Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 478

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. H.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (441241) datée du 8 janvier 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Linda Bell
Mode d’audience : Téléconférenc
Date de l’audience : Le 20 avril 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelant

Date de la décision : Le 21 avril 2022
Numéro de dossier : GE-22-604

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Décision

[1] Je rejette l’appel.

[2] La Commission de l’assurance-emploi a versé 2 000 $ de prestations d’assurance-emploi d’urgence à un prestataire qui n’y avait pas droit.

[3] Selon la loi, ce prestataire est tenu de rembourser le versement excédentaire (trop-payé). Par conséquent, je ne vais pas réduire ni annuler ce trop-payé.

Aperçu

[4] Le prestataire a demandé la prestation d’assurance-emploi d’urgenceNote de bas page 1. Le 6 avril 2020, il a reçu 2 000 $ en versement anticipé.

[5] Le gouvernement du Canada versait 2 000 $ à l’avance pour que les prestataires canadiens reçoivent l’argent le plus tôt possible pendant la pandémie mondiale de COVID-19Note de bas page 2. Ce versement équivaut à 4 semaines de prestations (4 x 500 $ = 2 000 $).

[6] Le prestataire a mis fin à sa demande de prestation après avoir signalé un retour au travail à temps plein en juin 2020. La Commission a d’abord estimé avoir pu récupérer 1 000 $ du versement anticipé. Cependant, après plusieurs mois, elle a relevé une erreur. La Commission a finalement réalisé qu’elle n’avait rien récupéré des 2 000 $ du versement anticipé.

[7] La Commission a découvert que le prestataire a touché 16 semaines de prestations, mais qu’il a prouvé son admissibilité pour une période de 12 semaines, du 15 mars 2020 au 6 juin 2020. Par conséquent, il a reçu 2 000 $ pour 4 semaines auxquelles il n’avait pas droit.

[8] Le prestataire n’est pas d’accord avec la Commission et porte la décision en appel devant le Tribunal de la sécurité sociale. Il confirme que son appel concerne le trop-payé de 2 000 $ et non 1 000 $, comme il est indiqué dans son formulaire d’appel. Il défend qu’il ne devrait pas avoir à rembourser ce trop-payé. Il avance que la Commission pourrait à tout le moins réduire le montant à 1000 $ en raison de son erreur.

Questions que je dois examiner en premier

Erreur du système de la Commission

[9] La Commission signale que le système automatisé a créé une erreur. Elle réclamait donc 1 000 $ du versement anticipé en établissant incorrectement que le prestataire avait observé la période d’inadmissibilité pendant deux semaines.

[10] Le prestataire a reçu un avis de dette indiquant un trop-payé de 1 000 $ de prestations. Plusieurs mois plus tard, la Commission a corrigé l’erreur, ce qui a fait passer le trop-payé à 2 000 $.

[11] La Commission affirme avoir avisé le prestataire de l’erreur du système le 7 janvier 2022. Elle a expliqué que le prestataire ne pouvait pas observer sa période d’inadmissibilité de deux semaines du 8 juin 2020 au 19 juin 2020, puisqu’il était retourné au travail à temps plein. Ainsi, la somme à rembourser est de 2 000 $Note de bas page 3.

[12] Le prestataire confirme avoir reçu, d’octobre à février 2022, cinq avis indiquant une dette à régler de 1 000 $. Et tout à coup, il a reçu un avis daté du 2 mars 2022 indiquant que la somme due s’élevait désormais à 2 000 $.

[13] Il est dommage que le système de la Commission ait entraîné une erreur sur la période d’inadmissibilité. Heureusement, chaque appel devant le Tribunal est considéré comme nouveau. Autrement dit, une nouvelle décision sera prise si le prestataire fournit toutes les preuves nécessaires. J’estime que l’erreur du système n’a pas causé préjudice au prestataire parce qu’il a été capable de faire appel du trop-payé de 2 000 $ devant le TribunalNote de bas page 4.

Demande d’une conférence de règlement

[14] À l’audience du 1er avril 2022, le prestataire a dit qu’il aimerait que la Commission envisage de régler l’affaire en acceptant d’annuler l’entièreté du trop-payé de 2 000 $, étant donné qu’elle admet son erreur. À tout le moins, la Commission devrait retrancher les derniers 1 000 $ qui résultent directement de l’erreur.

[15] J’ai ajourné l’audience et écrit à la CommissionNote de bas page 5 pour demander des observations supplémentaires concernant la demande de règlement du prestataire.

[16] La Commission a répondu qu’elle refusait d’annuler la dette. Elle soutient que le prestataire n’avait pas demandé de « défalcation » (annulation) plus tôt et qu’elle ne prendrait aucune décision pendant que l’appel est devant le TribunalNote de bas page 6.

[17] Le prestataire défend qu’il avait bel et bien demandé à la Commission de « faire disparaître » la dette, sa façon d’exprimer « défalquer ». Pour éviter de gaspiller temps et argent, il désire que les parties s’entendent maintenant. Ainsi, il pourrait passer à autre chose.

[18] En réponse à la demande du prestataire, pour accélérer le déroulement de l’affaire, j’ai invité les deux parties à une conférence de règlement le 20 avril 2022. La Commission a décliné l’invitation.

[19] Comme je l’ai expliqué au prestataire le 20 avril 2022, je vais maintenant examiner le fond de l’appel.

Questions en litige

[20] La Commission a-t-elle le pouvoir de calculer un versement excédentaire de prestations d’assurance-emploi d’urgence?

[21] La Commission a-t-elle examiné les demandes de prestations d’assurance-emploi d’urgence dans les délais prescrits?

[22] Le prestataire est-il tenu de rembourser le trop-payé des prestations d’assurance-emploi?

Analyse

Pouvoir de calculer un versement excédentaire de prestations d’assurance-emploi d’urgence

[23] La loi prévoit que, si la Commission établit qu’une partie prestataire a reçu une somme de prestations d’assurance-emploi d’urgence à laquelle elle n’avait pas droit, elle calcule le montant du versement excédentaire et en informe la partie prestataireNote de bas page 7.

[24] Le prestataire est d’accord sur le fait qu’il a reçu un versement anticipé de 2 000 $. Il a toutefois été avisé initialement d’un trop-payé de 1 000 $.

[25] Le prestataire ne conteste pas que, le 7 janvier 2022, la Commission l’a informé que le trop-payé s’élevait dorénavant à 2 000 $. Ce jour-là, il dit avoir cru qu’il avait affaire à un coup monté, puisque la personne au téléphone était intransigeante et ne le laissait pas parler.

Délai permettant à la Commission de réexaminer une demande

[26] Selon la loi, la Commission a 36 mois après le versement de prestations pour réexaminer une demandeNote de bas page 8. Ce délai passe à 72 mois si la Commission estime qu’une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse a été faiteNote de bas page 9.

[27] La Cour d’appel fédérale reconnaît que la Commission ne peut pas examiner des changements à une demande en même temps qu’ils surviennent. C’est précisément pour cette raison que la Loi sur l’assurance-emploi alloue un délai à la Commission pour annuler ou modifier toute décision relative à une demande particulière de prestations d’assurance-emploiNote de bas page 10.

[28] Le prestataire ne conteste pas qu’il a reçu un versement anticipé de 2 000 $ pour la prestation d’assurance-emploi d’urgence. Il ne conteste pas non plus le fait qu’il est retourné au travail à temps plein la semaine du 7 juin 2020. Cela signifie qu’il avait droit à seulement 12 semaines de prestations, du 15 mars 2020 au 6 juin 2020.

[29] Le prestataire défend qu’il n’a pas à rembourser le trop-payé parce que celui-ci découle de versements qu’il a touchés il y a deux ans déjà. Il n’aurait pas dû avoir à vérifier si les versements étaient corrects. Il précise aussi qu’il a déjà payé l’impôt sur le revenu lié à ces prestations.

[30] Je suis d’accord avec la Commission. On ne s’attendait pas à ce que le prestataire vérifie si les versements étaient corrects. Cependant, le trop-payé demeure réel même si le versement anticipé a pu échapper au prestataire ou même si celui-ci a payé l’impôt sur le revenu lié à ces prestations.

[31] Je reconnais que l’erreur de la Commission sur le montant du trop-payé a entraîné du stress et de la confusion pour le prestataire. Il a tout de même touché quatre semaines de prestations auxquelles il n’avait pas droit. Les faits restent les mêmes : l’emploi du prestataire s’est terminé en septembre 2020 et il a choisi de ne pas demander d’autres prestations.

[32] De plus, le trop-payé du prestataire reste le même malgré les prestations que son épouse a décidé de ne pas demander. Le choix d’une personne de ne pas demander de prestations, que ce soit la partie prestataire ou son ou sa partenaire, ne prouve pas son admissibilité à la prestation d’assurance-emploi d’urgence.

[33] Je suis d’avis que la Commission a suivi la loi dans son examen. Le trop-payé de 2 000 $ est valide. La Commission a fait un versement anticipé de 2 000 $ au prestataire le 6 avril 2020, soit 19 mois avant de l’informer de sa décision relative au trop-payé de 1 000 $. C’est aussi 21 mois avant le 7 janvier 2022, où la Commission a avisé le prestataire que le trop-payé s’élevait à 2 000 $ et non 1 000 $, comme elle l’avait décidé auparavant. L’examen de la Commission s’est donc déroulé dans les délais prescrits.

Remboursement d’un versement excédentaire

[34] Selon la loi, toute personne est tenue de rembourser une prestation d’assurance-emploi d’urgence reçue si elle n’y avait pas droitNote de bas page 11.

[35] La situation est malheureuse. Je reconnais que l’erreur de la Commission et le long délai nécessaire au réexamen du versement anticipé ont entraîné un trop-payé élevé, sans parler du stress et de la confusion pour le prestataire.

[36] La Commission a procédé à l’examen conformément à la loi. Le versement excédentaire est valide. Je n’ai pas le pouvoir d’effacer le trop-payéNote de bas page 12. Ce pouvoir relève de la Commission.

[37] Je n’ai pas non plus le pouvoir d’exiger de la Commission qu’elle efface ou annule un versement excédentaire. Cela dit, j’aimerais néanmoins, dans la présente affaire, que la Commission envisage la possibilité d’annuler le trop-payé en tout ou en partie en tenant compte de son erreur de calculNote de bas page 13.

[38] Je sympathise avec le prestataire compte tenu des circonstances qu’il a présentées. Cependant, comme je l’ai expliqué durant l’audience, je ne fonde pas ma décision sur des principes d’équité ou de préjudice financier. Ma décision repose sur les faits qui me sont fournis et sur l’application de la loi. Il n’y a aucune exception ni marge de manœuvre. Je ne peux pas réécrire ni interpréter la Loi sur l’assurance-emploi d’une manière contraire à son sens ordinaire, même pour des motifs d’ordre humanitaireNote de bas page 14.

Conclusion

[39] L’appel est rejeté.

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