Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : WF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 553

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : W. F. (prestataire)
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (447550) rendue le 19 janvier 2022 par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Audrey Mitchell
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 23 mars 2022
Personne présente à l’audience : Prestataire

Date de la décision : Le 28 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-521

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec la prestataire.

[2] Elle n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler. Par conséquent, elle ne peut pas recevoir de prestations d’assurance‑emploi.

Aperçu

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que la prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi du 21 juin 2021 au 24 septembre 2021 parce qu’elle n’était pas disponible pour travailler. Pour recevoir des prestations régulières, les prestataires doivent être disponibles pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Il faut donc que les prestataires cherchent un emploi.

[4] Je dois décider si la prestataire a prouvé qu’elle était disponible pour travailler. Elle doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) qu’elle était disponible pour travailler.

[5] Selon la Commission, la prestataire n’était pas disponible pour travailler parce qu’elle a dit qu’elle s’occupait de son fils. La Commission affirme que des incohérences dans les déclarations de la prestataire mettent en doute son affirmation voulant qu’elle était disponible pour travailler.

[6] La prestataire n’est pas d’accord. Elle affirme que son fils ne voulait pas qu’elle s’occupe de lui et lui a dit de retourner au travail. Elle dit qu’elle cherchait du travail.

Question en litige

[7] La prestataire était-elle disponible pour travailler?

Analyse

[8] Il y a deux articles de loi qui exigent que les prestataires démontrent leur disponibilité pour le travail. La Commission a décidé que la prestataire était inadmissible selon les deux articles. La prestataire doit donc remplir les critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[9] En premier lieu, la Loi sur l’assurance-emploi dit qu’une personne qui demande des prestations doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 1. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente des critères qui aident à expliquer ce qui constitue des « démarches habituelles et raisonnablesNote de bas de page 2 ». Je vais examiner ces critères plus bas.

[10] En deuxième lieu, la Loi prévoit aussi que la personne prouve qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 3. Selon la jurisprudence, il y a trois éléments que la personne doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensNote de bas de page 4. Je vais examiner ces éléments plus loin.

[11] La Commission a décidé que la prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations parce qu’elle n’était pas disponible pour travailler aux termes des deux articles de loi.

[12] Je vais maintenant examiner moi-même ces deux articles pour vérifier si la prestataire est disponible pour travailler.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[13] La loi énonce les critères dont je dois tenir compte pour décider si les démarches de la prestataire étaient habituelles et raisonnablesNote de bas de page 5. Je dois regarder si les démarches étaient soutenues et si elles visaient à trouver un emploi convenable. Autrement dit, il faut que la prestataire ait continué à chercher un emploi convenable.

[14] Je dois aussi évaluer les démarches que la prestataire a faites pour trouver un emploi. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente une liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte. En voici quelques exemplesNote de bas de page 6 :

  • évaluer les possibilités d’emploi;
  • s’inscrire à des outils de recherche d’emploi, à des banques d’emploi en ligne ou auprès d’agences de placement;
  • présenter des demandes d’emploi.

[15] La Commission affirme que la prestataire n’en a pas fait assez pour tenter de trouver un emploi.

[16] La prestataire n’est pas d’accord. Elle dit avoir téléphoné à de possibles employeuses et employeurs, s’être renseignée au sujet d’un emploi dans une pharmacie et avoir fait des recherches sur le site Guichet-Emplois. Selon la prestataire, ses démarches étaient suffisantes pour démontrer qu’elle était disponible pour travailler.

[17] Je juge que la prestataire n’a pas prouvé qu’elle faisait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver du travail. Je tire cette conclusion parce que je juge qu’elle n’en a pas fait assez pour essayer de trouver un emploi.

[18] La prestataire a dit à la Commission qu’elle avait téléphoné à un établissement de restauration rapide et à un grand magasin de détail à la fin de juillet 2021. Elle a expliqué que les deux entreprises lui ont dit qu’elles n’embauchaient pas. Elle a dit qu’elle avait tenté de joindre un bureau de médecin par téléphone au début d’août 2021, sans succès. Elle a ajouté qu’elle cherchait des emplois sur le site de Guichet-Emplois, mais que la plupart des lieux de travail étaient situés trop loin pour elle.

[19] À l’audience, la prestataire a nommé les mêmes employeuses et employeurs potentiels. Elle a ajouté qu’elle était allée dans des épiceries ethniques, mais elle ne les a pas nommées. La prestataire a déclaré qu’elle s’était rendue dans une pharmacie, mais qu’il n’y avait aucun poste à combler. Cependant, c’était en octobre ou en novembre 2021, c’est-à-dire à un moment qui ne fait pas partie de la période d’inadmissibilité de la prestataire.

[20] La prestataire était en vacances à compter du 18 juin 2021. Elle a prolongé son congé jusqu’au 23 juillet 2021. Elle a demandé à son employeur de prolonger son congé une autre fois. Il a refusé. Dans sa demande de révision, la prestataire a déclaré qu’elle avait commencé à chercher du travail à la fin de juillet 2021, après avoir quitté son emploi.

[21] D’après le témoignage de la prestataire et ses déclarations à la Commission, je conclus qu’elle a commencé à chercher du travail après avoir quitté son emploi. Je juge également qu’en communiquant avec de possibles employeuses et employeurs et en consultant le Guichet-Emplois, elle faisait le genre de recherche d’emploi que la loi mentionne. Je juge cependant qu’elle n’en a pas fait assez.

[22] Je considère que, pour la période allant de la fin juillet au 24 septembre 2021, il n’était pas suffisant de parler à deux entreprises, d’en appeler une troisième sans succès et de faire des recherches sur le site de Guichet-Emplois, mais de décider que la plupart des lieux de travail étaient trop loin. Même si la prestataire a dit qu’elle s’était rendue dans des épiceries ethniques, elle n’a pas fourni assez de détails pour montrer que cette démarche ainsi que d’autres activités suffisaient à prouver qu’elle faisait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver du travail.

[23] La prestataire n’a pas démontré que les démarches qu’elle a faites pour trouver un emploi étaient habituelles et raisonnables.

Capable de travailler et disponible pour travailler

[24] La jurisprudence établit trois éléments que je dois examiner pour décider si la prestataire était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable. La prestataire doit prouver les trois choses suivantesNote de bas de page 7 :

  1. a) Elle voulait retourner travailler dès qu’un emploi convenable était disponible.
  2. b) Elle a fait des efforts pour trouver un emploi convenable.
  3. c) Elle n’a pas établi de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment (c’est-à-dire beaucoup trop) ses chances de retourner au travail.

[25] Lorsque j’examine chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite de la prestataireNote de bas de page 8.

Désir de retourner au travail

[26] La prestataire n’a pas démontré qu’elle voulait retourner au travail dès qu’un emploi convenable était disponible.

[27] Comme je l’ai mentionné plus haut, la prestataire était en vacances à compter du 18 juin 2021. Elle a demandé à son employeur de prolonger son congé. Elle en a fait la demande pour la dernière fois dans un courriel daté du 23 juillet 2021. Elle voulait obtenir quatre semaines de plus en raison de l’accident de son fils et parce qu’il avait besoin d’une intervention chirurgicale. Elle a dit qu’elle ne pouvait pas retourner au travail dans de telles circonstances. Son employeur lui a répondu qu’il ne pouvait pas lui accorder un congé supplémentaire. Il a dit qu’il devrait trouver quelqu’un pour la remplacer.

[28] La Commission a parlé à la prestataire le 30 août 2021. À ce moment-là, la prestataire lui a dit que la raison pour laquelle elle avait quitté son emploi était que son fils s’était blessé et qu’elle devait s’occuper de lui. La Commission lui a parlé des prestations pour proches aidants, car elle avait mentionné qu’elle ne travaillait pas parce qu’elle devait s’occuper de son fils.

[29] La prestataire a appelé la Commission le 10 septembre 2021. Elle a expliqué qu’elle ne voulait pas obtenir les prestations pour proches aidants parce que son fils refusait de signer les documents. La Commission a expliqué que la prestataire n’aurait alors pas droit aux prestations régulières d’assurance-emploi. La prestataire a dit qu’elle parlerait à son fils et qu’elle rappellerait la Commission.

[30] Le 28 septembre 2021, la prestataire a déclaré qu’elle ne s’occuperait plus de son fils parce qu’elle ne serait pas admissible aux prestations. Elle a dit que, pour cette raison, elle était disponible pour travailler et voulait recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi.

[31] La Commission remet en question les déclarations de la prestataire selon lesquelles elle était disponible pour travailler. La Commission fait référence à ses conversations avec la prestataire qui sont mentionnées ci-dessus. Elle mentionne aussi le courriel que la prestataire a envoyé à son employeur, où elle explique qu’elle est incapable de travailler en raison de l’accident et de l’opération de son fils.

[32] Je suis d’accord avec la Commission. Je juge que les déclarations et les actions de la prestataire ne correspondent pas à celles d’une personne qui désire retourner travailler. J’ai interrogé la prestataire au sujet de l’observation de la Commission voulant que la prestataire ait dit qu’elle prenait soin de son fils jusqu’à ce qu’elle apprenne qu’elle n’aurait pas droit aux prestations régulières et qu’elle allait devoir rembourser les prestations versées en trop. La prestataire a seulement dit qu’elle cherchait un emploi. Je considère que la réponse de la prestataire n’explique pas de façon raisonnable pourquoi elle aurait demandé à son employeur un congé supplémentaire de quatre semaines pour s’occuper de son fils si elle ne s’occupait pas de lui.

[33] La prestataire a déclaré que quand son employeur lui a dit qu’il ne pouvait pas prolonger son congé, elle n’a pas pensé à lui demander de la reprendre parce qu’il a dit qu’il embaucherait une personne pour la remplacer. Elle a déclaré qu’elle était troublée à ce moment-là.

[34] Je conclus que si la prestataire avait voulu retourner travailler à la fin de juillet 2021, elle aurait pu reprendre l’emploi qu’elle occupait. D’après ses déclarations à la Commission et le courriel à son employeur, j’estime qu’il y a plus de chances qu’elle a continué de s’occuper de son fils jusqu’à la fin de septembre 2021.

[35] Je conclus que la prestataire n’a pas démontré qu’elle voulait retourner au travail.

Efforts pour trouver un emploi convenable

[36] La prestataire n’a pas fait assez d’efforts pour trouver un emploi convenable.

[37] Pour tirer une conclusion sur ce deuxième élément, j’ai examiné la liste des activités de recherche d’emploi mentionnée plus haut. La liste me sert seulement de référenceNote de bas de page 9.

[38] Pour trouver un nouvel emploi, la prestataire a notamment téléphoné à de possibles employeuses et employeurs, elle s’est rendue dans des épiceries ethniques et elle a fait des recherches sur le site Guichet-Emplois. C’est ce que j’ai expliqué plus haut, lorsque j’ai vérifié si les démarches de la prestataire étaient habituelles et raisonnables.

[39] De tels efforts n’étaient pas suffisants pour répondre aux exigences du deuxième élément. Je ne doute pas du fait que la prestataire a fait certains efforts pour trouver du travail. Cependant, je considère que communiquer avec quelques entreprises durant la période allant de la fin juillet à la fin septembre 2021, soit environ deux mois, n’est pas suffisant.

[40] La prestataire a dit qu’elle cherchait un emploi sur le site Guichet-Emplois. Elle a cependant dit que la plupart des lieux de travail étaient situés trop loin de chez elle. Je ne doute pas du fait que certains des emplois que la prestataire a vus auraient nécessité un déplacement d’une heure, ce qu’elle croyait être trop loin. Cependant, je ne suis pas convaincue qu’il n’y avait pas au moins un emploi à une distance raisonnable de sa maison pour lequel elle aurait pu poser sa candidature.

[41] Comme je l’ai déjà mentionné, quand l’employeur de la prestataire lui a dit qu’il ne pouvait pas approuver sa demande de congé supplémentaire, la prestataire ne lui a pas dit qu’elle pouvait revenir travailler comme prévu le 26 juillet 2021. Je ne peux pas conclure qu’elle a démontré avoir fait assez d’efforts pour retourner au travail sans au moins qu’elle demande à son employeur si elle pouvait reprendre son emploi.

Limitation indue des chances de retourner au travail

[42] La prestataire a bel et bien établi des conditions personnelles qui ont peut-être limité à tort ses chances de retourner au travail.

[43] La prestataire affirme que ce n’est pas le cas, car son fils ne voulait pas qu’elle s’occupe de lui et elle cherchait du travail.

[44] Malgré ce que dit maintenant la prestataire, j’ai déjà conclu qu’elle s’est probablement occupée de son fils jusqu’à la fin de septembre 2021. Étant donné le genre de blessures qu’il a subies et l’opération chirurgicale qui a suivi, je comprends pourquoi elle a voulu l’aider. La prestataire a déclaré que les blessures qu’il a eues prennent parfois un an à guérir. Je juge toutefois que le fait de devoir s’occuper de son fils a peut-être beaucoup trop limité les chances que la prestataire retourne au travail.

Somme toute, la prestataire était-elle capable de travailler et disponible pour travailler?

[45] À la lumière de mes conclusions sur les trois éléments analysés, je conclus que la prestataire n’a pas démontré qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable.

Conclusion

[46] La prestataire n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler au sens de la loi. C’est pourquoi je conclus qu’elle ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

[47] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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