Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : TA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 629

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : T. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (458780) datée du 7 mars 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Catherine Shaw
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 10 mai 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 13 mai 2022
Numéro de dossier : GE-22-872

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que le prestataire a été suspendu en raison d’une inconduite (c’est-à-dire parce qu’il a fait quelque chose qui a entraîné sa suspension). Par conséquent, le prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] Le prestataire a été suspendu de son emploi parce qu’il ne s’était pas fait vacciner contre la COVID-19. L’employeur a mis en œuvre une politique qui exigeait que les employés se fassent vacciner. Le prestataire a demandé une exemption à la politique, mais l’employeur a refusé. Le prestataire ne s’est pas fait vacciner contre la COVID-19 dans les délais; l’employeur l’a donc suspendu.

[4] La Commission a conclu que le prestataire a été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite. Elle a donc décidé que le prestataire est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[5] Le prestataire affirme qu’il est injuste qu’il ait été suspendu de son emploi. On ne devrait pas le forcer à se faire vacciner. De plus, cette exigence ne faisait pas partie de ses conditions d’emploi lorsqu’il a été embauché.

Question que je dois examiner en premier

L’employeur n’est pas mis en cause dans le présent appel

[6] Le Tribunal a déterminé que l’ancien employeur du prestataire était une partie potentielle à l’appel. Le Tribunal a envoyé une lettre à l’employeur, lui demandant s’il avait un intérêt direct dans l’appel et s’il voulait y être ajouté en tant que partie. L’employeur n’a pas répondu en date de la présente décision. Comme rien au dossier n’indique que l’employeur a un intérêt direct dans l’appel, j’ai décidé de ne pas l’ajouter en tant que partie.

Question en litige

[7] Le prestataire a-t-il été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[8] La loi prévoit que les parties prestataires qui perdent leur emploi en raison d’une inconduite sont exclues du bénéfice des prestationsNote de bas de page 2.

[9] La loi prévoit également que la partie prestataire suspendue de son emploi en raison de son inconduite n’est pas admissible aux prestations jusqu’à ce que l’une des conditions suivantes soit remplie :

  • la fin de la période de suspension;
  • la perte de son emploi ou son départ volontaire;
  • le cumul chez un autre employeur, depuis le début de cette période, d’un nombre suffisant d’heures d’emploi assurableNote de bas de page 3.

[10] Pour décider si le prestataire a été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison le prestataire a été suspendu. Ensuite, je dois décider si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi le prestataire a-t-il été suspendu?

[11] Les deux parties s’entendent pour dire que l’on a suspendu le prestataire parce qu’il a choisi de ne pas se conformer à la politique de l’employeur qui l’obligeait à se faire vacciner contre la COVID-19. Je ne vois rien qui prouve le contraire; j’admets donc ce fait.

La raison de la suspension du prestataire est-elle une inconduite selon la loi?

[12] Selon la loi, la raison de la suspension du prestataire est une inconduite.

[13] Pour être considérée comme une inconduite selon la loi, la façon d’agir doit être délibérée. Cela signifie qu’elle était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 4. Une inconduite comprend aussi une conduite qui est tellement insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 5. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que le prestataire ait eu une intention coupableNote de bas de page 6 (c’est-à-dire qu’il ait voulu faire quelque chose de mal).

[14] Il y a inconduite si le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’il soit congédié pour cette raisonNote de bas de page 7.

[15] La Commission doit prouver que le prestataire a été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite, selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire a été suspendu en raison de son inconduiteNote de bas de page 8.

[16] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que le prestataire savait qu’il devait se conformer à la politique de l’employeur pour continuer d’occuper son emploi. Le prestataire a décidé de ne pas se faire vacciner. Ce faisant, il a délibérément choisi de ne pas se conformer à la politique de l’employeur.

[17] Le prestataire affirme qu’il n’y a pas eu inconduite parce que la politique ne faisait pas partie de ses conditions d’emploi lorsqu’il a été embauché. Il estimait que le vaccin n’était pas sécuritaire et qu’il ne devrait pas être forcé à l’accepter.

[18] Le prestataire travaillait dans un hôpital. L’employeur a avisé le prestataire de sa politique de vaccination contre la COVID-19 en octobre 2021. La politique exigeait que les employés se fassent vacciner contre la COVID-19 au plus tard le 17 décembre 2021. Le prestataire a déclaré qu’il comprenait que les employés qui n’avaient pas reçu le vaccin seraient mis à pied.

[19] Le prestataire a discuté avec sa gestionnaire après l’annonce de la politique. Il lui a parlé de ses préoccupations concernant la politique de vaccination obligatoire. Elle lui a dit qu’elle comprenait ce qu’il ressentait. Elle a ajouté que s’il ne voulait pas du vaccin, il n’avait pas à le recevoir, mais qu’ils le mettraient à pied.

[20] Le prestataire a demandé une exemption de nature religieuse à l’employeur. Il a remis la demande écrite d’exemption à sa gestionnaire. Il a de nouveau parlé à la gestionnaire avant le 17 décembre 2021, et elle lui a dit que l’employeur allait lui refuser l’exemption.

[21] Le prestataire devait faire des quarts de travail après le 17 décembre 2021, soit la date limite de vaccination obligatoire selon la politique de son employeur. Mais le 17 décembre 2021, une représentante ou un représentant du personnel de l’employeur l’a appelé et lui a dit que ses quarts étaient annulés en raison de la politique de vaccination. Le prestataire a déclaré qu’il s’attendait à ce que cela arrive.

[22] J’estime que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite.

[23] Le prestataire a délibérément et sciemment choisi de ne pas se conformer à la politique de l’employeur. Les éléments de preuve indiquent qu’il savait que les conséquences de la non-conformité se traduiraient par la perte de son emploi.

[24] Le prestataire a été avisé de la politique de l’employeur en octobre 2021. Il a décidé de ne pas se faire vacciner contre la COVID-19 comme l’exigeait la politique. Il savait que la non-conformité à la politique pouvait entraîner sa suspension de son travailNote de bas de page 9.

[25] Je comprends que le prestataire a fait des démarches pour obtenir une exemption de la politique. Mais l’employeur a rejeté sa demande d’exemption. Le prestataire était conscient qu’il n’était pas exempté de la politique de l’employeur en fonction de ses préoccupations en matière de santé ou de ses croyances religieuses. Pourtant, il a quand même décidé de ne pas s’y conformer. S’il avait eu l’intention de le faire, le prestataire aurait pu communiquer cela à son employeur et demander une prolongation de délai.

[26] Le prestataire a soutenu que l’exigence de se faire vacciner contre la COVID-19 ne faisait pas partie de ses conditions d’emploi lorsqu’il a été embauché.

[27] L’employeur a le droit de gérer ses activités quotidiennes, ce qui comprend le droit d’élaborer et d’imposer des politiques en milieu de travail. Lorsque l’employeur a implanté cette politique comme étant une exigence pour l’ensemble de son personnel, cette politique est devenue une condition d’emploi pour le prestataire. 

[28] Je comprends les préoccupations du prestataire, selon lesquelles la politique de l’employeur n’était pas juste et lui donnait uniquement l’option de se faire vacciner. Je reconnais qu’il n’est pas d’accord avec la politique de l’employeur et que, selon lui, la perte de son emploi était injustifiée. Je n’ai cependant pas le pouvoir de décider si l’employeur du prestataire a porté atteinte à ses droits fondamentaux en le suspendant de son emploi.

[29] La Cour d’appel fédérale a déclaré que le Tribunal n’a pas à décider si la politique d’un employeur était raisonnable ou si le congédiement d’une partie prestataire était justifié. Le Tribunal doit décider si la conduite du prestataire constituait une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 10.

[30] Le prestataire peut avoir recours aux tribunaux judiciaires pour faire valoir ses revendications selon lesquelles l’employeur a porté atteinte à ses droits fondamentaux en implantant sa politique et l’a suspendu injustement. Cependant, ces questions doivent être traitées par le bon type de tribunal.

Somme toute, le prestataire a-t-il été suspendu en raison d’une inconduite?

[31] Selon mes conclusions précédentes, je suis d’avis que le prestataire a été suspendu en raison d’une inconduite.

Conclusion

[32] La Commission a prouvé que le prestataire a été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi il n’est pas admissible aux prestations d’assurance-emploi.

[33] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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