Assurance-emploi (AE)

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Citation : CB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 482

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : C. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (439766) datée du 23 novembre 2021 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Josée Langlois
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 22 avril 2022
Personne présente à l’audience : Appelante

Date de la décision : Le 29 avril 2022
Numéro de dossier : GE-22-735

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] L’appelante a démontré qu’elle était disponible pour travailler à compter du 16 août 2021, au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

Aperçu

[3] L’appelante a demandé des prestations régulières le 29 juillet 2021. La Commission a établi une période de prestations à compter du 18 juillet 2021. Par la suite, l’appelante a débuté une formation professionnelle en cuisine (DEP) qui est dispensée du 16 août 2021 au 30 août 2022 du lundi au vendredi de 8h00 à 16h00.

[4] Le 23 novembre 2021, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) a décidé que l’appelante n’était pas inadmissible aux prestations régulières d’assurance‑emploi à compter du 16 août 2021 parce qu’elle suivait une formation de sa propre initiative et qu’elle n’était pas disponible pour travailler.

[5] Pour recevoir des prestations régulières d’assurance‑emploi, l’appelante doit être disponible pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie que l’appelante doit être à la recherche d’un emploi.

[6] L’appelante explique qu’elle est disponible pour travailler et qu’elle recherche activement un emploi. Elle soutient qu’elle peut travailler de longues heures les soirs de la semaine ainsi que la fin de semaine. Elle affirme qu’elle a également demandé un changement d’horaire afin de suivre ses cours le soir.

[7] Je dois déterminer si l’appelante est disponible pour travailler au sens de la Loi à compter du 16 août 2021 et si elle peut recevoir des prestations d’assurance-emploi à compter de ce moment. L’appelante doit prouver sa disponibilité selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle était disponible pour travailler.

Question en litige

[8] L’appelante était-elle disponible pour travailler à compter du 16 août 2021 ?

Analyse

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[9] Le droit énonce les critères que je dois considérer pour déterminer si les démarches de l’appelante sont habituelles et raisonnables.Note de bas de page 1 Je dois déterminer si ces démarches sont soutenues et si elles visent à trouver un emploi convenable. Autrement dit, l’appelante doit avoir persévéré à chercher un emploi convenable.

[10] Je dois aussi évaluer les démarches que l’appelante a faites pour se trouver un emploi. Le Règlement présente une liste de neuf activités de recherche d’emploi que je dois considérer, commeNote de bas de page 2 :

  • évaluer les possibilités d’emploi;
  • rédiger un curriculum vitae ou une lettre de présentation;
  • s’inscrire à des outils de recherche d’emploi, des banques d’emploi en ligne ou auprès de bureaux de placement;
  • communiquer avec des employeurs éventuels;
  • présenter des demandes d’emploi.

[11] La Commission soutient que l’appelante a avoué n’avoir effectué aucune démarche pour se trouver un emploi avant le mois d’octobre 2021. Elle affirme que l’appelante a changé sa version des faits lorsque la décision initiale a été rendue par la Commission. La Commission fait valoir que l’appelante se contredit parce que même si elle mentionne avoir fait des recherches d’emploi dans le domaine de la restauration à compter du mois d’octobre 2021, elle a également mentionné qu’il n’y avait pas assez de restaurants dans sa région.

[12] L’appelante a expliqué lors de l’audience qu’elle a effectivement fait des démarches d’emploi dans le domaine de la restauration et celui du service à la clientèle et qu’elle a sollicité tous les commerces possibles dans sa localité, à X. Elle explique avoir également sollicité des emplois à X, localité où ses cours sont donnés. Elle explique qu’elle aurait pu travailler avant ou après ses cours.

[13] En ce sens, l’appelante a présenté sa candidature à différents endroits à compter du 16 août 2021. Elle a été embauchée par X en septembre 2021. Cependant, comme elle l’a expliqué à la Commission, à compter du mois d’octobre 2021, elle a effectué des démarches d’emploi parce que son employeur ne lui offrait que deux quarts de travail.

[14] Elle a donc présenté sa candidature chez Métro, chez IGA et chez Maxi parce qu’elle avait su qu’il était possible d’y travailler la nuit. Elle a également présenté sa candidature chez Tim Hortons, chez X et à X.

[15] Elle a également présenté sa candidature pour travailler dans un de ces restaurants à X : Pizza Hut, A&W, McDonald’s.

[16] Elle a poursuivi ses démarches pendant l’hiver 2021, elle a présenté sa candidature dans une pharmacie pour travailler comme caissière et au restaurant X. Elle espère obtenir un emploi au restaurant McDonald’s puisqu’elle a récemment participé à un entretien virtuel par Zoom.

[17] L’appelante a expliqué qu’elle vérifiait régulièrement les emplois disponibles sur le site d’Emploi-Québec.

[18] Je suis d’avis que l’appelante a fait des démarches suffisantes et raisonnables pour se trouver un emploi à compter du 16 août 2021. D’ailleurs, elle a trouvé un emploi au X, lequel emploi elle occupe depuis le mois de septembre 2021. Cependant, comme l’employeur ne lui offre pas suffisamment d’heures de travail par semaine, l’appelante a poursuivi ses démarches, soit pour combiner un autre emploi, soit pour trouver un emploi à temps plein parce qu’elle doit travailler pour subvenir à ses besoins.

[19] Bien que je suis d’accord avec la Commission que les déclarations de l’appelante semblent contradictoires, comme elle l’a expliqué lors de l’audience, l’appelante ne comprenait pas bien le but des appels logés par l’agent de la Commission et elle n’a fait que répondre aux questions sans trop savoir ce qui était recherché. Lors de sa demande de révision, elle demande de façon transparente de modifier sa déclaration.

[20] Il est vrai que la transcription des entretiens ne démontre pas clairement si l’appelante a été questionnée sur les démarches d’emploi qu’elle a faites. Ainsi, bien que ses déclarations semblent diverger et qu’elle semble tenter de fournir des réponses adéquates lui permettant de recevoir des prestations, dans les faits, elle a ajusté ses réponses parce qu’elle voulait prendre ses responsabilités.

[21] L’appelante a démontré avoir fait des démarches pour se trouver un emploi à compter du 16 août 2021. Elle s’est même trouvé un emploi à compter du mois de septembre 2021, ce qui démontre qu’elle avait fait des démarches pour se trouver un emploi avant le mois d’octobre 2021.

[22] Malgré le fait que les possibilités d’emploi étaient plus limitées à X qu’à Montréal, à titre d’exemple, l’appelante a démontré sa disponibilité à travailler pour occuper emploi dès qu’il était disponible. Elle a recherché activement un emploi dans des secteurs comme la restauration ou le service à la clientèle.

[23] Bien que les transcriptions des entretiens entre l’appelante et l’agent de la Commission indiquent que l’appelante n’était pas disponible ni intéressée à occuper un emploi plus de 25 heures par semaine et qu’elle limitait le type d’emploi qu’elle recherchait, je donne une préférence au témoignage de l’appelante lors de l’audience qui explique qu’elle devait subvenir à ses besoins, qu’elle aurait accepté autant d’heures que possibles offertes par un employeur et qu’elle aurait même abandonné un cours pour pouvoir occuper un emploi. En ce sens, l’appelante a demandé une modification à son horaire de cours.

[24] L’appelante a persévéré dans ses démarches pour se trouver un emploi à compter du 16 août 2021. Je conclus qu’elle a démontré sa disponibilité à travailler au sens du paragraphe 50(8) de la Loi ainsi qu’en vertu des articles 9.001 et 9.002 du Règlement.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[25] La jurisprudence établit trois éléments à examiner pour déterminer si un prestataire est capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable. L’appelante doit prouver les trois éléments suivantsNote de bas de page 3 :

  • montrer qu’elle veut retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert;
  • faire des démarches pour trouver un emploi convenable;
  • démontrer l’absence de conditions personnelles qui limiteraient indûment (c’est-à-dire qui limiteraient trop) ses chances de retourner travailler.

[26] Au moment d’examiner chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite de l’appelante.Note de bas de page 4

Vouloir retourner travailler

La Commission affirme que l’appelante ne démontre pas un désir de vouloir retourner travailler alors qu’elle se consacrait à sa formation qu’elle suivait à temps plein.

Comme mentionné dans la section précédente, l’appelante a fait plusieurs démarches pour se trouver un emploi. Elle a indiqué qu’elle cherchait activement un emploi parce qu’elle devait subvenir à ses besoins et elle a mentionné avoir demandé de suivre ses cours suivant un autre horaire afin de lui permettre de travailler.

[27] Je retiens des explications de l’appelante qu’elle étudiait à temps plein, mais qu’elle était disponible pour travailler et qu’elle était activement à la recherche d’un emploi.

[28] L’appelante a démontré un désir de vouloir retourner travailler à compter du 16 août 2021.

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[29] L’appelante a la responsabilité de chercher activement un emploi convenable afin de pouvoir obtenir des prestations d’assurance-emploi.Note de bas de page 5

[30] La Commission soutient que l’appelante a miné sa crédibilité en modifiant sa version des faits. Elle fait valoir que le dossier démontre qu’elle n’a fait aucune démarche pour se trouver un emploi.

[31] L’appelante a affirmé lors de l’audience qu’elle est disponible pour travailler.

Comme mentionné dans la section précédente, elle a présenté sa candidature à plusieurs employeurs. Par exemple, elle a sollicité les employeurs suivants : Métro, IGA, Maxi, Tim Hortons, X, X, Pizza Hut, A&W, McDonald’s et le restaurant X.

[32] Elle a évalué les emplois disponibles sur le site d’Emploi-Québec.

[33] Pour pouvoir recevoir des prestations régulières d’assurance‑emploi, l’appelante doit être disponible pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie qu’elle doit être à la recherche d’un emploi.

[34] Je constate que l’appelante a fait des efforts pour se trouver un emploi convenable à compter du 16 août 2021.

[35] Malgré qu’elle a été embauchée à X pour travailler les fins de semaine, soit le vendredi et le samedi, l’appelante a continué ses démarches d’emploi.

[36] Je conclus que l’appelante a fait des efforts pour se trouver un emploi convenable à compter du 16 août 2021.

Limiter indûment ses chances de retourner travailler

[37] La Commission soutient que l’appelante n’a pas réussi à réfuter la présomption de non-disponibilité pendant qu’elle suivait une formation à temps plein parce qu’elle limite sa disponibilité pour ne travailler qu’à temps partiel.

[38] L’appelante a déclaré qu’elle étudiait au programme en DEP en cuisine à temps plein du 16 août 2021 au 30 août 2022. Ces cours sont dispensés du lundi au vendredi de 8h00 à 16h00.

[39] Je présume que les cours auxquels participe l’appelante la rendent non disponible pour travailler au sens de la Loi.

[40] Cette présomption de non-disponibilité peut être renversée en fonction de quatre principes se rapportant spécifiquement aux cas de retour aux études.Note de bas de page 6

[41] Ces principes sont les suivantsNote de bas de page 7:

  • Les exigences de présence au cours ;
  • Le consentement du prestataire à abandonner ses études pour accepter un emploi;
  • Le fait que le prestataire ait déjà travaillé dans le passé à des heures irrégulières;
  • L’existence de « circonstances exceptionnelles » qui permettraient au prestataire de travailler tout en suivant son cours.

[42] Le 23 novembre 2021, l’appelante a déclaré qu’elle était à la recherche d’un emploi.

[43] Lors de l’audience, elle a précisé que malgré qu’elle suivait une formation à temps plein, elle était disponible pour travailler plus de 25 heures par semaine parce qu’elle devait subvenir à ses besoins. Contrairement à ce qu’affirme la Commission, elle soutient qu’elle cherche à travailler le plus grand nombre d’heures possible et qu’elle a demandé une modification à son horaire de cours.

[44] L’appelante explique qu’avant d’amorcer cette formation, elle étudiait au niveau secondaire et qu’elle travaillait chez Amir 40 heures par semaine. Après avoir obtenu son diplôme d’études secondaires, elle avait l’intention de s’inscrire à une formation en génie civil au CÉGEP, mais elle n’avait pas réussi tous les prérequis. Elle a donc continué à travailler chez X avant de cesser d’occuper son emploi en raison de la pandémie. Elle explique que son employeur ne l’a jamais rappelé.

[45] L’appelante a donc décidé de suivre une formation en cuisine et, comme elle habite en appartement avec son partenaire, elle devait travailler pour subvenir à ses besoins.

[46] Elle fait valoir qu’elle est disponible pour travailler à temps plein depuis le 16 août 2021

[47] Enfin, elle mentionne qu’elle a demandé un changement d’horaire de cours afin de débuter ses cours à 13h00 plutôt qu’à 8h00 et ainsi lui permettre de travailler suivant un autre horaire.

[48] Comme la Commission l’affirme : un prestataire qui suit un cours de formation sans être dirigé par une autorité désignée doit prouver qu’il est capable de travailler et disponible à cette fin et incapable de se trouver un emploi convenable. Le prestataire doit satisfaire aux exigences relatives à la disponibilité au même titre que tout autre prestataire qui souhaite obtenir des prestations régulières.Note de bas de page 8

[49] Dans ce cas-ci, je suis d’avis que l’appelante a réfuté la présomption de non-disponibilité pendant qu’elle était aux études. Elle a démontré un historique de travail à temps plein tout en se consacrant à ses études au niveau secondaire. Elle a également démontré avoir fait activement des démarches d’emploi orientées vers l’obtention d’un emploi et elle n’avait pas l’intention de restreindre son horaire de travail.

[50] J’estime que l’existence de « circonstances exceptionnelles » permet à l’appelante de travailler tout en suivant sa formation.

[51] Les seuls antécédents qui peuvent être considérés pour établir une période de prestations ne sont pas les heures d’emploi assurables cumulées alors qu’un prestataire travaille à temps plein. Et, les antécédents d’emploi ne sont pas le seul fondement sur lequel la présomption de disponibilité peut être réfutée.Note de bas de page 9 En effet, la présomption de non-disponibilité peut être réfutée par une preuve de circonstances exceptionnelles.Note de bas de page 10

[52] Ainsi, les circonstances exceptionnelles peuvent être associées à des antécédents d’emploi à temps partiel.

[53] L’appelante suit des cours selon un horaire à temps plein depuis le 16 août 2021, mais elle a réussi à renverser la présomption selon laquelle une personne suivant un cours de formation à temps plein, de sa propre initiative, n’est pas disponible à travailler.Note de bas de page 11

[54] L’appelante a expliqué avoir déjà travaillé à temps partiel tout en étudiant à temps plein. Elle a expliqué que même si elle avait un statut d’employé à temps partiel, elle travaillait parfois 40 heures par semaine et, dans les faits, elle travaillait à temps plein depuis plusieurs semaines lorsqu’elle a cessé d’occuper son emploi. L’appelante combine son horaire de travail et d’études depuis quelques années et elle n’a d’autres choix de le faire puisqu’elle doit subvenir à ses besoins.

[55] Je conclus qu’aucune condition personnelle ne limitait indûment les chances de l’appelante de se trouver un emploi convenable à compter du 16 août 2021. Elle a démontré qu’elle était disponible pour travailler tout en étudiant à temps plein.

Alors, l’appelante était-elle capable de travailler et disponible pour le faire ?

[56] Je dois appliquer les critères permettant de déterminer si l’appelante était disponible pour travailler au sens de la Loi sur l’assurance-emploi et si elle peut recevoir des prestations à compter du 16 août 2021.

[57] Pour être admissible à recevoir des prestations, l’appelante doit être disponible pour travailler tout jour ouvrable de sa période de prestations et elle doit démontrer qu’elle a fait des démarches pour se trouver un emploi tout jour ouvrable de sa période de prestations.

[58] Les circonstances exceptionnelles reliées à la pandémie de la Covid-19 me permettent de conclure que l’appelante était disponible pour travailler tout en suivant sa formation. Elle a également démontré avoir fait des efforts pour se trouver un emploi.

[59] Je conclus que l’appelante a démontré sa disponibilité à travailler à compter du 16 août 2021 au sens du paragraphe 50(8) de la Loi ainsi qu’en vertu des articles 9.001 et 9.002 du Règlement sur l’assurance-emploi.

[60] Selon mes conclusions sur les trois éléments, je conclus que l’appelante a démontré qu’elle était capable de travailler et disponible pour le faire.

Conclusion

[61] L’appel est accueilli.

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