Assurance-emploi (AE)

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Citation : JT c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 796

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : J. T.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (447730) datée du 5 janvier 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Charline Bourque
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 22 mars 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 23 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-471

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La prestataire n’a pas démontré qu’elle était fondée à quitter son emploi (c’est-à-dire qu’elle avait une raison acceptable selon la loi pour le faire) quand elle l’a fait. La prestataire n’était pas fondée à quitter son emploi parce que le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, la prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] La prestataire a quitté son emploi de directrice le 4 juin 2021 et a demandé des prestations d’assurance‑emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons de la prestataire pour quitter son emploi. Elle a conclu que cette dernière a quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’elle a choisi de quitter son emploi) sans justification prévue par la loi. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.

[4] Je dois décider si la prestataire a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas.

[5] La Commission affirme que la prestataire aurait pu demeurer en poste tout en recherchant un autre emploi lui convenant mieux et ne quitter que lorsqu’elle aurait l’assurance raisonnable d’un autre emploi débutant dans un avenir immédiat. La Commission affirme aussi que la prestataire a fait des déclarations contradictoires puisqu’elle avait initialement déclaré avoir quitté son emploi pour prendre sa retraite avant de mentionner qu’elle avait quitté son emploi afin de trouver un emploi à temps plein.

[6] La prestataire n’est pas d’accord et affirme qu’elle voulait cesser de travailler pour son employeur qui lui offrait un travail à temps partiel afin de pouvoir se trouver un emploi à temps plein. La prestataire ajoute que la situation chez son employeur était stressante puisque les impacts de la pandémie s’y faisaient sentir et elle ne savait pas si l’employeur pourrait demeurer ouvert. Elle avait besoin d’un revenu et souhaitait donc travailler à temps plein. Elle explique avoir fait plusieurs recherches d’emploi en ce sens, mais ne pas avoir réussi à trouver un autre emploi.  

Question en litige

[7] La prestataire est-elle exclue du bénéfice des prestations pour avoir quitté volontairement son emploi sans justification?

[8] Pour répondre à cette question, je dois d’abord aborder la question du départ volontaire de la prestataire. Je dois ensuite décider si elle était fondée à quitter son emploi.

Analyse

Les parties sont d’accord sur le fait que la prestataire a quitté volontairement son emploi

[9] J’accepte le fait que la prestataire a quitté volontairement son emploi. La prestataire reconnaît qu’elle a quitté son emploi le 4 juin 2021Note de bas page 1. La prestataire a remis une lettre de démission à son employeur le 14 mai 2021Note de bas page 2.

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que la prestataire était fondée à quitter volontairement son emploi

[10] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que la prestataire était fondée à quitter volontairement son emploi quand elle l’a fait.

[11] La loi prévoit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas page 3. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que le départ était fondé.

[12] La loi explique ce que veut dire « être fondée à ». Elle dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas page 4.

[13] La prestataire est responsable de prouver que son départ était fondéNote de bas page 5. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnable. Pour prendre une décision, je dois examiner toutes les circonstances présentes quand la prestataire a quitté son emploi.

[14] La prestataire affirme qu’elle a quitté son emploi parce qu’elle souhaitait prendre sa « retraite » de chez son employeur afin de se consacrer à la recherche d’un emploi à temps plein. Elle indique que son employeur ne lui offrait qu’un emploi à temps partiel alors qu’elle souhaitait trouver un emploi à temps plein et qu’elle ne savait pas s’il passerait au travers des impacts de la pandémie en raison même de la nature de l’entreprise. Elle indique que la situation lui créait beaucoup d’incertitude et de stress.

[15] Selon elle, son départ était la seule solution raisonnable à ce moment‑là parce qu’elle pouvait se consacrer à sa recherche d’emploi d’autant qu’elle croyait être en mesure de trouver rapidement un nouvel emploi en raison de sa vaste expérience de travail. Malheureusement, étant aux X où les emplois dépendent principalement de la pêche et du tourisme, elle n’a pas été en mesure de trouver un emploi, malgré ses nombreuses démarches.

[16] La Commission affirme que la prestataire n’était pas fondée à quitter son emploi parce son départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Elle affirme plus précisément que la prestataire aurait pu demeurer en poste tout en recherchant un autre emploi lui convenant mieux et quitter son emploi que lorsqu’elle aurait l’assurance raisonnable d’un autre emploi débutant dans un avenir immédiat. La Commission ajoute que la prestataire avait une demande active d’assurance-emploi au moment de son départ volontaire. Rien ne l’empêchait donc de demeurer à l’emploi, réclamer des prestations comme elle l’a fait pour les semaines où l’employeur ne pouvait pas lui offrir du travail et chercher un autre emploi lui convenant mieux. La prestataire a fait le choix personnel de quitter son unique employeur sans l’assurance d’un autre emploi, demandant ainsi à l’ensemble des cotisants de l’assurance-emploi de supporter le poids de sa décision.

[17] Je comprends que la prestataire a fait de nombreuses démarches afin de se trouver un nouvel emploi. Néanmoins, la question que je dois trancher demeure celle à savoir si le fait de quitter son emploi était la seule solution raisonnable.

[18] Je ne crois pas que c’était le cas. Je suis d’accord avec la Commission sur le fait que rien n’empêchait la prestataire de demeurer à l’emploi et de continuer à travailler pour son employeur tout en se cherchant un autre emploi.

[19] L’objectif de la Loi est d’indemniser des travailleurs qui se sont retrouvés involontairement sans emploiNote de bas page 6. Ainsi, pour bénéficier de prestations d’assurance-emploi un prestataire ne peut provoquer lui-même le risque de chômageNote de bas page 7. La prestataire s’est donc placée volontairement dans une situation où elle forcerait les cotisants du régime à lui payer des prestations. Cette situation va directement à l’encontre de l’objectif de la Loi.

[20] Même si je comprends la motivation de la prestataire de vouloir améliorer sa situation en trouvant un emploi à temps plein au lieu d’un emploi à temps partiel, le fait de vouloir améliorer sa situation financière constitue un motif valable, mais n’est pas une justification pour quitter son emploiNote de bas page 8.

[21] Je conclus que la prestataire n’a pas démontré que son départ volontaire constituait en la seule solution raisonnable. La prestataire aurait pu entre autres continuer d’occuper son emploi jusqu’à ce qu’elle en trouve un autre à temps plein. Par conséquent, je suis d’avis que le départ volontaire de la prestataire n’était pas justifié au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

Conclusion

[22] Je conclus que la prestataire est exclue du bénéfice des prestations.

[23] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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