Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : EC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 510

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : E. C.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (443128) datée du 12 janvier 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 24 mars 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante

Date de la décision : Le 25 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-463

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La prestataire n’a pas démontré qu’elle est disponible pour travailler. Cela signifie qu’elle est exclue du bénéfice des prestations.

Aperçu

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que la prestataire n’était pas admissible aux prestations régulières d’assurance-emploi à compter du 11 janvier 2021, parce qu’elle n’est pas disponible pour travailler. Pour recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi, une partie prestataire doit être disponible pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie qu’une partie prestataire doit être à la recherche d’un emploi.

[4] Je dois décider si la prestataire a prouvé qu’elle est disponible pour travailler. Elle doit établir sa preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) qu’elle soit disponible pour travailler.

[5] La Commission affirme que la prestataire n’est pas disponible parce qu’elle a fait des démarches insuffisantes pour trouver du travail et que ses études limitent sa disponibilité.

[6] La prestataire n’est pas d’accord et déclare qu’elle ne savait pas exactement ce qui constituait des activités de recherche d’emploi. Elle pensait qu’il s’agissait seulement d’aller à des entretiens et de postuler pour des emplois, et c’est pourquoi il semble que ses démarches étaient insuffisantes. Elle ne savait pas que toutes les autres mesures qu’elle prenait pour trouver du travail constituaient des activités de recherche d’emploi, alors elle n’en a jamais parlé.

[7] La prestataire affirme qu’elle va à l’école, mais qu’elle peut travailler le soir et les fins de semaine et qu’elle a en fait recommencé à travailler en juin 2021.

Question en litige

[8] La prestataire est-elle disponible pour travailler?

Analyse

[9] Il y a deux articles de loi qui exigent que les prestataires démontrent leur disponibilité pour le travail. La Commission a décidé que la prestataire était inadmissible selon les deux articles. Elle doit donc remplir les critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[10] En premier lieu, la Loi sur l’assurance-emploi dit qu’une personne qui demande des prestations doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableFootnote 1. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente des critères qui aident à expliquer ce qui constitue des « démarches habituelles et raisonnablesFootnote 2 ». Je vais examiner ces critères plus bas.

[11] En deuxième lieu, la Loi prévoit aussi que la personne doit prouver qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais incapable d’obtenir un emploi convenableFootnote 3. Selon la jurisprudence, il y a trois éléments que la personne doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensFootnote 4. Je vais examiner ces facteurs ci-dessous.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[12] La loi énonce les critères dont je dois tenir compte pour décider si les démarches de la prestataire sont habituelles et raisonnablesFootnote 5. Je dois vérifier si ses démarches sont soutenues et si elles s’orientent vers l’obtention d’un emploi convenable. Autrement dit, il faut que la prestataire ait continué à chercher un emploi convenable.

[13] Je dois aussi évaluer les démarches que la prestataire a faites pour trouver un emploi. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente une liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte. En voici quelques exemplesFootnote 6 :

  • évaluer les possibilités d’emploi;
  • rédiger un curriculum vitæ ou une lettre de présentation;
  • s’inscrire à des outils de recherche d’emploi, à des banques d’emploi en ligne ou auprès d’agences de placement;
  • participer à des ateliers sur la recherche d’emploi ou à des salons de l’emploi;
  • faire du réseautage;
  • communiquer avec de possibles employeuses ou employeurs;
  • postuler à des emplois.

[14] La Commission dit que la prestataire n’en fait pas assez pour essayer de trouver un emploi, car lorsqu’elle examine ses démarches de recherche d’emploi, elle constate qu’il y a des mois où elle n’a présenté aucune demande et que lorsqu’elle a postulé pour des emplois, c’était seulement à quelques endroits.

[15] La prestataire affirme que lorsqu’elle a parlé à la Commission au départ, elle leur a dit qu’elle ne cherchait pas d’emploi, parce qu’elle pensait que seulement aller à des entretiens et postuler pour des emplois constituaient des activités de recherche d’emploi.

[16] La prestataire affirme qu’elle ignorait que toutes ses autres activités comptaient jusqu’à ce qu’elle voie la liste des activités considérées comme des démarches de recherche d’emploi dans les observations de la Commission.

[17] La prestataire affirme qu’elle effectue de nombreuses activités de recherche d’emploi depuis qu’elle n’a pas été appelée à reprendre son poste comme prévu en décembre 2020.

[18] La prestataire affirme que même si elle a présenté très peu de demandes, cela ne signifie pas qu’elle n’a pas cherché beaucoup de travail; le manque de demandes est simplement attribuable au fait qu’elle n’a pas trouvé beaucoup d’emplois qui fonctionnaient pour elle.

[19] La prestataire affirme qu’elle est toujours à la recherche d’emplois sur Internet et Instagram. Elle fait du réseautage avec ses professeurs à l’école pour voir s’ils sont au courant de postes vacants, discute avec d’autres étudiants pour voir quel travail ils arrivent à trouver, vérifie le tableau d’offres d’emploi à l’école, fait du réseautage avec des conférenciers invités à son école pour savoir s’ils sont au courant de possibilités d’emploi, et assiste à des salons de l’emploi à son école.

[20] La prestataire affirme poursuivre ses démarches de recherche d’emploi même si elle a recommencé à travailler en juin 2021, car elle ne veut pas travailler dans un restaurant pour le reste de sa vie.

[21] Bien qu’il soit vrai que la prestataire n’a pas présenté beaucoup de demandes, je note que postuler pour des emplois est seulement un des nombreux facteurs que la loi considère comme des démarches raisonnables et habituelles pour trouver un emploi.

[22] J’accepte le témoignage de la prestataire concernant toutes les démarches qu’elle a faites pour trouver du travail et, lorsque je les considère à la lumière de tous les facteurs que le droit établit comme des démarches raisonnables et habituelles, j’estime que la prestataire a prouvé qu’elle fait des démarches continues pour trouver un emploi qui sont raisonnables et habituelles.

[23] Par conséquent, la prestataire ne devrait pas être exclue du bénéfice des prestations au titre de cet article de la loi.

Capable de travailler et disponible à cette fin

[24] Pour établir si une personne aux études est disponible au titre de l’article 18 de la Loi, la Cour d’appel fédérale a déclaré en 2010 qu’il existe une présomption selon laquelle les personnes qui fréquentent l’école à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler.

[25] La Loi a récemment été modifiée et les nouvelles dispositions s’appliquent à la prestataireFootnote 7. Selon mon interprétation, les nouvelles dispositions écartent la présomption de non‑disponibilité. Une personne étudiant à temps plein n’est pas présumée non disponible, mais doit plutôt prouver sa disponibilité, comme toute autre partie prestataire.

[26] La jurisprudence établit trois éléments que je dois examiner pour décider si la prestataire est capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable. La prestataire doit prouver les trois choses suivantesFootnote 8 :

  1. a) Elle souhaite retourner au travail dès qu’un emploi convenable est disponible.
  2. b) Elle a fait des efforts pour trouver un emploi convenable.
  3. c) Elle n’a pas établi de conditions personnelles qui pourraient indûment (autrement dit, trop) limiter ses chances de retourner au travail.

[27] Lorsque j’examine chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite de la prestataireFootnote 9.

Désir de retourner au travail

[28] La prestataire a démontré qu’elle souhaite retourner au travail dès qu’un emploi convenable est disponible.

[29] La prestataire affirme avoir été mise à pied de son emploi dans un restaurant en raison de la COVID-19, mais qu’elle s’attendait à ce qu’on lui demande de revenir travailler en décembre 2020. Cependant, cela ne s’est pas produit.

[30] Elle a plutôt dû attendre jusqu’en juin 2021 pour recommencer à travailler.

[31] La prestataire explique que dès que son employeur l’a appelée pour revenir au travail, elle a recommencé à travailler, car elle doit rembourser ses dettes d’études.

[32] La prestataire affirme qu’avant de recommencer à travailler en juin 2021, elle faisait beaucoup d’efforts pour trouver un emploi parce qu’elle souhaitait recommencer à travailler, et devait le faire.

[33] Je juge que le fait que la prestataire ait cherché un emploi pendant qu’elle était au chômage, et qu’elle ait immédiatement accepté l’offre de son employeur de retourner au travail, même si elle était aux études, montre qu’elle avait le désir de travailler dès qu’un emploi était disponible.

Des efforts pour trouver un emploi convenable

[34] La prestataire a fait assez d’efforts pour trouver un emploi convenable.

[35] Pour tirer une conclusion sur ce deuxième élément, j’ai examiné la liste des activités de recherche d’emploi mentionnée plus haut. La liste me sert seulement de référenceFootnote 10.

[36] Les efforts de la prestataire pour trouver un nouvel emploi comprennent les suivants :

  • évaluer les possibilités d’emploi;
  • rédiger un curriculum vitæ ou une lettre de présentation;
  • s’inscrire à des outils de recherche d’emploi, à des banques d’emploi en ligne ou auprès d’agences de placement;
  • participer à des ateliers sur la recherche d’emploi ou à des salons de l’emploi;
  • faire du réseautage;
  • communiquer avec de possibles employeuses ou employeurs;
  • postuler à des emplois.

[37] Il s’agit de ce que j’ai expliqué plus haut, lorsque j’ai vérifié si les démarches de la prestataire étaient habituelles et raisonnables.

[38] Ces efforts sont suffisants pour répondre aux exigences de ce deuxième élément. La prestataire a fait des efforts continus et vastes pour trouver un emploi.

[39] Il est vrai que la prestataire a présenté peu de demandes, mais ce n’est pas le facteur déterminant pour établir si elle a fait suffisamment d’efforts; tous les efforts qu’elle a déployés pour trouver un emploi doivent être pris en compte, pas seulement le nombre de demandes qu’elle a présentées.

Limitation indue des chances de retourner au travail

[40] La prestataire a fixé des conditions personnelles pouvant limiter indûment ses chances de retourner au travail.

[41] La prestataire affirme qu’elle fréquente l’école depuis le 11 janvier 2021; elle y a même passé l’été.

[42] La prestataire affirme que de janvier 2021 à la fin d’avril 2021, elle a suivi cinq cours. Les cours se donnaient du lundi au jeudi et étaient habituellement de 8 h à 11 h. Le mercredi, elle avait un deuxième cours de 12 h 30 à 14 h 30.

[43] De mai à la fin d’août 2021, elle suivait quatre cours, mais seulement quelques jours par semaine. Ces cours avaient lieu de 8 h à 11 h.

[44] À partir de septembre 2021, elle avait des cours le lundi, le mardi et le vendredi, de 8 h à 11 h.

[45] La prestataire affirme que même si les cours étaient enregistrés, au cas où une personne veuille l’écouter de nouveau ou ait manqué le cours, on s’attendait à ce que tout le monde assiste aux cours aux heures prévues, car il y avait des choses à faire en classe.

[46] La prestataire affirme qu’elle peut travailler le soir et les fins de semaine et que c’est ce qu’elle fait au restaurant depuis qu’elle a commencé en juin 2021.

[47] La Commission affirme que les études de la prestataire limitent sa disponibilité, car elle doit respecter son horaire de cours.

[48] Je suis d’accord avec l’observation de la Commission.

[49] J’estime que le fait que la prestataire doive assister à ses cours à des heures et des jours fixes signifie que sa disponibilité est limitée à certaines heures et certains jours de la semaine, ce qui limite indûment ses chances de trouver un emploiFootnote 11, car tout emploi devrait respecter cet horaire.

[50] Il peut sembler étrange de dire que les études ont une incidence sur la disponibilité et qu’elles limitent indûment le retour sur le marché du travail lorsqu’une personne travaille déjà. Cependant, l’assurance-emploi n’est pas un fonds pour venir en aide financièrement aux personnes dont le revenu est insuffisant parce qu’elles ne peuvent pas accepter plus d’heures, ou parce qu’elles n’arrivent pas à trouver un poste avec plus d’heures, parce qu’elles limitent leur disponibilité en raison de leurs études.

Somme toute, la prestataire est-elle capable de travailler et disponible à cette fin?

[51] Selon mes conclusions concernant les trois éléments, je conclus que la prestataire n’a pas démontré qu’elle est capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable.

Conclusion

[52] La prestataire n’a pas démontré qu’elle est disponible pour travailler au sens de la loi. Pour cette raison, je conclus qu’elle n’est pas admissible aux prestations.

[53] Cela signifie que l’appel est rejeté.

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