Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MN c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 245

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. N.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (0) rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada le 21 janvier 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : 23 mars 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 25 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-314

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La preuve montre que la prestataire a choisi l’option des prestations prolongées.

Aperçu

[3] Dans le formulaire de demande de prestations d’assurance-emploi, vous avez le choix entre deux options : « standard » et « prolongée »Note de bas page 1.

[4] L’option standard permet de recevoir un maximum de 35 semaines de prestations au taux normal. L’option prolongée permet de recevoir la même somme totale de prestations, mais à un taux moins élevé et pendant un maximum de 61 semaines. La somme reste donc la même. Elle est seulement répartie sur un nombre de semaines différent.

[5] Une fois que les paiements commencent, les personnes ne peuvent pas changer d’optionNote de bas page 2.

[6] Dans son formulaire de demande, la prestataire a choisi les prestations parentales prolongées. Elle dit qu’il s’agissait d’une erreur et qu’elle avait toujours voulu avoir les prestations standards.

[7] Elle a appelé la Commission de l’assurance-emploi du Canada pour essayer de faire modifier son choix de prestations pour des prestations standards une fois qu’elle a vu dans son compte qu’elle avait reçu un plus petit paiement.

[8] La Commission a dit à la prestataire qu’elle ne pouvait pas modifier son type de prestations, car la loi prévoit que le type de prestations parentales ne peut pas être modifié une fois que les paiements ont commencé.

[9] La prestataire a fait appel de cette décision auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[10] Elle a eu gain de cause. La division générale a établi que la prestataire avait choisi par erreur les prestations parentales prolongées et qu’elle avait toujours voulu choisir les prestations parentales standards, et elle lui a accordé des prestations parentales standards.

[11] La Commission a fait appel de la décision de la division générale auprès de la division d’appel et a eu gain de cause. La division d’appel a annulé la décision initiale de la division générale et l’a renvoyée à la division générale pour réexamen.

[12] C’est ainsi que je me suis retrouvé à devoir trancher cet appel.

Question en litige

[13] Quel type de prestations parentales la prestataire voulait-elle vraiment recevoir lorsqu’elle a fait son choix dans le formulaire de demande?

Analyse

[14] Les personnes qui demandent des prestations parentales de l’assurance-emploi doivent choisir entre l’option standard et l’option prolongéeNote de bas page 3. La loi dit qu’à partir du moment où la Commission commence à verser des prestations parentales, les prestataires ne peuvent plus changer d’optionNote de bas page 4.

[15] Pour savoir quel type de prestations parentales l’appelante voulait vraiment choisir quand elle a rempli le formulaire, il me faut examiner les éléments de preuve liés à ce choix. Autrement dit, l’option que la prestataire a choisie en remplissant sa demande est un facteur important, mais ce n’est pas la seule chose dont il faut tenir compte. Par exemple, il peut aussi être nécessaire de tenir compte du nombre de semaines de prestations que la prestataire voulait recevoir ou de la longueur du congé qu’elle prévoyait prendre.

Le choix de la prestataire dans la demande initiale

[16] L’option que la prestataire voulait choisir dans sa demande lorsqu’elle l’a remplie est un facteur important. À ce moment-là, avait-elle l’intention de choisir l’option standard ou l’option prolongée?

Les arguments des parties

[17] La Commission a déclaré que la prestataire avait été informée dans la demande de prestations parentales de la différence entre les prestations parentales standards et les prestations parentales prolongées et qu’elle avait choisi de recevoir des prestations parentales prolongées. La prestataire a aussi été informée que cette décision serait irrévocable une fois qu’elle commencerait à recevoir ses prestations parentalesNote de bas page 5.

[18] La prestataire affirme que pour son premier enfant, elle a choisi les prestations parentales standards, car elle voulait seulement s’absenter du travail pendant un an. La prestataire affirme que ce fait aurait dû amener la Commission à conclure qu’elle avait commis une erreur en choisissant les prestations prolongées dans la demande actuelle.

[19] La prestataire a déclaré qu’elle vivait une période très difficile avant de donner naissance à son enfant.

[20] Elle était tombée et s’était fracturé la cheville, et la chute l’a fait craindre pour son bébé à naître.

[21] Certaines situations sociales en Amérique avaient également déclenché le traumatisme qu’elle avait subi en grandissant dans un pays déchiré par la guerre. Cela a fait en sorte que la prestataire a eu des problèmes de santé mentale qui l’ont obligée à s’absenter du travail pour un congé de courte durée. Cela s’ajoutait au stress causé par la pandémie de COVID-19. La prestataire affirme qu’elle participait à des séances de counseling.

[22] La prestataire affirme qu’après tout cela, elle était seule lorsqu’elle a tenté de remplir la demande de prestations, car elle n’avait pas de soutien familial à l’époque. Son époux n’était pas au pays et elle s’occupait de son enfant de deux ans.

[23] La prestataire affirme qu’à la lumière de tout ce qu’elle vivait, il n’est pas difficile d’imaginer qu’elle a fait une erreur en remplissant la demande de prestations.

[24] La prestataire a déclaré qu’elle ne se rappelait pas pourquoi elle avait choisi 52 semaines de prestations si elle voulait en fait des prestations standards, mais qu’il est possible qu’elle ait choisi ce nombre simplement en calculant le nombre de semaines dans une année, car elle voulait être en congé pendant un an.

[25] La prestataire a déclaré qu’elle ne se souvenait pas du tout d’avoir lu les renseignements figurant dans le formulaire de demande ni pourquoi elle avait fait les choix qu’elle avait faits lorsqu’elle l’avait rempli.

[26] La prestataire affirme que tout ce processus a été extrêmement frustrant pour elle et qu’elle aurait aimé que la Commission se donne la peine de lui demander ce qui se passait dans sa vie lorsqu’elle a rempli la demande, de sorte qu’elle aurait pu les informer de ses problèmes de santé mentale avant qu’elle ne décide de refuser sa demande de modifier son type de prestations.

[27] La prestataire affirme que tout ce gâchis aurait pu être évité si la Commission disposait d’un processus automatisé qui enverrait une lettre ou un courriel aux prestataires pour leur faire savoir, environ un mois à l’avance, qu’à la date X, leurs prestations de maternité cesseraient d’être versées et que le versement des prestations parentales commencerait au taux de Y.

[28] Elle affirme qu’une telle lettre l’aurait immédiatement avertie que quelque chose n’allait pas, car le faible taux de prestations lui aurait sauté aux yeux.

[29] Elle aurait alors pu facilement téléphoner à l’avance et corriger l’erreur.

[30] La prestataire affirme que son cas n’est pas un incident isolé, car elle connaît d’autres femmes qui ont vécu ou qui vivent la même chose.

[31] Je suis d’accord avec la prestataire que toute cette affaire et bien d’autres affaires semblables auraient pu être évitées si la Commission avait simplement envoyé automatiquement une quelconque lettre avant le début du versement des prestations parentales de la prestataire, l’informant de la date à laquelle elles commenceraient et du taux des paiements.

[32] Toutefois, bien que je sois d’accord avec la prestataire sur ce point, je n’ai pas le pouvoir de forcer la Commission à faire quoi que ce soit pour modifier ses politiques ou pratiques opérationnelles. Je peux seulement suggérer fortement qu’elle tienne compte de la suggestion de la prestataire pour éviter d’autres incidents comme celui-ci.

[33] En ce qui concerne la principale question en litige, je conclus que la prestataire a toujours eu l’intention de choisir les prestations parentales prolongées.

[34] Je ne doute pas que la prestataire avait des problèmes de santé mentale et qu’il était difficile de gérer sa grossesse, de prendre soin de son nouveau-né et de remplir seule la demande de prestations.

[35] Cependant, la prestataire n’a pas démontré qu’elle était dans un état tel qu’elle était incapable de comprendre les informations du formulaire de demande de prestations parentales.

[36] Elle a réussi à remplir la demande de prestations parentales et à fournir tous les renseignements demandés, ce qui m’indique qu’elle était capable de lire et de comprendre les renseignements qui lui étaient présentés dans le formulaire.

[37] Je comprends l’argument de la prestataire selon lequel elle a choisi 52 semaines, car cela représentait une année, soit le temps total qu’elle voulait prendre en congé, mais le choix du nombre de semaines n’est pas déterminant quant à son choix de prestations.

[38] Il est vrai que 52 semaines ne représentent ni le maximum de 35 semaines de prestations standards ni le maximum de 61 semaines de prestations prolongées, mais une personne n’est pas tenue de choisir le maximum de semaines offertes. Si une personne voulait obtenir plus de 35 semaines de prestations parentales, elle devrait choisir l’option des prestations prolongées, qu’elle veuille prendre 61 semaines ou non.

[39] Donc, le fait qu’une personne ait choisi un nombre inférieur au nombre maximal de semaines offert selon l’option des prestations prolongées ne signifie pas que ce choix dénote une erreur dans le choix initial de la prestation parentale qu’elle voulait.

[40] Indépendamment de cela, la prestataire se heurte à un obstacle plus important pour pouvoir prouver que son intention a toujours été de choisir des prestations parentales standards.

[41] Le formulaire de demande de prestations parentales offre deux types de prestations : les prestations standards, au taux de 55 % de la rémunération hebdomadaire assurable, et les prestations prolongées, aux taux de 33 % de la rémunération hebdomadaire assurable. Cette partie du formulaire explique clairement que les paiements de prestations prolongées seront beaucoup plus petits que les paiements de prestation standards.

[42] Malgré ces renseignements, la prestataire a choisi les prestations prolongées.

[43] Je lui ai demandé pourquoi elle aurait choisi les prestations prolongées, puisque le formulaire indique qu’ils paient 22 % de moins que les prestations standards, si elle craignait de devoir subvenir à ses besoins pendant une période prolongée avec des paiements moins élevés.

[44] La prestataire m’a dit qu’elle ne se souvenait pas d’avoir lu cette information.

[45] J’estime que cette explication n’explique pas adéquatement pourquoi la prestataire a choisi les prestations prolongées, qui clairement, selon le formulaire, offrent des paiements inférieurs à ceux des prestations standards, si elle avait toujours eu l’intention de choisir les prestations standards.

[46] Je souligne que la Cour fédérale a déjà dit que les questions sur le formulaire sont claires. La Cour fédérale a également déclaré que c’est la responsabilité de la personne qui présente la demande de lire attentivement et d’essayer de comprendre ses options et qu’il n’existe aucun recours juridique quand une personne n’a pas répondu avec exactitude à des questions non ambiguësNote de bas page 6.

[47] Puisque le formulaire indique clairement comment les prestations prolongées fonctionnent et que les paiements de ce type de prestations sont plus petits, et puisque la prestataire a choisi ce type de prestations, je conclus qu’il n’y a aucun recours pour elle si elle a fait son choix parce qu’elle n’a pas lu ou compris ce qu’elle a lu. C’était sa responsabilité de s’assurer de lire et de comprendre le formulaire de demande.

Somme toute, quelle option la prestataire voulait-elle choisir au moment de présenter sa demande?

[48] Je conclus que la prestataire n’a pas prouvé qu’elle avait l’intention de choisir des prestations parentales standards au moment où elle a fait sa demande.

[49] Je comprends que la prestataire souhaite recevoir des prestations parentales standards. Toutefois, la loi dit clairement que le choix ne peut pas être modifié après que des prestations sont versées. Bien que je sympathise avec la situation de la prestataire, elle a demandé de changer le type de ses prestations le 12 mai 2021,Note de bas page 7 c’est-à-dire après qu’elle a commencé à toucher des prestations le 7 mai 2021,Note de bas page 8 et je ne peux pas changer la loi.Note de bas page 9

Conclusion

[50] La prestataire a choisi prestations parentales prolongées.

[51] Cela signifie que l’appel est rejeté.

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