Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 521

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : J. F.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (442641) datée du 10 décembre 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Sylvie Charron
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 21 février 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante

Date de la décision : Le 21 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-131

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelante.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite (c’est-à-dire parce qu’elle a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] L’appelante a perdu son emploi. Son employeur a affirmé qu’elle a été congédiée parce qu’elle a refusé de se conformer à la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de l’employeur.

[4] L’appelante ne conteste pas ce qui s’est passé. Elle dit qu’elle travaille à domicile et qu’elle croit profondément à l’immunité naturelle; elle pense que nous n’utilisons pas assez notre immunité naturelle.

[5] La Commission a accepté la raison du congédiement que l’employeur a fournie. Elle a conclu que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite. Elle l’a donc exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Question en litige

[6] L’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[7] Pour décider si l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison l’appelante a perdu son emploi. Ensuite, je dois décider si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi l’appelante a-t-elle perdu son emploi?

[8] Je conclus que l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle a refusé de se faire vacciner conformément à la politique de vaccination de son employeur. Mes raisons sont présentées ci-dessous.

[9] L’appelante convient que c’est la raison pour laquelle elle a été congédiée.

[10] Toutefois, l’appelante a déclaré qu’elle n’était pas d’accord avec la politique de son employeur. Elle affirme qu’elle travaille à domicile et qu’elle n’a pas eu de contact avec des patientes ou patients depuis mars 2020. Elle s’oppose au fait qu’elle n’a pas été autorisée à être testée régulièrement au lieu d’être vaccinée; il n’y a eu aucune mesure d’adaptation.

[11] L’appelante précise que l’employeur prétend suivre la directive 6, émise par la province en vertu de l’article 77.7 de la Loi sur la protection et la promotion de la santé, mais qu’il ne l’a pas vraiment fait puisqu’il n’a pas accordé une solution de rechange telle que des tests réguliers, comme le prévoit la directiveNote de bas de page 2.

[12] L’appelante estime également que la politique de l’employeur est déraisonnable parce qu’elle n’a pas obtenu de mesures d’adaptation. On aurait pu lui imposer de continuer à travailler à domicile, par exemple, ou lui demander de se soumettre à des tests régulièrement. L’appelante juge avoir été congédiée sans justification et non pour inconduite.

[13] L’appelante a déclaré qu’elle croyait fermement à l’immunité naturelle. Elle n’est pas à l’aise avec les vaccins à ARN messager; elle pense qu’ils pourraient affaiblir le système immunitaire. Elle a soumis une demande d’exemption fondée sur ses convictions, mais cette demande n’a pas été acceptée par son employeur.

[14] Je constate que l’employeur a rédigé une politique de vaccination conformément à la directive 6. La politique s’applique de la même façon à tout le personnel, à moins qu’une personne puisse prouver la nécessité d’une exemption fondée sur des questions médicales ou des motifs valables relatifs aux droits de la personneNote de bas de page 3. La politique a été communiquée à l’ensemble du personnel le 2 septembre 2021 et il a été précisé que le non-respect de cette politique entraînerait un congé sans solde ou un congédiement. Les employés avaient jusqu’au 9 septembre pour divulguer leur statut vaccinal. Le 1er novembre, l’employeur a décidé que l’appelante ne s’était toujours pas conformée à la politique de vaccination et elle a donc été congédiée.

[15] Je constate également qu’il était loisible à l’employeur de ne pas offrir le test comme option, conformément au paragraphe 2 de la directive 6, même si une employée ou un employé choisissait de suivre les séances d’éducation à la vaccination offertes par l’employeur. Cela est confirmé par ce que l’employeur a inscrit dans la politique de vaccination, comme indiqué à la page GD3-38. On y voit que les tests de dépistage de la COVID-19 ne sont disponibles que pour les personnes qui ont réussi à faire valoir une exemption médicale ou une exemption liée aux droits de la personne.

[16] Je conclus de ce qui précède que l’appelante a été congédiée pour avoir refusé de se conformer à la politique de vaccination de l’employeur.

La raison du congédiement de l’appelante est-elle une inconduite selon la loi?

[17] Selon la loi (la Loi sur l’assurance-emploi), la raison du congédiement de l’appelante est une inconduite.

[18] Pour être considérée comme une inconduite selon la loi, la façon d’agir doit être délibérée. Cela signifie qu’elle était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 4. Une inconduite comprend aussi une conduite qui est tellement insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 5. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que l’appelante ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal)Note de bas de page 6.

[19] Il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’elle soit congédiée pour cette raisonNote de bas de page 7.

[20] La Commission doit prouver que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite, selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas de page 8.

[21] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que l’appelante a volontairement et sciemment refusé de se conformer à la politique de vaccination de l’employeur, sachant que cela entraînerait la cessation de son emploi.

[22] L’appelante soutient qu’il n’y a pas eu d’inconduite, car elle a été congédiée sans justification. Elle estime que ce n’est pas une inconduite parce que la politique n’est pas raisonnable.

[23] J’estime que la Commission a prouvé l’existence d’une inconduite pour les raisons qui suivent.

[24] L’appelante a reconnu qu’elle connaissait la politique de vaccination de l’employeur. Elle savait qu’à moins d’obtenir une exemption, elle risquait de perdre son emploi parce qu’elle ne voulait pas se faire vacciner. Elle a échoué dans sa quête d’une exemption et dans son grief au titre de la convention collective. L’affaire a été soumise à l’arbitrage.

[25] J’estime que, compte tenu de ce qui précède, l’appelante a pris la décision consciente et intentionnelle de rejeter la politique de vaccination de l’employeur, et elle a été congédiée. Il existe un lien de causalité direct entre le comportement et le congédiement. En faisant son choix, l’appelante en a accepté les conséquences.

[26] Je comprends que l’appelante est catégorique sur le fait que la politique de l’employeur n’est pas raisonnable. Ce n’est pas au Tribunal d’en décider. Mon rôle est de décider pourquoi l’appelante a été congédiée et si la conduite en question constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. Tout le reste est mieux débattu devant un tribunal civil ou un arbitre du travail.

[27] Selon mes conclusions précédentes, je suis d’avis que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[28] La Commission a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[29] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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