Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 566

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. M.
Représentante ou représentant : A. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (446888) datée du 17 janvier 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Catherine Shaw
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 5 avril 2022
Personnes présentes à l’audience : Représentante de l’appelant
Date de la décision : Le 6 avril 2022
Numéro de dossier : GE-22-546

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec le prestataire.

[2] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter son emploi lorsqu’il l’a fait (autrement dit, il n’a pas fourni une raison que la loi accepte). Il n’était pas fondé à quitter son emploi parce que d’autres solutions raisonnables s’offraient à lui. Par conséquent, il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] Le prestataire a quitté son emploi pour faire des études, et il a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’il avait quitté volontairement son emploi (ou choisi de quitter son emploi) sans y être fondé, et qu’elle ne pouvait donc pas lui verser des prestations.

[4] Je dois décider si le prestataire a prouvé qu’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi.

[5] La Commission affirme que le prestataire aurait pu conserver son emploi tout en étudiant, ou choisir de continuer de travailler plutôt que de faire le choix personnel d’aller aux études.

[6] Le prestataire n’est pas d’accord et fait valoir qu’il a fait une demande de recommandation pour sa formation. Il croyait être autorisé à quitter son emploi par l’autorité désignée à le diriger.

Question en litige

[7] Le prestataire est-il exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi parce qu’il a quitté son emploi sans y être fondé?

[8] Pour répondre à cette question, je dois d’abord me pencher sur le départ volontaire du prestataire. Je dois ensuite décider si le prestataire était fondé à quitter son emploi.

Analyse

Les parties conviennent que le prestataire a quitté volontairement son emploi

[9] J’accepte que le prestataire a quitté volontairement son emploi. Il affirme avoir démissionné pour faire des études. Je ne vois aucune preuve qui contredit cela.

[10] Il y a cependant de l’information contradictoire concernant la date de la démission du prestataire. Dans sa demande de prestations, le prestataire a précisé que sa dernière journée de travail était le 27 août 2021. L’employeur a précisé dans le relevé d’emploi du prestataire que sa dernière journée de travail était le 9 septembre 2021.

[11] À l’audience, la représentante du prestataire a affirmé que sa dernière journée de travail était le 27 août 2021. Elle a dit qu’il était possible que le relevé d’emploi reflète les congés qu’il restait au prestataire, mais elle a confirmé que le prestataire avait mis fin à son emploi à compter du 27 août 2021.

[12] Je préfère me fier à ce que le prestataire a inscrit dans sa demande et à la confirmation de sa représentante pour ce qui est de sa dernière journée de travail. Je crois que cette information est plus fiable que le relevé d’emploi, car l’employeur n’a pas expliqué pourquoi il avait inscrit que la dernière journée de travail était le 9 septembre 2021. Aucune preuve ne montre que le prestataire a travaillé jusqu’au 9 septembre 2021, et le prestataire lui-même a contredit cette information. J’estime donc qu’il est plus probable que le prestataire ait démissionné de son emploi le 27 août 2021.

Ce que signifie « être fondé à » faire quelque chose

[13] Les parties ne s’entendent pas pour dire que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi lorsqu’il l’a fait.

[14] Selon la loi, une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle a quitté volontairement son emploi sans être fondée à le faireNote de bas de page 1. Il n’est pas suffisant qu’une personne ait une bonne raison de quitter un emploi pour prouver qu’elle était fondée à le faire.

[15] La loi explique ce que signifie « être fondé à ». Selon la loi, une personne est fondée à quitter son emploi si aucune autre solution raisonnable ne s’offrait à elle au moment où elle l’a fait. Il faut prendre en considération toutes les circonstancesNote de bas de page 2.

[16] Il incombe au prestataire de prouver qu’il était fondé à quitter son emploiNote de bas de page 3. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que sa seule option raisonnable était de démissionner. Pour décider si le prestataire était fondé à quitter son emploi, je dois examiner toutes les circonstances qui existaient au moment de sa démission.

Les circonstances qui existaient lorsque le prestataire a démissionné

[17] Le prestataire a dit qu’il avait quitté son emploi parce qu’il commençait un programme d’études à temps plein.

[18] La Commission affirme que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi parce que d’autres solutions raisonnables s’offraient à lui au moment où il a démissionné. Plus particulièrement, elle dit que le prestataire aurait pu continuer de travailler en fonction de son horaire de cours, ou conserver son emploi plutôt que de décider de faire des études.

[19] Parfois, la Commission (ou un programme autorisé par la Commission) dirige une personne vers une formation, un programme ou un cours. Une des circonstances dont je dois tenir compte est la question de savoir si la Commission avait dirigé le prestataire vers son programme d’études.

[20] La représentante du prestataire a dit qu’il avait fait de la recherche pour voir s’il pouvait obtenir une recommandation pour son programme d’études avant de démissionner. Il s’est d’abord inscrit à un programme de formation et de développement des compétences à la mi-août 2021. Puis, le 30 août 2021, il a été informé qu’il n’était pas admissible au programme. Cependant, on lui a dit qu’il serait peut-être admissible à un autre programme, Connexion NB-AE. Il a communiqué avec un agent de Connexion NB-AE le même jour. L’agent lui a dit qu’il devait faire une demande de prestations d’assurance-emploi avant de s’inscrire à Connexion NB-AE. Une fois qu’il serait approuvé pour le programme, il pourrait quitter son emploi et commencerait à recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[21] La représentante du prestataire a dit qu’il a immédiatement fait une demande d’inscription au programme Connexion NB-AE. Sa demande a été approuvée le 17 septembre 2021.

[22] La représentante du prestataire a soulevé deux décisions du Tribunal qui, à son avis, sont très semblables aux circonstances du prestataire (EG c Commission de l’assurance-emploi du Canada et BF c Commission de l’assurance-emploi du CanadaNote de bas de page 4).

[23] Dans la décision BF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, la prestataire a arrêté de travailler et a demandé une recommandation à son programme d’études. Sa demande a été approuvée peu de temps après. La membre du Tribunal a jugé que la recommandation à la formation était une circonstance pertinente, et elle a décidé que la prestataire n’avait aucune autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi, car elle devait déménager dans une autre ville pour suivre le programme de formation qui lui avait été recommandé.

[24] Dans la décision EG c Commission de l’assurance-emploi du Canada, Connexion NB-AE a dirigé la prestataire vers son programme d’études avant qu’elle quitte son emploi. Le membre de la division d’appel a conclu qu’une « personne qui quitte un emploi sur la recommandation de l’autorité désignée afin d’aller suivre un cours [ou un] programme d’instruction […] vers lequel elle a été dirigée [est] considérée avoir quitté son emploi avec justificationNote de bas de page 5 ».

[25] Ces décisions du Tribunal de la sécurité sociale offrent une interprétation conflictuelle de la loi.

[26] Dans BF v Commission de l’assurance-emploi du Canada, la membre a considéré le fait que la prestataire a été dirigée vers sa formation comme une circonstance pertinente, même si la prestataire n’avait pas demandé la recommandation avant de quitter son emploi.

[27] Dans EG c Commission de l’assurance-emploi du Canada, le membre de la division d’appel a conclu que la recommandation de la prestataire à la formation était seulement pertinente parce qu’elle l’avait obtenue avant de démissionner.

[28] Cela est important parce que la question de la justification dépend d’un moment précis; le moment où le prestataire a quitté son emploi. La Cour d’appel fédérale a dit que je peux seulement tenir compte des circonstances qui existaient au moment où le prestataire a quitté volontairement son emploi pour décider s’il était fondé à démissionnerNote de bas de page 6.

[29] Le membre de la division d’appel a tenu compte de ce principe dans la décision EG c Commission de l’assurance-emploi du Canada. Il a analysé une autre décision de la division d’appel du Tribunal (Commission de l’assurance-emploi du Canada c LS) dans laquelle il a été conclu que la division générale avait commis une erreur en décidant qu’une partie prestataire était fondée à quitter son emploi parce que Connexion NB-AE l’avait dirigée vers un programme de formationNote de bas de page 7. Cela est dû au fait que la prestataire avait quitté son emploi pour aller aux études avant que Connexion NB-AE accepte de lui donner une recommandation. La division d’appel s’est appuyée sur le fait que la loi dit qu’une partie prestataire doit obtenir la recommandation avant de quitter son emploiNote de bas de page 8.

[30] Je ne suis pas liée par les décisions antérieures du Tribunal. Toutefois, j’estime que le membre de la division d’appel a correctement appliqué la loi. Je préfère donc m’appuyer sur le principe énoncé dans EG c Commission de l’assurance-emploi du Canada plutôt que sur l’interprétation de la loi faite par la membre dans BF c Commission de l’assurance-emploi.

[31] Plusieurs des circonstances dans EG c Commission de l’assurance-emploi sont similaires à celles du prestataire. Les deux prestataires ont quitté leur emploi pour suivre un programme d’études. La Commission a soutenu dans les deux cas que les prestataires devaient obtenir [traduction] « l’autorisation de démissionner » de leur emploi pour suivre la formation recommandée. Par contre, j’estime que les faits de l’affaire qui nous concerne diffèrent de façon importante des faits de cette décision.

[32] Dans EG c Commission de l’assurance-emploi du Canada, le membre a conclu que « la prestataire n’a pas quitté son emploi pour poursuivre ses études sans avoir d’abord été dirigée vers son programme d’études par Connexion NB-AENote de bas de page 9 ». Il s’est appuyé sur ce fait lorsqu’il a décidé que la prestataire était fondée à quitter son emploi, car elle l’a fait pour suivre une formation pour laquelle elle avait déjà obtenu une recommandation.

[33] En ce qui concerne le prestataire, il n’avait pas été dirigé vers son programme d’études lorsqu’il a démissionné. En fait, il s’est seulement inscrit au programme Connexion NB-AE le 30 août 2021, après avoir déjà arrêté de travailler. Il a reçu son approbation le 17 septembre 2021, soit plusieurs semaines après avoir démissionné. Puisque le prestataire n’avait pas été dirigé vers son programme d’études au moment où il a démissionné, je ne peux pas en tenir compte dans le cadre de la présente décision.

[34] La jurisprudence dit clairement que si une personne quitte son emploi uniquement pour faire des études sans avoir obtenu de recommandation, elle n’est pas fondée à quitter son emploiNote de bas de page 10. Le prestataire n’avait pas obtenu de recommandation pour faire des études au moment où il a quitté son emploi, alors cela s’applique à lui.

[35] La représentante du prestataire a dit qu’il avait été informé qu’il pouvait quitter son emploi s’il obtenait l’approbation de Connexion NB-AE. Le prestataire croyait donc qu’il avait le droit de quitter son emploi compte tenu de l’information qu’il avait reçue. Il pensait pouvoir obtenir du soutien financier de l’assurance-emploi pendant ses études une fois qu’il avait obtenu l’approbation du programme Connexion NB-AE.

[36] Je reconnais que le prestataire a reçu de l’information d’un agent de Connexion NB-AE qu’il a interprétée comme signifiant qu’il pourrait recevoir des prestations d’assurance-emploi s’il quittait son emploi pour faire des études. Toutefois, la preuve montre que le prestataire a reçu cette information après qu’il a arrêté de travailler le 27 août 2021. La représentante du prestataire a affirmé que celui-ci avait parlé à l’agent le 30 août 2021. Le prestataire ne s’est pas fait dire de quitter son emploi avant qu’il démissionne, alors je ne peux pas tenir compte de cette circonstance dans le cadre de la présente décision.

[37] Je comprends que le prestataire a senti qu’il n’avait pas le choix de quitter son emploi vu qu’il commençait ses cours. Cependant, j’estime que ce n’est pas parce que le prestataire a choisi de faire des études qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. Il en est ainsi parce que d’autres solutions raisonnables s’offraient à lui au moment où il l’a fait.

[38] Le prestataire avait l’option raisonnable de conserver son emploi. Je comprends que le prestataire peut avoir de bonnes raisons pour avoir choisi de quitter son emploi pour aller aux études. Par contre, il s’agit d’un choix personnel et il va à l’encontre de l’idée à la base du régime d’assurance-emploiNote de bas de page 11.

[39] Le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi. Cela signifie qu’il doit être exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Conclusion

[40] Je conclus que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[41] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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