Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : AA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 643

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (443529) rendue le 5 janvier 2022 par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : John Noonan
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 15 mars 2022
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 23 mars 2022
Numéro de dossier : GE-22-417

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] A. A., l’appelante, a été avisée qu’à la suite d’une révision de son dossier, la Commission ne pouvait pas lui verser des prestations d’assurance-emploi du 27 septembre 2020 au 30 avril 2021 parce que l’appelante suivait un cours de formation de sa propre initiative et qu’elle n’avait pas prouvé sa disponibilité pour le travail. L’appelante fait valoir que, lorsqu’on lui a demandé si elle suivait un cours ou un programme de formation, elle ne pensait pas que la question faisait référence au programme universitaire qu’elle suivait, car il n’avait rien à voir avec la pratique d’un métier (pages GD3‑49 et GD3‑50 du dossier d’appel). Le Tribunal doit décider si l’appelante a prouvé sa disponibilité aux termes des articles 18 et 50 de la Loi sur l’assurance-emploi et des articles 9.001 et 9.002 du Règlement sur l’assurance-emploi.

Questions en litige

[3] Question no 1 : L’appelante avait-elle le désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable serait offert?

Question no 2 : Faisait-elle des démarches habituelles et raisonnables pour trouver du travail?

Question no 3 : A‑t‑elle établi des conditions personnelles pouvant limiter à tort ses chances de retourner sur le marché du travail?

Analyse

[4] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites dans le document GD4.

[5] On présume qu’une personne inscrite à une formation à temps plein n’est pas disponible pour travailler. Cette présomption de fait peut être réfutée (contredite) si l’on prouve l’existence de circonstances exceptionnelles (voir la décision Cyrenne, 2010 CAF 349).

[6] La présomption s’applique à une personne qui n’est pas disponible pour travailler quand elle suit un cours à temps plein de sa propre initiative. Pour réfuter la présomption, l’appelante doit démontrer que son intention est surtout d’accepter sur-le-champ un emploi convenable comme en témoignent ses démarches de recherche d’emploi, qu’elle est prête à faire tous les arrangements nécessaires ou qu’elle est disposée à abandonner son cours. Elle doit démontrer par ses actes que le cours passe en deuxième et ne fait pas obstacle à la recherche et à l’acceptation d’un emploi convenable.

[7] La personne qui suit un cours à temps plein sans qu’une autorité désignée par la Commission l’ait orientée vers ce cours doit démontrer qu’elle est capable de travailler et disponible pour travailler, mais incapable d’obtenir un emploi convenable. Elle doit aussi répondre aux exigences de disponibilité au même titre que toutes les personnes qui demandent des prestations régulières d’assurance-emploi. Elle doit continuer à chercher un emploi et elle doit démontrer que les exigences du cours n’ont pas restreint sa disponibilité de façon à réduire de beaucoup ses chances de trouver un emploi.

[8] Les éléments suivants peuvent être pertinents lorsqu’on détermine la disponibilité pour le travail :

  1. a) les exigences relatives à la présence en classe;
  2. b) la volonté des prestataires à abandonner leurs études pour accepter un emploi;
  3. c) la question de savoir si les prestataires ont déjà travaillé selon un horaire irrégulier;
  4. d) l’existence de « circonstances exceptionnelles » qui permettraient aux prestataires de travailler pendant leurs études;
  5. e) le coût financier de suivre le cours.

[9] Pour qu’on les déclare disponibles pour le travail, les prestataires doivent : 1) avoir le désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable est offert, 2) exprimer ce désir par des efforts pour trouver un emploi convenable, 3) ne pas établir de conditions personnelles pouvant limiter indûment leurs chances de retourner sur le marché du travail. Il faut considérer les trois éléments pour prendre une décision (voir la décision Faucher, A-56-96 et A-57-96).

Question en litige no 1 : L’appelante avait-elle le désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable serait offert?

[10] Non.

[11] Dans la présente affaire, d’après les déclarations et les observations de l’appelante, elle suivait un programme d’études à temps plein qui l’occupait pendant plus de 25 heures par semaine.

[12] Elle n’a pas reçu l’approbation d’une autorité désignée pour participer à ce programme.

[13] L’appelante a déclaré et confirmé à l’audience qu’elle avait commencé la formation à temps plein le 27 septembre 2020.

[14] Pendant la période en question, du 27 septembre 2020 au 30 avril 2021, elle n’a pas eu l’impression qu’elle devait respecter les mêmes exigences en matière de déclaration que les personnes qui suivent une formation pour un métier. Il n’y a donc aucune preuve que l’appelante cherchait un emploi de façon exhaustive.

[15] Je juge que les actions de l’appelante, ou l’absence d’action de la part de l’appelante, ne montrent pas, pendant toute la période en question, un désir sincère de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable serait offert.

Question en litige no 2 : Faisait-elle des démarches habituelles et raisonnables pour trouver du travail?

[16] Non.

[17] Encore une fois, rien ne démontre que l’appelante faisait une recherche d’emploi exhaustive.

[18] Même si elle maintient qu’elle était disponible, pour avoir droit au bénéfice des prestations, l’appelante doit quand même effectuer une recherche d’emploi raisonnable.

[19] En conséquence, elle a limité sa recherche d’emploi.

[20] Les activités de recherche d’emploi que l’appelante effectue depuis le 27 septembre 2020 ne peuvent pas être considérées comme une recherche d’emploi habituelle et raisonnable conformément à l’article 9.001 du Règlement.

[21] Je juge que l’appelante n’a pas démontré, pendant toute la durée de la présente procédure, qu’elle faisait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable.

Question en litige no 3 : A‑t‑elle établi des conditions personnelles pouvant limiter à tort ses chances de retourner sur le marché du travail?

[22] Oui.

[23] L’appelante a déclaré qu’elle avait l’intention de terminer son cours et non de retourner sur le marché du travail le plus tôt possible. Comme elle n’a pas fait une recherche d’emploi raisonnable et qu’elle a investi 5 000 $ dans son programme d’études, je juge que cela concorde avec les faits portés à ma connaissance.

[24] L’appelante n’a pas réfuté la présomption de non-disponibilité pendant son programme universitaire, car elle a déclaré qu’elle se concentrait sur ses études au lieu d’être disponible pour le travail. Elle a affirmé qu’elle n’était pas disponible pour travailler à temps plein, seulement à temps partiel les fins de semaine et une journée pendant la semaine. Elle a ajouté qu’elle était ouverte au travail à distance. On lui a demandé de fournir une liste montrant sa recherche d’emploi, ce qu’elle a accepté de faire, mais la Commission ne l’a pas encore reçue et ne pourrait maintenant plus la vérifier si jamais elle en recevait une.

[25] Comme l’appelante dans la présente affaire n’a pas suivi un cours d’instruction approuvé par une autorité désignée par la Commission, qu’elle a consacré plus de 25 heures par semaine à ses études et qu’elle a choisi de ne pas effectuer une recherche d’emploi raisonnable, je conclus qu’elle a établi des conditions personnelles pouvant limiter à tort ses chances de retourner sur le marché du travail.

[26] De plus, la Cour d’appel fédérale a confirmé qu’une prestataire qui limite sa disponibilité et qui est disponible pour travailler seulement en dehors de son horaire de cours n’a pas prouvé sa disponibilité pour le travail au sens de la Loi (voir la décision Duquet c Canada (Procureur général), 2008 CAF 313 et la décision Canada (Procureur général) c Gauthier, 2006 CAF 40).

[27] Une simple déclaration de disponibilité de la part des prestataires ne suffit pas à elle seule pour s’acquitter du fardeau de la preuve (voir les décisions du juge-arbitre du Canada sur les prestations CUB 18828 et CUB 33717).

[28] Même si j’appuie les efforts de l’appelante pour terminer ses études et ainsi trouver un emploi convenable, je juge qu’elle n’a pas démontré l’existence de « circonstances exceptionnelles » qui viendraient réfuter la présomption de non-disponibilité pendant ses études à temps plein. Elle n’a donc pas droit au bénéfice des prestations du 27 septembre 2020 au 1er mai 2021.

[29] Il me semble peu probable qu’une étudiante universitaire sur le point d’obtenir son diplôme puisse mal interpréter la question sur la formation dans les déclarations qu’il faut remplir toutes les deux semaines. La question « Étiez-vous aux études ou suiviez-vous un cours de formation pendant la période visée par cette déclaration? » est claire. Il n’y a aucune référence aux corps de métier. La plupart des gens savent que les études universitaires sont considérées comme des études postsecondaires.

[30] En ce qui concerne l’annulation du trop-payé (prestations versées en trop) que demande l’appelante, il s’agit d’une décision que seule la Commission peut prendre. Le Tribunal n’a pas le pouvoir de faire une telle chose. La décision de la Commission à ce sujet ne peut pas faire l’objet d’un appel devant le Tribunal. Seule la décision de la Commission qui a engendré le trop-payé est assujettie à une révision aux termes de l’article 112 de la Loi sur l’assurance-emploi. La responsabilité qui revient aux prestataires de rembourser un trop-payé et les intérêts qui en découlent ne peuvent pas faire l’objet d’une révision parce qu’il ne s’agit pas de décisions rendues par la Commission. De plus, la responsabilité devient celle d’une « personne endettée » plutôt que celle d’une « prestataire ». Le recours des prestataires à l’égard de telles questions consiste à demander un contrôle judiciaire à la Cour fédérale du Canada.

[31] Je n’ai pas le pouvoir de réduire ou d’annuler le trop-payé. Le Tribunal n’a pas la compétence nécessaire pour trancher de telles questions. C’est la Commission qui a le pouvoir de réduire ou d’annuler un trop-payé.

[32] L’appelante demande l’annulation du trop-payé. Je suis d’accord avec la position énoncée par la Commission et je note que, selon la loi, la décision de la Commission concernant l’annulation d’une somme due ne peut pas être portée en appel devant le Tribunal de la sécurité sociale. Par conséquent, je ne peux pas régler les questions relatives à une demande d’annulation ou de réduction d’un trop-payé.

[33] La Cour fédérale du Canada a le pouvoir d’instruire un appel portant sur l’annulation d’un trop-payé. Si [l’appelante] souhaite déposer un appel en ce sens, elle doit donc s’adresser à la Cour fédérale du Canada.

[34] Finalement, je ne vois rien dans le dossier qui laisse croire que la Commission a informé l’appelante au sujet du programme de remise de dette mis en place par l’Agence du revenu du Canada. Si le remboursement immédiat du trop-payé aux termes de l’article 44 de la Loi sur l’assurance-emploi lui cause des difficultés financières, l’appelante peut communiquer avec le Centre d’appels de la gestion des créances de l’Agence du revenu du Canada en composant le 1-866-864-5823. Il se pourrait qu’elle puisse prendre d’autres dispositions de remboursement en fonction de sa situation financière personnelle.

[35] Ni le Tribunal ni la Commission n’ont le pouvoir, qu’il soit discrétionnaire ou non, de déroger à des dispositions et conditions qui sont claires et imposées par la Loi ou le Règlement, pas même pour des raisons d’équité ou de compassion, des difficultés financières ou des circonstances atténuantes.

Conclusion

[36] Après avoir dûment pris en compte toutes les circonstances, je conclus que l’appelante n’a pas réussi à réfuter l’affirmation selon laquelle elle n’était pas disponible pour travailler du 27 septembre 2020 au 1er mai 2021. Par conséquent, l’appel concernant la disponibilité est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.