Assurance-emploi (AE)

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Citation : FD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 343

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : F. D.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (457010) datée du 14 février 2022 rendue par la Commission de l’assuranceemploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Nathalie Léger
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 30 mars 2022
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 19 avril 2022
Numéro de dossier : GE-22-613

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Décision

[1] L’appel est accueilli.

Aperçu

[2] Le 26 avril 2021, l’appelante reçoit son avis de cotisation de l’Agence du revenu du CanadaNote de bas de page 1. À la lecture de ce document, l’appelante constate qu’un montant de 570.06$ lui est réclamé pour « Cotisations à l’assurance-emploi à payer »Note de bas de page 2. L’appelante ne comprend pas pourquoi on lui réclame ces cotisations puisqu’elle est travailleuse autonome.

[3] Elle fait diverses démarches pour tenter de comprendre. On lui dit qu’elle aurait conclu, le 21 avril 2020, une ententeNote de bas de page 3 pour s’inscrire au programme de prestations spéciales de l’assurance-emploi pour les travailleurs autonomes. Elle soutient qu’elle n’a pourtant jamais demandé de telles prestations ni conclu une telle entente. Elle soutient également ne jamais avoir reçu la lettre confirmant cette entente, que ce soit par courriel ou par courrier.

[4] Le 22 décembre 2021, elle reçoit une lettre de la Commission de l’assurance-emploiNote de bas de page 4 l’informant que sa demande de mettre fin à l’entente a bel et bien été reçue. Cette lettre l’informe aussi qu’elle devra payer les cotisations d’assurance-emploi parce qu’elle n’a pas mis fin à l’entente dans les 60 jours de l’entrée en vigueur de celle-ci.

[5] L’appelante conteste devoir payer des cotisations parce qu’elle dit n’avoir jamais conclu cette entente et parce qu’elle n’a jamais reçu la confirmation de cette entente. 

Question en litige

[6] L’appelante a-t-elle conclu une entente afin de s’inscrire au programme de prestations spéciales de l’assurance-emploi pour les travailleurs autonomes?

Analyse

[7] La partie VII.1 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi) prévoit un régime particulier de prestations pour les travailleurs indépendantsNote de bas de page 5. Cette partie de la Loi s’applique au travailleur autonome seulement s’il a conclu un accord avec la Commission pour participer au programmeNote de bas de page 6. La Loi ne prévoit aucune modalité ou exigence pour la conclusion de cet accord. Tout ce qui est prévu c’est que la Commission peut établir ces modalitésNote de bas de page 7.  Les modalités sont simplement de remplir une série d’étapes à partir du dossier du prestataire qui demande à s’inscrire.

Est-ce qu’une entente a été conclue?

[8] La Commission est d’avis qu’une entente a été conclue par l’appelante pour participer au programme de prestations spéciales d’assurance-emploi pour travailleurs indépendants.

[9] Elle explique qu’il ne lui est pas possible de prouver la conclusion de cette ententeNote de bas de page 8. Tout ce qu’elle peut fournir, c’est le numéro de confirmationNote de bas de page 9 et une lettre confirmant l’ententeNote de bas de page 10. En effet, une telle entente se fait électroniquement, à partir du dossier de la prestataire qui se trouve à « MonServiceCanada ».  Ce système n’est accessible que par la prestataire. Celle-ci doit utiliser un code d’identification personnel pour y avoir accès. La Commission n’y a pas accès.

[10] De plus, la Commission soutient qu’il est improbable que l’appelante n’ait pas reçu la lettre de confirmation de l’entente puisque cette lettre a été envoyée à la même adresse que la lettre confirmant la fin de l’entente et que cette dernière s’est bien rendue à destinationNote de bas de page 11.

[11] L’appelante, quant à elle, fait valoir les éléments suivants. Tout d’abord, elle maintient, tant devant le Tribunal que lors des échanges avec la Commission, qu’elle n’a jamais conclu une telle entente et qu’elle n’a jamais voulu bénéficier du programme pour les travailleurs indépendantsNote de bas de page 12. Elle indique aussi qu’elle n’a jamais reçu la lettre confirmant l’entente. Ce n’est que lorsqu’elle a pris connaissance de son avis de cotisation qu’elle comprend que quelque chose cloche. Lors de l’audience, elle indique aussi que cette lettre ne se trouve pas dans son dossier de Service Canada.

[12] L’appelante explique qu’elle a demandé de recevoir la Prestation canadienne d’urgence (PCU) au mois de mars 2020. Sa demande a été acceptée. Elle a alors rempli ses demandes en ligne aux deux semaines pendant 7 moisNote de bas de page 13 et a reçu les prestations auxquelles elle avait droit.

[13] La Loi ne prévoit pas clairement à qui appartient le fardeau de la preuve dans un cas comme celui-ci. Puisque l’appelante réside au Québec, il faut se référer aux règles de droit civilNote de bas de page 14 pour connaitre les règles qui encadrent la formation d’un contrat ainsi que celles qui énoncent à qui appartient le fardeau de la preuveNote de bas de page 15 (c’est-à-dire à qui revient la charge de prouver un fait) dans une situation donnée.

[14] Je suis d’avis que le fardeau de la preuve revient à la Commission. C’est à elle de démontrer qu’un accord a été conclu puisque qu’il s’agit d’un élément qui est essentiel pour que l’article 152.02 puisse trouver applicationNote de bas de page 16. En d’autres mots, ce n’est que si un accord a effectivement été conclu que des cotisations peuvent être réclamées à l’appelante.

[15] Dans le présent dossier, la Commission a été incapable de produire l’accord conclu, de démontrer comment celui-ci aurait été conclu et par qui ou même de fournir une quelconque information autre que le numéro de confirmation qui serait relié à cet accord.

[16] La version de l’appelante et l’ordre dans le temps des demandes mettent également en doute la validité des informations fournies par la Commission. Il me semble aussi tout à fait improbable que l’appelante ait souhaité s’inscrire au programme de prestations spéciales pour les travailleurs autonomes alors qu’elle avait demandé, et obtenu, la PCU moins d’un mois auparavant. Je considère donc que la Commission ne réussit ni à prouver l’identité de la personne ayant conclu cet accord ni même qu’un accord a bel et bien été conclu.

Conclusion

[17] L’appel est accueilli. L’appelante n’a pas conclu d’accord pour s’inscrire au Programme de prestations spéciales de l’assurance-emploi pour les travailleurs autonomes. L’entente alléguée par la Commission est donc réputée n’avoir jamais existé.

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