Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : ZM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 616

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Prestataire : Z. M.
Commission : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (444098) datée du 11 janvier 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Audrey Mitchell
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 15 mars 2022
Personnes présentes à l’audience : Prestataire
Date de la décision : Le 21 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-483

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. 

[2] La prestataire n’a pas démontré qu’elle était fondée à prendre congé de son emploi (c’est-à-dire qu’elle n’avait pas de raison acceptable selon la loi pour le faire) quand elle l’a fait. La prestataire n’était pas fondée à prendre un congé parce que le congé n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, la prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] La prestataire a travaillé comme enseignante avant et après les heures de classe pour les enfants d’âge scolaire. Le gouvernement provincial a fermé les écoles en raison de la pandémie en avril 2021. La prestataire a demandé à son employeur s’il y avait un autre travail qu’elle pouvait faire. Elle voulait travailler dans la garderie d’urgence pour enfants d’âge scolaire. Son employeur lui a donné un travail dans une garderie avec des enfants qui ne sont pas d’âge scolaire. La prestataire dit qu’il n’y avait pas assez de travail à faire et qu’elle a donc quitté cet emploi. 

[4] L’employeur de la prestataire a émis un relevé d’emploi indiquant que la prestataire avait pris un congé. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons de la prestataire pour quitter son emploi. Elle a conclu que cette dernière a volontairement pris un congé sans justification prévue par la loi. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.

[5] Je dois décider si la prestataire a volontairement pris un congé le 28 mai 2021. Dans l’affirmative, je dois décider si elle a prouvé qu’elle n’avait pas d’autre solution raisonnable que de prendre une période de congé.

[6] La Commission affirme que la prestataire aurait pu continuer à travailler en tant qu’éducatrice de la petite enfance même si elle estimait qu’elle manquait de travail.

[7] La prestataire n’est pas d’accord et déclare qu’elle n’a pas demandé à prendre un congé. Elle dit que les autres enseignantes et enseignants qui travaillent avant et après les heures de classe ont été mis à pied, sauf elle.

Question que je dois examiner en premier

La Commission a fait une erreur administrative

[8] La Commission n’a pas envoyé à la prestataire une lettre l’informant de sa décision initiale du 8 novembre 2021. Cependant, les notes de la Commission montrent qu’elle a informé la prestataire de la décision verbalement.

[9] Une erreur qui ne cause aucun préjudice n’est pas fatale pour la décision examinée en appelNote de bas de page 1. Comme l’erreur n’a pas empêché la prestataire de demander à la Commission de réviser sa décision initiale et de faire appel de la décision de révision, j’estime que l’erreur n’a pas causé de préjudice à la prestataire.

Question en litige

[10] La prestataire est-elle exclue du bénéfice des prestations pour avoir volontairement pris un congé sans justification?

[11] Pour répondre à cette question, je dois d’abord aborder la question du congé pris volontairement par la prestataire. Je dois ensuite décider si la prestataire était fondée à prendre un congé.

[12] La Commission doit prouver que la prestataire a volontairement pris un congé. Ensuite, la prestataire doit démontrer qu’elle était fondée à prendre volontairement un congé. Elle doit démontrer qu’elle n’avait pas d’autre solution raisonnable que de prendre un congéNote de bas de page 2.

Analyse

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que la prestataire a volontairement pris un congé

[13] Pour décider si la prestataire a volontairement pris une période de congé, je dois établir si elle avait le choix de rester ou de partirNote de bas de page 3.

[14] La Commission soutient que la prestataire a pris un congé de sa propre initiative. Elle affirme que la prestataire et son employeur lui ont dit que la prestataire aurait pu continuer à travailler à la garderie pendant la période estivale.

[15] La prestataire affirme qu’elle n’a pas volontairement pris un congé. Elle dit que son employeur lui a dit qu’elle pouvait arrêter de travailler et revenir à la réouverture de l’école.

[16] La prestataire a travaillé comme enseignante avant et après les heures de classe pour les enfants d’âge scolaire. En raison de la pandémie, les écoles ont été fermées en 2020 et en 2021. La prestataire a témoigné que lorsque les écoles ont fermé en 2021, elle a demandé à son employeur si elle pouvait travailler à la garderie d’urgence pour les enfants d’âge scolaire. Elle a expliqué que ce service était destiné à la garde des enfants dont les parents devaient travailler et ne pouvaient pas rester à la maison avec leurs enfants lorsque les écoles étaient fermées. 

[17] La prestataire a témoigné que son employeur lui a dit qu’elle pouvait venir et voir ce qui se passe. Je lui ai demandé si elle savait qu’elle travaillerait à la garderie lorsqu’elle a appris qu’elle pouvait retourner au travail. Elle a répondu que oui. Cependant, elle a dit que travailler à la garderie n’était pas son poste habituel. Elle a dit qu’elle pensait y travailler pendant une semaine environ, puis que les écoles rouvriraient.

[18] La prestataire a témoigné qu’il y avait quatre ou cinq enseignantes et enseignants et sept enfants dans la garderie lorsqu’elle est retournée au travail. Elle voulait être utile à la garderie, mais elle n’avait rien à faire. Elle a déclaré que la personne qui la supervisait lui a demandé pourquoi elle était revenue travailler et lui a dit qu’elle devrait aller en arrêt de travail comme tout le monde et revenir lorsque les écoles rouvriraient.

[19] La Commission a parlé à l’employeur de la prestataire. Elle a dit que la prestataire avait demandé un congé sans en donner la raison. La Commission a dit à l’employeur ce que la prestataire avait déclaré au sujet du travail à la garderie, à savoir que la prestataire n’avait rien à faire. La Commission a déclaré que la prestataire avait communiqué avec la personne qui la supervisait pour demander à l’employeur de modifier la raison de l’émission du relevé d’emploi. L’employeur a reconfirmé que la prestataire n’a pas été mise à pied; on lui a plutôt offert un autre travail, qu’elle a refusé.

[20] La Commission a interrogé l’employeur de la prestataire au sujet d’une période de paye sur son relevé d’emploi où la prestataire n’avait aucun revenu. L’employeur de la prestataire a précisé qu’il n’avait pas officiellement mis à pied la prestataire lorsque les écoles ont été fermées le 12 avril 2021. Il a dit que c’était parce qu’il pensait que les écoles allaient rouvrir. L’employeur a déclaré que la prestataire était retournée occuper un poste différent après cette période de paye.

[21] J’accepte que la prestataire ait estimé qu’il n’y avait pas assez de travail pour elle à la garderie où elle travaillait. Cependant, j’estime que son employeur ne l’a pas mise à pied. Son employeur a déclaré à la Commission qu’il disposait de fonds pour le personnel de la garderie. Il a dit qu’il avait du travail pour la prestataire même s’il semblait y avoir peu de travail. L’employeur a dit qu’il était prêt à employer la prestataire pour toute la période estivale.

[22] J’ai interrogé la prestataire sur les déclarations que son employeur a faites à la Commission. Elle a affirmé que la personne qui la supervisait lui avait dit qu’elle pouvait s’en aller jusqu’à la réouverture de l’école. Elle a dit que cela lui semblait correct et que les choses allaient se dérouler comme lors des années précédentes, lorsqu’elle avait été mise à pied pendant l’été. La prestataire a soutenu que son employeur ne lui avait pas dit que si elle quittait son emploi, elle ne recevrait pas de prestations d’assurance-emploi.

[23] J’estime que la prestataire a peut-être mal compris que son employeur la mettait à pied. Je trouve que sa déclaration dans son avis d’appel, selon laquelle elle a supposé qu’elle était mise à pied, soutient cela. Pour cette raison, j’accorde plus de poids à la preuve de la Commission provenant de l’employeur, selon laquelle il y avait du travail à faire pour la prestataire et qu’elle aurait pu continuer à travailler à la garderie pendant l’été. 

[24] Les notes de la Commission révèlent que la prestataire a dit qu’elle avait demandé un congé parce que son employeur n’avait pas de place pour elle. La prestataire a dit plus tard à la Commission qu’elle aurait pu rester à la garderie, mais qu’elle ne voulait pas être assise et discuter toute la journée. Même si la prestataire a dit qu’elle n’avait pas demandé de congé, j’estime qu’elle a décidé de ne pas continuer à travailler.

[25] J’estime qu’en décidant de ne pas continuer à travailler parce qu’elle trouvait qu’il n’y avait pas assez de travail pour elle à la garderie, la prestataire a déclenché une période de congé. Compte tenu de la preuve fournie par l’employeur à la Commission, j’estime que la prestataire avait le choix de conserver son emploi.

[26] Je conclus que la prestataire a volontairement pris une période de congé à compter du 28 mai 2021.

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que la prestataire était fondée à quitter volontairement son emploi

[27] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que la prestataire était fondée à quitter volontairement son emploi quand elle l’a fait.

[28] La loi prévoit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si elle prend volontairement une période de congé sans justificationNote de bas de page 4. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de prendre un congé pour prouver que le congé était fondé.

[29] La loi explique ce que veut dire « être fondée à ». Elle dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 5.

[30] La prestataire est responsable de prouver que son départ était fondéNote de bas de page 6. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que prendre un congé était la seule solution raisonnable. Pour rendre une décision, je dois examiner toutes les circonstances présentes quand la prestataire a pris congé.

[31] La prestataire dit qu’elle a quitté son emploi à la garderie parce qu’il n’y avait pas assez de travail.

[32] La Commission affirme que la prestataire n’était pas fondée à prendre une période de congé parce que le congé n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Plus précisément, elle dit que la prestataire aurait pu continuer à travailler à la garderie, même si elle estimait qu’elle n’avait pas assez de travail.

[33] J’estime que la prestataire n’a pas démontré qu’elle n’avait pas d’autres solutions raisonnables que de prendre le congé pour les raisons qui suivent. Le premier argument de la prestataire est qu’elle n’a pas demandé de congé. Cependant, j’ai déjà établi qu’elle avait déclenché la période de congé.

[34] La prestataire a déclaré qu’elle avait demandé à travailler à la garderie d’urgence pour enfants d’âge scolaire. Elle a affirmé qu’elle l’avait demandé, mais que son employeur lui avait répondu qu’il n’y avait pas de place pour elle. Je ne doute pas de cela. Cependant, encore une fois, la prestataire a accepté de travailler à la garderie principale et aurait pu continuer à y travailler pendant l’été.

[35] Finalement, la prestataire a déclaré que toutes les enseignantes et tous les enseignants pour enfants d’âge scolaire de son école ont été mis à pied, sauf elle. Toutefois, la prestataire a déclaré qu’elle voulait continuer à travailler et avait donc communiqué avec son employeur. Elle a dit qu’elle est retournée au travail en espérant qu’on lui donne une chance de travailler à la garderie d’urgence pour enfants d’âge scolaire, mais qu’on ne l’a pas fait. Comme je l’ai déjà établi, la preuve dans le cas de la prestataire est qu’elle avait un emploi à la garderie qu’elle aurait pu conserver pendant l’été.

[36] J’ai interrogé la prestataire à propos de la suggestion de la Commission selon laquelle elle aurait pu chercher un autre emploi avant de prendre un congé. Elle a dit qu’elle avait cherché des emplois sur l’application de son employeur. C’est ce qui l’a poussée à appeler la personne qui la supervise. Cependant, la prestataire n’a pas conservé l’emploi qui lui a été offert.

[37] Je suis d’accord avec l’argument de la Commission selon lequel la prestataire aurait pu conserver son emploi à la garderie pour enfants d’âge non scolaire. Je conclus qu’il s’agissait d’une solution raisonnable pour éviter de prendre une période de congé au moment où elle l’a fait.

Alors, la prestataire était-elle fondée à prendre volontairement un congé?

[38] Compte tenu de mes conclusions, j’estime que la prestataire n’a pas démontré qu’elle n’avait pas d’autre choix raisonnable que de prendre un congé au moment où elle l’a fait. Par conséquent, elle n’était pas fondée à prendre un congé.

[39] Je compatis avec la prestataire, compte tenu du trop-payé de prestations. Cependant, l’objectif de la loi est d’indemniser les parties prestataires qui ont perdu leur emploi de manière involontaireNote de bas de page 7. Je compatis à la situation de la prestataire, mais je ne peux pas changer la loiNote de bas de page 8.

Conclusion

[40] L’appel est rejeté.

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