Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 472

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. D.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (437251) datée du 18 novembre 2021 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Mark Leonard
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 12 janvier 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelant

Date de la décision : Le 17 janvier 2022
Numéro de dossier : GE-21-2540

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelant (prestataire).

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler pendant ses études. Par conséquent, il est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance‑emploi.

Aperçu

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que l’appelant était inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi en date du 28 septembre 2020 parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. Pour recevoir des prestations régulières, les prestataires doivent être disponibles pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie que les prestataires doivent être à la recherche d’un emploi.

[4] Je dois décider si l’appelant a prouvé qu’il était disponible pour travailler. L’appelant doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il était disponible pour travailler.

[5] La Commission dit que l’appelant n’était pas disponible pour travailler parce qu’il était aux études et qu’il a constamment affirmé qu’il n’accepterait pas un emploi qui l’obligerait à les abandonner. La Commission soutient que l’appelant n’est pas disposé à accepter un emploi à temps plein si on lui en offre un. Elle ajoute également qu’il n’a pas prouvé qu’il a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi en raison du fait qu’il limitait sa recherche d’emploi.

[6] L’appelant n’est pas d’accord et affirme qu’il a toujours été disponible pour travailler et à la recherche d’un emploi. Il fait valoir que la Commission lui a demandé des renseignements à plusieurs reprises, qu’il a fournis, et que chaque fois, on lui a dit qu’il était admissible aux prestations.

Question en litige

[7] L’appelant était-il disponible pour travailler pendant ses études?

Analyse

[8] Il y a deux articles de loi qui exigent que les prestataires démontrent qu’ils sont disponibles pour travailler. La Commission a décidé que l’appelant était inadmissible selon les deux articles. L’appelant doit donc remplir les critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[9] Premièrement, la Loi sur l’assurance-emploi dit que les prestataires doivent prouver qu’ils font des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 1. Le Règlement sur l’assurance-emploi prévoit des critères qui aident à expliquer ce qui constitue des « démarches habituelles et raisonnablesNote de bas de page 2 ». Je vais examiner ces critères ci-dessous.

[10] Deuxièmement, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit aussi que les prestataires doivent prouver qu’ils sont « capables de travailler et disponibles à cette fin », mais incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 3. Selon la jurisprudence, il y a trois éléments que les prestataires doivent prouver pour démontrer qu’ils sont « disponibles » en ce sensNote de bas de page 4. Je vais examiner ces éléments ci-dessous.

[11] La Commission a décidé que l’appelant est inadmissible au bénéfice des prestations parce qu’il n’était pas disponible pour travailler selon les deux articles de loi.

[12] De plus, la Cour d’appel fédérale a déclaré que les personnes qui sont aux études à temps plein sont présumées ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas de page 5. C’est ce qu’on appelle la « présomption de non-disponibilité ». Autrement dit, on peut présumer qu’une personne n’est pas disponible pour travailler lorsque la preuve montre qu’elle est aux études.

[13] Je vais commencer par voir si je peux présumer que l’appelant n’était pas disponible pour travailler. J’examinerai ensuite s’il était disponible selon les deux articles de loi portant sur la disponibilité.

Présomption que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler

[14] La présomption de non disponibilité ne s’applique qu’aux personnes aux études à temps plein.

L’appelant n’est pas étudiant à temps plein

[15] L’appelant n’est pas étudiant à temps plein. Il termine ses études secondaires. Il a dit qu’il va à l’école deux jours sur sept et qu’il étudie parfois en ligne. Il a fourni un horaire de cours qui confirme que sa cohorte étudie un jour sur deux. Je considère qu’il est aux étude à temps partiel. La Commission reconnaît également que l’appelant n’est pas étudiant à temps plein. Par conséquent, la présomption de non disponibilité ne s’applique pas à lui.

[16] Cela signifie seulement que l’appelant n’est pas présumé non disponible pour travailler. Bien que son horaire de cours lui permettre de travailler, je dois tout de même examiner les deux articles de loi qui s’appliquent dans la présente affaire et décider s’il est véritablement disponible pour travailler.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[17] Le premier article de loi que je vais examiner dit que les prestataires doivent prouver qu’ils ont fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploiNote de bas de page 6.

[18] La loi énonce des critères dont je dois tenir compte pour décider si les démarches de l’appelant étaient habituelles et raisonnablesNote de bas de page 7. Je dois vérifier si ses démarches étaient soutenues et si elles visaient à trouver un emploi convenable. Autrement dit, l’appelant doit avoir continué à chercher un emploi convenable. Je dois aussi évaluer les démarches que l’appelant a faites pour trouver un emploi. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente une liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte. En voici quelques exemplesNote de bas de page 8 :

  • évaluer les possibilités d’emploi;
  • s’inscrire à des outils de recherche d’emploi, à des banques d’emploi en ligne ou auprès d’agences de placement;
  • communiquer avec de possibles employeuses ou employeurs;
  • postuler à des emplois.

[19] La Commission affirme que l’appelant n’en a pas fait assez pour tenter de trouver un emploi. Elle dit qu’il a limité sa recherche d’emploi aux emplois qui ne l’obligeaient pas à abandonner ses études.

[20] L’appelant n’est pas d’accord. Il dit qu’il était disponible pour travailler et qu’il a essayé de trouver un emploi, mais qu’il n’y est pas parvenu. Il précise qu’il travaillait dans un établissement de restauration rapide avant la pandémie de la COVID-19 tout en fréquentant l’école secondaire. Il soutient qu’il a été mis à pied lorsque la pandémie a frappé. Il a confirmé qu’il avait reçu la Prestation canadienne d’urgence jusqu’en septembre 2020 et qu’il a communiqué à ce moment-là avec la Commission au sujet du maintien de ses prestations. Il dit qu’on lui a conseillé demander des prestations d’assurance‑emploi. La Commission a établi une période de prestations à son profit commençant le 27 septembre 2020.

[21] La Commission a communiqué avec l’appelant en novembre 2020. Elle a alors confirmé que l’appelant était aux études et qu’il n’était pas disposé à les abandonner pour accepter un emploi si celui-ci entrait en conflit avec son horaire de cours. Dans une lettre datée du 22 décembre 2020, la Commission a informé l’appelant qu’il était inadmissible au bénéfice des prestations.

[22] La Commission a soutenu que bien que l’agente ait envoyé une lettre à l’appelant l’informant qu’il était inadmissible, elle n’avait pas achevé le processus qui l’aurait empêché de présenter des demandes et de recevoir des prestations.

[23] L’appelant n’a pas été clair sur ce qu’il a fait au sujet de cette lettre. Il a dit qu’il ne se souvenait plus exactement de ses conversations et de ses actions pendant la période où il recevait des prestations. Il a confirmé qu’il avait fait tout ce que les agentes et agents lui avaient demandé et que ses prestations avaient toujours été approuvées.

[24] Les notes de la Commission sur cette première communication ne mentionnent pas explicitement que l’on a demandé à l’appelant de tenir un registre de ses démarches de recherche d’emploi. Toutefois, la Loi sur l’assurance-emploi exige que les prestataires soient capables de prouver qu’ils ont fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi.

[25] L’appelant affirme que ses démarches étaient suffisantes pour démontrer qu’il était disponible pour travailler.

[26] L’appelant a confirmé que sa méthode habituelle pour trouver et postuler des emplois consistait à utiliser les sites de recherche d’emploi en ligne Facebook Marketplace et Indeed. Il dit qu’il ne s’est pas rendu physiquement dans les locaux d’un employeur pour trouver du travail. Cependant, il a affirmé qu’il s’était rendu une fois au centre commercial local pour chercher des possibilités d’emploi, mais qu’il n’y en avait pas.

[27] L’appelant n’a pu fournir aucune preuve de ses démarches de recherche d’emploi du 28 septembre 2020 au 14 septembre 2021. À ce moment-là, la Commission a de nouveau communiqué avec lui pour obtenir une telle preuve. L’appelant a cité dix emplois auxquels il prétendait avoir postulé. La Commission a noté qu’il n’était pas été en mesure de démontrer qu’il avait effectivement postuler pour l’un de ces emplois. Après que la Commission a rendu une décision de révision confirmant l’inadmissibilité de l’appelant, celui-ci transmis des copies d’écran des emplois qu’il avait précédemment nommés.

[28] La Commission avait demandé à l’appelant de fournir des détails sur ses démarches de recherche d’emploi du 8 septembre 2020 au 7 septembre 2021. Il n’a fourni aucun renseignement supplémentaire au-delà des 10 emplois auxquels il prétendait avoir postulé en août 2021.

[29] Dans son témoignage, l’appelant n’a pas pu démontrer qu’il avait postulé pour ces emplois à l’aide de confirmations par courriel ou par d’autres moyens. La Commission a demandé à l’appelant de fournir des détails sur ses démarches de recherche d’emploi avant août 2021. Il n’a pas été en mesure de le faire. Son témoignage concernant les démarches qu’il avait effectuées tout au long de sa période de prestations était vague et il a dit qu’il ne se souvenait pas des détails de sa recherche d’emploi.

[30] J’estime que l’appelant n’a pas prouvé qu’il a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable.

[31] L’appelant savait dès novembre 2020 que la Commission avait des préoccupations au sujet de sa disponibilité pour travailler. Elle lui avait dit qu’il n’était pas disponible pour travailler parce qu’il était aux études. Il me semble qu’il aurait pu s’assurer de documenter ses démarches de recherche d’emploi afin de répondre aux futures demandes de renseignements de la Commission.

[32] Il devait simplement démontrer qu’il avait fait des démarches soutenues pour trouver un emploi convenable tout au long de sa période de prestations. Il ne l’a pas démontré.

[33] Je comprends la préoccupation de l’appelant quant au fait que la Commission a continué de lui permettre de présenter des déclarations, ce qui lui donnait l’impression qu’il avait droit à des prestations.

[34] Le fait que la Commission n’ait pas suivi ses propres procédures pour mettre fin aux prestations de l’appelant a sérieusement contribué au trop-payé important de ce dernier. Toutefois, que la Commission ait commis ou non une erreur dans le traitement du dossier de l’appelant, les prestations ne peuvent être versées qu’aux prestataires admissiblesNote de bas de page 9.

Capable de travailler et disponible à cette fin

[35] Je dois également décider si l’appelant était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 10. La jurisprudence établit trois éléments que je dois examiner pour trancher cette question. L’appelant doit prouver les trois choses suivantesNote de bas de page 11 :

  1. a) qu’il voulait retourner sur le marché travail aussitôt qu’un emploi convenable était offert;
  2. b) qu’il a fait des efforts pour trouver un emploi convenable;
  3. c) qu’il n’a pas établi de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment (c’est‑à-dire trop) ses chances de retourner au travail.

[36] Lorsque j’examine chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite de l’appelantNote de bas de page 12.

Désir de retourner sur le marché du travail

[37] L’appelant n’a pas démontré qu’il voulait retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable était offert.

[38] L’appelant a affirmé que pour trouver un bon emploi à l’avenir, il a besoin de son diplôme d’études secondaires. Il dit que peu d’employeurs embaucheront une personne sans diplôme d’études secondaires. Il est très motivé à obtenir son diplôme et à trouver un meilleur emploi.

[39] L’appelant a dit qu’il avait un loyer, des paiements de voiture et d’autres dépenses à payer. Il dit qu’il devait trouver un emploi pour s’acquitter de ses obligations financières. Cependant, le fait que l’appelant avait besoin d’argent ne prouve pas qu’il souhaitait travailler ou qu’il était disposé à accepter un emploi convenable aussitôt qu’il était offert. L’appelant doit démontrer que son intention était avant tout de retourner sur le marché du travail.

[40] En fait, il est évident d’après le témoignage de l’appelant que son objectif « était d’obtenir un diplôme. Travailler était une considération secondaire. Il était prêt à le faire si cela ne nuisait pas à ses études. L’appelant a confirmé dans son témoignage qu’il n’était pas prêt à abandonner ses études pour accepter un emploi à temps plein.

[41] Il est admirable que l’appelant poursuive ses études, mais en se concentrant sur celles-ci plutôt que sur son retour sur le marché du travail, il n’a pas démontré qu’il voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable était offert.

Efforts pour trouver un emploi convenable

[42] L’appelant n’a pas fait assez d’efforts pour trouver un emploi convenable.

[43] Pour tirer une conclusion sur ce deuxième élément, j’ai examiné la liste des activités de recherche d’emploi mentionnée plus haut. Cette liste me sert seulement de référenceNote de bas de page 13.

[44] Les efforts que l’appelant a déployés pour trouver un nouvel emploi consistaient notamment à examiner les offres d’emploi affichées sur des sites d’emploi en ligne. Il dit qu’il a postulé à de nombreux emplois et qu’il a cherché un emploi au centre commercial local. Cependant, sur une période d’une année entière, ses efforts pour trouver un emploi convenable ne sont pas très importants. Encore une fois, ses efforts semblent davantage axés sur la recherche d’un emploi qui n’entrait pas en conflit avec ses études.

[45] J’ai expliqué plus haut pourquoi j’étais de cet avis lorsque j’ai évalué si les démarches que l’appelant a faites pour trouver un emploi étaient habituelles et raisonnables.

[46] Les efforts que l’appelant a faits ne sont pas suffisants pour répondre aux exigences liées à ce deuxième élément parce qu’il n’a tout simplement pas pu démontrer qu’il a recherché de manière soutenue un emploi convenable à temps plein et à temps partiel.

Limitation indue des chances de retourner sur le marché du travail

[47] L’appelant a établi des conditions personnelles limitait indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.

[48] L’appelant affirme qu’il n’a pas fait cela parce qu’il a postulé pour de nombreux emplois et qu’il a accepté récemment un emploi à temps plein et qu’il demeurera aux études jusqu’à ce qu’il obtienne son diplôme. Il soutient qu’il a toujours été disposé à accepter un emploi à temps plein et apte à occuper un tel emploi. Toutefois, cette déclaration contredit ses déclarations antérieures à la Commission et ses réponses aux questions du questionnaire de la Commission.

[49] La Commission affirme que l’appelant était fermement décidé à ne pas accepter un emploi qui entrait en conflit avec son horaire de cours. Le témoignage de l’appelant a confirmé cette condition.

[50] J’estime que l’appelant a établi une condition personnelle qui limite indûment ses chances de trouver un emploi convenable.

[51] Un « emploi convenable » n’est pas un emploi qui correspond à la situation et aux désirs de l’appelant. Il peut s’agir de tout emploi à temps plein du lundi au vendredi ainsi que de tout emploi à temps partiel qui pourrait nécessiter d’effectuer heures de travail qui entreraient en conflit avec l’horaire de cours de l’appelant. Pour demeurer admissible aux prestations d’assurance-emploi, une personne doit être prête à abandonner ses études et à retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable est offert. L’appelant a toujours dit qu’il n’était pas prêt à le faire.

L’appelant était-il donc capable de travailler et disponible à cette fin?

[52] À la lumière de mes conclusions sur les trois éléments, je juge que l’appelant n’a pas démontré qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable.

[53] L’appelant a dit qu’il doit rembourser un trop-payé important de prestations. Il a confirmé qu’il n’a trouvé un emploi que récemment, qu’il éprouve des difficultés financières et que le remboursement du trop-payé lui cause de l’anxiété.

[54] Je suis sensible à la situation difficile de l’appelant. La Loi sur l’assurance-emploi ne m’autorise pas à annuler une partie du trop-payé. Ce pouvoir appartient uniquement au ministreNote de bas de page 14. Toutefois, je suggère que la Commission examine les répercussions négatives que ses erreurs ont sur l’appelant lorsqu’elle envisage de réduire le trop‑payé.

Conclusion

[55] L’appelant n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler au sens de la loi. Pour cette raison, il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

[56] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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