Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

Le prestataire fait appel de la décision de la division générale (DG). Celle-ci a rejeté sommairement son appel après avoir conclu qu’il n’avait aucune chance raisonnable de succès. Elle a conclu que le prestataire ne remplissait pas les critères d’admissibilité aux prestations d’assurance-emploi (AE). Plus précisément, elle a conclu qu’il n’avait pas le nombre minimal d’heures d’emploi assurable qui est requis pour recevoir des prestations.

Devant la division d’appel (DA), le prestataire a soutenu que la DGavait enfreint les principes de justice naturelle. Il a affirmé qu’elle ne lui avait pas donné une occasion équitable de présenter ses arguments. Le prestataire a reçu une lettre datée du 28 janvier 2022 de la part du Tribunal. Le membre de la DG y précisait qu’il envisageait le rejet sommaire de l’appel pour les motifs énoncés dans la lettre. Le prestataire a compris qu’il avait jusqu’au 28 février 2022 pour déposer des observations. Le jour même, le prestataire a écrit au Tribunal pour demander la divulgation des documents de la Commission. Il n’a reçu aucune réponse du Tribunal. La DG a rendu sa décision le 8 février 2022. Elle a rejeté l’appel. Elle a conclu que le prestataire n’avait fourni aucun renseignement ou argument plausible qui l’aurait raisonnablement amenée à conclure qu’il avait accumulé assez d’heures d’emploi assurable pour avoir droit aux prestations.

L’article 22(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale exige que la DG avise l’appelant par écrit et lui donne un délai raisonnable pour présenter des observations avant de rejeter un appel de façon sommaire. Dans la présente affaire, la DG a reconnu qu’elle devait accorder à l’appelant un délai raisonnable pour présenter des observations. Elle lui a donné jusqu’au 28 février 2022. Elle a toutefois rendu sa décision 20 jours avant le délai qu’elle avait elle-même fixé, et ce, malgré le fait que le prestataire avait dit qu’il déposerait des observations détaillées. De toute évidence, la DG n’a pas donné au prestataire une occasion équitable de présenter ses arguments.

La DA a accueilli l’appel et renvoyé l’affaire à la DG pour réexamen par un autre membre. Le prestataire devrait avoir la possibilité de présenter ses arguments et de déposer des éléments de preuve pour appuyer sa demande.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : WC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 397

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Parties appelante : W. C.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Isabelle Thiffault

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 8 février 2022 (GE-21-2435)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Sur la foi du dossier
Date de la décision : Le 16 mai 2022
Numéro de dossier : AD-22-178

Sur cette page

Décision

[1] J’accueille l’appel et je renvoie l’affaire à la division générale pour un réexamen.

Aperçu

[2] L’appelant, W. C. (prestataire), porte la décision de la division générale en appel. La division générale a rejeté sommairement l’appel du prestataire parce qu’elle a conclu qu’il n’avait aucune chance raisonnable de succès. La division générale a conclu que le prestataire ne répondait pas aux critères d’admissibilité aux prestations d’assurance-emploi. Plus particulièrement, elle a conclu qu’il n’avait pas le nombre minimal d’heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations.

[3] Le prestataire soutient que la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle. Il soutient aussi que la division générale a commis des erreurs de droit et de fait. Il soutient que la division générale devrait annuler sa décision et accueillir son appel.

[4] L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, soutient que le rejet de l’appel du prestataire est « inévitable », peu importe la preuve ou les arguments présentés. La Commission soutient que la division générale n’a pas commis d’erreur en rejetant sommairement l’appel. La Commission demande à la division d’appel de rejeter l’appel.

Questions préliminaires

[5] Le prestataire soutient que la Commission a présenté ses observations en retard à la division d’appel. En plus, le prestataire reproche à la Commission d’avoir induit la division d’appel en erreur avec ses observations. En conséquence, il soutient que la division d’appel ne devrait pas accepter les observations de la Commission.

[6] Le 31 mars 2022, le Tribunal de la sécurité sociale a envoyé une lettre aux parties par courriel confirmant que le prestataire a interjeté appel à la division d’appel. Le Tribunal a informé les parties qu’elles avaient jusqu’au 23 avril 2022 pour déposer des arguments écrits. La Commission a déposé ses observations après cette date, le 28 avril 2022.

[7] Le 2 mai 2022, le prestataire a dit qu’il s’opposait au dépôt tardif des observations de la Commission. Selon lui, la Commission aurait dû demander la permission de déposer ses observations.

[8] La Commission a souligné que même si le prestataire a interjeté appel à la division d’appel le 8 mars 2022, elle n’a pas reçu l’avis d’appel avant le 31 mars 2022. Selon le calcul de la Commission fondé sur ses propres directives, elle avait jusqu’au 15 mai 2022 pour déposer ses observationsNote de bas page 1.

[9] Le prestataire fait référence à l’article 36 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. Cet article indique que les parties ont le droit de déposer des observations auprès de la division d’appel « dans les quarante-cinq jours suivant la date du dépôt de l’appel ». Le prestataire souligne que les quarante-cinq jours débutent à partir de la date à laquelle l’appel est interjeté et non la date à laquelle une partie reçoit l’avis d’appel. Il soutient que la date à laquelle la Commission a reçu une copie de son avis d’appel n’est pas pertinente. Il soutient que l’article indique clairement que les observations doivent être déposées dans les quarante-cinq jours suivant la date du dépôt de l’appel.

[10] Le prestataire soutient que la Commission aurait dû se conformer strictement au délai de quarante-cinq jours fixé dans le Règlement. Selon lui, la date à laquelle la Commission a reçu une copie de son avis d’appel n’est pas importante.

[11] Je dois tenir compte de l’intérêt de la justice. La Commission affirme essentiellement qu’elle a déposé ses observations en retard parce qu’elle a seulement reçu l’accusé de réception plus de trois semaines après que l’appelant a interjeté appel.

[12] Cependant, la Commission disposait tout de même de trois semaines pour déposer des observations, sinon elle aurait pu demander une prorogation du délai.

[13] Malgré cela, je vais accepter les observations de la Commission. Le retard n’est pas excessif et la Commission a une excuse raisonnable pour l’expliquer. Surtout, il est dans l’intérêt de la justice d’avoir les observations des deux parties.

Questions en litige

[14] Le prestataire a soulevé de nombreuses questions. Il soutient que la division générale a commis de nombreuses erreurs y compris un manquement aux principes de justice naturelle. Je vais me concentrer sur la question de savoir si la division générale a omis d’observer les principes de justice naturelle.

Analyse

[15] La division d’appel peut intervenir à l’égard d’une décision de la division générale s’il y a une erreur de compétence, une erreur procédurale, une erreur de droit ou certains types d’erreurs de fait.

La division générale a-t-elle violé des principes de justice naturelle?

[16] Le prestataire soutient que la division générale a violé des principes de justice naturelle. Il affirme que la division générale ne lui a pas donné une possibilité équitable de présenter ses arguments.

[17] Le prestataire a reçu une lettre du Tribunal datée du 28 janvier 2022. Le membre de la division générale l’a informé qu’il considérait rejeter sommairement l’appel selon les motifs énoncés dans la lettre.

[18] Le membre de la division générale a aussi écrit :

Si vous estimez que cet appel ne devrait pas être rejeté de façon sommaire, vous devez transmettre au Tribunal vos observations écrites détaillées expliquant pourquoi votre appel a une chance raisonnable de succès, et ce, au plus tard le 28 février 2022.

Si le Tribunal n’a pas reçu vos observations écrites à la date indiquée, le Tribunal rendra une décision en se fondant sur l’information déjà versée au dossier.

[19] Le prestataire a compris qu’il avait jusqu’au 28 février 2022 pour présenter des observations.

[20] Le même jour où il a reçu la lettre, le prestataire a écrit au Tribunal pour demander une divulgation de la part de la Commission. Le prestataire n’a pas reçu de réponse du Tribunal.

[21] La division générale a rendu sa décision le 8 février 2022. Elle a rejeté l’appel. Elle a conclu que le prestataire n’avait pas fourni de renseignements ou d’arguments plausibles selon lesquels elle pourrait raisonnablement conclure qu’il pouvait démontrer avoir accumulé le nombre d’heures d’emploi assurable nécessaire pour être admissible aux prestationsNote de bas page 2.

[22] Le prestataire affirme que le membre a injustement rendu sa décision sans attendre de recevoir ses observations, surtout en considérant qu’il s’attendait à une divulgation complète de la Commission. De plus, il affirme qu’il attendait de recevoir un rapport de l’Agence du revenu du Canada avant de déposer ses observations. Le prestataire affirme que son courriel du 28 janvier 2022 indiquait clairement qu’il déposerait des observations écrites détaillées expliquant pourquoi son appel avait une chance raisonnable de succès.

[23] L’article 22(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale exige que la division générale avise la partie appelante par écrit et lui donne un délai raisonnable pour présenter des observations avant de rejeter sommairement l’appel.

[24] En l’espèce, la division générale a reconnu qu’elle devait donner un délai raisonnable à une partie appelante pour présenter des observations. La division générale a donné au prestataire jusqu’au 28 février 2022.

[25] Cependant, la division générale a rendu sa décision vingt jours avant la fin de son propre délai. Cela en dépit du fait que le prestataire a déclaré qu’il allait présenter des observations détaillées. De toute évidence, la division générale n’a pas donné au prestataire une possibilité équitable de présenter ses arguments.

Réparation

[26] Le prestataire soutient que la réparation appropriée serait d’annuler la décision de la division générale et d’accueillir son appel.

[27] De son côté, la Commission affirme que l’appel du prestataire devrait être rejeté parce que son résultat est certain. Cependant, si j’acceptais les arguments de la Commission et je rejetais l’appel, le prestataire n’aurait jamais eu la possibilité de déposer les arguments détaillés qu’il avait l’intention de fournir à l’appui de sa demande. Il maintient qu’il répondait à tous les critères d’admissibilité aux prestations d’assurance-emploi. Il affirme qu’il peut prouver qu’il est admissible.

[28] Le prestataire devrait avoir la possibilité de fournir des éléments de preuve à l’appui de sa demande et de présenter ses arguments. Par conséquent, je renvoie cette affaire à la division générale aux fins de réexamen par un autre membre du Tribunal.

Conclusion

[29] J’accueille l’appel et je renvoie l’affaire à la division générale pour un réexamen par un autre membre.

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