Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : KT c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 457

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : K. T.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (453949) datée du 8 février 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 22 mars 2022
Personnes présente à l’audience : Appelant

Date de la décision : Le 11 avril 2022
Numéro de dossier : GE-22-605

Sur cette page

Décision

[1] Je rejette l’appel avec modification.

[2] Je constate que, pour la période du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021, la Commission a rendu une décision initiale dans laquelle elle autorisait les études de la prestataire et acceptait de lui verser des prestations avant de rendre sa décision du 17 décembre 2021.

[3] J’estime que même si la Commission peut revenir en arrière et revoir cette décision initiale, sa décision de le faire n’a pas été prise judiciairement, car elle a agi de mauvaise foi.

[4] En rendant la décision que la Commission aurait dû rendre, j’estime qu’elle n’aurait pas dû revenir en arrière et revoir sa décision initiale, ce qui signifie que la décision initiale est maintenue et que la prestataire n’est pas inadmissible aux prestations pour la période du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021.

[5] Pour la période du 7 septembre 2021 au 8 avril 2022, aucune décision initiale n’a été rendue avant la décision du 17 décembre 2021, et en examinant la disponibilité de la prestataire, j’ai constaté qu’elle n’était pas disponible. Par conséquent, l’inadmissibilité aux prestations doit être maintenue pour cette période.

Aperçu

[6] Toute partie prestataire doit être disponible pour travailler afin de recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi. La disponibilité est une exigence permanente : la partie prestataire doit être à la recherche d’un emploi.

[7] Une demande de prestations régulières d’assurance-emploi a été automatiquement établie à l’égard de la prestataire le 4 octobre 2020, après la fin de ses prestations d’assurance-emploi d’urgence.

[8] La prestataire recevait des prestations tout en étant aux études. Elle a signalé ce fait à la Commission à plusieurs reprises et a continué à recevoir des prestations.

[9] En septembre 2021, la Commission s’est entretenue avec la prestataire au sujet de ses études.

[10] Après avoir examiné tous les renseignements que la prestataire lui a fournis lors de l’appel de septembre 2021, ainsi que les renseignements qu’elle lui avait fournis auparavant, la Commission a décidé que la prestataire n’était pas disponible pour travailler pendant qu’elle était aux études et l’a rendue inadmissible aux prestations du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021 et du 7 septembre 2021 au 28 avril 2022.

[11] La prestataire se demande comment la Commission peut la rendre inadmissible aux prestations.

[12] Elle dit avoir parlé à des agentes ou agents de la Commission à plusieurs reprises et avoir rempli ses rapports par téléphone, en disant à plusieurs agentes et agents qu’elle allait à l’école et en précisant son horaire, et qu’ils ont approuvé sa formation, lui ont versé des prestations et ne lui ont jamais dit qu’il y avait un problème.

[13] La prestataire affirme que la Commission a agi de mauvaise foi lorsqu’elle a rendu sa décision de la rendre inadmissible aux prestations. En effet, la Commission était pleinement consciente du fait que la prestataire était aux études depuis plusieurs mois et que rien n’avait changé dans sa situation, mais que soudainement, elle a décidé de rendre la prestataire inadmissible aux prestations.

Questions que je dois examiner en premier

50(8) Inadmissibilité

[14] Dans ses observations, la Commission déclare qu’elle a rendu la prestataire inadmissible au titre de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi. L’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi porte sur une personne qui ne prouve pas à la Commission qu’elle a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable.

[15] En examinant la preuve, je n’ai pas vu que la Commission a demandé à la prestataire de prouver qu’elle a fait des démarches habituelles et raisonnables, ou que la Commission ait affirmé que si elle l’avait fait, sa preuve était insuffisante.

[16] Je constate également que la Commission n’a pas présenté d’observations détaillées sur la façon dont la prestataire n’a pas réussi à lui prouver qu’elle faisait des démarches habituelles et raisonnables. La Commission a seulement résumé ce que la loi dit en ce qui concerne l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi et ce qu’elle dit au sujet des démarches habituelles et raisonnables.

[17] En raison de l’absence de preuve à l’appui du fait que la Commission a demandé à la prestataire de prouver qu’elle a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable conformément à l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission n’a pas rendu la prestataire inadmissible au titre de cet article de loi. Par conséquent, il ne s’agit pas d’une question que je dois examiner.

Document déposé après l’audience

[18] Lors de l’audience, la prestataire a soulevé la question de savoir comment la Commission a pu rendre sa décision de la rendre inadmissible parce qu’elle n’était pas disponible pendant ses études, alors qu’elle avait déjà décidé de lui verser des prestations. Elle a également soutenu que la décision de la rendre inadmissible avait été prise de mauvaise foi.

[19] J’ai demandé à la Commission de répondre à ces arguments.

[20] Plus précisément, j’ai demandé à la Commission si elle estimait avoir déjà rendu une décision concernant la disponibilité de la prestataire et ses études, et si elle estimait que sa décision de revoir sa disponibilité avait été prise de façon judiciaire.

[21] La Commission a répondu le 23 mars 2022Note de bas de page 1, et j’ai tenu compte de ses réponses pour rendre ma décision.

Questions en litige

[22] La Commission a-t-elle rendu une décision initiale dans laquelle elle approuvait la formation de la prestataire avant de rendre sa décision du 17 décembre 2021?

[23] Dans l’affirmative, peut-elle revenir en arrière et revoir cette décision?

[24] Si elle peut revoir cette décision, a-t-elle agi de façon judiciaire lorsqu’elle a rendu sa décision?

[25] La prestataire est-elle disponible pour travailler?

Analyse

La Commission a-t-elle rendu une décision initiale?

[26] Il y a deux périodes pour lesquelles la prestataire était inadmissible : du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021 et du 7 septembre 2021 au 28 avril 2022. Je dois établir si une décision initiale a été rendue pour chacune des deux périodes.

Période du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021

[27] La prestataire fait valoir que la Commission a approuvé ses études, car la prestataire en a parlé à plusieurs reprises, au téléphone avec des agentes et agents et en remplissant des rapports en ligne. Elle n’a jamais été informée qu’il y avait un problème et a reçu des prestations.

[28] La Commission soutient qu’elle n’a jamais rendu de décision initiale dans laquelle elle acceptait que la prestataire était admissible à des prestations, car elle n’a pas examiné son admissibilité à des prestations avant sa décision du 17 décembre 2021.

[29] La Commission affirme qu’en raison de l’ordonnance provisoire no 10, elle a adopté une approche opérationnelle modifiée pour traiter les demandes des personnes en formation : elle a automatiquement autorisé des périodes de formation sans avoir procédé à un examen.

[30] Selon la Commission, le fait d’ [traduction] « autoriser » signifie d’ [traduction] « autoriser à devenir payable »; cela ne signifie pas que la disponibilité de la prestataire pour le travail a été examinée et jugée en règle.

[31] La Commission soutient que bien qu’il puisse être écrit à la fin des rapports en ligne, lorsqu’ils ont été remplis par la prestataire, que sa formation a été approuvée, cela signifie simplement que le rapport a été autorisé à devenir payable, et ce n’est pas une décision rendue concernant l’admissibilité de la prestataire aux prestations.

[32] Respectueusement, je ne suis pas d’accord avec les observations de la Commission.

[33] Le choix d’autoriser automatiquement toutes les formations peut seulement être appelé une décision.

[34] Même en utilisant les mots de la Commission, selon laquelle le terme [traduction] « autoriser » signifie uniquement [traduction] « autoriser à devenir payable », il s’agit tout de même d’une décision, puisque la Commission a décidé d’autoriser le paiement des prestations.

[35] Une autre preuve que la Commission a rendu une décision provient de l’examen des rapports en ligne que la prestataire a remplis.

[36] En regardant les rapports en ligne précédents de la prestataire, il est dit à la fin : [traduction] « Nous avons autorisé votre période de formation [...] » Encore une fois, nous voyons qu’une décision a été rendue : la Commission a autorisé la formation.

[37] Cependant, à la fin du rapport en ligne que la prestataire a rempli le 12 septembre 2021, il est indiqué : [traduction] « Les détails relatifs à la formation que vous avez fournis ont été transmis à un Centre Service Canada pour examen. Votre paiement sera retardé jusqu’à ce qu’une décision soit rendue. »

[38] Ce texte montre clairement que dans le rapport en ligne du 12 septembre 2021, la décision d’autoriser la formation n’a pas été rendue et qu’aucune prestation ne serait versée jusqu’à ce qu’une décision soit rendue.

[39] Ainsi, dans les rapports en ligne précédents où il est indiqué que la formation est autorisée, il n’est pas fait mention d’un retard de paiement, ce qui signifie donc qu’une décision a été rendue, puisque selon le rapport en ligne du 12 septembre 2021, tant qu’une décision n’est pas rendue, le paiement n’est pas effectué.

[40] De plus, dans la présente affaire, la prestataire n’a pas seulement déposé ses demandes en ligne. Elle en a modifié une par téléphone. Lorsque la prestataire a modifié son rapport par téléphone, rien ne dit que sa formation n’a pas été approuvée ou qu’elle devait être examinée afin qu’une décision soit rendue sur le paiement. En fait, selon l’information, la prestataire a été avisée de la décision. Il est clair qu’une décision a été rendue et que la demande de la prestataire a été approuvéeNote de bas de page 2.

[41] Donc, je conclus que la Commission a rendu une décision initiale dans laquelle elle a conclu que la prestataire était disponible pour travailler avant de rendre sa décision du 17 décembre 2021 sur la disponibilité de la prestataire pour la période du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021.

Période du 7 septembre 2021 au 28 avril 2022

[42] Toutefois, pour la période du 7 septembre 2021 au 28 avril 2022, je conclus que la Commission n’a pas rendu de décision initiale approuvant la formation de la prestataire et la jugeant disponible pour travailler avant de rendre sa décision du 17 décembre 2021.

[43] Je conclus cela, car le seul rapport de la prestataire qui relève de cette période est celui du 12 septembre 2021Note de bas de page 3, et il est clairement écrit à la fin de ce rapport que les détails relatifs à la formation ont été transmis pour examen et qu’aucun paiement ne serait effectué avant qu’une décision ne soit rendue.

La Commission peut-elle revenir en arrière et revoir une décision antérieure?

[44] Puisque j’ai conclu que la Commission n’a pas rendu de décision initiale pour la période du 7 septembre 2021 au 28 avril 2022 avant de rendre sa décision le 17 décembre 2021, je n’ai pas besoin d’examiner si elle peut revenir en arrière et revoir une décision concernant cette période, puisqu’il n’y a pas de décision initiale à revoir.

[45] Cependant, pour la période du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021, pour laquelle je juge que la Commission a rendu une décision initiale avant de rendre sa décision du 17 décembre 2021, j’estime que la Commission peut revenir en arrière et revoir sa décision initiale dans laquelle elle approuvait la formation de la prestataire et jugeait qu’elle était disponible pour travailler pendant cette période.

[46] Il y a deux articles de loi permettant à la Commission de revenir en arrière et de revoir une demandeNote de bas de page 4.

[47] La Commission mentionne les deux articles dans ses observations en disant qu’ils lui donnent le pouvoir d’examiner la disponibilité de la prestataire.

[48] Je suis d’accord avec les observations de la Commission. Quel que soit l’article qu’elle a choisi d’utiliser pour examiner une demande, les deux articles de loi établissent clairement que la Commission a ce pouvoir.

[49] Les deux articles donnent à la Commission de larges pouvoirs en matière d’examen.

[50] Aucun de ces articles ne fixe de limites quant aux raisons pour lesquelles la Commission peut revoir une demande. Il n’y a pas de circonstances qui doivent être remplies pour permettre l’examen d’une demande; si la Commission a envie d’examiner une demande, la loi le lui permet.

[51] La seule limitation énoncée dans l’un ou l’autre de ces articles est un délai fixé à 36 mois après le versement des prestations. Cela n’est pas en cause dans la présente affaire, car la Commission respecte bien ce délai. En effet, les prestations ont été versées au début de l’année 2021 et la Commission a effectué son examen et a rendu sa décision le 17 décembre 2021.

La Commission a-t-elle agi de manière judiciaire lorsqu’elle a rendu sa décision?

[52] Bien que la Commission puisse revenir en arrière et revoir sa décision pour la période du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021, sa décision de le faire est discrétionnaire.

[53] Cela signifie que la Commission n’est pas obligée de procéder à un examen ou tenue de le faire, mais qu’elle peut choisir de le faire si elle le souhaite. Les deux articles qui permettent à la Commission d’examiner une demande précisent qu’elle « peut » examiner une demande, et non qu’elle doit l’examiner.

[54] En d’autres mots, je ne peux intervenir, c’est-à-dire modifier la décision de la Commission, que si elle n’a pas exercé correctement son pouvoir discrétionnaire au moment où elle a rendu sa décisionNote de bas de page 5.

[55] Pour que la Commission ait fait un usage correct de son pouvoir discrétionnaire, elle ne doit pas avoir agi de mauvaise foi, ou dans un but ou pour un motif irrégulier, avoir pris en compte un facteur non pertinent ou avoir ignoré un facteur pertinent ou avoir agi de manière discriminatoire lorsqu’elle a décidé de revoir sa décision initiale pour la période du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021.

[56] La prestataire affirme que la Commission a agi de mauvaise foi, car elle ne lui a pas dit que le fait d’être étudiante signifiait qu’elle ne pouvait pas recevoir d’assurance-emploi. La prestataire dit qu’il est de la responsabilité de la Commission de détecter ce genre de choses lorsque les gens leur fournissent les renseignements appropriés, ce qu’elle a fait.

[57] La prestataire affirme que la Commission a agi dans un but ou pour un motif irrégulier, car elle a simplement versé de l’argent sans prendre aucune des mesures nécessaires pour s’assurer qu’il s’agissait de la bonne décision et que les personnes remplissaient réellement les conditions requises pour recevoir l’argent.

[58] La prestataire affirme que la Commission a ignoré le fait pertinent selon lequel elle leur avait dit qu’elle était étudiante à temps plein, car toutes les personnes à qui elle a parlé à la Commission ont simplement ignoré ce fait.

[59] La prestataire a déclaré qu’elle ne pensait pas que la Commission avait fait preuve de discrimination à son égard de quelque façon que ce soit.

[60] La Commission affirme qu’il n’y a aucune preuve qu’elle a agi de mauvaise foi lorsqu’elle a exercé son autorité pour revoir cette demande, car elle n’a pas rendu une décision sur la disponibilité de la prestataire pour ensuite revenir sur cette décision en utilisant les mêmes faits sur lesquels la décision initiale était fondée.

[61] Avec tout le respect possible, je trouve que c’est exactement ce qu’elle a fait.

[62] La prestataire a signalé qu’elle était aux études sur tous ses rapports, et à la fin de chaque rapport en ligne, il est indiqué que sa formation a été approuvée et elle a reçu des prestations.

[63] Elle a également rempli un questionnaire de formation le 16 janvier 2021, détaillant ses études et sa disponibilitéNote de bas de page 6.

[64] De plus, elle a parlé à une agente ou un agent au téléphone au sujet de son rapport, mais l’agente ou l’agent ne lui a jamais dit qu’elle ne remplissait pas les conditions requises ou qu’elle ne pouvait pas toucher ses prestations en raison de ses études, et elle a continué à recevoir des prestations.

[65] Le fait de dire initialement que les prestations de la prestataire ont été approuvées et de payer lesdites prestations, alors qu’elle a déclaré toutes ses études, qu’elle a rempli un questionnaire de formation et qu’elle a parlé à une agente ou un agent au téléphone, puis, plus tard, de décider de revenir en arrière et de revoir cette décision, pour ensuite la modifier en fonction des mêmes renseignements que ceux utilisés pour approuver initialement les prestations, est une décision prise de mauvaise foi par la Commission.

[66] Prouver qu’une conclusion a été prise de mauvaise foi est un critère élevé à remplir.

[67] Le simple fait que la Commission ait revu une demande qu’elle avait initialement approuvée et pour laquelle des prestations ont été versées n’est pas en soi une décision prise de mauvaise foi.

[68] La différence dans le cas de la prestataire est que, même en ignorant le fait de savoir si une approbation automatique constitue une décision (ce que j’ai conclu ci-dessus), elle a parlé avec une agente ou un agent de la Commission. Cette personne qui travaille pour la Commission et qui a parlé à la prestataire au sujet de son rapport lorsque la prestataire a appelé pour le modifier, n’a jamais dit qu’il y avait un problème avec son admissibilité aux prestations, ou qu’il pouvait y avoir un problème avec le paiement des prestations.

[69] Cela signifie que cette agente ou cet agent a dû se pencher sur la question de savoir si les renseignements que la prestataire lui donnait auraient une incidence sur son admissibilité aux prestations, si quelque chose devait être examiné. Cette agente ou cet agent a décidé qu’il n’y avait rien à examiner et a autorisé le versement des prestations à la prestataire.

[70] Puis, à une date ultérieure, alors que les prestations de la prestataire avaient déjà été approuvées et versées, la décision a été prise de revenir en arrière et d’examiner la décision initiale de verser des prestations à la prestataire et de modifier la décision initiale pour lui refuser des prestations en se fondant sur les mêmes renseignements que ceux utilisés pour lui accorder des prestations.

[71] Je tiens à être clair. Il n’est pas nécessaire qu’une condition soit remplie pour permettre à la Commission de revenir en arrière et d’examiner la demande de la prestataire. Il n’est pas nécessaire que de nouveaux renseignements soient découverts pour que la Commission ait le pouvoir de revenir en arrière et de revoir la demande. Si elle souhaite revoir une demande, elle peut le faire.

[72] Cependant, même si elle a le pouvoir de revenir en arrière et de revoir une demande sur un coup de tête, cette décision doit toujours être prise de manière judiciaire.

[73] Décider de revenir en arrière, de revoir la décision et de la modifier sur un simple coup de tête relève de la mauvaise foi et ne constitue pas un exercice judiciaire du pouvoir discrétionnaire.

[74] Une décision initiale a été rendue, les faits ont été examinés, la formation de la prestataire a été autorisée et les prestations ont été versées. Puis, à une date ultérieure, une autre personne de la Commission a décidé qu’elle aurait rendu une décision différente avec les mêmes renseignements et a décidé d’invoquer le pouvoir de réexamen de la Commission pour revenir en arrière et modifier la décision afin d’obtenir un résultat différent.

[75] Je note que la Commission n’a pas non plus fait valoir qu’elle essayait de corriger une erreur, ce qui soutient que la décision initiale de verser des prestations à la prestataire a été rendue de manière appropriée. Elle a simplement décidé à une date ultérieure qu’elle n’aimait pas cette décision.

[76] La décision de revenir en arrière a été prise de mauvaise foi, car il n’y avait rien d’autre dans le fait de revenir en arrière et de changer la décision qu’une apparente aversion pour la décision initiale.

[77] Étant donné que j’ai conclu que la Commission a agi de mauvaise foi, j’estime qu’il n’est pas nécessaire que j’examine tous les autres arguments de la prestataire expliquant pourquoi la Commission n’a pas agi de façon judiciaire.

[78] Étant donné que la Commission n’a pas agi « de façon judiciaire » lorsqu’elle a rendu sa décision, je vais rendre la décision que la Commission aurait dû rendre au titre de l’article 54(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.

[79] En rendant la décision que la Commission aurait dû rendre, j’estime que la décision initiale d’approuver la formation de la prestataire, et de conclure qu’elle est disponibilité pour travailler et admissible à des prestations pour la période du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021, n’aurait pas dû être réexaminée.

[80] Je ne vois rien qui puisse justifier un retour en arrière pour examiner et modifier la décision déjà rendue sur la disponibilité et l’admissibilité de la prestataire aux prestations. Le fait qu’une autre personne aurait rendu une décision différente de la décision initiale ne constitue pas un motif suffisant.

[81] Comme elle n’aurait pas dû être examinée, cela signifie que la décision initiale demeure inchangée et que la prestataire n’est donc pas inadmissible aux prestations pour la période du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021.

[82] Cependant, la question de l’inadmissibilité pour la période du 7 septembre 2021 au 28 avril 2022 demeure, et puisque j’ai conclu qu’aucune décision initiale n’avait été rendue pour cette période avant la décision du 17 décembre 2021, il n’y a aucun problème à ce que la Commission rende une décision sur la disponibilité de la prestataire pour cette période.

[83] Je vais donc poursuivre l’analyse habituelle de la disponibilité pour cette période d’inadmissibilité.

La prestataire était-elle disponible pour travailler pendant la période du 7 septembre 2021 au 28 avril 2022?

[84] La loi exige qu’une partie prestataire démontre qu’elle est disponible pour travaillerNote de bas de page 7. Pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, la partie prestataire doit être capable de travailler, être disponible pour le faire et être incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 8.

[85] En examinant si une personne qui étudie est disponible aux termes de l’article 18 de la Loi sur l’assurance-emploi, la Cour d’appel fédérale a déclaré en 2010 qu’il existe une présomption selon laquelle une partie prestataire qui étudie à temps plein n’est pas disponible pour travailler.

[86] La Loi sur l’assurance-emploi a été récemment modifiée et les nouvelles dispositions s’appliquent à la prestataireNote de bas de page 9. D’après ce que je lis des nouvelles dispositions, la présomption d’indisponibilité a été écartée. Une personne qui étudie à temps plein n’est pas présumée indisponible, mais doit prouver sa disponibilité comme tout autre prestataire.

[87] Toutefois, ces dispositions ont expiré après un certain temps, au plus tard le 25 septembre 2021Note de bas de page 10.

[88] Toute la période pendant laquelle la prestataire est inadmissible ne tombe pas dans la période où ces dispositions s’appliquent. Cependant, étant donné que le début de l’inadmissibilité de la prestataire relève de ces dispositions et que la Commission a examiné l’inadmissibilité sous l’angle de ces dispositionsNote de bas de page 11, je vais également les examiner.

[89] Pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, une partie prestataire doit être capable de travailler, être disponible pour le faire et être incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 12. La prestataire doit prouver trois choses pour démontrer qu’elle était : 

  1. le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable serait offert;
  2. l’expression de ce désir par des démarches pour trouver un emploi convenable;  
  3. l’absence de conditions personnelles pouvant limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travailNote de bas de page 13.

[90] Je dois prendre en compte chacun de ces facteurs pour pouvoir trancher la question de la disponibilitéNote de bas de page 14, et cela, en examinant l’attitude et la conduite de la prestataireNote de bas de page 15.

La prestataire a-t-elle le désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui sera offert?

[91] Je conclus que la prestataire a démontré qu’elle a le désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert.

[92] La prestataire a témoigné qu’elle voulait travailler, qu’elle cherchait du travail et qu’elle avait fait des demandes d’emploi en personne afin d’augmenter ses chances, mais qu’en raison des fermetures liées à la COVID, presque aucun endroit n’embauchait. Ainsi, malgré le fait qu’elle cherchait continuellement un emploi, elle n’a jamais réussi à trouver quelque chose.

[93] J’accepte que la prestataire souhaite travailler, et les démarches supplémentaires qu’elle a effectuées en se rendant en personne chez les employeurs pour tenter de trouver un emploi appuient son désir de retourner sur le marché du travail.

La prestataire a-t-elle fait des démarches pour trouver un emploi convenable?

[94] La prestataire fait suffisamment de démarches pour trouver un emploi convenable.

[95] Elle a témoigné qu’elle était et est toujours à la recherche d’un emploi.

[96] Elle dit avoir postulé à des endroits sur le campus et à l’extérieur, et se présente habituellement en personne pour essayer de trouver du travail.

[97] Elle a postulé dans toutes sortes d’établissements de vente au détail et de restauration rapide, mais n’a rien pu trouver en raison des restrictions liées à la COVID.

[98] Je conclus que les démarches de la prestataire pour chercher du travail, que ce soit en personne ou en ligne, à une grande variété d’endroits, représentent des démarches suffisantes et continues pour trouver un emploi.

La prestataire a-t-elle établi des conditions personnelles pouvant limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail?

[99] Je conclus que la prestataire a établi des conditions personnelles qui pourraient limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail, cette condition étant ses études.

[100] La prestataire affirme que lorsqu’elle avait cinq cours, ceux-ci finissaient généralement à midi, de sorte qu’elle avait les après-midi et les soirées de libres pour travailler et qu’elle était toujours libre les fins de semaine.

[101] La prestataire dit que lorsqu’elle était étudiante-athlète, son entraînement avait lieu au milieu de la journée et qu’elle n’avait aucun problème à adapter son horaire de travail en conséquence.

[102] J’estime que les études de la prestataire constituent une condition personnelle qui limiterait excessivement sa capacité à retourner sur le marché du travail.

[103] Je juge que le fait que la prestataire doive assister à ses cours à des heures et des jours fixes signifie que sa disponibilité est limitée à certaines heures et à certains jours, ce qui limite ses chances de trouver un emploiNote de bas de page 16.

[104] Ses chances de trouver un emploi sont limitées, car elle peut seulement accepter des emplois dont l’horaire de travail peut s’adapter à son horaire de cours.

[105] Bien qu’elle puisse être disponible les fins de semaine, je ne regarde que sa disponibilité pour les jours ouvrables et la loi précise que les fins de semaine ne sont pas des jours ouvrablesNote de bas de page 17.

La prestataire est-elle capable de travailler et disponible pour le faire et incapable de trouver un emploi convenable pour la période du 7 septembre 2021 au 8 avril 2022?

[106] Compte tenu de mes conclusions sur chacun des trois facteurs pris dans leur ensemble, je conclus que la prestataire n’était pas disponible pour travailler durant la période du 7 septembre 2021 au 8 avril 2022.

Conclusion

[107] Je rejette l’appel avec modification.

[108] Je conclus que, pour la période du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021, la Commission a rendu une décision initiale qui était d’approuver les études de la prestataire et de lui verser des prestations avant de rendre sa décision du 17 décembre 2021.

[109] Je conclus que même si elles peuvent revenir en arrière et revoir cette décision initiale, sa décision de le faire n’a pas été prise de façon judiciaire, car elle a agi de mauvaise foi.

[110] En rendant la décision que la Commission aurait dû rendre, je conclus qu’elle n’aurait pas dû revenir en arrière et revoir sa décision initiale, ce qui signifie que la décision initiale est maintenue et que la prestataire n’est pas inadmissible pour la période du 12 janvier 2021 au 30 avril 2021.

[111] Pour la période du 7 septembre 2021 au 8 avril 2022, aucune décision initiale n’a été rendue avant que la décision du 17 décembre 2021 ne soit rendue, et en examinant la disponibilité de la prestataire, j’ai constaté qu’elle n’était pas disponible et que, par conséquent, l’inadmissibilité devait être maintenue pour cette période.

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