Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AG c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 491

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. G.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (431894) datée du 24 novembre 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Solange Losier
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 24 février 2022
Personnes présente à l’audience : Appelant (prestataire)
Date de la décision : Le 28 avril 2022
Numéro de dossier : GE-22-12

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté avec modification. Je suis en partie d’accord avec le prestataire, mais en désaccord avec certains points.

[2] Le prestataire a reçu une rémunération en paie de vacances et en indemnité de préavis, et la Commission de l’assurance-emploi du Canada a réparti cette rémunération sur les semaines appropriées.

[3] Le prestataire a aussi reçu une allocation de retraite. Toutefois, celle-ci n’est pas considérée comme un revenu d’emploi ou une rémunération, alors la Commission ne peut pas répartir cette allocation.

Aperçu

[4] Selon la Commission, le prestataire a reçu 56 907,24 $ et 56 400,08 $, donc 113 307,32 $ en tout, de son ex-employeur. Cet employeur a produit deux relevés d’emploi à différents momentsNote de bas de page 1.

[5] La Commission a d’abord décidé que toute cette somme constituait une « rémunération » au sens de la loi puisqu’il s’agissait d’une paie de vacances, d’une indemnité de préavis, d’une allocation de retraite et d’une indemnité de départNote de bas de page 2. Elle a aussi décidé que les revenus de pension constituaient une rémunération. Cette situation a donné lieu à un trop-payéNote de bas de page 3.

[6] Selon la loi, toute rémunération est répartie sur un nombre donné de semaines. Ces semaines sont établies en fonction de la raison de la rémunérationNote de bas de page 4.

[7] La Commission a réparti la rémunération totale à compter de la semaine du 25 novembre 2018, puisqu’il y a eu cessation d’emploi à ce moment-làNote de bas de page 5. Les revenus de pension ont été répartis à compter du 3 mars 2019. Cette période a ensuite été raccourcie pour s’échelonner du 2 décembre 2018 à la semaine du 10 mars 2019Note de bas de page 6.

[8] Le prestataire n’est pas d’accord avec la Commission : une part de l’argent reçu ne constitue pas un revenu, car elle a été investie. Le prestataire défend qu’il avait droit à toutes les prestations reçues et que la Commission a commis une erreur dans les versementsNote de bas de page 7. Le prestataire a des problèmes de santé, et le remboursement du trop-payé créerait un préjudice financier.

Questions que je dois examiner en premier

J’ai demandé une décision de l’Agence du revenu du Canada (ARC)

[9] Le prestataire a dit à la Commission qu’il était en désaccord avec les montants des versements de fin d’emploi sur le relevé d’emploiNote de bas de page 8. Il a aussi noté que les montants étaient incorrectsNote de bas de page 9.

[10] Comme le prestataire et la Commission ne s’entendent pas sur les sommes qui ont été versées, j’ai demandé à la Commission d’obtenir une décision de l’ARC pour trancher la question à propos du montant de la rémunération assurable du prestataireNote de bas de page 10. La Commission a demandé plus de temps pour fournir les renseignements, ce que j’ai acceptéNote de bas de page 11.

[11] À l’audience, j’ai demandé au prestataire si les sommes versées, telles qu’elles sont indiquées sur les relevés d’emploi, étaient correctes. À sa connaissance, elles étaient correctes. J’ai mis le dossier en suspens en attendant la décision de l’ARCNote de bas de page 12.

Décision de l’ARC le 20 avril 2022

[12] Le 27 avril 2022, la Commission a envoyé au Tribunal une copie de la décision de l’ARCNote de bas de page 13. Voici ce qu’on y trouve :

  • [traduction]
    Nous établissons que, pour la période en question (date de début [2018-12-02] et date de fin [2020-12-26]), la paie de vacances et l’indemnité de préavis totalisant 14 890,24 $ étaient assurables au titre de l’article 2(1)(a) du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations.
  • Nous remarquons aussi qu’après la fin de votre emploi chez (employeur X), vous avez reçu une allocation de retraite de 98 417,08 $Note de bas de page 14. Il ne s’agit pas d’un revenu d’emploi. Cette allocation est exclue de la rémunération assurable au titre de l’article 2(3)(b) du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations.

Questions en litige

[13] Je dois décider ce qui suit :

  1. a) L’argent que le prestataire a reçu est-il considéré comme une rémunération?
  2. b) S’il s’agit d’une rémunération, la Commission l’a-t-elle répartie correctement?

Analyse

L’argent que le prestataire a reçu est-il considéré comme une rémunération?

[14] Selon la loi, la rémunération est le revenu intégral provenant de tout emploiNote de bas de page 15. La loi définit clairement les termes « revenu » et « emploi ».

[15] Le revenu est ce qu’une personne a reçu ou recevra d’un employeur ou d’une autre personne, en argent ou autreNote de bas de page 16. Selon la jurisprudence, l’indemnité de départ constitue une rémunérationNote de bas de page 17.

[16] L’emploi est tout travail qu’une personne a fait ou fera conformément à un contrat de service ou de travailNote de bas de page 18.

[17] Le prestataire doit prouver que l’argent reçu ne constitue pas une rémunération selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’argent reçu soit autre chose qu’une rémunération. La loi prévoit des exceptions pour l’argent provenant de certaines sources qui n’ont pas valeur de rémunérationNote de bas de page 19.

La Commission suggère de modifier sa décision initiale

[18] L’employeur a versé au prestataire un total de 113 307,32 $. Ce montant correspond aux éléments de preuve au dossier, dont le relevé d’emploi et la décision de l’ARC.

[19] En premier lieu, la Commission a décidé que la somme en question était une combinaison de paie de vacances, d’indemnité de préavis et d’allocation de retraiteNote de bas de page 20. Selon la Commission, tout cet argent constituait une rémunération au sens de la loi, y compris la pension que le prestataire a commencé à recevoir en mars 2019.

[20] La Commission a changé d’avis à la suite de l’audience et après avoir pris connaissance de la décision de l’ARCNote de bas de page 21. La Commission estime devoir modifier sa décision initiale, puisque seulement 14 890,24 $ est réellement considéré comme une rémunération et un revenu d’emploi. La Commission approuve la décision de l’ARC : les 98 417,08 $ restant ne constituaient pas un revenu d’emploi et n’étaient donc pas une rémunération assurableNote de bas de page 22.

[21] J’affirme que le montant de 14 890,24 $, qui représente une paie de vacances et une indemnité de préavis, a valeur de rémunération au sens de la loi. Il s’agit d’un revenu d’emploi. L’employeur a versé cette somme au prestataire parce qu’il y a eu cessation d’emploi. Cette somme doit donc être répartie.

[22] J’affirme également que le montant de 98 417,08 $, qui représente une allocation de retraite, n’a pas valeur de rémunérationNote de bas de page 23. La décision de l’ARC m’a persuadée que cette somme ne constituait pas un revenu d’emploi et n’était donc pas une rémunération assurableNote de bas de page 24. Ainsi, cette somme ne sera pas répartie.

La Commission a-t-elle réparti la rémunération correctement?

[23] Selon la loi, toute rémunération est répartie sur un nombre donné de semaines. Ces semaines sont établies en fonction de la raison de la rémunérationNote de bas de page 25.

[24] La loi prévoit que toute rémunération qu’une personne reçoit en raison d’une cessation d’emploi doit être répartie à compter de la semaine de cette cessation d’emploi. La date à laquelle la personne reçoit la rémunération ne change rien. La rémunération doit être répartie à compter de la semaine où a lieu la fin d’emploi, même si la personne n’a pas touché cette rémunération à ce moment-làNote de bas de page 26.

[25] Je juge que la paie de vacances et l’indemnité de préavis totalisant 14 890,24 $ doivent être réparties sur la période de prestations d’assurance-emploi du prestataire. Son dernier jour de travail était le 30 novembre 2018.

[26] Je reconnais que la rémunération hebdomadaire normale du prestataire était de 1 049,02 $. La répartition s’échelonnera du 2 décembre 2018 au 9 mars 2019Note de bas de page 27. La différence de 204,00 $ sera attribuée à la semaine du 10 mars 2019.

[27] Les parties ne semblent pas contester que les revenus de pension du prestataire doivent être répartis. Ces revenus ont été répartis à compter du 3 mars 2019, à raison de 138,00 $ par semaine, jusqu’à la fin de sa période de prestations. Par conséquent, j’accepte cela comme un fait.

[28] Comme je l’ai indiqué plus tôt, l’allocation de retraite de 98 417,08 $ ne sera pas répartie sur la période de prestations d’assurance-emploi du prestataire, car elle ne constitue pas une rémunération selon la décision de l’ARC.

La Commission peut-elle réexaminer la demande?

[29] Oui. La Commission peut réexaminer et recalculer une demande dans les 36 mois qui suivent le moment où des prestations ont été payées ou sont devenues payablesNote de bas de page 28. La Commission a en effet décidé de réexaminer la demande dans les 36 mois permis par la loi. Je ne peux pas changer la loi et je suis tenue de la suivre.

[30] Même si la Commission avait les deux relevés d’emploi et même si elle a commis une erreur en versant au prestataire des prestations auxquelles il n’avait pas droit, la loi permet à la Commission de réexaminer la demande et de récupérer toute dette.

Serait-il possible d’annuler le trop-payé?

[31] Le prestataire se trouvait dans une situation difficile. Toutefois, je n’ai pas le pouvoir d’effacer un trop-payéNote de bas de page 29. Le prestataire doit faire une demande de « défalcation » en raison d’un préjudice financier et l’envoyer à la Commission ou directement à l’ARC, ou au deux.

[32] Cependant, comme la répartition ne comprend plus l’allocation de retraite de 98 417,08 $, le prestataire pourrait demander à la Commission le tableau à jour de la distribution du trop-payéNote de bas de page 30 qui montre la répartition la plus récente et la nouvelle dette à régler.

Conclusion

[33] L’appel est rejeté avec modification.

[34] Le prestataire a touché une rémunération qui doit être répartie (paie de vacances et indemnité de préavis). Cette rémunération est répartie à compter de la semaine du 2 décembre 2018. Comme l’allocation de retraite ne constitue pas une rémunération, elle ne sera pas répartie.

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