Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : Commission de l’assurance-emploi du Canada c WB, 2022 TSS 555

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Angèle Fricker
Partie intimée : W. B.

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 29 septembre 2021 (GE-21-1453)

Membre du Tribunal : Shirley Netten
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 25 janvier 2022
Personnes présentes à l’audience : Représentante de l’appelante
Intimé

Date de la décision : Le 24 juin 2022
Numéro de dossier : AD-21-345

Sur cette page

Décision

[1] J’accueille l’appel de la Commission de l’assurance-emploi du Canada. La division générale a commis plusieurs erreurs dans sa décision sur la répartition de la rémunération.

Aperçu

[2] L’appel porte sur la répartition d’une indemnité de règlement sur la période de prestations d’assurance-emploi du prestataire (W. B.).

[3] Le prestataire a cessé de travailler le 11 juillet 2019. Il a touché des prestations régulières d’assurance-emploi du 25 août 2019 au 8 août 2020Note de bas de page 1, puis il a reçu la prestation d’assurance-emploi d’urgence jusqu’au 3 octobre 2020. En fin de compte, il a négocié un règlement avec son ancienne employeuse. En juin 2021, Service CanadaNote de bas de page 2 a réparti 51 686,84 $ provenant du règlement et de l’indemnité de préavis sur la période de prestations d’assurance-emploi, ce qui a entraîné un trop-payé (prestations versées en trop) de 12 926 $.

[4] Le prestataire a gagné sa cause en partie à l’issue de son appel à la division générale. Elle a décidé que seulement 19 635,18 $ de l’argent du règlement constituaient une rémunération. Elle a déclaré qu’il fallait répartir cette somme sur la période de prestations à compter de la semaine du 7 juillet 2019 jusqu’à la semaine du 1er septembre 2019. Cette décision a réduit le trop-payé du prestataire, le faisant passer à 1 124 $.

[5] La Commission a déposé un appel, avançant que la division générale avait commis trois erreurs en décidant de la répartition et du trop-payé. Je conviens que la division générale a fait les erreurs soulevées. Après la correction des erreurs, le trop-payé est de 2 500 $ compte tenu de la répartition de la rémunération. Il se peut que prestataire ait un autre trop-payé de 302 $ découlant la première répartition incorrecte de la rémunération, mais cette question dépasse la portée du présent appel.

Questions en litige

[6] Voici les questions à trancher dans la présente affaire :

  1. a) La division générale a-t-elle commis une erreur de fait en déduisant deux fois les mêmes frais juridiques de la rémunération à répartir?
  2. b) La division générale a-t-elle fait une erreur de droit dans la répartition de la rémunération en oubliant de tenir compte de la rémunération du prestataire au cours de sa dernière semaine de travail?
  3. c) La division générale a-t-elle fait une erreur de droit dans la répartition de la rémunération en oubliant de compter une période d’attente d’une semaine?
  4. d) À quel résultat la correction des erreurs de la division générale mène-t-elle?

Analyse

La somme à répartir est de 22 145,18 $

La division générale a commis une erreur de fait

[7] L’un des moyens d’appel devant la division d’appel est que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait qui n’est pas étayée par la preuveNote de bas de page 3.

[8] Le règlement entre le prestataire et son ancienne employeuse comprenait les sommes suivantes :

  • 25 807,65 $ en indemnité de préavis;
  • 40 750 $ pour les frais juridiques et les dommages-intérêts généraux;
  • 1 581,94 $ pour le remboursement d’un ordinateur portable de remplacement.

[9] Le prestataire avait déjà reçu 8 708,34 $ en guise d’indemnité de préavis.

[10] La division générale a conclu que la somme totale versée en indemnité de préavis, soit 34 515,99 $, était une rémunération. Elle était d’accord avec le prestataire sur un point : les frais juridiques, les dommages-intérêts généraux et le remboursement ne constituaient pas une rémunérationNote de bas de page 4. La division générale a reconnu que le prestataire avait payé 12 380,91 $ en frais juridiques en dehors du règlement et que les 40 750 $ mentionnés ci-dessus comprenaient un autre 2 500 $ pour les frais juridiques.

[11] La Commission fait remarquer que le prestataire a payé 12 370,81 $ en frais juridiques en dehors du règlement, et non 12 380,91 $. À part cet écart de 10,10 $, la Commission ne conteste aucune des conclusions ci-dessus.

[12] La division générale a ensuite commis une erreur de fait importante. Elle a soustrait 14 880,81 $ en frais juridiques de l’indemnité de préavis de 34 515,99 $ avant de conclure qu’il fallait répartir une rémunération de 19 635,18 $Note de bas de page 5. Cette conclusion contredit la preuve. Ayant déjà retiré les 40 750 $ de la rémunération, et comme ce montant comprenait 2 500 $ en frais juridiques, la division générale n’aurait pas dû soustraire de nouveau les 2 500 $ de l’indemnité de préavis. La division générale a commis une erreur de fait.

Je peux corriger l’erreur de la division générale

[13] Quand la division générale a fait une erreur, la division d’appel peut renvoyer l’affaire à la division générale ou rendre sa propre décisionNote de bas de page 6. Dans ce cas-ci, il n’est pas nécessaire de renvoyer l’affaire à la division générale. Les deux parties ont eu l’occasion de présenter leur preuve à la division générale, et les faits au dossier ne sont pas contestés.

[14] Les reçus pour les frais juridiques totalisent 12 370,81 $Note de bas de page 7. Voilà le montant qu’il faut soustraire de l’indemnité de préavis de 34 515,99 $. Je suis d’accord avec la représentante de la Commission pour dire qu’une rémunération de 22 145,18 $ doit être répartie sur la période de prestations d’assurance-emploi.

Aucune des indemnités de cessation d’emploi ne peut être répartie sur la semaine du 7 juillet 2019

La division générale a fait une erreur de droit

[15] Un autre moyen d’appel à la division d’appel est que la décision de la division générale est entachée d’une erreur de droitNote de bas de page 8.

[16] La division générale a affirmé qu’il fallait répartir la rémunération au taux de 2 346,15 $ par semaine à compter du 7 juillet 2019 (le dimanche de la semaine où le prestataire a cessé de travailler). La division générale a raison de dire que c’est à ce moment que l’exercice de répartition commence. Toutefois, elle ne s’est pas rendu compte qu’il fallait aussi prendre en compte les revenus d’emploi gagnés au cours de cette première semaine.

[17] La loi dit que la rémunération est « répartie sur un nombre de semaines qui commence par la semaine du licenciement ou de la cessation d’emploi, de sorte que la rémunération totale tirée par [le prestataire] de cet emploi dans chaque semaine consécutive, sauf la dernière, soit égale à sa rémunération hebdomadaire normale provenant de cet emploiNote de bas de page 9. »

[18] La division générale n’a pas tenu compte de la rémunération que le prestataire a reçue pour la semaine du 7 juillet 2019, de façon à s’assurer que le total de la somme répartie ne dépasserait pas la rémunération hebdomadaire normale. C’était une erreur de droit.

Je peux corriger l’erreur de la division générale

[19] Le relevé d’emploi montre que le prestataire a gagné au moins sa rémunération hebdomadaire normale de 2 346,15 $ au cours de la semaine du 7 juillet 2019. Par conséquent, aucune partie des 22 145,18 $ formant la rémunération de cessation d’emploi ne peut être répartie sur cette semaine. Au lieu de cela, comme le soutient la Commission, il faut répartir la rémunération découlant de la cessation d’emploi sur 10 semaines à compter de la semaine du 14 juillet 2019 :

  • au taux de 2 346,15 $ pendant 9 semaines (celles du 14, du 21 et du 28 juillet, celles du 4, du 11, du 18 et du 25 août et celles du 1er et du 8 septembre 2019);
  • le solde de 1 029,83 $ pour la 10e semaine (celle du 15 septembre 2019).

Le prestataire doit observer une période d’attente

La division générale a fait une erreur de droit

[20] La loi prévoit l’observation d’un délai de carence (période d’attente) d’une semaineNote de bas de page 10.

[21] La division générale a décidé que la répartition prendrait fin la semaine du 1er septembre 2019, ce qui donnerait un trop-payé de 1 124 $ découlant de la reprise des prestations la semaine suivante. Ce faisant, la division générale a oublié que le prestataire devait observer une période d’attente d’une semaine. C’était une erreur de droit.

Je peux corriger l’erreur de la division générale

[22] L’ajout d’une semaine d’attente à la répartition veut dire que le prestataire n’aurait pas dû recevoir de prestations d’assurance-emploi avant la semaine du 29 septembre 2019 (après les 10 semaines décrites ci-dessus, plus 1 semaine supplémentaire).

[23] Cette partie de l’exercice de répartition indique que le prestataire a reçu des prestations pendant 5 semaines de trop (celles du 25 août et du 1er, du 8, du 15 et du 22 septembre 2019).

La répartition n’est pas limitée par une « année d’imposition »

[24] Dans ses arguments, le prestataire demande si cette question devrait être considérée comme une nouvelle demande de prestations, parce que les demandes se limitent à l’année d’imposition. Il n’a pas fait appel de la décision de la division générale. Quoi qu’il en soit, la répartition de l’argent du règlement ne se limite pas à une année précise.

[25] La loi dit que si l’on touche des prestations d’assurance-emploi et que, plus tard, on reçoit une rémunération de son employeuse, il faut rembourser les prestations qui n’auraient pas été versées si l’on avait reçu la rémunération pendant la période de prestationsNote de bas de page 11. Peu importe combien de temps s’est écoulé ni durant quelle année d’imposition les indemnités découlant du règlement sont versées.

La répartition correcte des 22 145,18 $ entraîne un trop-payé initial de 2 500 $

[26] J’ai accepté les arguments de la Commission au sujet des erreurs de la division générale. La représentante de la Commission affirme toutefois que je ne peux pas décider du trop-payé qui en résulte, car le trop-payé n’est pas une décision, mais plutôt le résultat d’une décision sur la répartition de la rémunération. Je ne suis pas d’accord. Le prestataire a contesté la répartition de la rémunération. La division générale s’est penchée sur la rémunération à répartir et la façon de la répartir. La division générale a rendu une décision au sujet du trop-payé qui en a résulté. De plus, il est dans l’intérêt des deux parties de régler cette question dans la mesure du possible.

[27] L’exercice de répartition modifie le versement des prestations de deux façons.

[28] Premièrement, le prestataire n’aurait pas dû toucher des prestations pendant les 5 premières semaines de sa période de prestations (comme je l’ai expliqué plus haut), car la rémunération était répartie sur ces semaines. Cela donne un trop-payé de 2 810 $ (562 $ x 5).

[29] Deuxièmement, comme le prestataire a perdu 5 semaines au début de sa période de prestations, il avait droit aux prestations régulières d’assurance-emploi pour 5 semaines supplémentaires à la fin de sa période de prestations s’il était encore au chômage. Comme le prestataire recevait la prestation d’assurance-emploi d’urgence pour ces 5 semaines, à raison de 500 $ par semaine, il peut obtenir la différence avec le taux de prestation le plus élevé. Il lui manque donc 310 $ (62 $ x 5) de prestationsNote de bas de page 12.

[30] Cela donne un trop-payé total de 2 500 $.

[31] Malheureusement, un autre aspect du trop-payé ne peut être résolu dans la présente décision.

Le calcul final du trop-payé dépasse la portée du présent appel

[32] Selon la représentante de la Commission, en fin de compte, le trop-payé sera de 2 802 $ et non de 2 500 $. Elle affirme qu’en juin 2021, au moment de faire la première répartition (incorrecte), Service Canada a versé au prestataire un montant forfaitaire de 7 802 $ pour 21 semaines supplémentaires à la fin de sa période de prestations (un supplément à la prestation d’urgence pour 8 semaines et des prestations régulières pour 13 semaines). Cette somme a été versée au prestataire même s’il avait une dette de 12 926 $ à l’époque. La représentante de la Commission ajoute que, par la suite, 7 500 $ ont été versés pour rembourser la dette du prestataire. Elle laisse entendre que l’argent provenait de l’ancienne employeuse du prestataire (qui a retenu ce montant du règlement).

[33] Le prestataire n’est pas certain du paiement qu’il a reçu, et il n’a pas eu connaissance d’un versement effectué pour rembourser sa dette. Aucun élément de preuve concernant ces paiements n’a été présenté à la division générale.

[34] Si la représentante de la Commission a raison au sujet de ces paiements, le prestataire aurait un trop-payé supplémentaire de 302 $ (7 802 $ qu’il n’aurait pas dû recevoir moins 7 500 $). Je ne rendrai aucune décision sur ce point parce que je ne peux pas examiner les nouveaux éléments de preuve et les parties ne se sont pas entendues sur cet aspect du trop-payé. Le prestataire a demandé plus de temps pour examiner les arguments de la Commission, mais il a finalement choisi de ne pas y répondre.

Conclusion

[35] L’appel est accueilli. La division générale a commis plusieurs erreurs de droit dans sa décision sur la répartition. La répartition correcte de la rémunération entraîne un trop-payé de 2 500 $. Il se peut que le prestataire ait aussi un trop-payé supplémentaire qui dépasse la portée du présent appel.

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