Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 539

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. H.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (444567) rendue le 6 janvier 2022 par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Candace R. Salmon
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 6 avril 2022
Personne présente à l’audience : Appelant

Date de la décision : Le 7 avril 2022
Numéro de dossier : GE-22-416

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec le prestataire.

[2] Il n’a pas démontré qu’il y avait un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations. En d’autres mots, il n’a pas fourni une explication acceptable selon la loi. Par conséquent, sa demande ne peut pas être traitée comme s’il l’avait présentée plus tôtNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] Le prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi le 29 juin 2021. Il veut maintenant que la demande soit traitée comme s’il l’avait présentée plus tôt, c’est-à-dire le 10 mai 2021. La Commission de l’assurance‑emploi du Canada a déjà rejeté la requête du prestataire.

[4] Je dois décider si le prestataire a prouvé qu’il avait un motif valable de ne pas demander des prestations plus tôt.

[5] Selon la Commission, le prestataire n’avait pas de motif valable parce qu’il n’a pas agi comme une personne raisonnable l’aurait fait dans sa situation pour vérifier ses droits et ses obligations aux termes de la loi.

[6] Le prestataire n’est pas d’accord. Selon lui, il devrait avoir droit aux prestations parce qu’il cherchait du travail pendant la période du retard et il ne savait pas qu’il devait demander les prestations dans un certain délai.

Question en litige

[7] La demande de prestations peut‑elle être traitée comme si le prestataire l’avait présentée le 10 mai 2021? C’est ce qu’on appelle « antidater » la demande (en devancer la date).

Analyse

[8] Pour faire devancer la date d’une demande de prestations, il faut prouver les deux choses suivantesNote de bas de page 2 :

  1. a) Un motif valable justifiait le retard durant toute la période du retard. Autrement dit, il y a une explication qui est acceptable selon la loi.
  2. b) À la date antérieure (c’est-à-dire la date à laquelle on veut faire antidater la demande), on remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations.

[9] Dans cette affaire-ci, les principaux arguments portent sur la question de savoir si le prestataire avait un motif valable. Je vais donc commencer par là.

[10] Pour démontrer l’existence d’un motif valable, le prestataire doit prouver qu’il a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblablesNote de bas de page 3.

[11] Il doit prouver qu’il a agi de la sorte pendant toute la durée du retardNote de bas de page 4. Le retard commence le jour auquel le prestataire veut faire devancer la demande jusqu’au jour où il l’a présentée. Dans le cas du prestataire, le retard va donc du 10 mai 2021 au 27 juin 2021.

[12] Le prestataire doit aussi démontrer qu’il a vérifié assez rapidement son droit aux prestations et les obligations que lui impose la loiNote de bas de page 5. En d’autres mots, il doit prouver qu’il a fait de son mieux pour essayer de s’informer dès que possible de ses droits et responsabilités. Si le prestataire ne s’est pas renseigné, il doit démontrer que des circonstances exceptionnelles expliquent pourquoi il ne l’a pas faitNote de bas de page 6.

[13] Il doit établir sa preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) qu’un motif valable justifiait son retard.

[14] Le prestataire affirme qu’il avait un motif valable pour le retard parce qu’il cherchait du travail pendant toute la période du retard, qu’il s’attendait à trouver du travail rapidement et qu’il ne savait pas qu’il devait demander des prestations d’assurance-emploi immédiatement après avoir été mis à pied.

[15] Selon la Commission, le prestataire n’a pas démontré qu’un motif valable justifiait le retard parce qu’il n’a pas agi comme une personne raisonnable l’aurait fait dans la même situation pour vérifier ses droits et ses obligations aux termes de la loi.

[16] Je juge que le prestataire n’a pas prouvé qu’il avait un motif valable de retarder sa demande de prestations parce qu’il n’a pas démontré qu’il a vérifié assez rapidement ce qu’il devait faire pour présenter une demande dans le cadre du régime d’assurance-emploi.

[17] À l’audience, le prestataire a fait valoir qu’il a agi comme une personne raisonnable parce qu’il a cherché du travail après sa mise à pied. Il a expliqué qu’il pensait trouver du travail rapidement et qu’en cas contraire, il pourrait présenter une demande d’assurance-emploi plus tard. Il a ajouté qu’il ne savait pas qu’il avait un certain temps pour présenter une demande de prestations.

[18] Je juge que les arguments du prestataire ne confirment pas qu’il avait un motif valable justifiant son retard pour toute la période du retard. Il a été mis à pied le 7 mai 2021, mais il n’a pas demandé de prestations d’assurance-emploi avant le 29 juin 2021. Pendant la période du retard, il n’a pas communiqué avec la Commission pour s’informer sur le programme d’assurance-emploi et il n’a pas fait de recherches pour en savoir plus sur les règles entourant le délai de présentation d’une demande. Il a déclaré qu’il connaissait le programme d’assurance-emploi et qu’il avait déjà eu une demande active. Il savait que l’assurance-emploi l’aiderait financièrement s’il perdait son emploi, mais il n’a [traduction] « pas vraiment essayé » de se renseigner sur ses droits et ses obligations aux termes de la loi.

[19] Le prestataire a déclaré qu’il a fini par demander de l’assurance-emploi parce que trouver un emploi prenait plus de temps que prévu. Il a affirmé que pendant la période du retard, il avait accès à un téléphone et à Internet. Il a dit qu’il ne sait pas où se trouve le bureau de Service Canada le plus près de chez lui, mais je remarque qu’il vit dans une grande ville canadienne. Il est donc raisonnable de conclure qu’il vit à proximité d’un bureau de Service Canada.

[20] Comme le prestataire n’a rien fait pour s’informer de ses droits et de ses obligations aux termes de la loi, c’est-à-dire ce qu’il devait faire pour avoir droit aux prestations d’assurance-emploi, je conclus que son appel est voué à l’échec. Même si le prestataire cherchait du travail pendant la période du retard et qu’il n’était pas au courant de l’obligation de demander des prestations dans un délai donné, il était responsable de s’informer au sujet du programme d’assurance-emploi et de présenter une demande dans un délai précis, à moins de circonstances exceptionnelles. Le prestataire n’a invoqué aucune circonstance exceptionnelle. Il a plutôt dit qu’il avait mis l’accent sur la recherche d’un emploi et qu’il ne savait pas qu’il devait demander des prestations immédiatement. Ces raisons ne sont pas un motif valable.

[21] Les dispositions de la Loi sur l’assurance-emploi qui portent sur l’antidatation ne sont pas le produit d’un « simple caprice législatifNote de bas de page 7 ». Elles renferment plutôt une politique essentielle à l’efficience de son administration. Le fait de devancer la date d’une demande de prestations peut porter atteinte à l’intégrité du système, car elle donne le bénéfice des prestations de façon rétroactive et inconditionnelle sans possibilité de vérifier les critères d’admissibilité durant la période de rétroactivitéNote de bas de page 8. L’antidatation n’est pas un droit accordé aux prestataires. C’est plutôt un privilège pour lequel les prestataires doivent remplir les conditions requises. Comme les cours l’ont affirmé, c’est un privilège qui devrait s’appliquer de façon exceptionnelle. L’obligation de demander rapidement des prestations d’assurance-emploi est perçue comme étant très rigoureuse et stricte. C’est pourquoi l’exception relative au « motif valable justifiant le retard » est appliquée avec prudence.

[22] Je n’ai pas besoin de vérifier si le prestataire remplissait les conditions requises à la date antérieure pour recevoir des prestations. Sans motif valable, sa demande ne peut pas être traitée comme s’il l’avait présentée plus tôt.

Conclusion

[23] Le prestataire n’a pas prouvé qu’un motif valable justifiait le retard de sa demande de prestations pendant toute la durée du retard.

[24] L’appel est rejeté.

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