Assurance-emploi (AE)

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Citation : LB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 158

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, Section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : L. B.
Témoin de la partie appelante : S. D.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (440385) datée du 8 décembre 2021 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Charline Bourque
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 3 février 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Témoin de l’appelant
Date de la décision : Le 25 février 2022
Numéro de dossier : GE-22-190

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Le prestataire n’a pas démontré qu’il avait travaillé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi.

[3] De plus, même si le prestataire avait établi sa demande de prestations d’assurance-emploi au 18 juillet 2021, il n’aurait pas travaillé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi. Le prestataire ne pouvait pas bénéficier du crédit d’heures emploi assurables.

Aperçu

[4] Le prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi, mais la Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’il n’avait pas travaillé assez d’heures pour y être admissibleNote de bas de page 1.

[5] Je dois décider si le prestataire a travaillé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi.

[6] La Commission affirme que le prestataire n’a pas travaillé assez d’heures parce qu’il a besoin de 420 heures, mais il en a accumulé seulement 282.

[7] Le prestataire n’est pas d’accord et soutient que la Commission l’a avisé qu’il ne pouvait demander des prestations d’assurance-emploi en août comme il le fait chaque année puisque sa demande de prestations n’avait pas pris fin.

[8] En effet, en raison des prestations d’assurance-emploi d’urgence, la demande d’assurance-emploi du prestataire a pris fin le 2 octobre 2021. Ainsi, en juillet 2021, lorsque le prestataire a voulu présenter sa demande d’assurance-emploi comme il le fait chaque année, il a été avisé que sa demande ne prenait pas fin avant octobre et d’attendre à ce moment pour présenter sa demande.

[9] Or, le prestataire est d’avis que le fait d’avoir attendu en octobre 2021 pour présenter sa demande d’assurance-emploi l’a empêché d’établir sa demande de prestations. Ainsi, en plus de ne pas avoir suffisamment d’heures d’emploi assurables à cette date, il ne pouvait pas bénéficier du supplément d’heures d’emploi accordé dans le cadre des prestations d’assurance-emploi d’urgence.

[10] Le prestataire indique n’avoir jamais demandé des prestations d’assurance-emploi d’urgence. Il souhaitait plutôt recevoir des prestations régulières comme à son habitude. De plus, il se questionne à savoir pourquoi sa demande ne pouvait être établie en juillet 2021, ce qui lui aurait permis de recevoir des prestations d’assurance-emploi.

Questions en litige

[11] Le prestataire pouvait-il recevoir des prestations régulières de l’assurance-emploi lorsque sa demande a été établie en juillet 2020 ?

[12] Le prestataire a-t-il travaillé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi ?

[13] Le fait d’antidater la demande du prestataire en juillet 2021 lui aurait-il permis de recevoir des prestations d’assurance-emploi ?

Analyse

Question en litige no 1 : Le prestataire pouvait-il recevoir des prestations régulières de l’assurance-emploi lorsque sa demande a été établie en juillet 2020 ?

[14] Le prestataire est d’avis que c’est en raison du fait qu’il a reçu des prestations d’assurance-emploi d’urgence qu’il se retrouve dans cette situation alors qu’il souhaitait recevoir des prestations régulières, comme habituellement.

[15] Afin de répondre aux besoins des Canadiens pour faire face à la pandémie de la COVID-19, le gouvernement du Canada a modifié la Loi sur l’assurance-emploi. Entre autres, il a mis en place la prestation d’assurance-emploi d’urgence (« PAEU »).

[16] Ainsi, pour la période commençant le 15 mars 2020 et se terminant le 26 septembre 2020, aucune période de prestations ne pouvait être établie à l’égard, entre autres, des prestations régulières ou de maladieNote de bas de page 2. Les prestations accordées pendant cette période sont donc celles de la prestation d’assurance-emploi d’urgence. Ainsi, la Loi sur l’assurance-emploi n’accorde aucun choix au prestataire quant au type de prestations qu’il reçoit entre des prestations d’assurance-emploi et les prestations d’assurance-emploi d’urgence. Seules ces dernières sont accordées.

[17] Ainsi, lorsque le prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 3, une demande de prestation d’assurance-emploi d’urgence a été établie le 19 juillet 2020. Il a donc reçu des prestations d’assurance-emploi d’urgence à partir de cette date puisque la Loi n’accorde aucune discrétion à ce sujet. Le prestataire a reçu des prestations d’assurance-emploi d’urgence du 19 juillet 2020 au 3 octobre 2020Note de bas de page 4.

[18] En effet, le versement de la prestation d’assurance-emploi d’urgence prenait fin le 3 octobre 2020Note de bas de page 5.

[19] Par conséquent, je suis d’avis que je ne peux intervenir dans la décision relative au type de prestations accordées au prestataire. La demande de prestations d’assurance-emploi ayant été établie le 19 juillet 2020, le prestataire n’est admissible qu’aux prestations d’assurance-emploi d’urgence.

[20] Le prestataire n’avait d’autre choix que de recevoir les prestations d’assurance-emploi d’urgence, ce qu’il a reçuNote de bas de page 6. Ainsi, je suis d’avis qu’il n’est pas possible pour le prestataire de modifier le type de prestations d’assurance-emploi qu’il a reçu. La Loi est claire à ce sujet et seules les prestations d’assurance-emploi d’urgence pouvaient être versées au prestataire.

[21] De plus, la prestation d’assurance-emploi d’urgence prenait fin le 3 octobre 2020, comme dans le cas du prestataire. Ainsi, comme la prestation d’assurance-emploi d’urgence du prestataire a pris fin le 3 octobre 2020, une nouvelle demande a été initiée au 4 octobre 2020. Cette demande a pris fin le 2 octobre 2021Note de bas de page 7.

Question en litige no 2 : Le prestataire a-t-il travaillé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi au 4 octobre 2021 ?

[22] Le prestataire indique avoir attendu la fin de ses prestations d’assurance-emploi pour présenter une nouvelle demande de prestations. Il a indiqué avoir voulu faire une demande de prestations en juillet 2021 comme il le fait chaque année. Néanmoins, il a été informé que sa demande n’était pas terminée et qu’il devait attendre en octobre 2021 pour présenter une nouvelle demande, ce qu’il a fait.

[23] Le prestataire a donc présenté une nouvelle demande de prestations le 22 octobre 2021Note de bas de page 8. Cette demande aurait débuté le 4 octobre 2021, mais le prestataire n’avait pas assez d’heures d’emploi assurables pour permettre l’établissement de cette demande.

Comment être admissible aux prestations

[24] Chaque personne qui cesse de travailler ne reçoit pas nécessairement des prestations d’assurance-emploi. Il faut démontrer qu’on y est admissibleNote de bas de page 9. Le prestataire doit le démontrer selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable qu’il est admissible aux prestations.

[25] Pour être admissible, la personne doit avoir travaillé assez d’heures au cours d’une période établie. Cette période s’appelle la « période de référenceNote de bas de page 10 ».

[26] Le nombre d’heures dépend du taux de chômage dans la région de la personneNote de bas de page 11.

La région et le taux régional de chômage du prestataire

[27] Le prestataire qui a eu un arrêt de rémunération et a exercé un emploi assurable pendant au moins quatre cent vingt heures, au cours de sa période de référence, remplit les conditions requises pour établir une demande de prestationsNote de bas de page 12.

La période de référence du prestataire

[28] Comme je l’ai dit plus tôt, les heures prises en compte sont celles travaillées pendant la période de référence du prestataire. En général, la période de référence est la période de 52 semaines qui vient avant le début de la période de prestations d’une personneNote de bas de page 13.

[29] La période de prestations est différente de la période de référence. Il ne s’agit pas du même moment. La période de prestations est la période durant laquelle une personne peut recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[30] La Commission a décidé que la période de référence du prestataire était la période habituelle de 52 semaines. Elle a établi que cette période allait du 3 octobre 2020 au 2 octobre 2021.

Nombre d’heures que le prestataire a travaillé

[31] La Commission a établi que le prestataire avait travaillé 282 heures durant sa période de référence.

[32] Les informations des relevés d’emploi du prestataire démontrent que celui-ci a accumulé 80 heures d’emploi assurables pendant sa période de référence pour l’employeur X. Il a accumulé 201.34 heures d’emploi assurables pour l’employeur X pendant sa période de référence. Il a donc accumulé un total de 282 heures d’emploi assurables pendant sa période de référence.

Alors, le prestataire a-t-il travaillé assez d’heures pour être admissible aux prestations?

[33] J’estime que le prestataire n’a pas démontré qu’il avait travaillé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi. Il avait besoin de 420 heures, mais il a accumulé 282 heures.

Question en litige no 3 : Le fait d’antidater la demande du prestataire en juillet 2021 lui aurait-il permis de recevoir des prestations d’assurance-emploi ?

[34] Néanmoins, je dois prendre en considération la situation particulière du prestataire. Celui-ci est d’avis que sa demande d’assurance-emploi aurait dû prendre fin en juillet 2021 comme chaque année. Il affirme qu’il aurait alors dû pouvoir déposer sa demande d’assurance-emploi en juillet 2021 et établir une demande à partir de cette date.

[35] Le prestataire considère que sa demande du 19 juillet 2020 aurait dû prendre fin comme à l’habitude, après un an, soit au 17 juillet 2020. Il indique qu’il devrait donc débuter sa demande de prestations le 18 juillet 2021 comme à son habitude d’autant qu’il ne souhaitait pas recevoir de prestations d’urgence.

[36]  La Commission est d’avis qu’à cette date le prestataire n’aurait pas eu assez d’heures d’emploi assurables pour établir une nouvelle demande de prestations. La Commission est d’avis que le prestataire aurait accumulé 201.34 heures d’emploi assurables. La Commission prend en considération la période de référence allant du 4 octobre 2020 au 17 juillet 2021Note de bas de page 14.

[37] Le prestataire affirme qu’il aurait dû bénéficier du crédit d’heures supplémentaires accordé par le Gouvernement. Il aurait donc dû établir sa demande de prestations d’assurance-emploi à cette date.

Le prestataire peut-il bénéficier du crédit d’heures d’emploi assurables lors de l’établissement d’une demande de prestations au 18 juillet 2021 ?

[38] Un prestataire qui présente une demande initiale le 27 septembre 2020 ou après cette date et demande des prestations d’assurance-emploi régulières est réputé avoir 300 heures additionnelles d’emploi assurable pendant sa période de référence. S’il demande des prestations spéciales, le prestataire est réputé avoir 480 heures additionnelles d’emploi assurablesNote de bas de page 15.

[39] Néanmoins, cette disposition ne s’applique pas au prestataire dont le nombre d’heures d’emploi assurable exercé au cours de sa période de référence a déjà été majoréNote de bas de page 16.

[40] La Commission est d’avis que le prestataire n’aurait pas bénéficié du crédit d’heures d’emploi assurable puisqu’il a établi une demande de prestations en octobre 2020 et en a bénéficié, même s’il avait suffisamment d’heures pour se qualifier sans le créditNote de bas de page 17.

[41] La Division d’appel du Tribunal s’est penchée sur la question à savoir si un prestataire pouvait choisir le moment où il voulait utiliser ce crédit d’heures additionnelles. La Division d’appel a indiqué :

« que ce texte veut dire que les heures additionnelles s’appliquent à la première demande qui est présentée le 27 septembre 2020 ou après cette date. Elles ne peuvent pas s’appliquer à une demande subséquente à moins qu’aucune période de prestations n’ait été établie.

Le terme « réputé » enlève tout pouvoir discrétionnaire à la Commission. La prestataire est réputée avoir accumulé 300 heures additionnelles d’emploi assurable au cours de la période de référence associée à sa demande de 2020. Par conséquent, aucune heure additionnelle ne pouvait s’appliquer à la période de référence d’une demande subséquente. »Note de bas de page 18

[42] Par conséquent, en suivant les directives de la Division d’appel, je constate que le prestataire a débuté une demande de prestations le 19 juillet 2020. Celle-ci a pris fin le 3 octobre 2020Note de bas de page 19. Puis, une nouvelle demande de prestations a été établie le 4 octobre 2020. Par conséquent, comme la Commission le confirme, le crédit d’heures d’emploi prévu a été appliqué à la période de prestations débutant le 4 octobre 2020.

[43] Ainsi, même si le prestataire avait déposé une nouvelle demande de prestations d’assurance-emploi le 18 juillet 2021, le crédit d’heures d’emploi assurable additionnelles n’aurait pas pu être appliqué puisque le prestataire était réputé avoir eu ce crédit à la première demande déposée après le 27 septembre 2020.

[44] Le prestataire ne pouvait donc pas bénéficier du crédit d’heures additionnelles d’emploi assurable même s’il avait établi une demande de prestations d’assurance-emploi au 18 juillet 2021.

Le prestataire avait-il assez d’heures d’emploi assurables pour établir une demande de prestations en date du 18 juillet 2021 ?

[45] Le taux de chômage pour les périodes de prestations commençant le 27 septembre 2020 et se terminant le 11 septembre 2021 est de 13,1 %, s’il est supérieur au taux qui s’appliquerait autrementNote de bas de page 20.

[46] Ainsi, en date du 18 juillet 2021, le prestataire devrait avoir travaillé au moins 420 heures durant sa période de référence pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi.

La période de référence du prestataire

[47] La Commission a décidé que la période de référence du prestataire était plus courte que la période habituelle de 52 semaines. Il en est ainsi parce qu’une période de prestations précédente avait commencé le 3 octobre 2020.

[48] La période de référence actuelle ne peut jamais empiéter sur une période de référence précédente. C’est ce qui se produirait si le début de la période de référence remontait à avant le 3 octobre 2020.

[49] La Commission a donc décidé que la période de référence du prestataire allait du 4 octobre 2020 au 17 juillet 2021.

Nombre d’heures que le prestataire a travaillé

[50] La Commission a établi que le prestataire avait travaillé 201.34 heures durant sa période de référence.

[51] Les informations des relevés d’emploi du prestataire démontrent que celui-ci a accumulé 0 heure d’emploi assurable pendant sa période de référence pour l’employeur X puisque le travail a été effectué après la période de référence. Il a accumulé 201.34 heures d’emploi assurables pour l’employeur X pendant sa période de référence. Il a donc accumulé un total de 201.34 heures d’emploi assurables pendant sa période de référence.

Alors, le prestataire a-t-il travaillé assez d’heures pour être admissible aux prestations?

[52] J’estime que le prestataire n’a pas démontré qu’il avait travaillé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi. Il avait besoin de 420 heures, mais il a accumulé 201.34 heures.

[53] Je comprends l’incompréhension du prestataire alors qu’il a l’habitude de déposer une nouvelle demande d’assurance-emploi chaque année environ en juillet et qu’il est admissible aux prestations. Malheureusement, je ne peux pas modifier la Loi. L’assurance-emploi est un régime d’assurance et, comme pour tout autre régime d’assurance, il faut satisfaire à des conditions pour pouvoir recevoir des prestations.

[54] Dans la présente affaire, le prestataire ne satisfait pas aux conditions. Il n’est donc pas admissible aux prestations. Même si je suis sensible à la situation du prestataire, je ne peux pas changer la loiNote de bas de page 21.

Conclusion

[55] Je conclus que le prestataire n’a pas travaillé assez d’heures pour être admissible aux prestations.

[56] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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