Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : LS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 541

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : L. S.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (443608) datée du 23 décembre 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Catherine Shaw
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 3 mars 2022
Personne présentes à l’audience : Appelante
Représentante de l’appelant
Date de la décision : Le 9 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-301

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal de la sécurité sociale n’est pas d’accord avec le prestataire.

[2] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter son emploi (c’est-à-dire qu’il n’avait pas une raison acceptable selon la loi pour le faire) quand il l’a fait. Il n’était pas fondé à quitter son emploi parce que le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, le prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] Le prestataire a quitté son emploi pour aller à l’école et a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a conclu qu’il a quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’il a choisi de démissionner) sans justification. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.

[4] Je dois décider si le prestataire a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas.

[5] La Commission affirme que le prestataire aurait pu continuer à travailler plutôt que de prendre la décision d’aller à l’école.

[6] Le prestataire n’est pas d’accord et affirme qu’il ne pouvait pas continuer à travailler parce qu’il y aurait eu un conflit d’horaire.

Question en litige

[7] Le prestataire est-il exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour avoir quitté volontairement son emploi sans justification?

[8] Pour répondre à cette question, je dois d’abord aborder la question du départ volontaire du prestataire. Je dois ensuite décider si le prestataire était fondé à quitter son emploi.

Question que je dois examiner en premier

L’employeur n’est pas une partie à l’appel

[9] Le Tribunal a désigné l’ancien employeur du prestataire comme partie mise en cause potentielle à l’appel. Il lui a donc envoyé une lettre pour lui demander s’il avait un intérêt direct dans l’appel du prestataire et s’il souhaitait être ajouté comme partie mise en cause. L’employeur n’a pas répondu avant la date de la présente décision. Puisqu’il n’y a rien au dossier qui indique que l’employeur a un intérêt direct dans l’appel, j’ai décidé de ne pas l’ajouter comme partie.

Analyse

Le prestataire a quitté volontairement son emploi

[10] Pour décider si le prestataire a quitté volontairement son emploi, je dois examiner s’il a choisi de conserver ou de quitter son emploi lorsqu’il a cessé de travaillerNote de bas de page 1.

[11] Le prestataire affirme qu’il pensait être licencié lorsqu’il a cessé de travailler pour aller à l’école.

[12] Le prestataire était sur une liste d’attente pour un programme d’études collégiales. Il a été accepté dans le programme le 31 août 2021. Le 2 septembre 2021, il a dit à son employeur qu’il devait cesser de travailler parce qu’il commençait l’école la semaine suivante. Son supérieur lui a dit que l’employeur le licencierait pour qu’il puisse obtenir des prestations d’assurance-emploi. Toutefois, l’employeur a produit un relevé d’emploi la semaine suivante indiquant que le prestataire avait quitté son emploi pour aller à l’école.

[13] L’agente de la paye de l’employeur a dit à la Commission que l’employeur n’avait licencié personne à ce moment-là. Elle a dit que le prestataire travaillerait toujours s’il n’avait pas pris la décision d’aller à l’école.

[14] À l’audience, le prestataire a reconnu qu’il aurait pu continuer à travailler s’il n’était pas allé à l’école.

[15] Les deux parties s’entendent pour dire que le prestataire aurait pu conserver son emploi s’il n’avait pas pris la décision de le quitter. J’estime donc que le prestataire avait la possibilité de continuer à travailler, mais qu’il a décidé de partir. Cela signifie qu’il a quitté volontairement son emploi.

Ce que signifie « être fondé » à quitter son emploi

[16] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi quand il l’a fait.

[17] La loi prévoit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 2. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que le départ était fondé.

[18] La loi explique ce que signifie « être fondé » à quitter son emploi. Elle précise qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable dans son cas, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 3.

[19] Le prestataire est responsable de prouver que son départ était fondéNote de bas de page 4. Il doit le faire selon la prépondérance des probabilités, c’est-à-dire qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnable. Pour trancher la question, je dois examiner toutes les circonstances présentes lorsque le prestataire a quitté son emploi.

Circonstances présentes lorsque le prestataire a quitté son emploi

[20] Le prestataire a dit avoir quitté son emploi parce qu’il commençait un programme d’études à temps plein. Avant de quitter son emploi, il faisait des quarts de 12 heures. Il affirme que le départ était la seule solution raisonnable dans son cas parce qu’il ne pouvait pas continuer à travailler avec ses obligations scolaires et le long trajet jusqu’à l’école.

[21] La Commission affirme que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi parce que le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Plus précisément, elle soutient que le prestataire aurait pu continuer à travailler ou s’informer auprès du gouvernement provincial pour être dirigé vers sa formation avant de partir.

[22] Parfois, la Commission (ou une autorité approuvée par la Commission) dirige les personnes vers une formation, un programme ou un cours. L’une des circonstances dont je dois tenir compte est la question de savoir si la Commission l’a fait pour le prestataire.

[23] Le prestataire a été dirigé vers son programme d’études en septembre 2021. Il a fait des recherches sur le programme Connexion AE du Nouveau-Brunswick, offert par le gouvernement provincial, avant de quitter son emploi. Puis, après avoir demandé des prestations d’assurance-emploi, il a demandé d’être dirigé vers le programme Connexion AE. Sa demande a été accueillie le 26 septembre 2021.

[24] La représentante de l’appelant a dit que le prestataire n’aurait pas pu être dirigé vers sa formation dans le cadre du programme Connexion AE avant de quitter son emploi. Elle a fourni une copie du formulaire de demande du programmeNote de bas de page 5. Ce dernier précise qu’une personne peut seulement présenter une demande dans le cadre du programme Connexion AE si elle reçoit des prestations d’assurance‑emploi ou si elle a demandé des prestations d’assurance-emploi à Service Canada. Autrement dit, le prestataire n’aurait pas pu présenter une demande dans le cadre du programme, et donc être dirigé vers sa formation, avant qu’il ait cessé de travailler et demandé des prestations d’assurance-emploi.

[25] La représentante a fourni la copie d’une décision récemment rendue par le Tribunal qui, selon elle, est très semblable à la situation du prestataire (voir la décision BP v Commission de l’assurance-emploi du Canada)Note de bas de page 6. Le prestataire dans cette affaire était aussi sur une liste d’attente pour un programme d’études. Il a été admis au programme à la dernière minute et a dû quitter son emploi rapidement. Le prestataire avait été dirigé vers son programme d’études, mais la Commission l’a exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi parce qu’il n’avait pas démontré que l’autorité désignée lui avait permis de quitter son emploi. La représentante a fait valoir que la Commission a présenté le même argument dans le cas présent.

[26] Dans la décision BP, le membre du Tribunal a conclu qu’aucune autorisation de quitter son emploi n’est nécessaire pour qu’une partie prestataire soit fondée à quitter son emploi. Le membre a jugé que [traduction] « toute personne qui quitte un emploi sur la recommandation de l’autorité désignée afin d’aller suivre un cours ou un programme d’instruction vers lequel elle a été dirigée est considérée avoir quitté son emploi avec justification ».

[27] L’affaire BP et le cas du prestataire ont plusieurs points communs. Les deux prestataires ont suivi un programme d’études collégiales à la dernière minute. Les deux prestataires ont quitté leur emploi parce qu’ils ne pouvaient pas continuer à travailler tout en étant aux études à temps plein. Toutefois, j’estime que les faits dans le cas présent se distinguent de ceux de l’affaire BP d’une manière importante.

[28] Le membre dans la décision BP a conclu que le prestataire avait [traduction] « demandé d’être dirigé [vers sa formation] avant de commencer ses études, et [que] cela [avait] été fait avant qu’il ne quitte son emploiNote de bas de page 7 ». Le membre s’est appuyé sur ce fait pour décider que le prestataire était fondé à quitter son emploi parce qu’il était parti pour suivre une formation vers laquelle il avait déjà été dirigé.

[29] Cela est important parce que la question de savoir si le prestataire était fondé à quitter son emploi concerne un moment précis, soit celui où le prestataire a quitté son emploi. Je peux seulement prendre en considération les circonstances présentes au moment où le prestataire a quitté volontairement son emploi pour décider s’il était fondé à le faireNote de bas de page 8.

[30] Dans le cas présent, le prestataire n’a pas été dirigé vers son programme d’études avant de quitter son emploi. Il a seulement pu demander d’être dirigé vers sa formation dans le cadre du programme Connexion AE après avoir cessé de travailler et demandé des prestations d’assurance-emploi. Puisque le prestataire n’a pas été dirigé vers son programme d’études avant de quitter son emploi, je ne peux pas considérer que cela fait partie de la présente décision.

[31] La jurisprudence prévoit clairement qu’une personne qui quitte son emploi simplement pour suivre des études sans y avoir été dirigée n’est pas fondée à le quitterNote de bas de page 9. Les deux parties s’entendent pour dire que le prestataire n’a pas été dirigé vers son programme d’études avant de quitter son emploi. La jurisprudence s’applique donc dans son cas.

[32] Je comprends que le prestataire avait l’impression de ne pas avoir le choix de quitter son emploi parce qu’il commençait l’école. Toutefois, j’estime que ce choix ne signifie pas qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. En effet, il avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi quand il l’a fait.

[33] Le prestataire aurait pu conserver son emploi. Je comprends qu’il avait peut-être de bonnes raisons d’avoir choisi de quitter son emploi afin d’aller à l’école. Toutefois, c’est un choix personnel qui est contraire à l’idée derrière le régime de l’assurance‑emploiNote de bas de page 10.

[34] Le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi. Par conséquent, il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Conclusion

[35] Je conclus que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance‑emploi.

[36] L’appel est donc rejeté.

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