Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : KL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 574

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : K. L.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (451692) datée du 27 janvier 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Linda Bell
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 1er avril 2022
Personnes présentes à l’audience : Partie appelante (prestataire)
Date de la décision : Le 6 avril 2022
Numéro de dossier : GE-22-622

Sur cette page

Décision

[1] Je rejette l’appel.

[2] La prestataire n’a pas démontré qu’elle était fondée (c’est-à-dire qu’elle avait une raison acceptable selon la loi) à quitter son emploi quand elle l’a fait. Cela signifie qu’elle est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] Le vendredi 24 septembre 2021, la prestataire est devenue malade au travail. Le 29 septembre 2021, elle a appris qu’elle a reçu un résultat positif au test de dépistage de la COVID-19.

[4] Le lendemain, le 30 septembre 2021, la prestataire s’est rendue au travail pour soumettre ses heures de travail. Peu de temps plus tard, l’employeur lui a envoyé un message texte lui disant de ne pas se présenter au travail pendant qu’elle avait la COVID-19. Dans l’échange de messages textes, la prestataire a dit à l’employeur qu’elle [traduction] « n’allait pas revenir » et qu’il devrait « se trouver quelqu’un d’autre ».

[5] La Commission a examiné les raisons pour lesquelles la prestataire a quitté son emploi. La Commission a décidé qu’elle a quitté volontairement (ou a choisi de quitter) son emploi sans justification. La Commission n’a donc pas été en mesure de verser ses prestations.

[6] La prestataire n’est pas d’accord avec la Commission. Elle fait appel auprès du Tribunal de la sécurité sociale. Elle affirme qu’elle a démissionné en raison de la COVID-19. Elle dit également qu’après avoir envoyé le message texte à l’employeur disant qu’elle ne reviendrait pas, elle lui a téléphoné pour lui dire qu’elle ne démissionnait pas.

Question que je dois examiner en premier

[7] Le Tribunal a établi que l’employeur de la prestataire pouvait être mis en cause dans l’appel. Le Tribunal a envoyé une lettre à l’employeur pour lui demander s’il souhaitait être ajouté comme partie mise en causeNote de bas de page 1. Pour être mis en cause, l’employeur doit montrer que l’appel l’intéressait directement. L’employeur n’a pas répondu à la lettre du Tribunal. Puisque rien au dossier n’indique que l’appel intéresse directement l’employeur, j’ai décidé de ne pas le mettre en cause dans le présent appel.

Question en litige

[8] La prestataire a-t-elle volontairement quitté son emploi?

[9] Dans l’affirmative, la prestataire était-elle fondée à quitter son emploi?

Analyse

Départ volontaire

[10] J’estime que la prestataire a volontairement quitté son emploi. Voici, ci-dessous, ce que j’ai examiné.

[11] La loi énonce qu’une fois que l’employeur accepte la démission de la partie prestataire, on considère qu’elle a volontairement quitté son emploi. Cela comprend les cas où les prestataires ont changé d’avis et ont voulu retirer leur démissionNote de bas de page 2.

[12] La prestataire est d’accord pour dire que, le 30 septembre 2021, elle a envoyé un message texte à N. (l’employeur) lui disant : [traduction] « Je ne reviens pas trouve quelqu’un d’autre tu es vraiment impoli ». L’employeur a répondu [traduction] : « S’il te plaît, réfléchis avant de prendre ta décision ». La prestataire a continué à envoyer des messages textes, dont un qui disait [traduction] : « quand je quitterai A. viendra avec moi ».      

[13] J’estime que l’employeur a accepté la démission de la prestataire, car il a immédiatement répondu au message texte de la prestataire en disant [traduction] : « Désolé que tu te sentes comme ça, je demanderai à S. de préparer ton dernier chèque. Je te souhaite bonne chanceNote de bas de page 3. »

[14] La prestataire affirme que plus tard cette journée-là, elle a téléphoné à l’employeur pour lui dire qu’elle ne démissionnait pas. Selon la prestataire, il a affirmé qu’il dirait à S. de ne pas émettre son relevé d’emploi. La prestataire affirme également qu’elle a envoyé un message texte à Sheila lui disant qu’elle ne démissionnait pas, mais que Sheila a dit qu’on ne voulait pas qu’elle revienne.

[15] La Commission dit que la prestataire a avoué avoir démissionné sur une impulsion. La Commission dit également que l’employeur lui a dit qu’il ne se souvenait pas que la prestataire ait demandé à ravoir son emploi. Au contraire, la prestataire avait été très claire quant à son intention de démissionnerNote de bas de page 4.

[16] Après l’examen des faits, tels qu’énoncés ci-dessus, je trouve que la prestataire a volontairement quitté son emploi. C’est elle qui a amorcé sa cessation d’emploi en envoyant le message texte disant [traduction] : « Je ne reviens pas trouve quelqu’un d’autre dis à l’employeur. » Elle avoue qu’elle a démissionné sur une impulsion. L’employeur a accepté sa décision de démissionner, car il lui a répondu qu’il ferait préparer son dernier chèque.

[17] Donc, même si elle a essayé de retirer sa démission, le fait est que l’employeur a accepté la démission de la prestataire et a procédé à l’émission de son dernier chèque. Je conclus donc qu’elle est partie volontairement.

[18] Je vais maintenant décider si la prestataire était fondée à quitter volontairement son emploi au moment où elle l’a fait.

Justification

[19] Les parties ne sont pas d’accord pour dire que la prestataire était fondée à quitter volontairement son emploi au moment où elle l’a fait.

[20] La loi précise qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 5. Avoir une bonne raison de quitter un emploi ne suffit pas à démontrer la justification.

[21] La loi explique ce que veut dire « être fondé à ». Il est dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable au moment où elle l’a fait, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 6.

[22] Il incombe à la prestataire de prouver que son départ était fondé. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnableNote de bas de page 7.

[23] Avant de décider si elle était fondée à démissionner, je dois examiner toutes les circonstances présentes au moment où la prestataire a quitté son emploiNote de bas de page 8. Ensuite, la prestataire doit démontrer qu’elle n’avait pas d’autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi au moment où elle l’a faitNote de bas de page 9.

Circonstances entourant la démission de la prestataire

[24] Dans ses documents d’appel, la prestataire dit qu’elle a démissionné parce qu’elle était malade (positive au test de dépistage de la COVID-19). Cependant, elle a aussi dit à plusieurs reprises qu’elle a démissionné sur une impulsion. Elle a expliqué en détail qu’elle trouvait que l’employeur était impoli lorsqu’il a appris qu’elle s’était rendue au travail pour soumettre ses heures de travail le 30 septembre 2022, le jour après avoir reçu un résultat positif au test de dépistage de la COVID-19.

[25] La prestataire dit qu’elle avait eu des symptômes pendant quelques jours avant de recevoir un résultat positif au test de dépistage. Elle a continué à travailler à ce moment-là parce qu’elle pensait que ses symptômes découlaient de ses autres troubles médicaux. Puis, lorsqu’elle a appris qu’elle avait la COVID-19, elle a compris que sa période d’isolement était terminée en raison de ses symptômes précédents. Elle ne pensait donc pas avoir fait quelque chose de mal lorsqu’elle est allée au travail pour soumettre ses heures. C’est pourquoi elle était contrariée lorsque l’employeur lui a envoyé un message texte pour lui dire de ne pas se rendre au travail.

[26] La prestataire a expliqué qu’elle a dit à l’employeur qu’elle démissionnait pour le faire réagir. Elle dit qu’elle pensait qu’il sympathiserait et discuterait de son retour au travail, mais cela ne s’est pas produit.

[27] La prestataire dit que l’employeur a accepté qu’elle retourne au travail. Il lui a dit qu’il demanderait à Sheila de ne pas émettre son relevé d’emploi. Elle a envoyé un message texte à S. indiquant qu’elle ne démissionnait pas, mais S. a répondu qu’on ne voulait pas qu’elle revienne. La prestataire dit qu’elle n’a pas gardé les preuves de ces appels téléphoniques ni de ces messages textes.

[28] La Commission a signalé qu’au cours de la conversation téléphonique du 26 janvier 2022 avec l’employeur, ce dernier a expliqué que la prestataire les a appelés, lui et sa femme, après avoir démissionné. Il dit que la prestataire a commencé à les injurier. Il se souvient qu’elle était en colère, qu’elle jurait et qu’elle disait qu’elle démissionnait. Il ne se souvient pas qu’elle ait demandé à revenir au travail.

[29] La prestataire dit qu’elle a l’impression que S. (l’employeur) et O. prenaient parti contre elle. Elle ne voulait pas que l’effet de son message texte soit permanent. Elle a eu un différend avec son employeur et a démissionné. Elle a soutenu que l’employeur lui a donné quelques jours pour y réfléchir et que le même jour, elle lui a téléphoné pour lui dire qu’elle voulait retourner au travail.

Autres solutions raisonnables

[30] À mon avis, les circonstances présentées par la prestataire, qu’elles soient considérées individuellement ou cumulativement, ne représentent pas une justification au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. Cela est dû au fait que des solutions raisonnables s’offraient à la prestataire au moment où elle a démissionné.

[31] J’estime que sont crédibles les déclarations répétées de la prestataire selon lesquelles elle a démissionné sur une impulsion. C’est plus probable étant donné les circonstances présentées.

[32] Je reconnais que la prestataire a fourni des déclarations contradictoires sur les raisons de son départ. Elle dit qu’elle ne voulait pas démissionner. Elle dit également qu’elle avait l’impression que l’employeur s’en prenait à elle et qu’elle a donc démissionné sur une impulsion. Elle [traduction] « voulait le faire réagir », donc elle lui a dit qu’elle ne reviendrait pas. Cependant, dans ses documents d’appel, elle dit que la raison de son départ était qu’elle était malade (COVID-19).

[33] Lors de l’audience, la prestataire a continué à se contredire. Au départ, elle a dit que lorsqu’elle s’est rendue au travail pour soumettre ses heures le 30 septembre 2020, elle n’avait aucun symptôme et que sa période d’isolement était terminée. Cependant, elle a également dit qu’elle avait démissionné le même jour parce que la COVID-19 la rendait [traduction] « vraiment malade » et parce qu’elle gérait ses troubles médicaux.

[34] Je suis d’accord avec la Commission pour dire que la prestataire avait des options raisonnables autre que celle de quitter son emploi. Elle aurait pu simplement accepter de suivre les directives de l’employeur et de ne pas retourner au travail pendant qu’elle avait la COVID-19. Si elle avait des doutes quant à sa période d’isolement, elle aurait pu en discuter avec son employeur. La prestataire aurait également pu accepter ce que l’employeur disait dans son message texte, c’est-à-dire de réfléchir un peu à sa décision de démissionner, au lieu de continuer à envoyer des messages textes antagoniques et à téléphoner à l’employeurNote de bas de page 10.

[35] Comme indiqué ci-dessus, lorsqu’un employeur accepte la démission d’une partie prestataire, on considère qu’elle a démissionné. Cela comprend les cas où la partie prestataire a changé d’avis et a voulu retirer sa démissionNote de bas de page 11. Un employeur n’est pas obligé de retirer une démission ou de réembaucher un employé une fois qu’il a accepté la démission.

[36] En examinant les circonstances entourant la démission de la prestataire, même cumulativement, je suis contrainte de conclure que des solutions raisonnables s’offraient à elle au moment où elle a démissionné. Elle aurait pu notamment accepter de réfléchir un moment au sujet de sa décision de démissionner, comme l’a suggéré l’employeur, au lieu de continuer à chercher noise. Cela signifie que la prestataire n’était pas fondée à quitter son emploi.

[37] Je suis sensible à la situation de la prestataire telle qu’elle l’a décrite lors de l’audience. Toutefois, je dois fonder ma décision sur les faits portés à ma connaissance et sur l’application de la loi. Je ne peux faire aucune exception et je n’ai aucune latitude. Je ne peux pas interpréter ou réécrire la loi d’une manière qui est contraire à son sens ordinaire, pas même pour un motif de compassionNote de bas de page 12.

Conclusion

[38] L’appel est rejeté.

[39] La prestataire a volontairement quitté son emploi sans justification. Cela signifie qu’elle est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.