

[20] Le prestataire travaillait à l’extérieur de sa province natale pendant les mois d’hiver. Il pratique la pêche commerciale au printemps et à l’été. Il a précisé que le type de travail qu’il occupait exigeait qu’il travaille en étroite collaboration avec ses collègues. Dans les semaines qui ont précédé sa cessation d’emploi, il s’était soumis à un test de dépistage de la COVID‑19 et avait dû s’isoler. Il craignait de contracter la COVID-19 ou de transmettre la maladie à son père âgé, avec qui il réside. Le prestataire est retourné sur le lieu de travail après sa période d’isolement.

[21] Le prestataire a déclaré qu’il avait exprimé ses préoccupations à son supérieur et que celui-ci lui avait dit que s’il ne se sentait pas à l’aise, il pouvait quitter le travail sans problème. Avant de quitter le travail pour les vacances de Noël, le prestataire a dit avoir eu une bonne discussion avec son supérieur. Il a dit que son supérieur lui avait dit qu’il ne savait pas s’il y aurait du travail après Noël.

[22] Le prestataire a déclaré que lorsqu’il a cessé de travailler le 10 décembre 2020, c’était à cause des vacances de Noël. Il est retourné dans sa province natale et a précisé qu’il s’attendait à retourner travailler le 4 janvier 2021. Il a dit qu’il n’avait pas été rappelé au travail. Le prestataire a dit que lorsque le supérieur n’avait pas communiqué avec lui, il a pensé qu’il s’agissait d’un licenciement. Le prestataire a déclaré avoir communiqué avec son supérieur plus tard avant de demander des prestations d’assurance-emploi. Il a dit que son supérieur lui avait dit qu’il n’y avait pas de travail.

[23] Le représentant a soutenu que le prestataire avait été licencié. Il a fait référence au relevé d’emploi modifié émis par l’employeur le 16 juin 2021. Le relevé d’emploi modifié indiquait que le prestataire avait cessé de travailler en raison d’une pénurie de travail et non parce qu’il avait démissionné, comme l’indiquait le relevé d’emploi initial.

[24] Le prestataire a dit que le relevé d’emploi avait été modifié après avoir parlé à son supérieur.

[25] Le prestataire a fourni des renseignements contradictoires sur les raisons pour lesquelles il a cessé de travailler. Ses déclarations dans sa demande de prestations d’assurance-emploi, ses conversations avec les responsables de Service Canada, ses déclarations dans sa demande de révision et dans son appel devant le Tribunal au sujet des raisons pour lesquelles il a cessé de travailler contredisent toutes le témoignage qu’il a livré à l’audience. Ses déclarations ne peuvent pas toutes être vraies. Il m’est donc difficile de décider laquelle des déclarations du prestataire est fiable.

[26] Le prestataire a déclaré avoir quitté son emploi dans sa demande de prestations d’assurance-emploi. Le formulaire demandait au prestataire la raison pour laquelle il avait quitté son emploi. Voici ce qu’il a écrit :

[traduction]
Je ne me sentais pas en sécurité au travail à cause de la COVID‑19. Il y a eu des cas actifs de COVID sur le lieu de travail. On m’a envoyé en isolement pendant une semaine et j’ai dû me soumettre à deux tests. Après avoir obtenu un résultat négatif, j’ai reçu l’ordre de retourner au travail. À la fin du projet, le nombre de cas augmentait et je savais que je devais retourner chez moi auprès de mon père, qui est vulnérable. Je ne me sens plus en sécurité au travail. Mon employeur m’a dit que si, à un moment donné, je ne me sentais pas en sécurité ou que je ne faisais pas un travail sécuritaire, je pouvais refuser un travail dangereux. J’ai une offre d’emploi garantie à compter du 1er mai 2021.

[27] Le prestataire a écrit dans sa demande de prestations d’assurance-emploi qu’il avait parlé de la situation à son supérieur et qu’il avait l’impression que tout allait bien. Le prestataire a aussi écrit qu’il devait retourner à la maison à cause de la COVID‑19 et qu’il avait une offre d’emploi garantie à compter de mai 2021.

[28] Le représentant a déclaré que le prestataire n’était pas tenu de prendre soin de son père. Il a dit que le prestataire n’avait pas quitté son emploi pour cette raison. Le prestataire a déclaré qu’il a travaillé pendant quatre ou cinq jours après sa période d’isolement, puis qu’il est rentré chez lui pour les vacances de Noël.

[29] Le prestataire a cessé de travailler le 10 décembre 2020. Son employeur a d’abord produit un relevé d’emploi le 17 décembre 2020. La raison de ce relevé d’emploi était la [traduction] « démission ». Le relevé d’emploi a ensuite été modifié le 16 juin 2021 pour indiquer [traduction] « pénurie de travail/fin du contrat ou de la saison » comme raison d’émission.

[30] Dans sa demande de prestations d’assurance-emploi, le prestataire a indiqué qu’il ne travaillait plus parce qu’il avait quitté son emploi. J’ai demandé au prestataire pourquoi il n’avait pas indiqué qu’il ne travaillait plus en raison d’une pénurie de travail, puisque c’était la première option dans la demande. Le prestataire a répondu ceci : [traduction] « J’ai rempli le formulaire de mon mieux ».

[31] Les responsables de Service Canada ont communiqué avec le prestataire pour discuter des raisons pour lesquelles il n’avait pas indiqué dans son relevé de demande de prestations qu’il avait quitté son emploi.

[32] Un responsable de Service Canada a demandé au prestataire pourquoi il n’avait pas déclaré sa démission dans le relevé de demande de prestations qu’il avait présenté le 19 décembre 2020. Le prestataire a répondu ceci : [traduction] « Je ne savais pas que je devais le faire. Je n’ai pas vu que la question était posée. Je pensais ne pas avoir à le déclarer avant la présentation d’une nouvelle demande. » Le responsable de Service Canada a demandé s’il y avait des renseignements dont le prestataire voulait tenir compte dans le cas où une pénalité devait être imposée. Le prestataire a répondu qu’il était rentré chez lui à cause de la COVID‑19Note de bas de page 3.

[33] Lors d’une deuxième conversation avec le responsable de Service Canada, le prestataire a dit qu’il avait quitté son emploi parce qu’il avait peur d’attraper la COVID‑19. Il a dit qu’il vivait dans un point chaud et qu’il ne pouvait pas aller et venir comme bon lui semblait. Il craignait que lui ou son père ne contracte la COVID‑19. La Commission a demandé au prestataire s’il avait une date de fin d’emploi. Il a répondu ceci : [traduction] « Il n’y avait pas de date de fin. On n’en a jamais discuté. En général, tout s’arrête quand c’est terminéNote de bas de page 4. »

[34] Au cours de cette deuxième conversation, le prestataire a dit qu’il avait [traduction] « dit à son employeur que [s’il ne se sentait] pas en sécurité, [il pouvait] refuser de travailler ». Il en a informé son employeur deux semaines après le 10, puis il est rentré chez lui le 10 décembre. Il ne pensait pas que son relevé d’emploi indiquerait qu’il avait démissionné. Le prestataire a précisé ceci : [traduction] « Ce n’est pas seulement moi qui ai décidé de ne plus travaillerNote de bas de page 5 ».

[35] Le prestataire a aussi dit à Service Canada que le lieu de travail avait fermé ses portes pour les vacances de NoëlNote de bas de page 6.

[36] Le responsable de Service Canada a noté qu’il avait passé en revue les déclarations du prestataire avec lui. Le prestataire a ajouté ceci : [traduction] « je n’avais pas l’intention de rentrer à la maison, mais la situation (c’est-à-dire la COVID‑19) s’est tellement détériorée que j’ai dû le faire; sinon je resterais dans mon appartement sans travaillerNote de bas de page 7 ».

[37] Le prestataire a écrit ceci dans sa demande de révision, présentée le 5 mars 2021 : [traduction] « je ne m’attendais pas à ce que le mot “démission” soit inscrit sur mon relevé d’emploi, car j’ai eu une discussion civilisée avec mon employeur au sujet de la raison de mon départNote de bas de page 8 ».

[38] Le 7 avril 2021, le prestataire a fait appel au Tribunal. Il a écrit dans son appel qu’il avait quitté son emploi au début de décembre uniquement en raison de la pandémie et de l’augmentation du nombre de cas de COVID‑19. Le prestataire a écrit qu’il avait discuté avec son supérieur, qui a convenu qu’il était acceptable de quitter et de retourner dans sa province natale parce que le prestataire estimait que la situation n’était pas sécuritaire en raison de la pandémie de la COVID‑19. Le prestataire a écrit ceci : [traduction] « J’ai appris récemment en discutant de nouveau avec mon supérieur que ce sont ses supérieurs qui n’étaient pas d’accord avec mon départ et qui ont inscrit le mot “démission” sur mon relevé d’emploiNote de bas de page 9! ».

[39] J’ai demandé au prestataire pourquoi il n’avait pas dit aux responsables de Service Canada qu’il ne travaillait pas en raison d’une pénurie de travail. Il a répondu que c’était parce que le mot « démission » était inscrit sur le relevé d’emploi. Le représentant a noté qu’il s’agit de la version des conversations du responsable qui figure dans le dossier d’appel. Je remarque que le prestataire n’a pas contesté le contenu des conversations enregistrées par les responsables de Service Canada. Le représentant a déclaré que la conversation du prestataire et de l’employeur était incertaine. La COVID‑19 était l’une des principales raisons pour lesquelles le prestataire était retourné chez lui et s’était retrouvé en isolement.

[40] Le représentant a déclaré que l’employeur ne pouvait pas mettre en place les protocoles nécessaires et que l’entreprise ne pouvait pas garantir le travail. Le représentant a dit que le prestataire avait quitté son emploi pour la période de fermeture normale de Noël. Il a dit que l’employeur n’était pas certain de la voie à suivre en raison de la COVID‑19. Le représentant a ajouté que l’employeur a communiqué cette information au prestataire.

[41] Le représentant du prestataire a soumis un relevé d’emploi modifié, daté du 16 juin 2021, selon lequel le prestataire a cessé de travailler en raison d’une pénurie de travail. Le représentant affirme que le relevé d’emploi modifié confirme bien que le prestataire a été licencié.

[42] Je reconnais que le relevé d’emploi a été modifié pour indiquer la pénurie de travail. Toutefois, le relevé d’emploi est seulement un élément de preuve qui peut être utilisé pour savoir si une partie prestataire a quitté volontairement son emploi. Dans le cas présent, j’accorde moins de poids au relevé d’emploi parce qu’il contredit les déclarations du prestataire dans sa demande de prestations d’assurance-emploi, ses déclarations aux responsables de Service Canada, et ses déclarations dans sa demande de révision et dans son appel devant le Tribunal.

[43] Le représentant a affirmé que le prestataire n’avait pas quitté son emploi en raison de la COVID‑19, mais plutôt en raison de la pause normale que l’entreprise a prise pour l’ensemble de son personnel. Il soutient que l’employeur du prestataire ne pouvait garantir le travail à la suite des vacances de Noël. Le représentant a soutenu que dans ces circonstances, l’employeur devrait suivre la documentation selon laquelle l’entreprise a licencié le prestataire parce qu’elle ne pouvait pas prévoir ses besoins futurs en matière de travail pendant une pandémie sans précédent et qu’elle était déjà aux prises avec des cas de COVID‑19 dans son milieu de travail.

[44] Selon moi, si le prestataire pensait qu’il avait été licencié lorsqu’il a cessé de travailler en décembre 2020, il avait amplement l’occasion de dire que c’était le cas. Il aurait pu : indiquer qu’il avait été licencié dans sa demande de prestations d’assurance‑emploi; dire aux responsables de Service Canada que le relevé d’emploi n’était pas exact lors de ses entretiens; et dire que c’était le cas lorsqu’il a présenté sa demande de révision ou lorsqu’il a fait appel devant le Tribunal. Cependant, il ne l’a pas fait.

[45] Je remarque que le prestataire a indiqué dans sa demande de prestations d’assurance-emploi qu’il ne travaillait plus parce qu’il avait quitté son emploi. Le prestataire a donné les raisons détaillées pour lesquelles il a quitté son emploi dans sa demande de prestations d’assurance-emploi. Ses raisons étaient liées à sa crainte qu’il puisse contracter la COVID‑19, qu’il puisse transmettre la maladie à son père âgé qui était immunodéprimé et qu’on lui ait dit qu’il pourrait quitter le travail s’il ne se sentait pas en sécurité.

[46] Le prestataire a déclaré qu’il s’attendait à retourner au travail le 4 janvier 2021. Il a dit avoir parlé à son supérieur avant de demander des prestations d’assurance‑emploi. Il a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi le 6 janvier 2021. Il a dit que son supérieur et lui avaient discuté et qu’il n’y avait pas de travail. Pourtant, le prestataire a indiqué dans sa demande de prestations d’assurance‑emploi qu’il ne travaillait pas parce qu’il avait quitté son emploi. Si le prestataire s’attendait à être rappelé au travail et qu’il savait à partir du 4 janvier 2021 que l’employeur ne le ferait pas, il n’y avait aucune raison pour qu’il indique dans sa demande de prestations d’assurance-emploi qu’il a quitté son emploi.

[47] De plus, en janvier 2021 et en février 2021, le prestataire a poursuivi ses conversations avec des responsables de Service Canada pour expliquer les raisons pour lesquelles il a quitté son emploi en raison de la COVID‑19. Le prestataire a dit à un responsable de Service Canada que ce n’était pas seulement lui qui avait décidé de ne plus travailler. Le prestataire a écrit ceci dans sa demande de révision : [traduction] « je ne m’attendais pas à ce que le mot “démission” soit inscrit sur mon relevé d’emploi, car j’ai eu une discussion civilisée avec mon employeur au sujet de la raison de mon départNote de bas de page 10 ». Il a écrit dans son appel au Tribunal qu’il avait quitté son emploi au début de décembre uniquement en raison de la pandémie et de l’augmentation du nombre de cas de COVID‑19Note de bas de page 11. Ces éléments de preuve, combinés aux déclarations écrites du prestataire, m’indiquent que le prestataire était à l’origine de sa cessation d’emploi lorsqu’il a décidé qu’il ne travaillerait plus et qu’il a dit à son supérieur qu’il quitterait son emploi en raison de ses préoccupations liées à la COVID‑19 sur le lieu de travail. Cela signifie que le prestataire a choisi de quitter son emploi. Par conséquent, je conclus que le prestataire a quitté volontairement son emploi le 10 décembre 2020.

[48] Comme j’ai décidé que le prestataire avait quitté volontairement son emploi, je dois maintenant décider s’il était fondé à le faire.

Les parties ne conviennent pas que le prestataire était fondé à quitter son emploi

[49] Les parties ne conviennent pas que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi lorsqu’il l’a fait.

[50] La loi précise qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 12. Avoir une bonne raison de quitter un emploi ne suffit pas à démontrer que l’on est fondé à le faire.

[51] La loi explique ce qu’on entend par être « fondé à quitter volontairement son emploi ». Selon la loi, une personne est fondée à quitter son emploi si son départ était la seule solution raisonnable dans son cas. La loi prévoit que je dois tenir compte de toutes les circonstancesNote de bas de page 13.

[52] Il incombe au prestataire de démontrer qu’il était fondé à quitter son emploiNote de bas de page 14. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités, c’est-à-dire qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il n’avait aucune autre solution raisonnable que de quitter son emploi.

[53] Pour décider si le prestataire était fondé à quitter son emploi, je dois examiner toutes les circonstances entourant son départ. Parmi celles-ci, il y en a quelques-unes qui sont prévues par la loiNote de bas de page 15. Même si je décide que l’une ou l’autre des circonstances énumérées s’applique au prestataire, celui-ci doit tout de même démontrer qu’il n’avait aucune autre solution raisonnable que de quitter son emploi.

[54] Une partie prestataire peut avoir plus d’une raison de quitter un emploi.

[55] La demande de prestations d’assurance-emploi du prestataire indiquait qu’il avait quitté son emploi parce qu’il ne se sentait pas en sécurité au travail en raison de la COVID‑19. Il a écrit qu’il y avait des cas actifs de COVID‑19 sur place et qu’il avait dû s’isoler pendant une semaine après avoir été soumis à un test de dépistage. Il a dit que le nombre de cas augmentait et qu’il savait qu’il devait retourner chez lui auprès de son père, qui est vulnérable. Il a écrit que son employeur lui avait dit que s’il ne se sentait pas en sécurité ou ne faisait pas un travail sécuritaire, il pouvait refuser de travailler.

[56] La loi prévoit qu’une personne ayant l’obligation de prendre soin d’un proche parent est fondée à quitter son emploi s’il n’y a aucune autre solution raisonnable dans son casNote de bas de page 16. Le représentant a soutenu que le prestataire n’avait pas quitté son emploi pour s’occuper de son père. Par conséquent, je conclus que le prestataire ne peut pas invoquer cette disposition pour établir qu’il était fondé à quitter son emploi.

[57] Selon la loi, une personne qui a l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat est fondée à quitter son emploi s’il n’y a aucune autre solution raisonnable dans son casNote de bas de page 17.

[58] Le prestataire a écrit dans sa demande de prestations d’assurance-emploi qu’il avait une offre d’emploi garantie à compter de mai 2021. La Commission a communiqué avec l’employeur du prestataire pour obtenir plus d’informations sur les raisons pour lesquelles il avait quitté son emploi. Le représentant de l’employeur a dit que le prestataire était parti à la pêche. Un responsable de Service Canada a demandé au prestataire pourquoi son employeur avait dit à la Commission qu’il avait quitté son emploi pour aller à la pêche. Le prestataire a répondu que c’était faux parce que la pêche ne commençait qu’en maiNote de bas de page 18. Le prestataire a déclaré qu’il n’avait pas quitté son emploi pour un autre travail. L’offre d’emploi qu’il a mentionnée dans sa demande de prestations d’assurance-emploi concernait son travail de pêcheur commercial. Ce travail est saisonnier. Il a discuté de la possibilité d’aller à la pêche avec son supérieur, qui vient également de la province natale du prestataire. À la lumière de la preuve du prestataire selon laquelle il n’a pas quitté son emploi pour aller à la pêche, je conclus que le prestataire ne peut invoquer cette disposition pour établir qu’il était fondé à quitter son emploi.

[59] Le prestataire a déclaré dans sa demande de prestations d’assurance-emploi et aux responsables de Service Canada qu’il craignait de contracter la COVID‑19 sur son lieu de travail. Il a déclaré qu’il travaillait dans un petit espace avec d’autres personnes et qu’il n’était pas possible pour lui de se tenir à une distance de six pieds des autres. Il a dit que l’employeur lui avait fourni, à lui et à ses collègues, des masques et des lunettes à porter sur le lieu de travail.

[60] Le prestataire a déclaré qu’il s’était soumis à un test de dépistage de la COVID‑19 lorsqu’il travaillait. Il a dû s’isoler dans son appartement. Il a obtenu un résultat négatif et a dû retourner au travail. Il a dit être retourné sur le lieu de travail et avoir travaillé pendant quatre ou cinq jours avant de cesser de travailler le 10 décembre 2020. Il a dit qu’il devait retourner dans sa province natale parce qu’il craignait de contracter la COVID‑19 dans la province où il travaillait. Le prestataire a déclaré qu’il n’avait pas cessé de travailler, mais qu’il partait en raison de la situation liée à la COVID‑19.

[61] Le prestataire a dit avoir discuté de ses préoccupations avec son supérieur. J’ai demandé au prestataire s’il avait fait des suggestions au supérieur sur la façon de rendre le travail sécuritaire. Le prestataire a répondu que ce n’était pas à lui de le faire. Il a déclaré qu’il n’avait aucun problème de santé pouvant rendre son travail dangereux.

[62] Le prestataire a écrit dans sa demande de prestations d’assurance-emploi que son employeur lui avait dit qu’il pouvait refuser un travail dangereux.

[63] La Commission affirme que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi parce qu’il n’avait pas épuisé toutes les solutions raisonnables avant de partir. Plus précisément, elle soutient que le prestataire aurait pu continuer de travailler tout en essayant de résoudre ses préoccupations avec son employeur, que ce soit en demandant des protocoles améliorés en matière de santé et de sécurité ou en demandant une période de congé temporaire pour chercher un autre emploi qu’il juge plus convenable.

[64] Le représentant a soutenu que le prestataire avait présenté un document, le relevé d’emploi, selon lequel il n’a pas quitté volontairement son emploi. Il a dit que l’employeur n’était pas en mesure de s’assurer que le prestataire et les autres membres du personnel pouvaient être en sécurité au travail. Il a dit que le prestataire n’avait pas immédiatement quitté son emploi en raison de la COVID‑19; c’était le congé des Fêtes. Le représentant a déclaré que l’employeur ne pouvait pas garantir le travail et que le prestataire n’avait pas quitté d’emploi dont le travail était continu.

[65] Être fondé à quitter un emploi ne signifie pas avoir une bonne raison pour le faire. La question n’est pas de savoir s’il était raisonnable pour le prestataire de quitter son emploi, mais plutôt si son départ était la seule solution raisonnable qui s’offrait à lui, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 19.

[66] Rien n’indique que le prestataire se serait vu accorder un congé temporaire pour chercher un autre emploi. Par conséquent, j’estime que le fait de demander un congé temporaire pour chercher un emploi différent n’est pas une autre solution raisonnable au départ du prestataire.

[67] Il faut se demander si le fait que le prestataire ait quitté volontairement son emploi parce qu’il craignait des conditions dangereuses au travail était la seule autre solution raisonnable dans son casNote de bas de page 20.

[68] Je reconnais que le prestataire avait des préoccupations liées à la COVID‑19 et à la capacité de son employeur d’assurer sa sécurité dans le contexte de la COVID‑19 au travail. Il a déclaré que son employeur fournissait des masques et des lunettes à l’ensemble du personnel lorsque le travail se faisait dans un petit espace. L’espace de travail était tel que le prestataire et ses collègues ne pouvaient pas se tenir à une distance de six pieds des autres lorsqu’ils travaillaient.

[69] Le prestataire a dit avoir discuté de ses préoccupations avec son supérieur. Il a dit à un responsable de Service Canada qu’il avait eu cette discussion environ deux semaines avant de cesser de travailler le 10 décembre 2020. Le prestataire a déclaré qu’il n’avait fait aucune suggestion au supérieur quant à la façon de rendre le travail plus sécuritaire, parce qu’il ne pensait pas que c’était à lui de le faire. Le prestataire a aussi indiqué dans sa demande de prestations d’assurance-emploi qu’il n’avait pas fait part de ses préoccupations au sujet du lieu de travail et de la COVID‑19 à un organisme externe parce qu’il [traduction] « n’y avait pas d’organisme à consulter ».

[70] Le prestataire a aussi dit à un responsable de Service Canada qu’il vivait dans l’un des plus grands points chauds en Amérique du Nord. Il commandait son épicerie en ligne. Il y a eu beaucoup de nouvelles règles concernant les chantiers de construction. Il a précisé : [traduction] « Nous ne fermions pas nos portes ».

[71] Je pense qu’il aurait été raisonnable que le prestataire demande à son employeur quels protocoles de sécurité il pourrait mettre en place pour répondre à ses préoccupations concernant la COVID‑19. Bien que le prestataire ait dit à son employeur qu’il partait en raison de ses préoccupations au sujet de la COVID‑19, rien ne prouve qu’il ait demandé que ces préoccupations soient résolues avant de quitter son emploi. En ne demandant pas qu’on réponde à ses préoccupations, le prestataire n’a pas réglé ce conflit dans son milieu de travailNote de bas de page 21. Cela signifie que le prestataire n’a pas épuisé cette solution raisonnable avant de quitter son emploi.

[72] Compte tenu de toutes les circonstances, j’estime que le prestataire n’a pas prouvé qu’il n’avait aucune autre solution raisonnable que de quitter son emploi lorsqu’il l’a fait. Il aurait été raisonnable pour le prestataire de demander à son employeur de répondre à ses préoccupations. Il ne l’a pas fait. Par conséquent, je conclus que la décision du prestataire de quitter son emploi ne satisfait pas au critère lié au fait d’être fondé à quitter volontairement son emploi, comme le prévoient la Loi sur l’assurance‑emploi et la jurisprudence mentionnée précédemment.

Analyse : fausse déclaration et pénalité

[73] La Commission peut imposer une pénalité à une partie prestataire ou à toute autre personne agissant pour le compte d’une partie prestataire pour chaque acte ou omission qu’elle sait faux ou trompeurNote de bas de page 22.

[74] Il ne suffit pas que la déclaration ou l’omission soit fausse ou trompeuse. La partie prestataire doit sciemment faire la fausse déclaration ou la déclaration trompeuse [mis en évidence par la soussignée]. « Sciemment » signifie que la partie prestataire savait que les renseignements fournis étaient faux lorsqu’elle a fait la déclaration, et ne comprend aucun élément d’intention de tromperNote de bas de page 23.

[75] Il incombe à la Commission de démontrer que la déclaration ou l’observation est fausse ou trompeuse et que la partie prestataire a fait la fausse déclaration en sachant qu’elle était fausse ou trompeuseNote de bas de page 24. Si elle parvient à le prouver, il incombe alors à la partie prestataire de prouver que la déclaration n’a pas été faite sciemment et de fournir une explication raisonnable pour les renseignements inexactsNote de bas de page 25.

[76] Dans la présente affaire, le fardeau de la preuve relève de la prépondérance des probabilités, ce qui signifie qu’il est « plus probable qu’improbable » que les événements se soient déroulés comme ils sont décrits.

[77] Je n’ai pas à établir qu’il y avait une intention de tromper pour conclure qu’une fausse déclaration a été faite sciemmentNote de bas de page 26.

[78] La décision d’imposer une sanction pécuniaire et le calcul du montant de la pénalité sont des décisions discrétionnaires de la CommissionNote de bas de page 27. Cela signifie que la Commission a la possibilité de fixer la pénalité à un montant qu’elle juge correct. Je dois examiner la façon dont la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire. Je peux modifier la pénalité seulement si je décide d’abord que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire comme il se doit lorsqu’elle en a déterminé le montantNote de bas de page 28.

[79] Si la Commission a agi de mauvaise foi ou pour un motif inapproprié, a tenu compte de facteurs non pertinents ou n’a pas tenu compte de facteurs pertinents, ou a agi de façon discriminatoire, elle n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaireNote de bas de page 29. Si je conclus que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire, je peux rendre la décision que la Commission aurait dû rendre.

[80] En pareil cas, je respecte le pouvoir discrétionnaire de la Commission d’imposer une pénalité. De plus, je reconnais que la loi a précisé que j’ai le pouvoir de modifier une pénalité dans les circonstances mentionnées précédemment, mais je ne peux pas annuler une pénalité si je conclus que la Commission avait un fondement juridique pour l’imposerNote de bas de page 30.

Le prestataire a fait une fausse déclaration

[81] Le représentant a soutenu que la Commission avait rendu sa décision selon laquelle il y avait eu une fausse déclaration fondée sur un relevé d’emploi produit par erreur par l’employeur du prestataire. Ce relevé d’emploi a par la suite été modifié. Le représentant a fait valoir que le relevé d’emploi modifié supprimait le fondement de la décision de la Commission selon lequel il y a eu fausse déclaration.

[82] Le représentant a dit que les renseignements fournis par le prestataire étaient exacts. Le relevé d’emploi confirme que les renseignements fournis par le prestataire étaient exacts et qu’il n’a pas fourni de faux renseignements. Le représentant a écrit que le prestataire avait réitéré qu’il n’avait jamais fourni de renseignements faux ou trompeurs à la Commission, c’est-à-dire qu’il n’avait pas déclaré avoir cessé de travailler pour son employeur. Le représentant a écrit que le prestataire estimait que la loi ne s’appliquait pas et que la pénalité devait être supprimée.

[83] À l’audience, le prestataire a déclaré qu’il avait présenté une demande de prestations d’assurance-emploi en décembre 2019. Il recevait des prestations d’assurance-emploi lorsqu’il est retourné au travail en octobre 2020. Le prestataire a rapporté ses gains dans ses déclarations bimensuelles. Il ne se souvenait pas s’il avait rempli le relevé de demande du 19 décembre 2020 par téléphone ou en ligneNote de bas de page 31.

[84] Le dossier d’appel indique que le relevé de demande du 19 décembre 2020 couvrait la période de deux semaines allant du 29 novembre 2020 au 12 décembre 2020. Le prestataire a répondu oui à la question de savoir s’il avait travaillé pendant ces deux semaines et s’il avait touché un revenu. Il a déclaré ses heures travaillées et la rémunération qu’il a reçue pour la première et la deuxième semaine de la période visée par le relevé.

[85] Selon le dossier d’appel, le relevé de demande indique ceci : [traduction] « La question suivante vous permettra de nous informer de toute perte d’emploi que vous n’avez pas déjà déclarée. Avez-vous cessé de travailler pour un employeur pendant la période visée par le présent relevé? » Le prestataire a répondu non.

[86] Le prestataire a déclaré qu’il ne comprenait pas qu’il avait été licencié le 10 décembre 2020, lorsqu’il a cessé de travailler. Il revenait à la maison pour Noël. Il s’attendait à retourner travailler au début de la nouvelle année et à être rappelé au travail après le 4 janvier 2021.

[87] La demande de prestations d’assurance-emploi du prestataire, présentée le 4 janvier 2021, indiquait qu’il avait quitté son emploi pour des raisons liées à la COVID‑19. Cette demande a été remplie 24 jours après que le prestataire a rempli son relevé de demande.

[88] Un responsable de Service Canada a demandé au prestataire pourquoi il n’avait pas déclaré sa cessation d’emploi dans le relevé qu’il avait présenté le 19 décembre 2020. Le prestataire a répondu ceci : [traduction] « Je ne savais pas que je devais le faire. Je n’ai pas vu que la question était posée. Je pensais ne pas avoir à le déclarer avant la présentation d’une nouvelle demandeNote de bas de page 32. »

[89] Au cours d’une deuxième conversation avec le responsable de Service Canada, le prestataire a dit qu’il avait [traduction] « dit à son employeur que [s’il ne se sentait] pas en sécurité, [il pouvait] refuser de travailler ». Il en a informé son employeur deux semaines après le 10, puis il est rentré chez lui le 10 décembre. Il ne pensait pas que son relevé d’emploi indiquerait qu’il avait démissionné. Le prestataire a précisé ceci : [traduction] « Ce n’est pas seulement moi qui ai décidé de ne plus travaillerNote de bas de page 33 ».

[90] Je n’accepte pas l’argument du représentant selon lequel le relevé d’emploi modifié signifie qu’il n’y a pas eu de fausse déclaration. Le relevé d’emploi a modifié la raison de l’émission. Cela n’a pas changé le fait que le prestataire a cessé de travailler le 10 décembre 2020.

[91] Je conclus que le prestataire savait, lorsqu’il a déposé le relevé le 19 décembre 2020, qu’il avait quitté son emploi le 10 décembre 2020. Le fait qu’il soit au courant de son départ le 10 décembre 2020 se reflète dans sa demande de prestations d’assurance-emploi, les conversations qu’il a eues avec les responsables de Service Canada, sa demande de révision et son appel devant le Tribunal. Il a constamment précisé qu’il avait cessé de travailler pour des raisons liées à la COVID‑19. Son dernier jour d’emploi était le 10 décembre 2020, ce qui correspond à la période de deux semaines couverte par le relevé de demande. Le prestataire a répondu non à la question [traduction] « Avez-vous cessé de travailler pour un employeur pendant la période visée par le présent relevé? ». Par conséquent, je conclus que le prestataire a répondu non en sachant que la déclaration était fausse ou trompeuse. Je conclus donc que la déclaration a été faite sciemment et qu’une pénalité est justifiée.

La Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire au moment de calculer la pénalité

[92] J’estime que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a calculé le montant de la pénalité. Par conséquent, je peux déterminer la pénalité à imposer.

[93] La Commission peut imposer une pénalité à une partie prestataire ou à toute autre personne agissant pour le compte d’une partie prestataire pour chaque acte ou omission qu’elle sait faux ou trompeurNote de bas de page 34. La Commission peut émettre un avertissement au lieu d’imposer une pénalitéNote de bas de page 35.

[94] La Commission a fait valoir qu’elle a rendu ses décisions dans la présente affaire de manière judiciaire, car toutes les circonstances pertinentes ont été prises en compte au moment de déterminer le montant de la pénalité. Elle affirme que la déclaration du prestataire a induit la Commission en erreur et a entraîné le paiement de prestations auxquelles le prestataire n’avait pas droit. Le prestataire savait que sa déclaration ne reflétait pas fidèlement les faits lorsqu’il l’a faite. La Commission a fait valoir que le montant de la pénalité correspondait à 50 % du trop-payé de 1 719 $, car le prestataire n’avait pas de circonstances atténuantes à prendre en considération.

[95] Le dossier d’appel contient un compte rendu de décision pour la pénalité imposée au prestataire. Dans la section [traduction] « Motif », on fait référence au fait que le prestataire n’a pas déclaré avoir quitté son emploi qu’il occupait au sein d’une entreprise de camionnage désignéeNote de bas de page 36. Le prestataire a déclaré qu’il ne connaissait pas l’entreprise de camionnage et qu’il n’avait jamais travaillé pour cette entreprise. Le représentant a dit que le fait d’avoir déclaré que l’employeur du prestataire était une entreprise de camionnage l’a amené à remettre en question l’exactitude de la transcription de la décision.

[96] J’accepte la preuve du prestataire selon laquelle il n’a pas travaillé pour l’entreprise de camionnage. La preuve est claire : il a travaillé pour une autre entreprise dans une industrie différente à l’extérieur de sa province.

[97] Je ne suis pas d’accord que le fait de nommer l’entreprise de camionnage dans le compte rendu de décision remette en question l’exactitude de la transcription de la décision. L’employeur réel du prestataire est nommé dans la section portant sur les faits, et les dates de son relevé de demande et de sa cessation d’emploi sont exactes. Par conséquent, j’estime que le fait de nommer un autre employeur ne permet pas de savoir si la Commission a agi de manière judiciaire lorsqu’elle a calculé le montant de la pénalité.

[98] La section [traduction] « Motif » indique que le prestataire n’a pas fourni d’explication pour avoir omis de divulguer sa cessation d’emploi. La section [traduction] « Motif » précise ceci : [traduction] « D’après les faits, on peut conclure qu’il est plus probable qu’improbable que le client a fait les fausses déclarations sciemment, car aucune explication concrète n’a été donnée pour les omissions ». Ce n’est pas le cas. Un responsable de Service Canada a demandé au prestataire pourquoi il avait omis de déclarer sa cessation d’emploi dans son relevé de demande. Le prestataire a répondu ceci : [traduction] « Je ne savais pas que je devais le faire. Je n’ai pas vu que la question était posée. Je pensais ne pas avoir à le déclarer avant la présentation d’une nouvelle demande. » Cet élément de preuve m’indique que le prestataire a fourni une explication pour ne pas avoir déclaré sa cessation d’emploi. À mon avis, les raisons pour lesquelles le prestataire n’a pas déclaré sa cessation d’emploi sont un facteur pertinent à prendre en considération au moment de déterminer une pénalité. Le fait de savoir si ces raisons sont acceptables pour la Commission peut éclairer la décision de la Commission d’imposer une pénalité. En ne tenant pas compte de l’explication fournie par le prestataire pour ne pas avoir déclaré sa cessation d’emploi dans le relevé de demande, la Commission n’a pas pris en considération un facteur pertinent dans sa décision d’imposer une pénalité au prestataire pour avoir fait une fausse déclaration.

[99] Rien ne prouve que la Commission ait considéré des facteurs non pertinents ou ait agi de mauvaise foi lorsqu’elle a rendu sa décision.

[100] La Commission n’aurait pas su, au moment où elle a rendu sa décision, que le prestataire croyait avoir été licencié. Cela s’explique par le fait que le prestataire a omis de dire à la Commission qu’il croyait avoir été licencié, même s’il avait eu plusieurs occasions de le faire. Comme je l’ai mentionné précédemment, j’ai conclu que le prestataire avait quitté volontairement son emploi et qu’il l’avait fait sans justification. Par conséquent, je ne considère pas que la preuve et l’argument que le prestataire a présentés à l’audience selon lesquels il n’a pas démissionné constituent un facteur pertinent dans l’évaluation de la pénalité.

[101] Je conclus que la Commission peut imposer une pénalité. Toutefois, comme elle n’a pas tenu compte de l’explication du prestataire selon laquelle il n’a pas déclaré la cessation d’emploi dans son relevé de demande, la Commission n’a pas correctement exercé son pouvoir discrétionnaire au moment de calculer le montant de la pénalité.

[102] J’ai conclu que le prestataire a sciemment fait une fausse déclaration lorsqu’il a omis de déclarer qu’il avait cessé de travailler dans le relevé de demande qu’il a présenté le 19 décembre 2020. La Commission était au courant, mais a choisi de ne pas tenir compte de l’explication du prestataire selon laquelle il a omis de déclarer la cessation d’emploi. Par conséquent, je conclus qu’il est plus approprié de fixer la pénalité à 430 $Note de bas de page 37.

Analyse : avis de violation

[103] L’objet de la loi qui permet à la Commission d’imposer un avis de violation à une partie prestataire est de « dissuader les violations au régime d’assurance-emploi en imposant une sanction additionnelle aux prestataires qui tentent d’abuser du systèmeNote de bas de page 38 ». La Cour a en outre réaffirmé que le pouvoir d’émettre un avis de violation est un pouvoir discrétionnaire qui appartient à la CommissionNote de bas de page 39.

[104] J’ai compétence pour décider si la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a émis un avis de violationNote de bas de page 40.

[105] Pour que j’intervienne dans la décision de la Commission, je dois d’abord établir que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a décidé d’émettre l’avis de violation. Comme je l’ai mentionné précédemment, si la Commission a agi de mauvaise foi ou pour un motif inapproprié, a tenu compte de facteurs non pertinents ou a omis de tenir compte de facteurs pertinents, ou a agi de façon discriminatoire, elle n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaireNote de bas de page 41.

[106] La Commission a soutenu qu’elle a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a émis l’avis de violation. Elle dit qu’après avoir examiné l’incidence générale de l’avis de violation sur le prestataire, y compris les circonstances atténuantes, les infractions antérieures et l’incidence sur la capacité du prestataire de présenter des demandes futures, elle a convenu qu’une violation s’appliquait dans le cas du prestataire. Comme le prestataire avait accumulé 1 820 heures d’emploi assurable au moment où il a demandé des prestations, la Commission a décidé que l’augmentation du nombre d’heures (exigée selon l’avis de violation) n’aurait pas d’incidence sur la capacité du prestataire à présenter des demandes futures.

[107] Le représentant a soutenu que le relevé d’emploi modifié portait sur tous les articles de la Loi sur l’assurance-emploi dans les observations de la Commission, lesquelles se trouvent dans le document GD4B du dossier d’appel.

[108] Le dossier d’appel contient un compte rendu de décision sur la violationNote de bas de page 42. Le compte rendu de décision indique qu’il s’agit du premier cas de fausse déclaration du prestataire et que le trop-payé de prestations d’assurance-emploi totalisait 1 719 $. Dans la section [traduction] « Décision », il y a un X à côté de [traduction] « Non autorisé – Classification » et [traduction] « Grave – le trop-payé total réel et/ou potentiel se situe entre 1 000 $ et 4 999 $ ». Dans la section [traduction] « Motif », il y a l’énoncé suivant : [traduction] « Le client n’a fourni aucune circonstance atténuante; par conséquent, une violation sera imposée ».

[109] Lorsque le prestataire a communiqué avec la Commission le 5 février 2021 pour s’informer de l’état de sa nouvelle demande de prestations d’assurance-emploi, il a dit qu’il trouvait la situation financière difficile. Il dépendait de l’aide de ses parentsNote de bas de page 43. À mon avis, la situation financière du prestataire est un facteur atténuant dont il faut tenir compte dans l’évaluation d’un avis de violation.

[110] Un autre facteur à prendre en considération est l’incidence générale de la violation sur le prestataire, y compris sa capacité de présenter une demande futureNote de bas de page 44. Dans ce cas, la violation grave signifie que le prestataire devra accumuler 50 % plus d’heures pour établir une demande future. Malgré l’observation de la Commission selon laquelle le nombre d’heures d’emploi assurable utilisé par le prestataire pour présenter une nouvelle demande a été pris en compte, il n’y a pas de preuve dans le compte rendu de décision que la Commission a tenu compte de ce facteur lorsqu’elle a décidé d’imposer un avis de violation grave.

[111] En ne prenant pas en considération la situation financière du prestataire et l’incidence de l’avis de violation grave sur sa capacité de présenter une demande future, la Commission n’a pas tenu compte d’un facteur pertinent. Par conséquent, je conclus que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a imposé un avis de violation grave.

[112] Le prestataire a éprouvé des difficultés financières lorsqu’il n’a pas été en mesure de présenter une nouvelle demande de prestations d’assurance-emploi. Il doit rembourser les prestations d’assurance-emploi qu’il a reçues depuis le 10 décembre 2020. Il est un pêcheur commercial saisonnier qui détient un emploi à l’extérieur de sa province natale pendant la basse saison. Il n’a pas été en mesure de trouver un autre emploi avant de commencer la pêche en mai 2021. Compte tenu de ces circonstances, j’estime qu’émettre un avis de violation grave aurait des conséquences importantes sur les futures demandes de prestations d’assurance-emploi du prestataire. Par conséquent, je conclus qu’en raison de ces circonstances atténuantes, un avis de violation ne devrait pas être imposé.

Conclusion

[113] En ce qui concerne la question du départ volontaire, l’appel est rejeté.

[114] En ce qui concerne la question de la fausse déclaration et de la pénalité, l’appel est accueilli en partie. La pénalité passe de 859 $ à 430 $.

[115] En ce qui concerne la question de l’avis de violation grave, l’appel est accueilli.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.