Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : TD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 441

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : T. D.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (421442) rendue le 11 mai 2021 par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Leanne Bourassa
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 23 mars 2022
Personne présente à l’audience : Appelant

Date de la décision : Le 23 mars 2022
Numéro de dossier : GE-21-1067

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec T. D., le prestataire.

[2] Il n’a pas démontré qu’il était fondé (c’est-à-dire qu’il avait une raison acceptable selon la loi) à quitter son emploi quand il l’a fait. Son départ n’était pas fondé parce que ce n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Ainsi, il n’est pas [sic] exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] Le prestataire a quitté son emploi chez Loblaws/Maxi le 18 février 2021. Par la suite, il a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons pour lesquelles le prestataire a quitté son emploi. Elle a décidé qu’il avait quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire choisi de démissionner) sans justification. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.

[4] Je dois décider si le prestataire a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas.

[5] Selon la Commission, le prestataire aurait pu expliquer sa façon de voir les choses à son employeuse et faire attention à la durée de ses pauses par la suite. Il aurait également pu parler de ses problèmes à une personne du siège social avant de démissionner.

[6] Le prestataire n’est pas d’accord. Il affirme qu’il ne pouvait pas continuer à travailler dans cet environnement et qu’il ne devrait pas être puni pour les gestes de son employeuse.

Question préliminaire

Beaucoup de temps s’est écoulé avant que l’audience du prestataire ait lieu

[7] À l’audience, le prestataire a commencé par dire qu’il était frustré de tout le temps qu’il a fallu pour régler cette affaire.

[8] Le Tribunal s’efforce d’agir le plus rapidement possible, mais parfois, les retards sont inévitables. Dans la présente affaire, le prestataire a d’abord demandé une audience en personne. Malheureusement, en raison de la pandémie mondiale de COVID-19, les audiences en personne étaient impossibles. Ce n’est que le 1er mars 2022 que le prestataire a dit au Tribunal qu’il accepterait maintenant une audience par téléphone. Une date d’audience a donc été fixée dès que possible.

Question en litige

[9] Le prestataire est-il exclu du bénéfice des prestations parce qu’il a quitté volontairement son emploi sans justification?

[10] Pour répondre à cette question, je dois d’abord examiner la question du départ volontaire. Ensuite, je dois décider si le prestataire était fondé à quitter son emploi.

Analyse

Les parties sont d’accord sur le fait que le prestataire a quitté volontairement son emploi

[11] J’admets que le prestataire a quitté son emploi volontairement. Le prestataire convient qu’il a démissionné le 18 février 2021. Il a présenté une lettre de démission qu’il a écrite lui-même. Aucune preuve n’indique le contraire.

Les parties ne s’entendent pas sur la question de savoir si le départ était fondé

[12] Les parties ne sont pas d’accord sur la question de savoir si le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi quand il l’a fait.

[13] La loi précise qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 1. Avoir une bonne raison de quitter un emploi ne suffit pas à démontrer que le départ est fondé.

[14] La loi explique ce qu’on entend par « une personne est fondée à » faire quelque chose. Selon la loi, une personne est fondée à quitter son emploi si son départ était la seule solution raisonnable dans son cas. La loi précise qu’il faut tenir compte de toutes les circonstancesNote de bas de page 2.

[15] Le prestataire est responsable de prouver que son départ était fondéNote de bas de page 3. Il doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas. Pour décider si le départ est fondé, je dois examiner toutes les circonstances entourant le départ du prestataire.

[16] Le prestataire explique qu’il a démissionné parce qu’il a été accusé à tort de vol de temps par une superviseure, ce qu’il a trouvé extrêmement insultant. Il dit que la seule solution raisonnable dans son cas était de partir à ce moment-là parce qu’on ne pouvait pas s’attendre à ce qu’il continue de travailler dans cet environnement.

[17] La Commission affirme que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi, parce le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Plus précisément, elle dit qu’il aurait pu expliquer à la superviseure qu’il croyait avoir droit à une heure et demie de pause par jour et qu’il ne savait pas qu’il s’agissait d’une heure de dîner à un moment précis et de deux pauses de 15 minutes. La Commission ajoute que par la suite, il aurait pu faire attention à ses pauses. Il aurait aussi pu s’adresser au siège social avant de démissionner.

[18] Je constate que de nombreuses solutions s’offraient au prestataire. Quitter son emploi n’était pas la seule solution. Par conséquent, son départ n’était pas fondé.

[19] Le prestataire a choisi de quitter son emploi parce qu’il se sentait insulté par la façon dont, selon lui, une superviseure en particulier le traitait. En premier lieu, il croit qu’elle s’est moquée de lui avec un autre collègue. Deuxièmement, il dit qu’elle s’est rangée du côté d’un autre employé lorsqu’elle a cru qu’il avait pris une pause trop longue.

[20] Avant de quitter un emploi, les prestataires qui veulent obtenir des prestations d’assurance-emploi doivent démontrer avoir fait leur possible pour régler les conflits avec la personne qui les supervise ou tout autre collègue. Ce n’est pas ce que le prestataire a fait.

[21] Le prestataire a dit qu’il n’avait pas entendu de quoi se moquait la superviseure. Il savait seulement qu’elle riait avec un autre collègue juste après lui avoir dit de ne pas s’asseoir pendant qu’il garnissait les tablettes du bas. Il aurait pu résoudre ce problème en parlant à la superviseure pour confirmer ce dont elle se moquait au lieu de supposer qu’elle riait à ses dépens.

[22] En ce qui concerne la fois où le prestataire s’est fait dire que sa pause avait été trop longue, je juge que quitter son emploi n’était pas la seule solution qui s’offrait à lui. D’abord, il aurait simplement pu accepter les commentaires de sa superviseure et continuer à travailler. Il aurait aussi pu confirmer les règles relatives à ses pauses. Enfin, il aurait pu apprendre à utiliser la carte de pointage qu’on lui a remise le lendemain pour s’assurer de ne pas refaire la même erreur.

[23] Le prestataire dit qu’il ne pouvait pas continuer à travailler parce que l’employeuse l’a accusé de voler du temps. Il ajoute qu’un employé avait parlé à la superviseure qui disait qu’il volait du temps. Le fait qu’un collègue ait dit à la superviseure qu’il était en retard sans lui parler au préalable et le fait qu’il pense que la superviseure l’a accusé d’avoir volé du temps ont tous deux rendu le lieu de travail intolérable pour lui.

[24] En examinant ce qu’elle a déclaré à la Commission, je remarque que l’employeuse a dit avoir expliqué au prestataire que revenir des pauses en retard était [traduction] « comme voler du temps à la compagnie ». Elle nie avoir accusé le prestataire de vol. De plus, elle a confirmé que le prestataire n’avait fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire pour cela. C’est le prestataire qui a démissionné.

[25] Le prestataire a confirmé qu’après avoir été informé par la superviseure que sa pause avait été trop longue, il est allé voir le collègue qui avait rapporté son retard et l’a traité de bébé parce qu’il n’était pas venu lui parler directement. Lorsque la superviseure a refusé d’exiger une lettre d’excuses du collègue en question, le prestataire s’est assis pour écrire sa lettre de démission.

[26] Le prestataire a visiblement été insulté, mais je ne vois aucune obligation de quitter son poste moins de 24 heures après la première discussion avec la superviseure. Avant de décider de quitter volontairement son emploi et de se retrouver au chômage, il aurait pu attendre de se calmer et essayer de trouver une solution en discutant de ses frustrations avec une ou un superviseur qu’il respectait.

[27] Je note également que le prestataire a communiqué avec une personne de son syndicat pour essayer de déposer un grief. Le syndicat lui a dit de parler au siège social. Le prestataire n’a pas précisé s’il avait téléphoné au siège social avant ou après avoir donné sa démission. Il aurait pu prendre le temps de faire cette démarche et en attendre le résultat avant de quitter son emploi.

[28] Enfin, le prestataire ne m’a pas convaincue que son lieu de travail était à ce point intolérable qu’il ne pouvait pas continuer de travailler là jusqu’à ce qu’il trouve un autre emploi.

[29] Les prestations d’assurance-emploi sont conçues pour aider les personnes qui perdent leur emploi pour des raisons indépendantes de leur volontéNote de bas de page 4. Dans la présente affaire, c’est le prestataire qui a décidé de quitter son emploi. D’autres options s’offraient à lui. Il n’était donc pas fondé à quitter volontairement son emploi et il n’a pas droit aux prestations d’assurance-emploi.

Conclusion

[30] Je conclus que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations.

[31] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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