Assurance-emploi (AE)

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Citation : FM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 406

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : F. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (439992) datée du 26 novembre 2021 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Manon Sauvé
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 27 janvier 2022
Personne présente à l’audience : L’appelant
Date de la décision : Le 1er février 2022
Numéro de dossier : GE-21-2518

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le prestataire n’a pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pendant sa période de référence.

[2] De plus, le prestataire n’a pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant le retard de sa demande initiale de prestationsNote de bas de page 1. Un motif valable est une raison acceptable selon la loi pour expliquer le retard. Par conséquent, sa demande initiale ne peut être traitée comme si elle avait été présentée plus tôt.

Aperçu

[3] Le prestataire travaille depuis plus de 30 ans pour son employeur. Son poste de travail est aboli en décembre 2019. Il reçoit une indemnité de départ de 109 844 $ qui correspond à 23 mois de salaire à partir du mois de janvier 2020.

[4] Le 17 août 2021, le prestataire demande des prestations d’assurance-emploi. Il demande également que la demande initiale soit traitée comme si elle avait été présentée plus tôt, soit le 5 janvier 2020.

[5] La Commission rend deux décisions concernant sa demande. Dans un premier temps, la Commission détermine que le prestataire n’a pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pendant sa période de référence du 16 août 2020 au 14 août 2021. Il devait avoir accumulé 420 heures d’emploi assurable pendant cette période. Il n’a pas accumulé d’heures, puisqu’il n’a pas travaillé.

[6] Dans un deuxième temps, la Commission refuse de traiter la demande initiale comme si elle avait été présentée le 5 janvier 2020. Selon la Commission, il n’a pas démontré qu’il avait un motif valable pour justifier son retard entre le 5 janvier 2020 et le 17 août 2021.

[7] Le prestataire n’est pas d’accord avec les décisions de la Commission. Il a contribué toute sa vie au régime de l’assurance-emploi. Il ne savait qu’il pouvait présenter une demande pour recevoir des prestations d’assurance-emploi. De plus, il recevait une indemnité de son employeur, il aurait commis une fraude en présentant une demande.

Questions en litige

  1. 1. Le prestataire a-t-il travaillé assez d’heures pendant la période de référence pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi ?
  2. 2. La demande initiale de prestations du prestataire peut‑elle être traitée comme si elle avait été présentée le 5 janvier 2020 ? C’est ce qu’on appelle « antidater » la demande initiale.

Analyse

1. Le prestataire a-t-il travaillé assez d’heures pendant la période de référence pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi ?

[8] Chaque personne qui cesse de travailler ne reçoit pas nécessairement des prestations d’assurance-emploi. Il faut démontrer qu’on y est admissibleNote de bas de page 2. Le prestataire doit le démontrer selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable qu’il est admissible aux prestations.

[9] Pour être admissible, la personne doit avoir travaillé assez d’heures au cours d’une période établie. Cette période s’appelle la « période de référenceNote de bas de page 3 ».

[10] Le nombre d’heures dépend du taux de chômage dans la région de la personneNote de bas de page 4.

[11] La Commission a établi que la région du prestataire était Montréal et les environs, et que le taux régional de chômage au moment visé était de 13,1 %.

[12] Cela signifie que le prestataire devrait avoir travaillé au moins 420 heures durant sa période de référence pour être admissible aux prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 5.

[13] Comme je l’ai dit plus tôt, les heures prises en compte sont celles travaillées pendant la période de référence du prestataire. En général, la période de référence est la période de 52 semaines qui vient avant le début de la période de prestations d’une personneNote de bas de page 6.

[14] Dans le cas du prestataire, la période de référence commence le 16 août 2020 et se termine le 14 août 2021. Pendant cette période, le prestataire doit avoir accumulé 420 heures d’emploi assurable.  

[15] Je retiens de la preuve au dossier et de son témoignage que le prestataire n’a pas travaillé pendant cette période. Il n’a donc pas accumulé des heures d’emploi assurable.

[16] J’estime que le prestataire n’a pas démontré qu’il avait travaillé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi. Il avait besoin de 420 heures, mais il n’a pas accumulé des heures pendant cette période.

[17] L’assurance-emploi est un régime d’assurance et, comme pour tout autre régime d’assurance, il faut satisfaire à des conditions pour pouvoir recevoir des prestations.

[18] Dans la présente affaire, le prestataire ne satisfait pas aux conditions. Il n’est donc pas admissible aux prestations. Même si je suis sensible à la situation du prestataire, je ne peux pas changer la loiNote de bas de page 7.

2. La demande initiale de prestations du prestataire peut-elle être traitée comme si elle avait été présentée le 5 janvier 2020 ? C’est ce qu’on appelle « antidater » la demande initiale.

[19] Pour que sa demande initiale de prestations soit antidatée, une personne doit prouver les deux choses suivantesNote de bas de page 8 :

  1. a) qu’elle avait un motif valable justifiant son retard durant toute la période écoulée. Autrement dit, qu’elle avait une explication acceptable selon la loi ;
  2. b) qu’à la date antérieure (c’est-à-dire la date à laquelle elle veut que sa demande initiale soit antidatée), elle remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations.

[20] Les arguments principaux dans cette affaire servent à décider si le prestataire avait un motif valable. C’est donc par cela que je commencerai.

[21] Pour démontrer qu’il avait un motif valable, le prestataire doit prouver qu’il a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblablesNote de bas de page 9. Autrement dit, il doit démontrer qu’il a agi comme une personne raisonnable et réfléchie aurait agi dans une situation semblable.

[22] Le prestataire doit le prouver pour toute la période du retardNote de bas de page 10. Cette période s’étend du jour où il veut que sa demande initiale soit antidatée au jour où il a présenté cette demande. Par conséquent, la période de retard du prestataire est du 5 janvier 2020 au 17 août 2021.

[23] Le prestataire doit aussi démontrer qu’il a vérifié assez rapidement s’il avait droit à des prestations et quelles obligations la loi lui imposaitNote de bas de page 11. Cela veut dire que le prestataire doit démontrer qu’il a fait de son mieux pour essayer de s’informer sur ses droits et ses responsabilités dès que possible. Si le prestataire ne l’a pas fait, il doit alors démontrer les circonstances exceptionnelles qui l’en ont empêchéNote de bas de page 12.

[24] Le prestataire doit le démontrer selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable qu’il avait un motif valable justifiant son retard.

[25] Selon la Commission, le prestataire n’a pas de motif valable pour justifier son retard. L’ignorance de la Loi même s’il est de bonne foiNote de bas de page 13 n’est pas un motif valable. En fait, il devait s’informer le plus rapidement possible à la Commission pour connaitre ses droits et ses obligations.

[26] Le prestataire affirme qu’il avait un motif valable justifiant son retard. En effet, il recevait une indemnité de départ pendant cette période. Il ne pouvait donc pas recevoir des prestations d’assurance-emploi pendant que son ancien employeur lui versait un salaire pendant 23 mois.

[27] Le prestataire soutient qu’il ne voulait pas commettre une fraude auprès de la Commission de l’assurance-emploi. Il a décidé de présenter sa demande au mois d’août 2021, parce qu’il sait que les délais de traitement d’une demande d’assurance-emploi peuvent être longs.

[28] Je suis d’avis que cela ne constitue pas un motif valable pour justifier son retard. Une personne raisonnable et prudente vérifie assez rapidement auprès de la Commission pour connaitre ses droits et ses obligationsNote de bas de page 14. Il ne pouvait pas présumer que sa demande serait frauduleuseNote de bas de page 15.

[29] Il n’a pas présenté sa demande, parce qu’il recevait une indemnité de son employeur. Dans une cause similaire, la CourNote de bas de page 16 a décidé que le fait de recevoir des indemnités de départ n’empêchait pas de présenter une demande de prestations d’assurance-emploi.

[30] Par ailleurs, le fait qu’il ignorait qu’il pouvait être admissible à des prestations d’assurance n’est pas un motif valable pour justifier son retardNote de bas de page 17.

[31] J’estime que le prestataire n’a pas prouvé qu’il avait un motif valable justifiant son retard à demander des prestations pour toute la période entre le 5 janvier 2020 et le 17 août 2021.

[32] Je suis également d’avis qu’il n’a pas démontré une situation exceptionnelle expliquant pourquoi il n’a pas agi comme une personne raisonnable et prudente dans les mêmes circonstances.

[33] Je n’ai pas besoin d’examiner si le prestataire remplissait les conditions requises, à la date antérieure, pour recevoir des prestations. S’il n’a pas de motif valable, sa demande initiale ne peut pas être traitée comme si elle avait été présentée plus tôt.

Conclusion

[34] Je conclus que le prestataire n’a pas accumulé d’heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations.

[35] Je conclus également que le prestataire n’a pas prouvé qu’il avait un motif valable justifiant le retard de sa demande initiale de prestations pendant toute la période écoulée.

[36] L’appel est rejeté.

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