Assurance-emploi (AE)

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Citation : AC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 266

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. C.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (445248) datée du 20 décembre 2021 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Normand Morin
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 10 février 2022
Personne présente à l’audience : L’appelante
Date de la décision : Le 4 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-193

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Je conclus que l’inadmissibilité au bénéfice des prestations d’assurance-emploi imposée à l’appelante à compter du 16 août 2021, parce qu’elle n’a pas démontré qu’elle était en chômage, est justifiéeNote de bas de page 1. L’appelante ne remplit donc pas les conditions requises pour recevoir des prestations d’assurance-emploi à compter de cette date.

Aperçu

[2] Du 19 mars 2019 au 14 août 2021, l’appelante a travaillé comme « aide à domicile » pour l’employeur L. R. (l’employeur)Note de bas de page 2. 

[3] Le 26 septembre 2021, elle présente une demande initiale de prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 3. Elle déclare avoir cessé de travailler en raison d’un « accord de travail partagé »Note de bas de page 4. Elle indique que son retour au travail était prévu le 22 août 2021Note de bas de page 5. Une période de prestations a été établie à compter du 15 août 2021Note de bas de page 6.

[4] Le 18 novembre 2021, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) rend une décision apparaissant dans le dossier d’assurance-emploi de l’appelante (Mon dossier Service Canada) selon laquelle des prestations d’assurance-emploi ne peuvent pas lui être versées à partir du 16 août 2021Note de bas de page 7. Dans cette décision, la Commission indique qu’elle considère que soit l’appelante est un « travailleur autonome » (travailleuse autonome) ou qu’elle travaille des semaines entières, ou encore, qu’elle continue de recevoir son salaire pendant qu’elle est en congéNote de bas de page 8.

[5] Le 2 décembre 2021, après avoir en consulté son dossier d’assurance-emploi sur le site Internet de la Commission (Mon dossier Service Canada) et après avoir constaté que celle-ci avait rendu une décision à son endroit, en date du 18 novembre 2021, l’appelante présente une demande de révision de cette décisionNote de bas de page 9.

[6] Le 20 décembre 2021, la Commission l’informe, par écrit, qu’elle ne peut pas lui verser de prestations d’assurance-emploi à partir du 16 août 2021 parce qu’elle considère qu’elle travaillait des semaines entièresNote de bas de page 10.

[7] Le 20 décembre 2021, à la suite d’une demande de révision, la Commission l’avise qu’elle maintient la décision rendue à son endroit, le 18 novembre 2021 (décision apparaissant dans le dossier d’assurance-emploi de l’appelante), concernant la semaine de chômage (état de chômage). Elle lui précise que compte tenu de son régime de travail, elle est considérée comme effectuant une semaine entière de travail pendant sa période de congéNote de bas de page 11.

[8] L’appelante explique que depuis 2019, elle travaille une semaine entière sur deux. Elle déclare être prête, capable et disposée à travailler durant les semaines où elle ne travaille pas. L’appelante indique faire des recherches d’emploi. Elle soutient qu’elle devrait avoir le droit de recevoir des prestations. Le 13 janvier 2022, l’appelante conteste auprès du Tribunal la décision en révision de la Commission. Cette décision fait l’objet du présent recours devant le Tribunal.

Questions en litige

[9] Je dois déterminer si l’imposition à l’appelante d’une inadmissibilité au bénéfice des prestations d’assurance-emploi, parce qu’elle n’a pas démontré qu’elle était en chômage, est justifiéeNote de bas de page 12. Pour cela, je dois répondre aux questions suivantes :

  • Est-ce que l’appelante travaille plus d’heures que le nombre d’heures habituellement travaillées au cours d’une semaine par des employés à temps plein, et a-t-elle droit à une période de congé aux termes de son contrat de travail?

Analyse

[10] Pour l’établissement d’une « période de prestations », la Loi prévoit qu’une personne peut recevoir des prestations d’assurance‑emploi pour chaque semaine où elle est au chômageNote de bas de page 13.

[11] Une « semaine de chômage », pour un prestataire, correspond à « une semaine pendant laquelle il n’effectue pas une semaine entière de travail »Note de bas de page 14.

[12] Lorsqu’une qu’une personne travaille habituellement plus d’heures, de jours ou de périodes de travail que n’en travaillent habituellement des employés à temps plein au cours d’une semaine, et qu’elle a droit, aux termes de son contrat de travail, à une période de congé, elle est réputée avoir travaillé une semaine entière au cours de chaque semaine comprise, complètement ou partiellement, dans cette dernière périodeNote de bas de page 15.

Est-ce que l’appelante travaille plus d’heures que le nombre d’heures habituellement travaillées au cours d’une semaine par des employés à temps plein, et a-t-elle droit à une période de congé aux termes de son contrat de travail?

[13] J’estime que dans le cadre de son emploi, l’appelante travaille régulièrement un nombre d’heures plus élevé qu’un employé à temps plein, au cours d’une semaine. Aux termes de son contrat de travail, l’appelante a également droit à une période planifiée de congé.

[14] Je considère que les semaines au cours desquelles l’appelante ne travaille pas pour l’employeur ne représentent pas des semaines de chômage.

[15] Le témoignage et les déclarations de l’appelante indiquent les éléments suivants :

  1. a) Depuis son embauche en mars 2019, l’appelante travaille une semaine entière sur deux comme « aide à domicile » auprès d’une personne vivant avec un handicap. Elle travaille du dimanche au samedi inclusivement, comme l’indiquent son horaire de travail et le calendrier de ses semaines de travailNote de bas de page 16 ;
  2. b) Au début de son emploi, elle effectuait 40-45 heures par semaine. Depuis l’année 2020 environ, elle travaille 90-92 heures par semaine, soit environ 13 heures par jour. Durant les semaines où elle ne travaille pas, une autre employée la remplace. Pendant les semaines où elle travaille, l’autre employée est en congéNote de bas de page 17 ;
  3. c) Cet arrangement avec l’employeur existe depuis le début de son emploi. Elle a accepté les conditions d’emploi offertes par l’employeur, dont celles prévoyant qu’elle allait travailler sept jours par semaine suivie de sept jours de congé, en alternance. Il n’y a pas eu d’interruption de son lien d’emploi. Elle travaille toujours pour l’employeur selon les conditions établies ;
  4. d) Elle déclare ne recevoir aucun salaire lorsqu’elle est en congé, comme ses relevés de paie le démontrentNote de bas de page 18 ;
  5. e) Sa situation d’emploi ne correspond pas à celle d’un « travailleur autonome », comme l’a indiqué la Commission dans sa décision rendue le 18 novembre 2021Note de bas de page 19 ;
  6. f) L’appelante déclare être disponible à travailler. Elle se dit prête, capable et disposée à le faire durant les semaines où elle ne travaille pas chez l’employeur. Elle affirme être toujours en recherche d’emploiNote de bas de page 20 ;
  7. g) Elle explique avoir présenté une demande de prestations après avoir accumulé suffisamment d’heures assurables pour être en mesure de recevoir des prestations. Dans sa demande, elle a déclaré avoir cessé de travailler en raison d’un « accord de travail partagé »Note de bas de page 21. Elle a aussi indiqué dans cette demande qu’elle ne faisait pas partie d’un groupe d’employés participant à un programme de travail partagé et n’avait pas reçu de code de référence à cet effetNote de bas de page 22 ;
  8. h) Elle soutient avoir le droit de recevoir des prestations. Elle mentionne en avoir déjà reçu dans le passé pour les semaines où elle était en congéNote de bas de page 23.

[16] Dans le cas présent, je considère que dans le cadre de son travail d’aide à domicile, l’appelante était en accord avec les conditions d’emploi qui y étaient rattachées.

[17] Ces conditions prévoyaient entre autres qu’elle allait travailler selon un horaire établi afin d’accomplir, en alternance, une semaine de travail de sept jours et qu’elle allait ensuite bénéficier d’une semaine de congé avant de reprendre son travail la semaine suivante. L’appelante a accepté les conditions de l’employeur à cet effet. Elle travaille toujours pour l’employeur selon ces conditions.

[18] Le témoignage de l’appelante et les éléments de preuve au dossier démontrent qu’elle travaille un nombre d’heures plus élevé qu’une personne qui travaille à temps plein dans une semaine, car depuis 2020 environ, elle effectue sept jours de travail et accomplit 90-92 heures de travail sur une base hebdomadaire. L’appelante travaille ainsi plus d’heures, de jours ou de périodes que ne travaillent habituellement au cours d’une semaine, des personnes employées à temps plein, comme l’indique la LoiNote de bas de page 24.

[19] Aux termes de son contrat de travail, l’appelante a également droit à une période planifiée de congé. Les semaines durant lesquelles elle ne travaille pas ne sont pas des semaines où elle est en chômage puisqu’il s’agit de semaines de congé prévues à son entente de travail. Cette période planifiée de congé doit être considérée comme une semaine entière de travail selon la LoiNote de bas de page 25.

[20] J’estime que pendant les semaines de congé de l’appelante, il n’y a pas de rupture du lien d’emploi avec son employeur. Lors de l’audience, l’appelante précise qu’il n’y a pas eu d’interruption de son lien d’emploi.

[21] La Cour d’appel fédérale (la Cour) nous informe qu’un prestataire ayant un horaire prévoyant des périodes de travail puis de congé est réputé être en emploi pendant les périodes de congé qui s’inscrivent dans cet horaireNote de bas de page 26.

[22] Bien que l’appelante fasse valoir qu’au cours des semaines où elle ne travaille pas, elle est disponible pour le faire et qu’elle effectue des recherches d’emploi, cette situation ne change rien au fait qu’elle a d’abord accepté les conditions de travail de son employeur prévoyant qu’elle allait travailler, en alternance, une semaine, et ensuite bénéficier d’une semaine de congé.

[23] Je retiens également que l’appelante n’a pas conclu d’accord de travail partagé avec l’employeur et la Commission.

[24] Même si l’appelante réfère à l’existence d’un tel accord de travail, elle indique aussi qu’elle n’a pas obtenu de code de référence pour en démontrer l’existence.

[25] Sur ce point, je souligne que dans son argumentation, la Commission explique que bien que l’appelante ait déclaré qu’elle avait un accord de travail partagé et que l’employeur ait inscrit ce motif sur le relevé d’emploi, il ne s’agit pas d’un cas de travail partagéNote de bas de page 27. La Commission précise que le travail partagé doit faire l’objet d’un accord entre elle, l’employeur et les employés concernésNote de bas de page 28. Elle spécifie que lorsqu’un employeur présente une demande pour un accord de travail partagé, certaines conditions s’appliquent afin qu’il soit approuvéNote de bas de page 29. La Commission souligne que dans le cas présent, il n’y a aucune preuve au dossier indiquant qu’un tel accord a été concluNote de bas de page 30.

[26] En résumé, je considère que la situation d’emploi de l’appelante relève de l’exception prévue à la Loi selon laquelle durant ses semaines de congé, elle est considérée avoir travaillé des semaines entières de travailNote de bas de page 31.

[27] L’appelante ne peut donc être considérée comme étant au chômage durant ces semainesNote de bas de page 32.

[28] Son admissibilité au bénéfice des prestations ne peut être établie à compter du 16 août 2021Note de bas de page 33.

Conclusion

[29] Je conclus que l’inadmissibilité aux prestations d’assurance-emploi imposée à l’appelante à compter du 16 août 2021, parce qu’elle ne démontre pas qu’elle est en chômage, est justifiée.

[30] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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