Assurance-emploi (AE)

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Citation : SP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 256

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : S. P.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (412418) datée du 25 mars 2021 rendue par la Commission de l’assurance emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Normand Morin
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 3 mars 2022
Personne présente à l’audience : L’appelante
Date de la décision : Le 10 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-287

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Je conclus que la décision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) de laisser écouler un délai de carence (période d’attente) d’une semaine, relativement à la période de prestations de l’appelante ayant débuté le 15 novembre 2020, avant de commencer à lui verser des prestations régulières d’assurance-emploi, est justifiéeNote de bas de page 1.

[2] Je souligne que dans son argumentation, la Commission indique qu’il est « toujours possible » de faire débuter la nouvelle période de prestations de l’appelante le 11 octobre 2020Note de bas de page 2, soit le dernier jour de travail effectué par cette dernière avant qu’elle ne présente une demande de prestations le 25 novembre 2020. Je conclus qu’il appartient ainsi à l’appelante d’examiner avec la Commission dans quelle mesure il pourrait être avantageux de faire débuter sa période de prestations à compter du 11 octobre 2020 ou à partir d’une autre date possible dans son cas, de manière à ne pas avoir à écouler un délai de carence.

Aperçu

[3] Du 10 juin 2020 au 11 octobre 2020 inclusivement, l’appelante travaille comme cuisinière pour l’employeur X, et cesse de travailler pour lui en raison d’un manque de travail.

[4] Le 25 novembre 2020, elle présente une demande de prestations régulières d’assurance-emploiNote de bas de page 3.

[5] Une période de prestations est établie à compter du 15 novembre 2020Note de bas de page 4.

[6] Le 7 décembre 2020, après avoir finalisé le traitement de la demande de prestations de l’appelante, la Commission lui verse des prestations représentant deux semaines de prestations pour la période de trois semaines échelonnée du 15 novembre 2020 au 5 décembre 2020 inclusivement. Je considère qu’en fonction des explications de la Commission sur ce point, à la suite d’une demande du Tribunal, la décision qu’elle a rendue en date du 7 décembre 2020 en finalisant la demande de prestations de l’appelante, tient lieu de décision initiale, même si aucun avis écrit n’a été envoyé à cette dernièreNote de bas de page 5.

[7] Le 25 mars 2021, à la suite d’une demande de révision, la Commission informe l’appelante qu’elle maintient la décision rendue à son endroit, en date du 7 décembre 2020, concernant l’écoulement de son délai de carenceNote de bas de page 6.

[8] L’appelante explique avoir cessé de travailler le 11 octobre 2020 en raison de la pandémie de COVID-19Note de bas de page 7. Elle indique être en désaccord avec le fait qu’un délai de carence (période d’attente) d’une semaine se soit écoulé, soit du 15 au 21 novembre 2020, avant que des prestations ne lui soient versées. L’appelante affirme que la Commission lui a indiqué qu’elle n’aurait pas à écouler ce délai avant de recevoir des prestations. Elle soutient avoir été pénalisée par le fait qu’elle ait eu à écouler ce délai. Le 21 janvier 2022, l’appelante conteste auprès du Tribunal la décision en révision de la Commission. Cette décision fait l’objet du présent recours devant le Tribunal.

Question en litige

[9] Je dois déterminer si la décision de la Commission de laisser écouler un délai de carence (période d’attente) d’une semaine, relativement à la période de prestations de l’appelante ayant débuté le 15 novembre 2020, avant de commencer à lui verser des prestations régulières d’assurance-emploi est justifiéeNote de bas de page 8.

Analyse

[10] Selon la règle générale, un prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi, à la suite de l’établissement d’une période de prestations à son profit, tant qu’il ne s’est pas écoulé un délai de carence (période d’attente) d’une semaine de chômage pour laquelle des prestations devraient sans cela être verséesNote de bas de page 9.

[11] À la suite de modifications apportées à la Loi, des mesures temporaires ont été mises en place pour faciliter l’accès aux prestationsNote de bas de page 10.

[12] Ces mesures prévoient entre autres qu’un prestataire n’a pas à écouler son délai de carence si la demande de prestations est présentée pour des prestations versées au titre des parties I, VII.1 ou VIII de la Loi et que la période de prestations débute au plus tard le 25 octobre 2020Note de bas de page 11.

[13] Un article du Règlement a également été modifié faisant en sorte que la Commission peut supprimer le délai de carence pour toute période de prestations qui commence au plus tôt à la date d’entrée en vigueur de cet article, mais au plus tard le 25 septembre 2021Note de bas de page 12. Cet article a été en vigueur du 31 janvier 2021 au 25 septembre 2021 inclusivementNote de bas de page 13.

[14] Dans le présent dossier, j’estime qu’en fonction de l’établissement de la période de prestations de l’appelante au 15 novembre 2020, un délai de carence d’une semaine doit s’écouler avant que des prestations ne soient versées à cette dernièreNote de bas de page 14.

[15] L’appelante soutient qu’elle ne devrait pas avoir à laisser écouler un délai de carence d’une semaine suivant la demande de prestations qu’elle a présentée le 25 novembre 2020. Son témoignage et ses déclarations indiquent les éléments suivants :

  1. a) Son dernier jour de travail avant de présenter sa demande de prestations le 25 novembre 2020, fut le 11 octobre 2020 lorsqu’elle a effectué une période d’emploi chez XNote de bas de page 15. Elle a également travaillé comme serveuse dans un comptoir de restauration pour un autre employeur et a cessé de travailler pour lui le 13 mars 2020. Elle a perdu chacun de ces deux emplois en raison de la pandémie de COVID-19Note de bas de page 16 ;
  2. b) Elle a reçu des prestations pendant une courte période, soit pendant environ deux mois après avoir présenté sa demande de prestations le 25 novembre 2020. Elle a recommencé à travailler vers le mois de janvier 2021 ;
  3. c) Lorsqu’elle a présenté sa demande de prestations, la Commission lui a indiqué qu’elle n’aurait pas à laisser écouler un délai de carence suivant la présentation de sa demandeNote de bas de page 17 ;
  4. d) Après avoir constaté dans son dossier d’assurance-emploi (Mon dossier Service Canada) qu’elle n’avait pas reçu de prestations pour une semaine après le début de sa période de prestations le 15 novembre 2020, elle a de nouveau communiqué avec la Commission ;
  5. e) La Commission lui a dit qu’elle récupérerait la somme d’argent représentant une semaine de prestations et correspondant à la durée de son délai de carence, mais elle ne l’a pas reçueNote de bas de page 18 ;
  6. f) La Commission ne lui a pas dit que c’était possible qu’une nouvelle période de prestations soit établie à son profit à compter du 11 octobre 2020. La Commission lui a indiqué qu’elle pouvait présenter un avis d’appel devant le Tribunal ;
  7. g) Elle fait valoir qu’elle a le droit de recevoir des prestations pour la semaine où elle a dû écouler un délai de carence. Elle ne veut que récupérer le montant en prestations correspondant à la semaine où elle a dû écouler ce délai ;
  8. h) Elle soutient avoir été pénalisée, étant donné qu’elle a dû écouler un tel délai avant que des prestations ne lui soient versées. Il y a une injustice dans la Loi selon elleNote de bas de page 19.

[16] De son côté, la Commission présente les arguments suivants :

  1. a) Un prestataire dont la date de début de période de prestations se situe entre le 27 septembre 2020 et le 25 octobre 2020 ou entre le 31 janvier 2021 et le 19 septembre 2021 est admissible à la suppression du délai de carence, et ce, peu importe le genre de prestations demandéNote de bas de page 20 ;
  2. b) L’appelante avait une demande de prestations ayant débuté le 15 décembre 2019. Elle a reçu des paiements jusqu’au 14 novembre 2020 pour celle-ci. Elle a rempli ses déclarations en continu, chaque période de deux semaines, durant toute sa période de prestations. Lors de sa fin d’emploi du 11 octobre 2020, elle a continué de remplir ses déclarations pour les semaines du 11 octobre 2020 au 21 novembre 2020. Sa dernière déclaration couvrant les deux semaines du 8 novembre 2020 au 21 novembre 2020 a été faite le 23 novembre 2020. Les paiements ont été émis jusqu’au 14 novembre 2020 puisque l’appelante avait reçu des prestations régulières pour les 26 semaines payables auxquelles elle avait droitNote de bas de page 21 ;
  3. c) Lorsque l’appelante a présenté sa demande de prestations, elle a indiqué une fin d’emploi au 11 octobre 2020. Une demande débutant le 11 octobre 2020 aurait donc été admissible à la suppression du délai de carence, ce qui pourrait expliquer l’information qui lui a été donnée par un des agents de la Commission voulant qu’elle n’aurait pas de délai de carence à écoulerNote de bas de page 22 ;
  4. d) Rien dans la Loi ou le Règlement ne permet de supprimer le délai de carence que doit laisser écouler l’appelante pour sa demande de prestations présentée le 25 novembre 2020Note de bas de page 23 ;
  5. e) Il serait toujours possible de faire débuter la nouvelle période de prestations le 11 octobre 2020 en terminant l’ancienne demande au 10 octobre 2020. Cela implique d’annuler les paiements émis pour les cinq semaines du 11 octobre 2020 au 14 novembre 2020. Le trop-payé devra être récupéré sur la demande subséquenteNote de bas de page 24.

[17] Je considère que suivant l’établissement par la Commission d’une nouvelle période de prestations à compter du 15 novembre 2020, l’appelante ne peut se prévaloir des dispositions prévues à la Loi ou au Règlement selon lesquelles elle n’a pas à laisser écouler un délai de carence d’une semaine avant de pouvoir recevoir des prestations.

[18] En effet, seules les périodes de prestations débutant au plus tard le 25 octobre 2020 peuvent faire en sorte qu’un prestataire n’ait pas à laisser écouler un délai de carence d’une semaine avant de pouvoir toucher des prestationsNote de bas de page 25.

[19] De la même manière, seules les périodes de prestations dont la date de début se situe au cours de la période du 31 janvier 2021 au 25 septembre 2021 inclusivement peuvent permettre à un prestataire de voir son délai de carence supprimé par la CommissionNote de bas de page 26.

[20] La période de prestations de l’appelante ne correspond à aucune de ces deux situations puisque cette période a été établie à compter du 15 novembre 2020.

[21] Toutefois, dans son argumentation, la Commission explique qu’il est « toujours possible » de faire débuter la nouvelle période de prestations de l’appelante le 11 octobre 2020 en terminant son ancienne demande au 10 octobre 2020Note de bas de page 27.

[22] La Commission précise que cette modification impliquerait d’annuler les paiements émis à l’appelante pour les cinq semaines de la période du 11 octobre 2020 au 14 novembre 2020 et que le trop-payé en prestations qui en découlerait devrait être récupéré sa demande de prestations subséquenteNote de bas de page 28.

[23] Je considère que dans l’hypothèse où la période de prestations de l’appelante serait établie à compter du 11 octobre 2020, ou à une autre date possible, située au plus tard le 25 octobre 2020, cette dernière n’aurait pas à laisser écouler un délai de carence d’une semaine, conformément à la LoiNote de bas de page 29.

[24] Dans ce contexte, j’estime qu’il appartient à l’appelante d’examiner avec la Commission dans quelle mesure le fait d’établir sa période de prestations à compter du 11 octobre 2020 ou au plus tard le 25 octobre 2020, pourrait être avantageux dans son cas.

[25] Je suis d’avis que cet examen doit tenir compte du fait que l’appelante n’a reçu des prestations que pendant une période d’environ deux mois suivant la présentation de sa demande de prestations le 25 novembre 2020, comme elle l’affirme, avant qu’elle ne recommence à travailler. Un tel examen doit également prendre en compte la différence entre le taux de prestations hebdomadaires établi à partir de la période de prestations de l’appelante ayant débuté en décembre 2019 et le taux de prestations hebdomadaires applicable en fonction d’une période de prestations établie à compter du 11 octobre 2020 ou au plus tard le 25 octobre 2020.

[26] En résumé, j’estime que l’appelante ne peut être exemptée de devoir laisser écouler un délai de carence d’une semaine pour sa demande de prestations ayant débuté à compter du 15 novembre 2020Note de bas de page 30. Il lui est toutefois « toujours possible », selon la Commission, de faire débuter cette période de prestations à partir du 11 octobre 2020Note de bas de page 31.

Conclusion

[27] Je conclus que la décision de la Commission de laisser écouler un délai de carence d’une semaine, relativement à la période de prestations de l’appelante ayant débuté le 15 novembre 2020, avant de commencer à lui verser des prestations régulières d’assurance-emploi est justifiée.

[28] Par conséquent, l’appel est rejeté.

[29] Toutefois, puisqu’il est toujours possible pour l’appelante de faire débuter sa période de prestations à partir du 11 octobre 2020, il appartient à cette dernière d’examiner avec la Commission en quoi une modification de cette nature pourrait lui être avantageuse.

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