Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : FB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 238

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale – Section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : F. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision de la Commission de l'assurance-emploi du Canada (440323) datée du 23 décembre 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Amanda Pezzutto
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 23 février 2022
Personnes présentes à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 2 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-175

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Décision

[1] F. B. est la prestataire. La Commission de l'assurance-emploi du Canada lui demande de rembourser la prestation d’assurance-emploi d’urgence (PAEU) qu’elle a reçue. La prestataire fait appel de cette décision auprès du Tribunal de la sécurité sociale.

[2] Je rejette l’appel de la prestataire. Elle n’a pas prouvé son admissibilité à la PAEU. Il en est ainsi parce que sa rémunération dépassait le seuil qui lui permettrait de recevoir la prestation.

Aperçu

[3] Le prestataire avait deux emplois : un emploi à temps partiel et un emploi à temps plein. Elle a perdu son emploi à temps plein en mars 2020 et a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission a commencé à lui verser une PAEU. La prestataire occupait toujours son emploi à temps partiel et a donc demandé conseil à la Commission. Les agents de la Commission lui ont dit de continuer à faire ses déclarations de prestataire toutes les deux semaines et à déclarer ses revenus. C’est donc ce que la prestataire a fait. Elle a déclaré sa rémunération provenant de son emploi à temps partiel chaque semaine. Elle a touché une PAEU jusqu’au début d’octobre 2020.

[4] Plusieurs mois plus tard, la Commission a examiné le dossier de la prestataire. Elle a décidé que sa rémunération dépassait le seuil qui lui permettrait de toucher la PAEU. La Commission lui a donc demandé de rembourser la totalité de la PAEU qu’elle a reçue entre le 22 mars et le 3 octobre 2020.

[5] La Commission soutient que la prestataire gagnait toujours plus de 1 000 $ par période de quatre semaines pendant qu’elle recevait la PAEU. La Commission affirme que cela signifie qu’elle a gagné plus que le seuil autorisé pour recevoir la PAEU. Elle affirme donc que la prestataire doit rembourser la PAEU qu’elle a reçue.

[6] La prestataire n’est pas d’accord avec les décisions de la Commission. Elle affirme que des agents de la Commission lui ont dit qu’elle avait droit à la prestation et qu’elle devait simplement continuer à déclarer sa rémunération. Elle dit que la Commission aurait dû se rendre compte plus tôt de la question entourant son revenu au lieu de lui verser la prestation d’abord, puis de lui demander de la rembourser par après.

Questions en litige

[7] La prestataire fait appel de la décision de la Commission concernant sa PAEU. Elle dit qu’elle ne devrait pas avoir à rembourser la prestation qu’elle a reçue. Elle a présenté un certain nombre d’arguments expliquant pourquoi elle n’est pas d’accord avec les décisions de la Commission. J'ai divisé son appel en plusieurs questions, et je passerai en revue chacune d'entre elles dans ma décision.

  • La Commission a-t-elle respecté la loi lorsqu’elle a versé à la prestataire une PAEU plutôt que des prestations régulières d’assurance-emploi?
  • La Commission a-t-elle le pouvoir de réviser rétroactivement l’admissibilité de la prestataire?
  • Quelle était la rémunération de la prestataire pendant qu’elle recevait la PAEU?
  • La prestataire gagnait-elle plus que le seuil permis?
  • Les conseils trompeurs ou inexacts de la Commission rendent-ils la prestataire admissible à des prestations?
  • Ai-je le pouvoir d’annuler le trop-payé de la prestataire?

Analyse

Question en litige no 1 : La Commission a-t-elle respecté la loi lorsqu’elle a versé à la prestataire une PAEU plutôt que des prestations régulières d’assurance-emploi?

[8] La loi dit que la Commission devait verser une PAEU plutôt que des prestations régulières d’assurance-emploi. Cela est dû au fait que la prestataire a présenté sa demande de prestations après l’entrée en vigueur de la loi sur la PAEU.

[9] Certains faits fondamentaux ne sont pas contestés. Le dernier jour de travail de la prestataire à son emploi à temps plein était le 20 mars 2020. Elle a fait une demande de prestations d’assurance-emploi le même jour. À partir de cette information, la Commission a fait commencer la période de prestations de la prestataire le 22 mars 2020. Autrement dit, le 22 mars 2020 était la date d’entrée en vigueur des prestations de la prestataire.

[10] En réponse à la pandémie de la COVID-19, le gouvernement du Canada a pris plusieurs mesures temporaires. L’une de ces mesures a été la création du programme de PAEU.

[11] En termes simples, le gouvernement a créé un programme temporaire pour simplifier le versement des prestations. La Commission a automatiquement transféré toute personne qui faisait une nouvelle demande de prestations d’assurance-emploi au programme de PAEU. La loi ne donnait pas aux gens le choix entre les prestations régulières de l’assurance-emploi et la PAEU. Si une personne faisait une demande de prestations régulières d'assurance-emploi le 15 mars 2020 ou [sic], la Commission l’inscrivait automatiquement au programme de PAEUNote de bas de page 1.

[12] Aucune preuve ne démontre que la prestataire touchait déjà des prestations régulières d’assurance-emploi avant mars 2020. Elle n'a pas demandé le renouvellement d'une demande de prestations d'assurance-emploi préexistante. Au lieu de cela, le 22 mars 2020, elle a demandé de commencer une nouvelle période de prestations d’assurance-emploi.

[13] Cela signifie que la Commission a dû utiliser la loi sur l’AE ERB parce que c’était la loi en vigueur au moment où elle a demandé des prestations. Ni la Commission ni le prestataire n’avaient le choix quant à la façon de verser des prestations. La loi ne donnait pas au prestataire le choix de choisir les prestations régulières d’AE plutôt que les prestations d’AE.

[14] Cela signifie que la Commission a dû amorcer une période de prestations pour la PAEU. La prestataire n’avait pas la possibilité de choisir des prestations régulières d’assurance-emploi.

Question en litige no 2 : La Commission a-t-elle le pouvoir de réviser rétroactivement l’admissibilité de la prestataire?

[15] La loi donne à la Commission des pouvoirs très étendus pour revenir sur n'importe laquelle de ses décisions concernant les prestations d'assurance-emploiNote de bas de page 2.  Par contre, la Commission doit suivre la loi concernant les délais lorsqu’elle révise ses décisions. Habituellement, la Commission dispose d'un maximum de trois ans pour revenir sur ses décisionsNote de bas de page 3. Si la Commission vous a versé des prestations d'assurance‑emploi auxquelles vous n'aviez pas vraiment droit, elle peut vous demander de les rembourserNote de bas de page 4.

[16] La loi stipule spécifiquement que la Commission peut utiliser ses pouvoirs de révision pour réviser rétroactivement l'ERB de l'assurance-emploi.Note de bas de page 5

[17] En l’espèce, la Commission a examiné la PCU qu’elle a versée au prestataire à compter du 22 mars 2020. Selon la preuve de la Commission, la Commission a commencé son examen le 8 mars 2021. Au cours de cette conversation, la Commission a dit à la prestataire qu’elle examinait sa rémunération et son admissibilité à la PCU. La Commission a décidé que la prestataire n’était pas admissible à des prestations d’assurance-emploi en raison de sa rémunération. Elle a donc envoyé un avis de dette à la prestataire concernant le trop-payé le 8 octobre 2021.

[18] La preuve montre que la Commission a terminé chacune des étapes de l’examen rétroactif dans les délais prévus par la loi. Elle a réexaminé les demandes de prestations de la prestataire, a rendu une décision, calculé le trop-payé et l'a avisée de la décision et du trop-payé, le tout dans les 36 mois suivant la date à laquelle elle avait initialement versé les prestations.

[19] Par conséquent, je conclus que la Commission a utilisé son pouvoir pour examiner rétroactivement l’admissibilité de la prestataire à la PAEU en respectant la loi. La loi confère à la Commission le pouvoir d’effectuer un examen rétroactif, et la Commission a suivi les lignes directrices et les délais prévus par la loi lorsqu’elle a procédé à son examen.

[20] Je comprends que la prestataire a déclaré honnêtement et avec exactitude sa rémunération chaque semaine dans ses déclarations bimensuelles. Même si la Commission disposait d'informations sur la rémunération de la prestataire, elle a attendu plusieurs mois avant de rendre une décision concernant son admissibilité à la PAEU. Cela a entraîné un trop-payé important pour la prestataire. Je suis sensible à sa situation et je comprends que le retard de la Commission lui a causé de la frustration. Toutefois, je conclus que la loi donne à la Commission le pouvoir de rendre une décision rétroactive concernant le droit de la prestataire à la PAEU.

Question en litige no 3 : Quelle était la rémunération de la prestataire pendant qu’elle touchait des prestations d’AE?

[21] La prestataire remplissait des déclarations toutes les deux semaines pendant qu'elle recevait la PAEU. Chaque semaine, elle déclarait ses revenus comme suit :

Début de la semaine Rémunération déclarée
22 mars 2020 453 $
29 mars 2020 370 $
5 avril 2020 603 $
12 avril 2020 378 $
19 avril 2020 410 $
26 avril 2020 444 $
3 mai 2020 440 $
10 mai 2020 498 $
17 mai 2020 686 $
24 mai 2020 780 $
31 mai 2020 $614
7 juin 2020 2 452 $
14 juin 2020 465 $
21 juin 2020 461 $
28 juin 2020 448 $
5 juillet 2020 444 $
12 juillet 2020 433 $
19 juillet 2020 260 $
26 juillet 2020 173 $
2 août 2020 347 $
9 août 2020 433 $
16 août 2020 433 $
23 août 2020 433 $
30 août 2020 433 $
6 septembre 2020 428 $
13 septembre 2020 433 $
20 septembre 2020 433 $
27 septembre 2020 410 $

[22] La prestataire dit n’avoir aucune preuve pour contredire la rémunération qu'elle a déclarée dans ses déclarations bihebdomadaires. Lors de l'audience, la prestataire a affirmé qu'elle avait calculé sa rémunération en fonction des heures travaillées et de son salaire horaire. Elle a dit qu’elle était certaine que l’information concernant sa rémunération était exacte.

[23] La Commission s'appuie sur la rémunération que la prestataire a déclarée dans sa déclaration bihebdomadaire. La Commission ne m’a pas donné de renseignements différents sur la rémunération de la prestataire.

[24] J'accepte donc que la rémunération que la prestataire a déclarée dans ses déclarations bihebdomadaires est correcte.

Question en litige no 4 : La prestataire a-t-elle gagné plus que le seuil permis?

[25] Je conclus que la prestataire a gagné plus que le seuil permis. En d'autres termes, sa rémunération était trop élevée pour qu’elle demande la PAEU.

[26] La loi explique l’incidence que la rémunération a sur le droit d’une personne à la PAEU. Une personne peut avoir un revenu de travail en même temps qu’elle reçoit la PAEU, mais elle ne peut pas gagner plus d’un certain seuil. La loi prévoit qu’une personne ne peut pas gagner plus de 1 000 $ par période de quatre semaines. Les quatre semaines n'ont pas à être consécutivesNote de bas de page 6. Cela signifie que la Commission peut exclure des semaines du décompte s’il s’agit d’une semaine de travail complète. Si une personne gagne plus de 1 000 $ sur une période de quatre semaines, elle n’est pas admissible à la PAEU.

[27] La Commission m’a fourni les renseignements suivants pour expliquer comment elle a examiné la rémunération de la prestataire :

Début de la semaine Période Rémunération Rémunération totale de la période
22 mars 2020 Période 1 453 $  
29 mars 2020 1 370 $  
5 avril 2020 1 Semaine de travail complète – cette semaine est exclue  
12 avril 2020 1 378 $  
19 avril 2020 1 410 $ 1 611 $
26 avril 2020 Période 2 444 $  
3 mai 2020 2 440 $  
10 mai 2020 2 498 $  
17 mai 2020 2 Semaine de travail complète – cette semaine est exclue  
24 mai 2020 2 Semaine de travail complète – cette semaine est exclue  
31 mai 2020 2 Semaine de travail complète – cette semaine est exclue  
7 juin 2020 2 2 452 $ 3 834 $
14 juin 2020 Période 3 465 $  
21 juin 2020 3 461 $  
28 juin 2020 3 Semaine de travail complète – cette semaine est exclue  
5 juillet 2020 3 444 $  
12 juillet 2020 3 433 $ 1 803 $
19 juillet 2020 Période 4 260 $  
26 juillet 2020 4 173 $  
2 août 2020 4 347 $  
9 août 2020 4 433 $ 1 213 $
16 août 2020 Période 5 433 $  
23 août 2020 5 433 $  
30 août 2020 5 433 $  
6 septembre 2020 5 428 $ 1 727 $
13 septembre 2020 Période 6 433 $  
20 septembre 2020 6 433 $  
27 septembre 2020 6 410 $ 1 276 $

[28] Bref, ce tableau signifie que la prestataire a gagné plus de 1 000 $ par période de quatre semaines entre le 22 mars et le 3 octobre 2020.

[29] La prestataire ne m’a fourni aucun renseignement démontrant que la Commission aurait mal effectué ses calculs. Je suis donc d’accord avec la Commission. J’estime que la rémunération de la prestataire dépassait le seuil. Elle n’a pas prouvé qu’elle avait droit à la PAEU entre le 22 mars et le 3 octobre 2020.

Question en litige no 5 : Les conseils trompeurs ou inexacts de la Commission rendent-ils la prestataire admissible à des prestations?

[30] La prestataire affirme avoir communiqué avec la Commission à plusieurs reprises pendant qu’elle recevait la PAEU. Elle dit que les agents de la Commission lui ont dit de déclarer sa rémunération et de continuer de recevoir la PAEU. Elle dit qu’elle n’aurait pas continué de recevoir la PAEU si elle savait qu’elle n’y avait pas droit.

[31] Je comprends que la prestataire soit frustrée en raison des conseils qu’elle a reçus des agents de la Commission. Elle affirme que ceux-ci l’ont induite en erreur.

[32] Même si je conviens que les agents de la Commission ont induit la prestataire en erreur, cela ne signifie pas qu’elle peut recevoir des prestations. La prestataire peut seulement toucher des prestations si la loi le permet. Les agents individuels de la Commission ne peuvent pas promettre de verser des prestations d'une manière qui va à l'encontre de la loiNote de bas de page 7. De plus, la loi ne me donne pas le pouvoir d’accorder une compensation à la prestataire même si des agents de la Commission ont commis des erreurs.

[33] Cela signifie que la prestataire ne peut pas recevoir la PAEU en raison d’erreurs de la Commission. Elle peut seulement recevoir la PAEU si la loi le permet.

Question en litige no 6 : Ai-je le pouvoir d'annuler le trop-payé de la prestataire?

[34] La Commission rend ses propres décisions concernant l’annulation des trop‑payés. Je ne peux pas lui ordonner d’annuler le trop-payé de la prestataireNote de bas de page 8. Je ne peux pas non plus l’autoriser à renoncer à son obligation de rembourser les prestationsNote de bas de page 9.

[35] Si la prestataire veut que la Commission annule le trop-payé, elle doit d’abord demander à la Commission d’annuler sa dette. Si la Commission rejette sa demande, elle peut demander à la Cour fédérale de réviser le refus de la Commission.

Conclusion

[36] Je rejette l’appel de la prestataire. Elle n’a pas prouvé son admissibilité à la PAEU en raison de sa rémunération.

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