Assurance-emploi (AE)

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Citation : RA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 358

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (444036) datée du 20 décembre 2021 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Sylvie Charron
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 28 mars 2022
Personne présente à l’audience : Appelante

Date de la décision : Le 22 avril 2022
Numéro de dossier : GE-21-2584

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelante.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite (c’est-à-dire parce qu’elle a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] L’appelante a perdu son emploi. Son employeur a affirmé qu’elle a été congédiée parce qu’elle a refusé de se faire vacciner contre la Covid-19. De plus, elle a aussi refusé les tests de dépistage.

[4] L’appelante ne conteste pas que c’est ce qui s’est passé. Par contre, l’appelante soutient qu’en fait l’employeur l’a congédiée parce que l’employeur a refusé de l’accommoder soit en la réaffectant à du travail de bureau, soit en lui accordant un congé sans solde. Elle affirme aussi qu’elle ne comprend pas comment la Commission considère qu’elle a commis un geste d’inconduite alors qu’elle n’a jamais eu l’occasion de retourner au travail après son congé de maternité.

[5] La Commission a accepté la raison du congédiement que l’employeur a fournie. Elle a conclu que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite. Elle l’a donc exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Question en litige

[6] L’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[7] Pour décider si l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison l’appelante a perdu son emploi. Ensuite, je dois décider si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi l’appelante a-t-elle perdu son emploi?

[8] J’estime que l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle a refusé de se conformer à la politique de vaccination de son employeur.

[9] L’employeur a dit à la Commission que l’appelante ne s’est pas présentée au travail les 14, 16 et 17 juin 2021 car elle refusait de se faire vacciner selon un arrêté ministériel provincial alors en vigueur. L’employeur a considéré que c’était un abandon d’emploi et a procédé à la fermeture administrative du dossier de l’appelante.Note de bas de page 2 Il n’était pas possible pour l’appelante de prendre un congé sans solde.

[10] L’appelante n’est pas d’accord. Elle affirme que la vraie raison pour laquelle elle a perdu son emploi est que l’employeur a refusé de l’accommoder; elle ne voulait pas recevoir le vaccin et ne pouvait pas se faire dépister trois fois par semaine pour des raisons familiales. De plus, elle a demandé d’être réaffectée, mais il n’y avait rien de disponible dans son champs d’études.Note de bas de page 3 Elle soutient de plus que deux de ses collègues ont fini par recevoir un courriel qui les dispensait du dépistage obligatoire.

[11] Lors de la demande de révision, l’appelante a dit craindre le vaccin « expérimental ». Elle a aussi soulevé des problèmes de glande thyroïde, confirmés par une copie de tests qui ont reçu la cote GD-12. Elle n’a cependant pas consulté de médecin pour obtenir une exemption médicale au vaccin.

[12] L’employeur a ajouté que le dépistage pouvait se faire dans des cliniques satellites ou sur les lieux du travail, mais hors des heures du travail à moins d’entente avec l’employeur.Note de bas de page 4

[13] Finalement, l’employeur a dit devoir appliquer l’arrêté ministériel provincial sur la vaccination et l’appelante ne voulait ni la vaccination ni le dépistage.

[14] En bout de compte, l’appelante dit qu’elle rencontre tous les critères d’admissibilité à l’assurance-emploi puisqu’elle n’est pas responsable de la perte de son emploi, elle est disponible à travailler à tous les jours et se cherche activement un emploi. Il est injuste de la congédier parce qu’un arrêté ministériel a été greffé à la convention collective.Note de bas de page 5

[15] De plus, en témoignage à l’audience, l’appelante a dit qu’elle est punie pour ne pas suivre un arrêté ministériel qui n’est plus en vigueur. Elle reproche à la Commission de ne pas avoir communiqué avec sa supérieure immédiate pour vraiment bien comprendre son cas et ses raisons pour le refus de se faire vacciner.

[16] Je suis bien consciente du fait que l’appelante juge que son employeur devait l’accommoder. Par contre, mon rôle se limite à déterminer si l’appelante a droit aux bénéfices de l’assurance-emploi, vu son refus soutenu de se conformer aux directives de l’employeur.

[17] Je conclus que l’appelante a été congédiée à cause de son refus de se faire vacciner ou de se soumettre aux tests de dépistage suivant la politique de l’employeur.

[18] L’employeur et l’appelante ont dit tous les deux que c’est le fait de ne pas être vaccinée, et de refuser le dépistage qui ont fait en sorte que l’appelante a été congédiée. Il n’y a pas de preuve du contraire.

La raison du congédiement de l’appelante est-elle une inconduite selon la loi?

[19] Selon la loi, la raison du congédiement de l’appelante est une inconduite.

[20] Pour être considérée comme une inconduite selon la loi, la façon d’agir doit être délibérée. Cela signifie qu’elle était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 6. Une inconduite comprend aussi une conduite qui est tellement insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 7. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que l’appelante ait eu une intention coupableNote de bas de page 8 (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal).

[21] Il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’elle soit congédiée pour cette raisonNote de bas de page 9.

[22] La Commission doit prouver que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite, selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas de page 10.

[23] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que l’appelante savait qu’elle devait soit être vaccinée, soit se faire dépister trois fois par semaine pour pouvoir venir au travail. Elle a refusé. En bout de ligne, l’employeur lui a fait parvenir une lettre qui indique clairement qu’il y aurait fermeture administrative de son dossier d’employée, donc, un congédiement, à défaut de se présenter au travail.Note de bas de page 11

[24] Je conclus donc que l’appelante savait qu’elle pouvait perdre son emploi si elle ne se présentait pas au travail. Elle savait que pour se présenter au travail il lui fallait un vaccin ou des tests de dépistage. Elle a donc volontairement accepté le congédiement comme suite logique au refus de se faire vacciner ou dépister. Sa conduite a été délibérée, en ce sens que ne pas accepter de se faire vacciner ou dépister sont des gestes conscients et intentionnels.

[25] L’appelante soutient qu’il n’y a pas eu inconduite parce que elle n’a jamais pu retourner au travail après son congé de maternité pour poser un geste d’inconduite. Elle déplore le fait que l’employeur ne veut pas l’accommoder. Elle est convaincue que pendant la période où on cherche à lui imposer la vaccination, l’arrêté ministériel n’est plus en vigueur.

[26] Au fait, l’employeur a dit que l’arrêté ministériel était toujours en vigueur à l’époque, et qu’une explication possible pour le fait que deux des collègues de l’appelante ont reçu un courriel disant qu’elles n’étaient plus visées est qu’elles ont peut-être été vaccinées. De plus, l’employeur a ajouté que le dépistage était possible dans des cliniques satellites, et pas seulement à l’hôpital.

[27] Je comprends bien que l’appelante avance que c’est l’arrêté ministériel qui l’a empêchée de travailler. Il faut cependant considérer l’envers de cette médaille : c’est le refus volontaire de se conformer à l’arrêté ministériel qui a fait que l’appelante ne pouvait pas se présenter au travail.

[28] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite parce que la preuve démontre que l’appelante savait que l’employeur devait appliquer l’arrêté ministériel sur la vaccination ou le dépistage obligatoire. L’appelante a refusé et la vaccination et le dépistage. Refuser de se conformer à la politique de l’employeur est un acte délibéré. De plus, il y a un lien direct entre le refus de l’appelante et le congédiement.

Alors, l’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

[29] Selon mes conclusions précédentes, je suis d’avis que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[30] La Commission a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[31] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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