Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : EV c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 133

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale — Section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : E. V.
Représentante ou représentant : A. V.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (446190) datée du 11 janvier 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Mark Leonard
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 17 février 2022
Personne présente à l’audience : Représentant de l’appelante
Date de la décision : Le 21 février 2022
Numéro de dossier : GE-22-244

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelante n’a pas démontré qu’elle était fondée à quitter son emploi (c’est-à-dire qu’elle n’avait pas une raison acceptable selon la loi pour le faire) quand elle l’a fait. L’appelante n’était pas fondée à quitter son emploi parce que le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, elle est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi

Aperçu

[3] L’appelante a quitté son emploi et a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons pour lesquelles l’appelante a quitté son emploi. Elle a conclu que cette dernière a quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’elle a choisi de quitter son emploi) sans justification prévue par la loi. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.

[4] Je dois décider si l’appelante a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas.

[5] L’appelante affirme qu’on ne lui assignait pas assez d’heures de travail pour couvrir ses dépenses. Elle affirme avoir communiqué avec la Commission et qu’une agente ou un agent lui a dit qu’elle recevrait des prestations si elle quittait son emploi. Elle dit que la seule raison pour laquelle elle a décidé de quitter son emploi est qu’une agente ou un agent a confirmé qu’elle serait admissible à des prestations.

[6] La Commission affirme que l’appelante aurait pu demeurer en fonction alors qu’elle cherchait un autre emploi. Elle dit que le départ n’était pas la seule solution raisonnable qui s’offrait à l’appelante au moment où elle a quitté son emploi; elle ne peut donc pas recevoir de prestations.

Question en litige

[7] L’appelante est-elle exclue du bénéfice des prestations pour avoir quitté volontairement son emploi sans justification?

[8] Pour répondre à cette question, je dois d’abord aborder la question du départ volontaire de l’appelante. Je dois ensuite décider si elle était fondée à quitter son emploi.

Analyse

Les parties sont d’accord sur le fait que la prestataire a quitté volontairement son emploi

[9] L’appelante n’était pas à l’audience. Son représentant y a assisté et a résumé sa cause.

[10] Dans le cadre de son appel, l’appelante a soutenu qu’elle avait quitté son emploi le 16 octobre 2021. Je souligne que dans sa demande de prestations, elle a indiqué que le 8 octobre 2021 était son dernier jour de travail, et que son employeur a noté dans son relevé d’emploi que son dernier jour de travail était le 12 octobre 2021. Il n’y avait aucun élément de preuve au dossier comme une lettre de démission et l’appelante n’était pas à l’audience pour éclaircir la question des dates.

[11] Cependant, l’appelante a confirmé dans son appel qu’elle avait quitté son emploi, mais uniquement après avoir consulté une personne représentant la Commission. Le représentant de l’appelante l’a confirmé et a déclaré que l’appelante ne conteste pas le fait qu’elle a quitté volontairement son emploi.

[12] J’accepte le fait que l’appelante a quitté volontairement son emploi. Rien ne prouve le contraire.

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelante était fondée à quitter volontairement son emploi

[13] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelante était fondée à quitter volontairement son emploi quand elle l’a fait.

[14] La loi prévoit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNoe de bas page 1. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que le départ était fondé.

[15] La loi explique ce que veut dire « être fondée à ». Elle dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable, compte tenu de toutes les circonstancesNoe de bas page 2.

[16] L’appelante est responsable de prouver que son départ était fondéNoe de bas page 3. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnable. Pour prendre une décision, je dois examiner toutes les circonstances présentes quand l’appelante a quitté son emploi.

[17] L’appelante a affirmé qu’elle a quitté son emploi parce que ses heures de travail avaient été considérablement réduites. Elle a raconté que les quarts étaient parfois annulés à la dernière minute. À cause de la diminution des heures de travail, elle ne faisait pas assez d’argent pour respecter ses obligations financières. Elle affirme qu’elle a communiqué avec la Commission et qu’une représentante ou un représentant lui a dit qu’elle pouvait démissionner de son emploi et recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[18] La Loi sur l’assurance-emploi précise différentes circonstancesNoe de bas page 4 qui peuvent constituer un motif valable pour quitter un emploi. L’appelante n’a pas soutenu que sa situation correspondait à l’une des circonstances indiquées dans la Loi sur l’assurance-emploi. J’ai examiné l’observation de l’appelante. Elle a été embauchée pour un poste sans heures stables. Elle savait que ses heures de travail pouvaient varier d’une semaine à l’autre et qu’il n’y avait aucune quantité de travail garantie. Elle affirme que quand ses heures ont été considérablement réduites, elle ne pouvait pas respecter ses obligations financières et devait trouver autre chose de plus stable.

[19] Les détails concernant sa situation ne correspondent à aucune des circonstances prévues par la Loi sur l’assurance-emploi qui constituerait un motif valable de quitter un emploi. Elle savait lorsqu’elle a accepté l’emploi que les heures pouvaient varier; et ne peut donc pas se fonder sur le fait qu’il y ait eu une modification importante de ses conditions de rémunération.

[20] Ainsi, il ne reste donc plus que l’argument selon lequel elle s’est fiée aux conseils d’une représentante ou d’un représentant de la Commission lorsqu’elle a choisi de quitter son emploi. L’appelante a soutenu que la seule raison pour laquelle elle a décidé de quitter son emploi est qu’une représentante ou un représentant lui a confirmé qu’elle pouvait le faire tout en recevant quand même des prestations. Elle affirme s’être fiée à cette information de la représentante ou du représentant et qu’elle ne devrait pas souffrir parce qu’elle l’a fait.

[21] L’appelante a signalé avoir communiqué avec la Commission le 14 octobre 2021 pour discuter de sa situation. Elle a raconté que la représentante ou le représentant lui a dit qu’elle pouvait quitter son emploi et être admissible aux prestations. Après avoir reçu cette information, l’appelante a démissionné de son poste et a présenté une demande renouvelée de prestations d’assurance-emploi. Ses observations précisent que son dossier en ligne de l’assurance-emploi avait été réactivé, mais contenait une note disant [traduction] : « Décision requise ».

[22] Elle a de nouveau communiqué avec la Commission le 22 novembre 2022 [sic], et une représentante ou un représentant lui a dit qu’elle recevrait probablement des prestations bientôt. Elle a ajouté que le 29 novembre 2021, elle a reçu un appel de la Commission au cours duquel on l’a informée qu’elle ne serait pas admissible aux prestations parce qu’elle n’était pas fondée à quitter son emploi.

[23] La Commission affirme que l’appelante n’était pas fondée à quitter son emploi quand elle l’a fait parce que le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Plus précisément, la Commission dit que l’appelante aurait pu demeurer en fonction alors qu’elle cherchait un autre emploi. De plus, elle a soutenu que l’appelante aurait pu conserver son emploi et demander quand même des prestations s’il y avait eu interruption de la rémunération.

[24] La Commission a fait valoir qu’il était peu probable qu’une représentante ou un représentant ait dit à l’appelante qu’elle serait admissible aux prestations si elle quittait son emploi. Cependant, la Commission n’a pas nié que l’appel a eu lieu. Elle n’a pas non plus fourni d’enregistrement de l’appel téléphonique présumé ou une transcription. Elle n’a donné aucune preuve selon laquelle la représentante ou le représentant a expliqué l’option de demeurer en fonction et de recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[25] Les observations de l’appelante précisent qu’elle a parlé à une représentante ou un représentant le 14 octobre 2021. Elle a noté l’heure de l’appel et le numéro de téléphone. L’appelante affirme que l’agente ou l’agent lui a dit qu’elle pouvait recevoir des prestations d’assurance-emploi si elle démissionnait de son emploi.

[26] Je suis convaincu que l’appelante a fait l’appel pour poser des questions sur ses options d’assurance-emploi. L’appelante n’était pas à l’audience; elle n’a donc pas pu raconter ce qui s’est passé pendant l’appel de façon plus détaillée. J’estime que le souvenir qu’a l’appelante des événements est crédible dans la mesure où elle croit qu’on lui a donné des renseignements erronés.

[27] La Commission affirme qu’il est peu probable qu’une représentante ou un représentant fasse une erreur et dise à une ou un prestataire qu’il ou elle peut quitter un emploi et recevoir des prestations d’assurance-emploi. Pourtant, dans ses observations, la Commission souligne qu’elle a fait une erreur en ne communiquant pas sa décision initiale par écrit à l’appelante. Manifestement, il se peut que la Commission fasse une erreur. De plus, elle avise les prestataires qu’elle enregistre les entrevues, mais elle n’a pas fourni d’enregistrement ou de transcription de cet appel à l’appui de ses observations.

[28] L’appelante n’a pas téléphoné à l’improviste pour obtenir des renseignements généraux dans une situation où il n’y avait aucun dossier dans lequel on pouvait consigner des notes. Elle avait une demande précédente que l’on a réactivée. Il devrait y avoir des notes dans son dossier concernant la conversation du 14 octobre 2021. J’estime qu’étrangement, il y a des lacunes dans les observations de la Commission au chapitre de l’appel du 14 octobre 2021.

[29] Je suis incapable d’établir s’il y a eu une erreur de communication ou un malentendu de la situation de la part de l’une ou l’autre des parties. Cependant, les tribunaux ont examiné la question des répercussions de renseignements erronés fournis par la Commission.

Des renseignements erronés de la Commission représentent-ils un motif valable pour quitter un emploi?

[30] Dans ses observations, l’appelante maintient catégoriquement que la représentante ou le représentant lui a dit qu’elle pouvait quitter son emploi tout en étant admissible aux prestations d’assurance-emploi. Elle affirme qu’elle s’est fiée à cette information erronée lorsqu’elle a décidé de quitter son emploi.

[31] Il est bien établi en jurisprudence que même lorsque la Commission donne des renseignements erronés à une ou un prestataire, la question qui demeure est toujours celle de savoir si la personne est admissible aux prestationsNoe de bas page 5.

[32] La Cour suprême a maintenu que des renseignements erronés fournis par la Commission ne permettent pas d’accorder une exemption des exigences prévues par la Loi sur l’assurance-emploi. Cela veut dire que même si la Commission a fourni des renseignements inexacts sur lesquels l’appelante s’est fondée, il ne s’agit pas d’un motif valable pour quitter un emploi.

[33] Alors, peu importe que l’appelante ait reçu de l’information erronée, la loi exige quand même qu’elle démontre qu’elle était fondée à quitter un emploi. Le critère juridique servant à décider si l’appelante était fondée à quitter son emploi n’est pas qu’elle ait quitté son emploi dans des circonstances précises, mais le fait que l’appelante n’avait aucune autre solution raisonnable que de quitter son emploi quand elle l’a fait.

[34] Je dois conclure que l’appelante n’était pas fondée à quitter son emploi parce que le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Il aurait été raisonnable pour elle de demeurer en fonction et de chercher un autre emploi tout en demandant des prestations d’assurance-emploi au même moment à cause de la réduction de son salaire.

[35] J’ai de l’empathie pour l’appelante. Qu’elle ait été mal informée ou qu’elle ait mal compris, l’appelante a pris une décision qui a eu une incidence négative sur elle.

[36] Cependant, comme je l’ai expliqué, de l’information erronée ne permet pas d’accorder une exemption de l’application de la Loi sur l’assurance-emploi.

Conclusion

[37] Je conclus que l’appelante est exclue du bénéfice des prestations.

[38] Par conséquent, l’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.