Assurance-emploi (AE)

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Citation : ED c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 342

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : E. D.
Représentants : Thomas Blackburn-Boily
Denis Poudrier
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (448199) datée du 28 janvier 2022 rendue par la Commission de l’assuranceemploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Josée Langlois
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 11 avril 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentants
Date de la décision : Le 13 avril 2022
Numéro de dossier : GE-22-779

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Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] L’appelant a démontré qu’il avait un motif valable le justifiant de ne pas se présenter à sa formation autorisée. De plus, la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a imposé une exclusion d’une durée de six semaines.

[3] L’appelant a également démontré qu’il était fondé à quitter son emploi (c’est-à-dire qu’il avait une raison acceptable selon la Loi pour le faire) quand il l’a fait. Par conséquent, il n’est pas exclu du bénéfice des prestations à compter du 20 août 2021.

Aperçu

[4] L’appelant a présenté une demande de prestations le 25 mai 2021. Il a alors indiqué qu’il avait reçu l’autorisation de suivre une formation dans le cadre d’un programme d’emploi ou de développement des compétences. L’autorité désignée par la Commission, Emploi-Québec, a approuvé une formation à laquelle devait participer l’appelant du 3 mai 2021 au 22 octobre 2021.

[5] À compter du 8 mai 2021, l’appelant a dû respecter deux quarantaines consécutives d'une durée de 14 jours. Pour cette raison, il s’est absenté de ses cours et il n’a pas pu poursuivre sa formation dans les délais requis. Il a donc repris son emploi chez X.

[6] Le 28 janvier 2022, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) a examiné les raisons de l’appelant pour quitter son emploi le 20 août 2021 chez X.

[7] La Commission a conclu que l’appelant avait quitté volontairement son emploi le 20 août 2021 (c’est-à-dire qu’il a choisi de quitter son emploi) sans justification prévue par la Loi. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations à compter de ce moment. La Commission a également conclu qu’elle ne pouvait verser des prestations à l’appelant à compter du 4 juillet 2021, pour une période de six semaines, parce que l’appelant avait cessé de participer, sans motif valable, à une formation qui avait été approuvée par Emploi-Québec.

[8] Lorsqu’elle a rendu sa décision initiale la Commission avait également conclu que l’appelant n’était pas disponible pour travailler à compter du 4 juillet 2021 parce qu’il n’avait pas donné suite à ses tentatives de le joindre. La Commission a cependant révisé cette décision en faveur de l’appelant.

[9] Je dois déterminer si l’appelant a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas. Je dois également déterminer s’il était justifié d’abandonner la formation à laquelle il avait été dirigé par l’autorité désignée par la Commission.

Questions en litige

Participation à la formation autorisée

[10] Est-ce que l’appelant a volontairement cessé de participer à la formation approuvée par Emploi-Québec le 8 mai 2021 ?

[11] Si oui, avait-il un motif valable le justifiant de cesser de participer à sa formation?

[12] L’exclusion de six semaines imposée par la Commission est-elle justifiée ?

Départ volontaire

[13] L’appelant est-il exclu du bénéfice des prestations pour avoir quitté volontairement son emploi sans justification le 20 août 2021 ?

[14] Pour répondre à cette question, je dois d’abord aborder la question du départ volontaire de l’appelant. Je dois ensuite déterminer s’il était fondé à quitter son emploi.

Analyse

Participation à la formation autorisée

Les parties sont d’accord sur le fait que l’appelant a volontairement cessé de participer à sa formation

[15] Comme il l’avait déclaré à la Commission, l’appelant a confirmé lors de l’audience qu’il a volontairement cessé de participer à sa formation le 8 mai 2021. Sa formation, dispensée au Centre d’éducation des adultes de Val-des-Sources, a débuté le 3 mai 2021, il a participé à une semaine complète de cours et, le samedi 8 mai 2021, il a dû se placer en quarantaine pendant 14 jours parce qu’il avait été en contact avec une personne qui avait contracté la Covid-19. Vers la fin de ce confinement, l’appelant a commencé à ressentir des symptômes de la maladie. Après avoir reçu un résultat positif à la Covid-19, il s’est de nouveau confiné pendant une période de 14 jours.

[16] Comme il l’a déclaré à la Commission, l’appelant devait reprendre sa formation après sa période de confinement, mais la directrice du Centre de formation lui a dit que la formation était trop avancée et qu’il ne pouvait pas la reprendre en juin 2021. Comme il était prévu que les cours se terminent le 25 juin 2021 pour reprendre le 6 septembre 2021, la directrice a demandé à l’appelant d’attendre au 6 septembre 2021 pour reprendre ses cours.

[17] Cette situation a engendré un malentendu pour l’appelant parce que lorsqu’il a voulu reprendre sa formation le 6 septembre 2021, la directrice du Centre lui a dit qu’il ne pouvait pas reprendre sa formation puisque les critères du programme de formation dirigée n’étaient plus satisfaits. L’appelant n’était plus bénéficiaire de l’assurance-emploi. Entre le 6 septembre 2021 et le 18 octobre 2021, l’appelant a tenté de régulariser son dossier d’assurance-emploi et il attendait une décision de la Commission afin de pouvoir poursuivre la formation qui avait été approuvée.

[18] Puisque la situation ne s’est pas réglée, le 18 octobre 2021, l’appelant a recommencé à travailler chez son employeur.

[19] La Commission est d’accord que l’appelant a cessé de participer volontairement à sa formation, mais elle soutient que la déclaration de l’appelant, concernant la date de fin de la participation à ses cours, manque de crédibilité. Elle a donc établi que l’appelant ne s’était présenté à ses cours qu’une seule journée et elle a retenu la date du 3 mai comme fin de la participation à ses cours.

[20] L’appelant a transmis au Tribunal un document démontrant les travaux qu’il avait effectués pendant ses cours jusqu’au 7 mai 2021 inclusivement.Note de bas de page 1

[21] Les explications de l’appelant apparaissent plausibles et je suis d’avis qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelant ait assisté à ses cours jusqu’au 7 mai 2021.

[22] L’appelant a volontairement cessé de participer à ses cours parce qu’il devait respecter les règles sanitaires imposées par le gouvernement pendant la pandémie de la Covid-19.

L’appelant avait-il un motif valable le justifiant de cesser de participer à sa formation?

[23] La Loi prévoit qu’un prestataire est exclu du bénéfice des prestations lorsque, sans motif valable, il cesse de participer à la formation qui avait été approuvée.Note de bas de page 2

[24] L’organisme Emploi-Québec a autorisé l’appelant à participer à une formation qui s’échelonnait du 3 mai 2021 au 22 octobre 2021.

[25] L’appelant s’est présenté à ses cours le 3 mai 2021 et il a participé à sa formation pendant la première semaine, soit jusqu’au vendredi 7 mai 2021 inclusivement.

[26] Le samedi 8 mai 2021, l’appelant a été informé qu’il avait été en contact avec une personne ayant contracté la maladie de la Covid-19. Afin de respecter les règles sanitaires imposées par le gouvernement à ce moment, l’appelant a entamé une quarantaine de 14 jours. À la fin de cette période, il a lui-même commencé à ressentir des symptômes. Il s’est donc confiné pour une période de 14 jours supplémentaires comme l’exigeaient les règles sanitaires.

[27] Après cette période, l’appelant a contacté la directrice du Centre auprès duquel il suivait une formation. Celle-ci lui aurait alors dit que puisque les cours se terminaient à la fin du mois de juin 2021, il était trop tard pour réintégrer la formation. Elle lui a demandé de reprendre sa formation au début de la prochaine session, soit le 6 septembre 2021.

[28] Pour cette raison, dès que son employeur a eu besoin de ses services, soit le 4 juillet 2021, l’appelant a recommencé à travailler temporairement. Il était prévu qu’il cesse d’occuper son emploi le 20 août 2021 afin de pouvoir participer à sa formation.

[29] Le 20 août 2021, l’appelant a contacté la directrice du Centre de formation pour connaître la date exacte du retour à l’école puisqu’il n’avait reçu aucune information à ce sujet. Celle-ci lui a mentionné qu’il ne pouvait pas réintégrer ses cours puisqu’il n’était pas bénéficiaire de l’assurance-emploi alors que cette condition était un des critères d’autorisation au programme.Note de bas de page 3

[30] L’appelant a alors contacté l’agente d’Emploi-Québec et lui aurait laissé un message, mais elle ne l’aurait pas rappelé. Il a également contacté la Commission pour régulariser son dossier. Il a attendu jusqu’en octobre 2021 et, puisqu’il n’obtenait pas une réponse favorable, il a repris son emploi le 18 octobre 2021.

[31] Ce malentendu a eu des conséquences fâcheuses pour l’appelant qui avait obtenu l’autorisation de suivre une formation tout en recevant des prestations d’assurance-emploi. Il explique d’ailleurs lors de l’audience que réussir cette formation lui était nécessaire pour travailler comme charpentier-menuisier plutôt que comme journalier.

[32] La Commission fait valoir que l’appelant n’a pas contacté son agente chez Emploi-Québec. Elle affirme également que, parce que ses tentatives pour joindre l’appelant ont échouées, elle ne peut pas établir qu’il avait un motif valable de se retirer du cours.

[33] Je suis d’accord avec l’appelant.

[34] Lorsqu’il a cessé de se présenter à ses cours le lundi 10 mai 2021, l’appelant avait un motif valable. L’appelant devait respecter les consignes sanitaires émises par le gouvernement. Parce qu’il avait été en contact avec une personne ayant contracté la Covid-19, l’appelant devait se confiner pendant une période de 14 jours pour respecter les règles émises à ce moment. Sa quarantaine s’est prolongée parce qu’il a également contracté la Covid-19.

[35] L’appelant avait donc un motif valable pour cesser de participer à sa formation pendant cette période. Par la suite, il n’a pu réintégrer sa formation ni en juin 2021 ni en septembre 2021 parce que la directrice n’était pas d’accord. Un malentendu s’est créé et, comme il n’était plus prestataire de l’assurance-emploi, l’appelant n’a pu poursuivre cette formation qui avait été approuvée. Il a donc réintégré son emploi chez X.

[36] Même si l’appelant aurait dû contacter l’agente chez Emploi-Québec pour s’assurer de la mise à jour de son dossier, il n’en demeure pas moins que lorsqu’il a cessé de participer à sa formation le 10 mai 2021, l’appelant avait un motif valable le justifiant de cesser de participer à sa formation.

La Commission était-elle justifiée d’imposer une exclusion de six semaines

[37] Lorsqu’un prestataire a reçu l’autorisation de participer à une formation par une autorité désignée et qu’il cesse d’y participer sans motif valable, il est exclu des prestations pour une durée s’échelonnant entre une et six semaines.

[38] L’exclusion réduit le nombre de semaines de prestations auxquelles le prestataire a droit. Les semaines d’exclusion sont déduites du nombre de semaines pendant lesquelles des prestations sont payables au cours de la période de prestations.

[39] La durée de l’exclusion ne pouvait pas dépasser six semaines dans le cas de l’appelant.Note de bas de page 4

[40] Le pouvoir de déterminer la durée de la période d’exclusion (d’une durée maximale de six semaines) est un pouvoir discrétionnaire qui relève de la Commission. Je ne peux intervenir à moins que le pouvoir discrétionnaire de la Commission ait été exercé d'une manière non judiciaire, c’est-à-dire en tenant compte de facteurs non pertinents ou sans tenir compte de toutes les considérations pertinentes.Note de bas de page 5

[41] La Commission a déterminé que l’appelant devait être exclu du bénéfice des prestations pour une durée de six semaines. Comme elle l’a fait valoir, elle d’abord considéré que l’appelant était exclu du bénéfice des prestations à compter du 3 mai 2021, ce qui a engendré un trop-payé de 3 570 $.Note de bas de page 6

[42] Au moment de la révision, la Commission a modifié la date à laquelle débutait l’exclusion. De cette manière, le trop-payé a été annulé et l’appelant n’a pas à rembourser la somme de 3 570 $ que la Commission lui réclamait.Note de bas de page 7

[43] Cependant, la Commission a tout de même exclu l’appelant du bénéfice des prestations pour une période de six semaines à compter du 4 juillet 2021.

[44] Lorsqu’elle a imposé cette exclusion, la Commission a considéré les éléments suivants :

  • Elle a considéré que l’appelant n’avait pas contacté son agente chez Emploi-Québec pour l’informer de son absence à sa formation ;
  • Elle a considéré les tentatives vaines qu’aurait faites un agent de la Commission pour contacter l’appelant. Parce que ces tentatives pour le joindre ont échouées, la Commission indique qu’elle ne peut pas établir qu’il y a des circonstances atténuantes expliquant son absence aux cours;
  • Elle a considéré que l’appelant avait omis de contacter la Commission ;
  • Elle a considéré que l’appelant n’avait pas agi comme une personne raisonnable l’aurait fait en ne s’informant pas des exigences de sa formation dirigée ;

[45] Pour ces raisons, elle a imposé la durée maximale de l’exclusion, soit six semaines. Elle justifie la durée de l’exclusion par le fait que la formation de l’appelant devait se terminer le 22 octobre 2021.

[46] Je suis d’accord avec l’appelant. La Commission n’a pas considéré les circonstances exceptionnelles dues à la pandémie de la Covid-19. Elle n’a pas considéré qu’à la fin de sa quarantaine, le confinement obligatoire et exigé par le gouvernement à ce moment, la directrice du Centre de formation a demandé à l’appelant de continuer ses cours à compter du 6 septembre 2021. La Commission n’a pas considéré que l’appelant a contacté la directrice du Centre de formation pour s’informer chaque fois, soit en juin 2021 ainsi qu’en août 2021 et elle n’a pas considéré les directives reçues par l’appelant de la part de cette responsable.

[47] Je précise que cette situation a engendré tout un malentendu pour l’appelant qui a cessé d’occuper son emploi le 20 août 2021 pour reprendre ses cours et qu’il n’a jamais pu reprendre sa formation autorisée en raison de son dossier administratif qui n’était pas en règle. L’appelant voulait reprendre sa formation au début du mois de juin 2021 comme il voulait reprendre sa formation le 6 septembre 2021, mais la directrice du Centre de formation n’a pas accepté son retour. D’abord parce que la session était trop avancée et ensuite parce que son dossier d’assurance-emploi n’était pas en règle.

[48] Cette situation est malheureuse pour l’appelant et je ne peux conclure que la Commission a pris en considération tous les facteurs pertinents lorsqu’elle a imposé la durée de l’exclusion au bénéfice des prestations.

[49] Je conclus que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire puisqu’elle n’a pas considéré les circonstances exceptionnelles reliées à la pandémie de la Covid-19 ainsi que les directives émises par la directrice du Centre de formation.

Départ volontaire

Les parties sont d’accord sur le fait que l’appelant a quitté volontairement son emploi

[50] Comme il l’avait déclaré à la Commission, l’appelant a confirmé lors de l’audience qu’il a volontairement quitté son emploi le 20 août 2021.Note de bas de page 8

[51] La Commission est également d’avis que l’appelant a quitté volontairement son emploi le 20 août 2021.

[52] J’accepte le fait que l’appelant a quitté volontairement son emploi. L’appelant reconnaît avoir quitté son emploi le 20 août 2021 et je ne vois aucun élément de preuve qui viendrait contredire cela.

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelant était fondé à quitter volontairement son emploi

[53] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelant était fondé à quitter volontairement son emploi quand il l’a fait.

[54] La Loi sur l’assurance-emploi prévoit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justification.Note de bas de page 9 Il ne suffit pas d’avoir un motif valable (c’est-à-dire une bonne raison) de quitter un emploi pour prouver que le départ était fondé.

[55] Le droit explique ce que veut dire « être fondé à ». Il dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable, compte tenu de toutes les circonstances.Note de bas de page 10

[56] L’appelant est responsable de prouver que son départ était fondé.Note de bas de page 11 Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi au moment où il l’a fait était la seule solution raisonnable. Je dois examiner toutes les circonstances présentes au moment où l’appelant a quitté son emploi.

[57] Lorsqu’il a transmis sa demande de prestations, l’appelant a déclaré qu’il avait quitté volontairement son emploi pour participer à une formation à laquelle il avait été dirigé par Emploi-Québec.

[58] Une note transcrite par un agent de la Commission le 8 juin 2021 démontre que la formation à laquelle participe l’appelant est dûment autorisée par Emploi-Québec et que l’appelant était autorisé à quitter son emploi pour participer à une activité de formation.Note de bas de page 12

[59] Le relevé d’emploi émis par l’employeur le 27 avril 2021 indique que l’appelant a quitté volontairement son emploi pour effectuer un retour aux études.Note de bas de page 13

[60] L’appelant a déclaré qu’il avait l’intention de travailler chez son employeur pendant l’été 2021 et, il a expliqué lors de l’audience, qu’il avait l’intention de continuer à travailler chez son employeur X après sa formation. D’ailleurs, la preuve démontre qu’à deux reprises, en juillet 2021 et en octobre 2021, l’appelant est retourné travailler chez cet employeur.

[61] Par la voix de son représentant, il a expliqué lors de l’audience que son employeur n’avait qu’un ou deux travailleurs et qu’il accepte des contrats en fonction de la manœuvre disponible. L’employeur avait donc l’intention de réembaucher l’appelant lorsque sa formation était terminée. Malgré que l’appelant n’a pu poursuivre sa formation, l’employeur l’a tout de même réembauché.

[62] Ainsi, l’appelant a quitté son emploi pour permettre à l’employeur d’embaucher un autre travailleur pendant qu’il suivait sa formation. Sa formation avait été autorisée par Emploi-Québec et, au surplus, il avait reçu l’autorisation de quitter son emploi pour participer à une formation dirigée. L’appelant n’avait d’autres choix que de quitter son emploi pour participer à sa formation qui était dispensée à temps plein du 3 mai 2021 au 22 octobre 2021.

[63] L’appelant a discuté avec l’employeur et il a évalué les solutions qui se présentaient à lui avant de quitter son emploi. Il s’attendait à ce que son employeur l’embauche pour la période estivale et, dans les faits, c’est ce qui s’est passé.

[64] L’appelant explique qu’il travaillait comme journalier et que l’employeur avait l’intention de l’embaucher comme charpentier-menuisier dès qu’il aurait terminé sa formation. En ce sens, il fait valoir qu’il connaît bien son employeur qui est également son voisin et que le lien d’emploi n’a jamais été véritablement rompu.

[65] Le 20 août 2021, l’appelant a cessé d’occuper son emploi chez X comme convenu puisqu’il s’attendait à recommencer sa formation dirigée et que l’employeur n’avait plus de travail à lui offrir. À cette période, il est vrai que l’appelant avait mal au cou, mais cette situation ne le rendait pas incapable de participer à ses cours.

[66] Cependant, l’appelant n’a pas pu réintégrer sa formation le 6 septembre 2021 comme la directrice du Centre de formation le lui avait dit en juin 2021. Étant donné des malentendus dans le traitement de son dossier auprès de la Commission et auprès d’Emploi-Québec, l’appelant explique ne jamais avoir obtenu une réponse positive indiquant que son dossier était régularisé. Il explique même avoir perdu « ses cartes de compétence » parce qu’il n’a pas complété son niveau secondaire 4 comme l’exige la CCQ. L’appelant travaille toujours pour le même employeur puisqu’il est officiellement de retour au travail depuis le 18 octobre 2021.Note de bas de page 14

[67] Il est vrai que, dans la plupart des cas, un prestataire a l’obligation de faire des efforts pour trouver un autre emploi avant de prendre la décision unilatérale de quitter celui qu’il occupe.Note de bas de page 15 Dans ce cas-ci, l’appelant avait obtenu l’autorisation de suivre une formation par une autorité compétente, soit Emploi-Québec, il avait reçu l’autorisation de quitter l’emploi qu’il occupait pour suivre sa formation et il avait l’intention, comme son employeur le lui avait proposé, de retourner travailler chez ce même employeur une fois sa formation terminée.

[68] Étant donné ces circonstances, particulièrement le fait qu’une formation dispensée à temps plein du 3 mai 2021 au 22 octobre 2021 avait été autorisée, je suis d’avis que l’appelant était fondé à quitter son emploi au moment où il l’a fait. L’appelant a fait ce qu’il fallait : il a discuté de la situation avec l’employeur et il a obtenu l’autorisation de quitter volontairement son emploi pour participer à sa formation.

[69] L’appelant devait suivre cette formation pour régulariser son dossier auprès de la CCQ et obtenir la validité de ses « cartes de compétence » lui permettant de travailler dans la construction. Il a donc cessé de travailler une première fois le 27 avril 2021 et il a ensuite cessé d’occuper son emploi le 20 août 2021.

[70] Étant donné que sa formation avait été autorisée par Emploi-Québec et qu’il s’est assuré de l’intention de l’employeur de le reprendre après son cours, l’appelant avait alors évalué toutes les solutions raisonnables avant de quitter son emploi.

[71] Bien la Commission soutienne que l’appelant a quitté son emploi parce qu’il avait mal au cou, les faits démontrent qu’il était prévu qu’il recommence ses cours à cette date et que l’employeur, ayant accepté de reprendre l’appelant uniquement pour l’été, n’avait plus de travail à lui offrir à ce moment.

[72] La Commission est d’avis que l’appelant aurait dû consulter un professionnel de la santé avant de s’absenter pour prendre du repos en raison d’une blessure. Cependant, lorsque l’on analyse le dossier plus largement, la situation démontre que l’employeur avait prévu réembaucher l’appelant uniquement pour une période temporaire. Surtout, la Commission n’a pas considéré que l’appelant avait l’autorisation de quitter son emploi pour suivre son cours. Étant donné cet imbroglio administratif, l’appelant n’a jamais repris son cours : la directrice du Centre de formation ne pouvait l’admettre puisqu’il ne recevait pas de prestations d’assurance-emploi.

[73] Lorsqu’un travailleur quitte volontairement son emploi, il est exclu de la possibilité de recevoir des prestations. Il est vrai que le fait de participer à une formation dirigée par Emploi-Québec et autorisée par la Commission permet de lever la présomption de non-disponibilité lorsque l’on est étudiant à temps plein. Il est vrai qu’il en est autrement pour l’exclusion, mais, pour étudier à temps plein suivant l’horaire de sa formation autorisée, l’appelant n’avait d’autres choix que de quitter son emploi. Au surplus, il avait reçu cette autorisation.

[74] Bien que la Commission mentionne qu’il n’y avait pas « urgence » pour l’appelant d’abandonner sa formation, je suis plutôt d’avis que l’appelant devait respecter les règles sanitaires émises par le gouvernement et qu’il a cessé temporairement de se présenter sa formation dans l’espoir de la reprendre plus tard.Note de bas de page 16

[75] Malheureusement pour l’appelant, il a d’abord été en contact avec une personne ayant contracté la Covid-19 et il a ensuite été inoculé par cette maladie. Selon la directrice, l’appelant ne pouvait reprendre sa formation en juin 2021 puisque les cours se terminaient à la fin du mois de juin 2021. Elle a demandé à l’appelant de reprendre sa formation le 6 septembre 2021.

[76] N’eût été cette circonstance exceptionnelle reliée à la pandémie de la Covid-19, l'appelant aurait poursuivi sa formation. Au lieu de cela, le dossier de l’appelant a fait l’objet de révision autant auprès de la Commission que chez Emploi-Québec au point qu’il n’a jamais pu réintégrer sa formation préalablement autorisée. Cependant, un fait demeure, il travaille toujours chez X.

[77] L’appelant était fondé à quitter volontairement son emploi le 20 août 2021.

[78] Je précise toutefois que l’appelant a la responsabilité d’informer la Commission de sa situation et qu’il doit déclarer sa rémunération en transmettant de façon périodique ses déclarations du prestataire.

Conclusion

[79] L’appelant a démontré qu’il avait un motif valable le justifiant de ne pas se présenter à sa formation et la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a imposé une exclusion d’une durée de six semaines.

[80] L’appelant a démontré qu’il était fondé à quitter son emploi le 20 août 2021.

[81] Par conséquent, l’appel est accueilli.

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