Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 590

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : S. S.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (452776) datée du 27 janvier 2022 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Leanne Bourassa
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 9 mars 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 24 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-409

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec la prestataire, S. S.

[2] La prestataire n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler pendant ses études. Par conséquent, elle ne peut pas recevoir de prestations d’assurance‑emploi.

Aperçu

[3] Pour recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi, les prestataires doivent être disponibles pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie que les prestataires doivent être à la recherche d’une emploi.

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que la prestataire était inadmissible aux prestations régulières d’assurance-emploi en date du 14 décembre 2020 parce qu’elle suivait un programme de formation de sa propre initiative et qu’elle n’avait pas prouvé sa disponibilité pour travailler.

[5] Je dois décider si la prestataire a prouvé qu’elle était disponible pour travailler. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle était disponible pour travailler.

[6] La Commission affirme que la prestataire n’était pas disponible pour travailler parce qu’elle étudiait à temps plein. Elle avait également signalé à la Commission qu’elle essayait seulement de trouver un emploi qu’elle pouvait concilier avec son horaire de cours.

[7] La prestataire affirme qu’elle a travaillé dans le passé pendant qu’elle étudiait et qu’elle était prête à travailler en dehors de ses heures de cours, qui étaient principalement en ligne. Elle n’est pas d’accord avec la décision rendue rétroactivement et soutient qu’elle n’a pas été avisée de son inadmissibilité.

Question en litige

[8] La prestataire était-elle disponible pour travailler pendant ses études?

Analyse

[9] Il y a deux articles de loi qui exigent que les prestataires démontrent leur disponibilité pour travailler. La Commission a fait référence à ces deux articlesNote de bas de page 1.

[10] La Cour d’appel fédérale a également déclaré que les personnes aux études à temps plein sont présumées ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas de page 2. C’est ce qu’on appelle la « présomption de non-disponibilité ».

[11] La Commission affirme aussi que les nouvelles dispositions adoptées pendant la pandémie de COVID-19 lui permettent de vérifier qu’une personne qui reçoit des prestations alors qu’elle suit un cours pour lequel elle n’a pas été dirigée a droit à ces prestations. Ces dispositions lui permettent aussi d’exiger la preuve que cette personne était capable de travailler et disponible à cette fin pour tout jour ouvrable de sa période de prestationsNote de bas de page 3.

[12] D’après mon interprétation de ces dispositions, la présomption de non‑disponibilité a été écartée. On ne présume plus que les personnes aux études à temps plein ne sont pas disponibles pour travaller. À présent, ces personnes doivent démontrer leur disponibilité comme les autres prestataires.

[13] Donc, d’après mon interprétation de la loi, je conclus que les personnes qui suivent un cours à temps plein pour lequel elles n’ont pas été dirigées ne peuvent recevoir des prestations que pour les jour ouvrables de leur période de prestations pour lesquels elle ont prouvé qu’elles étaient capable de travailler et disponible à cette finNote de bas de page 4. La Commission peut, à tout moment après le versement de prestations à ces personnes, exiger la preuve qu’elles étaient capables de travailler et disponibles à cette finNote de bas de page 5. Selon la Loi sur l’assurance-emploi, si ces personnes sont incapable de fournir cette preuve, elles ne sont pas admissibles aux prestations.

[14] Je tiens à mentionner que la prestataire n’a pas a réfuter la présomption de non‑disponibilité puisqu’elle ne s’applique pas à elle. Elle n’a donc pas besoin de démontrer qu’elle a déjà travaillé pendant qu’elle étudiait à temps plein. Elle doit seulement prouver qu’elle était disponible pendant la période en questionNote de bas de page 6.

La prestataire n’a pas été déclarée inadmissible aux prestations au titre de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi

[15] La Commission a fait valoir que la prestataire a été déclarée admissible aux prestations au titre de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi.

[16] Cet article dit que les prestataires doivent prouver qu’ils font « des démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 7. Le Règlement sur l’assurance-emploi prévoit des critères qui aident à expliquer ce qui constitue des « démarches habituelles et raisonnablesNote de bas de page 8 ».

[17] Rien dans la preuve n’indique que la Commission ait demandé à la prestataire de prouver qu’elle avait fait des démarches habituelles et raisonnables, ni qu’elle ait affirmé que si la prestataire l’avait fait, sa preuve était insuffisante. La prestataire a dit qu’on ne lui avait jamais demandé de fournir une preuve de ses démarches de recherche d’emploi.

[18] J’estime aussi que la Commission n’a pas présenté d’observations détaillées expliquant pourquoi elle jugeait que la prestataire n’avait pas prouvé qu’elle faisait des démarches habituelles et raisonnables. La Commission n’a fait que résumer ce que la l’article de loi pertinentNote de bas de page 9 dit au sujet des démarches habituelles et raisonnables.

[19] Comme aucun élément de preuve n’indique que la Commission a demandé à la prestataire de prouver qu’elle a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable conformément à l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance‑emploi, la Commission n’a pas déclaré la prestataire inadmissible aux prestations au titre de cet article. Par conséquent, je n’ai pas besoin d’examiner cette question.

La prestataire a été déclarée inadmissible aux prestations au titre de l’article 18(1)(a)

[20] La Loi sur l’assurance-emploi prévoit que les prestataires doivent prouver qu’ils sont « capables de travailler et disponibles à cette fin », mais incapables d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 10.

[21] La Commission affirme qu’elle a agi en vertu de l’article 153.161(2) de la Loi lorsqu’elle a vérifié la disponibilité pour travailler de la prestataire. Cet article porte sur l’application de l’article 18(1)(a) de la Loi, qui exige que les prestataires prouvent qu’ils sont capables de travailler et disponibles pour travailler, mais incapables d’obtenir un emploi convenable.

[22] Je conclus que la Commission a déclaré la prestataire inadmissible aux prestations au titre de l’article 18(1)(a) de la Loi, car elle déterminait si elle était disponible pour travailler.

[23] Selon la jurisprudence, il y a trois éléments que les prestataires doivent prouver pour démontrer qu’ils sont « disponibles » en ce sensNote de bas de page 11. Je vais examiner ces éléments ci-dessous.

Capable de travailler et disponible à cette fin

[24] Pour démontrer qu’elle est capable de travailler et disponible à cette fin, la prestataire doit prouver les trois choses suivantesNote de bas de page 12 :

  1. a) qu’elle voulait retourner travailler dès qu’un emploi convenable serait offert;
  2. b) qu’elle a fait des efforts pour trouver un emploi convenable;
  3. c) qu’elle n’a pas établi de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment (c’est-à-dire trop) ses chances de retourner au travail.

[25] Lorsque j’examine chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite de la prestataireNote de bas de page 13.

Désir de retourner au travail

[26] La prestataire a démontré qu’elle voulait retourner au travail aussitôt qu’un emploi convenable serait offert.

[27] La prestataire travaillait pour l’entreprise de peinture de son père pendant qu’elle étudiait. Malheureusement, l’entreprise a fermée ses portes en raison de la pandémie lorsque les mesures de confinement provinciales ont été mises en place. Si cela ne s’était pas produit, la prestataire aurait continué de travailler.

[28] La prestataire a également cherché un emploi pendant ses études. Elle a expliqué qu’elle devait payer des factures et qu’elle avait toujours travaillé pendant qu’elle étudiait. Ses réponses dans ses questionnaires de formation vont dans ce sens. J’estime qu’elle voulait retourner au travail.

Efforts pour trouver un emploi convenable

[29] Il n’est pas suffisant pour les prestataires de dire qu’ils veulent retourner au travail pour répondre à ce deuxième élément. Les prestataires doivent manifester ce désir par des efforts pour trouver un emploi convenable.

[30] J’estime que la prestataire a fait des efforts pour trouver un emploi convenable.

[31] Les efforts de la prestataire pour trouver un nouvel emploi consistaient notamment à se rendre dans les entreprises qui étaient toujours ouvertes malgré les mesures de confinement provinciales et à distribuer des curriculum vitæ. Elle a postulé en personne dans des restaurants à service rapide et d’autres entreprises essentielles parce qu’elle estimait qu’elle avait plus de chance d’obtenir un emploi lorsqu’elle était face à face avec un employeur potentiel. Elle a également distribué des curriculum vitae en passant à la commande à l’auto de restaurants à service rapide. De plus, elle était inscrite au site Web Guichet-emplois et à d’autres ressources en ligne et recevait des avis d’offres d’emploi.

[32] La prestataire a expliqué qu’elle a constaté qu’il n’y avait que des emplois disponibles que pour le printemps et l’été. Elle a quand même présenté des demandes d’emploi. Même si les déplacements étaient limités dans sa région, elle a aussi essayé de postuler à des emplois en dehors de sa région. Elle a postulé pour des emplois à temps plein et à temps partiel. Elle pensait s’arranger avec son employeur si elle devait suivre des cours en ligne. Elle attendait également que les restrictions soient levées pour pouvoir retourner travailler dans l’entreprise de son père.

[33] Les efforts que la prestataire a faits sont suffisants pour répondre aux exigences de ce deuxième élément parce qu’elle était active dans sa recherche d’emploi. Elle a persisté malgré les restrictions gouvernementales et a cherché à savoir quelles entreprises embauchaient malgré le confinement.

Limitation indue des chances de retourner au travail

[34] Malgré ses efforts pour trouver un emploi, la prestataire a établi des conditions personnelles qui ont pu limiter indûment ses chances de retourner au travail.

[35] La prestataire affirme qu’elle n’a pas fait cela parce qu’elle pouvait travailler en dehors de ses heures de cours et que la plupart des limitations étaient dues aux restrictions gouvernementales.

[36] La Commission soutient que la prestataire a limité sa disponibilité pour travailler seulement en dehors de ses heures de cours.

[37] J’estime que la prestataire a établi des conditions personnelles qui ont pu limiter ses chances de retourner au travail.

[38] J’admets qu’elle était quelque peu limitée par les restrictions gouvernementales sur les déplacements à l’extérieur de sa région. Je ne considère cependant pas qu’il s’agisait d’une condition personnelle qu’elle a établi et qui aurait limité ses chances de trouver un emploi.

[39] La prestataire a déclaré qu’elle postulait pour toutes sortes d’emplois et que si elle avait eu une offre, elle aurait trouvé une solution avec son employeur pour pouvoir assister aux cours en ligne qu’elle devait suivre. Elle pouvait suivre ses autres cours qui étaient enregistrés ou asynchrones lorsqu’elle ne devait pas travailler.

[40] Malheureusement, j’estime que ce témoignage, ainsi que les déclarations de la prestataire sur les questionnaires de formation qu’elle a remplis au moment où elle recevait des prestations, montrent qu’elle accordait la priorité à ses études plutôt qu’à un travail à temps plein. Cela signifie qu’elle a établi une condition personnelle qui restreignait ses possibilités d’emploi.

[41] Dans son questionnaire de formation daté 22 janvier 2021, la prestataire a dit qu’elle était obligée d’assister aux cours prévus à l’horaire et que certains de ces cours avaient lieu pendant les heures normales de travail. Elle a aussi clairement indiqué qu’elle n’était disponible que pour travailler à temps partiel en raison de sa lourde charge de cours. Enfin, elle a ajouté qu’elle n’accepterait un emploi que si elle pouvait retarder sa date de début d’emploi pour pouvoir terminer son programme de formation. Elle a répété cela lorsqu’elle s’est adressée à la Commission en décembre 2021.

[42] La prestataire a également déclaré dans son avis d’appel qu’elle était prête à travailler entre ses cours. En raison de la cohérence de ces déclarations, je dois conclure qu’elle ne cherchait qu’un emploi qu’elle pouvait concilier avec son horaire de cours.

[43] Je comprends que la prestataire croyait qu’elle pouvait trouver un emploi à temps partiel et s’entendre ensuite avec son employeur pour modifier son horaire afin de pouvoir de travailler tout en suivant ses cours à temps plein. Cependant, en se consacrant d’abord à ses cours et en ne cherchant qu’un emploi qui lui permettait de terminer ses études, la prestataire a établi une condition personnelle qui limitait les emplois qui lui étaient offerts.

La prestataire était-elle donc capable de travailler et disponible à cette fin?

[44] À la lumière de mes conclusions sur les trois éléments, je conclus que la prestataire n’a pas démontré qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable.

Questions supplémentaires

[45] La prestataire a dit au Tribunal qu’elle avait été franche au sujet de ses études de sorte que la Commission n’aurait pas dû lui verser des prestations si elle n’y avait pas droit. Le fait que le gouvernement approuvait automatiquement les prestations était une erreur qui ne concernait pas les prestataires. La prestataire affirme que si on lui avait dit qu’elle aurait peut-être dû tout rembourser, elle n’aurait jamais accepté les prestations.

[46] Je comprends la frustration de la prestataire. Malheureusement, la loi exige expressément que toute personne qui reçoit des prestations régulières d’assurance‑emploi, quelles qu’elles soient, soit disponible pour travailler. De plus, la loi permet à la Commission d’examiner la disponibilité pour travailler des personnes aux études. La Commission peut le faire même si des prestations d’assurance-emploi ont déjà été verséesNote de bas de page 14. Je ne peux pas changer cela.

[47] La prestataire a attiré mon attention sur des décisions du tribunal précédent. Elle explique que ces décisions établissent que les prestataires ont le droit d’être avisés de leur inadmissibilité et d’avoir une chance de se conformer aux exigences de la CommissionNote de bas de page 15.

[48] Les décisions invoquées par la prestataire diffèrent beaucoup de la présente affaire. Dans ces affaires, les prestataires avaient initialement droit à des prestations, mais leur situation a changé pendant leur période de prestations, ce qui a affecté leur admissibilitéNote de bas de page 16. Les juges-arbitres ont conclu que les prestataires devaient être avisés si leur admissibilité aux prestations devait changer.

[49] Dans le cas de la prestataire, son admissibilité aux prestations n’a pas changé parce que sa situation a évolué pendant sa période de prestations. On a plutôt jugé qu’elle n’était pas admissible aux prestations prestations en premier lieu. Pour cette raison, je ne trouve pas que ces décisions sont utiles pour orienter ma décision.

Conclusion

[50] La prestataire n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler au sens de la loi. Je conclus donc qu’elle ne peut pas recevoir de prestations d’assurance‑emploi.

[51] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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