Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : DT c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 571

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie prestataire : D. T.
Représentante ou représentant : S. T.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 28 mars 2022
(GE-22-393)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Date de la décision : Le 28 juin 2022
Numéro de dossier : AD-22-252

Sur cette page

Décision

[1] La permission de faire appel est refusée, car l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La prestataire, D. T. (prestataire), fait appel de la décision de la division générale. Celle-ci a conclu que la prestataire n’avait pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler pendant qu’elle fréquentait l’école secondaire à temps plein. La division générale a conclu qu’elle n’était donc pas admissible aux prestations d’assurance‑emploi et qu’il restait un trop-payé dans sa demande.

[3] La prestataire soutient que la division générale a commis des erreurs procédurales et factuelles lorsqu’elle a conclu qu’elle n’était pas disponible pour travailler. Elle soutient que la membre de la division générale ne l’a pas traitée équitablement. Elle laisse aussi entendre que la division générale n’a pas tenu compte de son témoignage.

[4] Avant que l’appel de la prestataire puisse aller de l’avant, je dois décider s’il a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 1. Une chance raisonnable de succès est l’équivalent d’une cause défendableNote de bas de page 2. Si l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès, l’affaire est close.

[5] Je ne suis pas convaincue que l’appel ait une chance raisonnable de succès. Par conséquent, je ne donne pas à la prestataire la permission d’aller de l’avant avec son appel.

Questions en litige

[6] Voici les questions en litige :

  1. a) Est-il possible de soutenir que la division générale a traité la prestataire de façon injuste?
  2. b) Est-il possible de soutenir que la division générale a négligé ou déformé une partie de la preuve?

Analyse

[7] La division d’appel doit accorder la permission de faire appel à moins que l’appel n’ait aucune chance raisonnable de succès. Il y a une chance raisonnable de succès s’il est possible qu’une erreur de compétence, de procédure, de droit ou un certain type d’erreur de fait ait été commiseNote de bas de page 3.

[8] En ce qui concerne les erreurs de fait, il faut que la division générale ait fondé sa décision sur une erreur commise de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments de preuve portés à sa connaissance.

[9] Après avoir obtenu la permission de la division d’appel, la partie prestataire passe à l’appel proprement dit. À cette étape, la division d’appel décide si la division générale a commis une erreur. Si c’est le cas, la division d’appel décide ensuite de la façon de la corriger.

Est‑il possible de soutenir que la division générale a traité la prestataire de façon injuste?

[10] La prestataire soutient que la division générale ne l’a pas traitée équitablement [traduction] « parce qu’elle a toujours été honnête au sujet de son statut d’élèveNote de bas de page 4 ».

Allégations de partialité

[11] De ce fait, je comprends que la prestataire soutient essentiellement que la membre de la division générale a fait preuve de partialité à son égard parce qu’elle était une élève.

[12] La Cour suprême du Canada a énoncé le critère de la crainte raisonnable de partialité. Elle a fait référence à l’opinion dissidente du juge Grandpré dans la décision Committee for Justice and Liberty c L’Office national de l’énergie :

[C]e critère consiste à se demander « à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Croirait-elle que, selon toute vraisemblance [la personne qui doit rendre la décision], consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste? »

[13] La simple allégation de partialité ne satisfait pas à cette norme.

[14] J’ai écouté l’enregistrement audio de l’audience de la division générale. La membre a fait une introduction. Elle a expliqué ce à quoi la prestataire pouvait s’attendre à l’audience. Elle a décrit la forme que prendrait l’audience. La membre a expliqué ce que la prestataire devait prouver. Elle a examiné les documents et les faits. Elle a ensuite cerné les questions en litige et le critère juridique auquel la prestataire devait satisfaire.

[15] Tout au long de l’audience, la membre s’est montrée respectueuse envers la prestataire. Elle a traité la prestataire d’une manière juste et équitable.

[16] Dans sa décision, la membre de la division générale a examiné la preuve dont elle disposait. Celle-ci comprenait la preuve documentaire au dossier d’audience ainsi que le témoignage de vive voix de la prestataire. La membre de la division générale a pris en considération la preuve et les arguments de la prestataire. Elle a soupesé la preuve et appliqué la loi aux faits qu’elle jugeait pertinents.

[17] La membre de la division générale a expliqué ses motifs. Elle a exposé les questions qu’elle devait trancher et les facteurs qu’elle devait évaluer. Elle a énuméré les faits sur lesquels elle s’est fondée. L’analyse de la membre était détaillée et réfléchie.

[18] Dans la présente affaire, il était inévitable de tenir compte du fait que la prestataire était aux études. Il existe une présomption générale dans la loi voulant que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler. La division générale ne pouvait pas ignorer cela. Toutefois, elle a également examiné si des exceptions auraient pu s’appliquer pour réfuter la présomption générale.

[19] La division générale est ensuite allée encore plus loin. Elle a également évalué si la prestataire était disponible pour travailler. Elle n’était pas obligée de le faire étant donné qu’elle avait conclu que la présomption générale s’appliquait. Cependant, elle a examiné si la prestataire était disponible, au cas où elle aurait eu tort de croire que la présomption générale s’appliquait.

[20] L’horaire de cours de la prestataire était nécessairement pertinent à sa disponibilité. La division générale a donc dû en tenir compte.

[21] Autrement dit, il n’y avait rien d’arbitraire au fait que la division générale examine le statut d’élève de la prestataire et son horaire de cours. Il s’agissait de considérations pertinentes à la question de la disponibilité.

[22] Je n’ai rien constaté, que ce soit au cours de l’audience ou dans la décision elle-même, qui laisse entendre que la membre s’est montrée partiale à l’égard de la prestataire ou qu’elle l’a traitée de façon injuste. La membre a donné à la prestataire une occasion pleine et équitable de présenter sa cause, puis elle a rendu une décision mesurée et justifiée par les faits et le droit.

Allégations de manque d’équité procédurale

[23] Les allégations de manque d’équité peuvent aussi comprendre des erreurs de procédure. Cela pourrait signifier l’un des éléments suivants, qu’une partie prestataire :

  • n’a pas reçu un préavis suffisant de l’audience;
  • ne connaissait pas la preuve qu’elle devait réfuter;
  • n’a pas pu consulter la totalité des documents,
  • n’a pas eu l’occasion de présenter ses arguments;
  • n’a pas eu droit à une audience équitable.

[24] La prestataire n’a pas relevé quoi que ce soit que la membre de la division générale aurait pu faire qui aurait porté atteinte à son droit à l’équité procédurale. Je ne vois rien dans la preuve qui me porte à croire que le processus à la division générale était injuste envers le prestataire.

Allégations de manque d’équité par la Commission de l’assurance-emploi du Canada

[25] Je reconnais que la prestataire affirme qu’il est injuste qu’elle se retrouve avec un trop-payé important alors qu’elle s’est fiée aux conseils de la défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, par l’entremise de Service Canada. Elle a rempli avec exactitude le formulaire de demande de prestations ainsi que ses déclarations hebdomadaires, et dit donc qu’elle aurait dû pouvoir s’attendre à ce que l’information fournie par la Commission soit exacte.

[26] La prestataire continue de dire qu’il est injuste que la Commission l’ait amenée à croire qu’elle avait droit à des prestations alors qu’elle savait qu’elle était élève à temps plein. Elle affirme aussi qu’il est injuste que la Commission n’ait pas traité sa demande plus rapidement. Si elle avait traité sa demande plus tôt, le trop-payé n’aurait pas été si élevé.

[27] Le fait que la prestataire se soit fiée à la Commission et le retard dans le traitement de sa demande sont des préoccupations valides. Toutefois, il ne s’agit pas d’éléments que je peux prendre en considération au moment de décider si je dois ou non accorder une permission de faire appel. Comme je l’ai mentionné plus haut, les questions que je peux examiner sont très limitéesNote de bas de page 5.

Résumé

[28] La prestataire est clairement en désaccord avec la décision de la division générale. Cependant, cela ne signifie pas que la membre de la division générale ne l’a pas traitée de façon équitable, ou que le processus à la division générale n’était pas équitable.

[29] Je ne suis pas convaincue qu’il soit possible de soutenir que la membre de la division générale a commis une erreur de procédure ou qu’elle a fait preuve de partialité à l’égard de la prestataire.

Est-il possible de soutenir que la division générale a négligé ou déformé une partie de la preuve?

[30] La prestataire soutient que la division générale a négligé ou déformé certains éléments de preuve. Elle écrit ce qui suit :

traduction]
J’étais disponible pour travailler à temps plein pendant que j’étais au secondaire. J’ai commencé mon premier emploi […], le lendemain de mon 15e anniversaire. J’ai travaillé pour deux entreprises différentes, l’une étant McDonald’s, qui est ouvert 24 heures sur 24, et l’autre étant [deuxième employeur]. En raison du confinement, j’ai été mise à pied par [deuxième employeur] et j’ai perdu la majorité de mes heures chez McDonald’s. J’ai communiqué avec l’assurance-emploi et on m’a dit que j’étais admissible aux prestations. J’ai vérifié mon admissibilité auprès d’une représentante de l’assurance-emploi plus de huit fois au téléphone, et elle m’a assuré que j’étais admissible et elle a elle-même rempli la demande pour moi au téléphone. Pendant que je recevais des prestations d’assurance-emploi, j’ai manifesté le désir de travailler à temps plein, y compris des quarts de nuit chez McDonald’s, mais on ne pouvait pas m’offrir suffisamment d’heures en raison du confinement. La plupart du temps, je devais quitter mes cours en ligne plus tôt pour pouvoir me rendre au travail, parce que mon quart commençait avant la fin de ma journée d’école. Je cherchais constamment d’autres emplois pour compenser la perte de mes heures chez [deuxième employeur], mais personne n’embauchait pendant la pandémie. Maintenant, j’ai un trop-payé important à rembourser en raison de l’inadmissibilité rétroactive qui m’a été imposée. Toute ma famille a souffert pendant le confinement, et l’argent que j’ai reçu a servi à payer des dépenses familiales. J’ai 16 ans et je ne peux pas rembourser une dette de 14 600 $.

[31] La décision de la division générale reflète fidèlement une grande partie de cette preuveNote de bas de page 6.

[32] La seule différence est que la division générale a écrit que la mère de la prestataire avait demandé [traduction] « six ou sept fois » si une élève du secondaire pouvait obtenir des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 7. La prestataire affirme qu’il s’agit d’une erreur. Elle affirme que la preuve montre qu’elle a vérifié son admissibilité auprès d’une représentante de la Commission [traduction] « plus de huit fois au téléphone ».

[33] Cependant, j’estime que le nombre de fois que la Commission a dit à la prestataire ou à sa mère que la prestataire était admissible aux prestations n’a aucune incidence. Cela n’aurait pas changé l’issue parce que le nombre de fois où la Commission a avisé la prestataire n’avait aucune répercussion sur la disponibilité de celle-ci à travailler.

[34] À part cela, je constate que la prestataire a déclaré que la Commission lui avait donné ce conseil [traduction] « au moins six à sept fois ». La prestataire l’a dit trois foisNote de bas de page 8. La division générale a décrit avec exactitude le témoignage de vive voix de la prestataire.

[35] Je ne suis pas convaincue qu’il soit possible de soutenir que la division générale a commis les erreurs de fait que la prestataire prétend qu’elle a commises. Les conclusions de la division générale reposaient sur des éléments de preuve.

[36] La prestataire cherche en grande partie à faire réévaluer les faits et à obtenir une issue différente. Toutefois, cela ne constitue pas un motif d’appel.

Conclusion

[37] La permission de faire appel est refusée, car l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

[38] Je remarque que la division générale a énuméré des options que la prestataire peut examiner pour répondre à ses préoccupations au sujet du trop-payé. La prestataire pourra les explorer, si ce n’est pas déjà fait.

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