Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : Commission de l’assurance-emploi du Canada c RH, 2022 TSS 663

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante ou représentant   : Julie Villeneuve
Partie intimée : R. H.

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 8 février 2022 (GE-22-89)

Membre du Tribunal : Charlotte McQuade
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 15 juin 2022
Personnes présentes à l’audience : Représentante de la partie appelante
Partie intimée

Date de la décision : Le 22 juillet 2022
Numéro de dossier : AD-22-135

Sur cette page

Sur cette page

Décision

[1] J’accueille l’appel.

[2] La division générale a commis des erreurs de droit.

[3] R. H., la partie intimée (prestataire), n’a pas assez d’heures d’emploi assurable pour qu’une période de prestations soit établie le 19 ou le 26 septembre 2021.

Aperçu

[4] La prestataire a arrêté de travailler le 24 septembre 2021 et a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi ce jour-là. La Commission de l’assurance-emploi du Canada avait décidé que la prestataire n’avait pas les 420 heures assurables requises pour avoir droit aux prestations. La prestataire a fait appel de cette décision devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] La division générale a conclu que la prestataire avait assez d’heures si sa période de prestations commençait le 26 septembre 2021. Pour tirer cette conclusion, la division générale s’est fondée sur une disposition législative temporaire qui accordait 300 heures additionnelles d’emploi assurable à toute partie prestataire qui demandait des prestations régulièresNote de bas de page 1. Avec ce crédit et ses heures accumulées, la prestataire avait assez d’heures pour être admissible.

[6] La Commission a porté en appel la décision de la division générale. Selon la Commission, la division générale a fait des erreurs de droit lorsqu’elle a :

  • décidé que la période de prestations de la prestataire commençait le 26 septembre 2021 au lieu du 19 septembre 2021;
  • mal interprété la disposition temporaire relative au crédit pour que celle-ci s’applique à une période de prestations commençant après le 25 septembre 2021.

[7] La Commission est d’avis que, sans le crédit, la prestataire n’a pas assez d’heures pour avoir droit aux prestations à partir du 26 septembre 2021. Elle avance aussi que, même si le début de la période de prestations était le 19 septembre 2021 et que les 300 heures s’appliquaient, la prestataire n’aurait toujours pas assez d’heures pour être admissible.

[8] J’estime que la division générale a effectivement commis des erreurs de droit. Par conséquent, je peux substituer ma propre décision à celle de la division générale. Malheureusement, la prestataire n’a pas assez d’heures pour avoir droit aux prestations, que le début de sa période de prestations soit le 19 ou le 26 septembre 2021.

Questions en litige

[9] Voici les questions à examiner dans cet appel :

  1. a) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en décidant que la période de prestations de la prestataire commençait le 26 septembre 2021?
  2. b) La division générale a-t-elle mal interprété l’article 153.17 de la Loi sur l’assurance-emploi en décidant que le crédit s’appliquait à la période de prestations de la prestataire commençant le 26 septembre 2021?
  3. c) S’il y a lieu, comment puis-je corriger les erreurs de la division générale?

Analyse

La division générale a commis une erreur de droit en décidant que la période de prestations commençait le 26 septembre 2021

[10] La période de prestations de la prestataire ne peut pas commencer le 26 septembre 2021.

[11] La Commission avait décidé que la prestataire n’avait pas accumulé assez d’heures pendant sa période de référence pour être admissible aux prestations. La prestataire a porté cette décision en appel devant la division générale du Tribunal.

[12] Pour établir si la prestataire avait assez d’heures, la division générale devait décider de sa période de référence. Comme celle-ci correspond à la période de 52 semaines avant le début de la période de prestations, la division générale devait d’abord décider du début de la période de prestationsNote de bas de page 2.

[13] La loi établit qu’une période de prestations débute, selon le casNote de bas de page 3 :

  1. a) le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération;
  2. b) le dimanche de la semaine au cours de laquelle est formulée la demande initiale de prestations, si cette semaine arrive après celle de l’arrêt de rémunération.

[14] La prestataire a arrêté de travailler le 24 septembre 2021 et a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi le jour même, le 24 septembre 2021.

[15] Un arrêt de rémunération se produit lorsque l’emploi d’une personne prend fin, et qu’au moins sept jours consécutifs s’écoulent pendant lesquels la personne ne travaille pas pour l’employeur ni n’est rémunérée par celui-ciNote de bas de page 4.

[16] Selon la division générale, comme le dernier jour de travail de la prestataire était le 24 septembre 2021, qu’elle n’avait travaillé pour aucun employeur et n’avait reçu aucune rémunération pour la période suivant le 24 septembre 2021, son arrêt de rémunération arrivait le 1er octobre 2021Note de bas de page 5.

[17] La division générale a donc conclu que la période de prestations de la prestataire commençait le 26 septembre 2021Note de bas de page 6.

[18] La Commission avance que la division générale a commis une erreur de droit en décidant que l’arrêt de rémunération arrivait le 1er octobre 2021. Elle affirme que l’arrêt de rémunération se produit au dernier jour de travail, soit le 24 septembre 2021, et non sept jours plus tard. Selon la Commission, la période de prestations de la prestataire aurait dû commencer le 19 septembre 2021 au lieu du 26 septembre 2021.

[19] La prestataire dit qu’elle a arrêté de travailler le 24 septembre 2021 et croit que la division générale a pris la bonne décision concernant le début de sa période de prestations.

[20] J’estime que la division générale a commis une erreur de droit en décidant que la date d’arrêt de rémunération de la prestataire était le 1er octobre 2021. La division générale est tenue de suivre les décisions de la Cour d’appel fédérale qui interprètent des articles de la Loi sur l’assurance-emploi. Toutefois, dans ce cas-ci, elle n’a pas pris en compte que la Cour d’appel fédérale interprète le terme « arrêt de rémunération » tel qu’il est défini dans le Règlement sur l’assurance-emploi, comme la date où une personne est licenciée ou cesse d’être au service de son employeur, et non sept joursplus tardNote de bas de page 7.

[21] Ainsi, l’arrêt de rémunération de la prestataire était le 24 septembre 2021, et non le 1er octobre 2021. En conséquence, sa période de prestations doit commencer le 19 septembre 2021.

[22] La Loi sur l’assurance-emploi ne nous permet pas de postdater une période de prestations, c’est-à-dire de lui donner une date ultérieure à la date réelle. Ainsi, il était impossible selon la loi que la période de prestations de la prestataire commence le 26 septembre 2021.

[23] Par conséquent, la période de référence de la prestataire ne peut pas être du 27 septembre 2020 au 25 septembre 2021, comme l’a décidé la division généraleNote de bas de page 8.

[24] La période de référence est la période de 52 semaines qui précède le début d’une période de prestationsNote de bas de page 9. La période de référence de la prestataire devait donc aller du 20 septembre 2020 au 18 septembre 2021.

[25] Comme j’ai déjà conclu que la division générale avait fait une erreur de droit, je n’aurais pas à examiner si elle a mal interprété l’article 153.17 de la Loi. Toutefois, la prestataire a compris qu’elle bénéficierait du crédit si elle présentait sa demande de prestations avant le 26 septembre 2021. Les deux parties ont présenté des arguments sur la fin de l’application du crédit. Je considère donc que je dois me pencher sur la question.

La division générale a mal interprété l’article 153.17 de la Loi sur l’assurance-emploi

[26] La division générale a mal interprété l’article 153.17 de la Loi en décidant qu’il s’appliquait à la période de prestations de la prestataire commençant le 26 septembre 2021.

Dispositions législatives pertinentes

[27] L’article 153.17 de la Loi était une mesure temporaire ajoutée en réaction à la pandémie de COVID-19. Une personne qui présentait une demande initiale de prestations régulières le 27 septembre 2020 ou après cette date, ou à l’égard d’un arrêt de rémunération qui était survenu à cette date ou après, était réputée avoir un crédit de 300 heures d’emploi assurableNote de bas de page 10. Ainsi, une personne avait besoin de seulement 120 heures de plus pour atteindre les 420 heures requises et être admissible aux prestations régulières.

[28] L’article 153.17 de la Loi a arrêté de s’appliquer le 25 septembre 2021Note de bas de page 11.

[29] Par la suite, une disposition législative de transition (temporaire) est entrée en vigueur. Elle énonçait que l’article 153.17 de la Loi continuait de s’appliquer aux parties prestataires dont la période de prestations commençait durant la période allant du 27 septembre 2020 au 25 septembre 2021Note de bas de page 12.

[30] Dans la présente affaire, il faut décider si la période de prestations de la prestataire devait commencer avant le 26 septembre 2021 pour qu’elle obtienne le crédit, ou si elle pouvait l’obtenir pourvu qu’elle ait présenté sa demande de prestations ou arrêté de travailler avant le 26 septembre 2021.

Décision de la division générale

[31] La division générale a décidé que la prestataire pouvait bénéficier du crédit de 300 heures pour deux raisonsNote de bas de page 13 :

  1. a) elle avait demandé des prestations le 24 septembre 2021, et cette date correspondait au sens de l’article 153.17(1)(b) au sujet de la présentation de la demande initiale;
  2. b) sa période de référence s’est terminée le 25 septembre 2021, tout juste avant que la disposition relative au crédit cesse de s’appliquer.

[32] La division générale a conclu que la prestataire avait assez d’heures pour que sa période de prestations débute le 26 septembre 2021. Elle avait besoin de 420 heures, mais en avait accumulé 135 pendant sa période de référence. Grâce au crédit de 300 heures, elle arrivait à 435 heures.

Arguments des parties

[33] La prestataire est d’avis que la division générale a bien interprété l’article 153.17 de la Loi. Elle mentionne que la Commission l’a informée qu’elle avait besoin de 120 heures seulement pour être admissible. Personne ne lui a dit qu’il fallait commencer la période de prestations avant le 26 septembre 2021, et elle n’a pas vu cette information sur le site Web. De plus, elle soutient que l’article 153.17 ne mentionne aucune obligation de commencer une période de prestations avant le 26 septembre 2021 pour bénéficier du crédit.

[34] Selon la Commission, la division générale a commis une erreur de droit en omettant de placer les mots de l’article 153.17 dans le cadre du contexte de deux autres dispositions législatives importantes. La Commission est d’avis que, si l’on prend en considération ces deux autres dispositions, le sens de l’article 153.17 est clair : le crédit s’applique seulement aux personnes dont la période de prestations est établie dans la période allant du 27 septembre 2020 au 25 septembre 2021.

[35] La première disposition sur laquelle la Commission s’appuie concerne la définition de « demande initiale de prestations ». Selon la Commission, une demande initiale est plus qu’une simple demande. La Loi sur l’assurance-emploi définit la demande initiale comme une « demande formulée aux fins d’établir une période de prestations au profit du prestataireNote de bas de page 14 ». La Commission soutient donc que la demande initiale est étroitement liée au début de la période de prestations.

[36] La seconde disposition sur laquelle la Commission s’appuie en est une de transition qui est entrée en vigueur après que l’article 153.17 de la Loi a arrêté de s’appliquer le 25 septembre 2021Note de bas de page 15. Cette disposition établit que l’article 153.17 continue de s’appliquer aux parties prestataires « dont la période de prestations commence durant la période commençant le 27 septembre 2020 et se terminant le 25 septembre 2021Note de bas de page 16 ».

[37] Selon la Commission, cette disposition de transition montre clairement que le crédit de l’article 153.17 ne s’applique pas aux périodes de prestations commençant après le 25 septembre 2021.

[38] La Commission soutient que, lorsqu’on lit les mots de l’article 153.17 de la Loi en connaissant les deux autres dispositions importantes, on comprend que le crédit ne peut pas s’appliquer aux périodes de prestations débutant après le 25 septembre 2021. Par conséquent, le crédit ne peut pas s’appliquer à la prestataire, si sa période de prestations débute le 26 septembre 2021.

[39] La Commission ajoute que, même si sa période de prestations commençait le 19 septembre 2021 et qu’elle pouvait obtenir le crédit de 300 heures, la prestataire n’a que 100 heures d’emploi assurable dans sa période de référence du 20 septembre 2020 au 18 septembre 2021. Elle n’arrive toujours pas aux 420 heures requises.

Ma décision

[40] Aucune décision de la Cour fédérale ou de la Cour d’appel fédérale ne dicte qu’une période de prestations doit commencer avant le 26 septembre 2021 pour que le crédit s’applique. Cependant, la division d’appel du Tribunal a récemment interprété l’article 153.17 de la Loi en contexte, de sorte que le crédit est inapplicable à une période de prestations débutant après le 25 septembre 2021Note de bas de page 17.

[41] Je ne suis pas tenue de suivre les décisions de la division d’appel du Tribunal, mais je suis d’accord avec le raisonnement dans ce cas-ci. Si l’on interprète l’article 153.17 de la Loi en contexte, le crédit ne s’applique pas aux périodes de prestations débutant après le 25 septembre 2021. J’estime alors que la prestataire ne peut pas obtenir le crédit avec une période de prestations commençant le 26 septembre 2021. Je vais expliquer ma décision.

[42] Conformément au concept d’interprétation législative, je dois « lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateurNote de bas de page 18 ». Autrement dit, je dois tenir compte du texte, du contexte et de l’objectif de la disposition en question.

[43] Cela veut dire qu’il ne suffit pas de lire les mots pour comprendre une disposition. La loi établit que, lorsque les mots d’une disposition sont « précis et non équivoque[s] » (clairs et simples), leur sens ordinaire joue un rôle primordial dans leur interprétationNote de bas de page 19.

[44] La loi dit aussi que mon interprétation doit être la plus large qui soit lorsqu’il est question de prestations. (La Loi sur l’assurance-emploi en est un exemple.) De plus, si la formulation de la loi est ambiguë ou manque de clarté, la solution doit être en faveur du demandeur de prestationsNote de bas de page 20.

[45] Je dois donc garder tous ces principes en tête en décidant de la signification de l’article 153.17 de la Loi.

Objectif

[46] L’article 153.17 de la Loi se trouve dans la partie VIII.5 intitulée « Mesures temporaires pour faciliter l’accès aux prestations ».

[47] La Commission précise que l’objectif des mesures temporaires de la partie VIII.5 était de faciliter l’accès aux prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 21. L’article 153.17 de la Loi comptait parmi ces mesures temporaires.

[48] La prestataire n’a pas présenté d’argument précis concernant l’objectif de l’article 153.17.

[49] C’est clair selon moi. L’objectif de l’article 153.17 de la Loi est de rendre l’accès aux prestations d’assurance-emploi plus facile pour une période temporaire, comme l’énonce le titre de la partie VIII.5.

[50] Toutefois, je suis d’accord avec le raisonnement dans la décision de la division d’appel que j’ai mentionnée plus haut. Les interprétations de l’article 153.17 de la Commission et de la division générale respectent toutes deux cet objectifNote de bas de page 22. L’objectif ne nous aide pas vraiment à clarifier la fin de l’application des heures additionnelles.

Texte et contexte

[51] Si l’on tient compte des mots seulement, l’article 153.17 ne dit pas qu’une période de prestations doit commencer avant le 26 septembre 2021 pour que le crédit s’applique.

[52] Ainsi, on pourrait conclure en fonction des mots seulement que le début de la période de prestations avant le 26 septembre 2021 n’était pas une condition pour obtenir le crédit.

[53] Toutefois, il n’y a pas que les mots qui contribuent au sens de l’article 153.17. Pour saisir la signification des mots de l’article, on doit les placer dans le cadre du contexte de la Loi sur l’assurance-emploi et de toute disposition législative liéeNote de bas de page 23.

[54] J’estime que la division générale a commis une erreur de droit en omettant de placer les mots de l’article 153.17 en contexte.

[55] En contexte, l’article 153.17 de la Loi n’est pas ambigu. Pour que le crédit s’applique, une période de prestations doit clairement être établie avant le 26 septembre 2021.

[56] Alors, quel est le contexte au juste? D’abord, il faut examiner le fonctionnement de la Loi sur l’assurance-emploi qui permet d’accorder des prestations.

[57] Selon la Loi sur l’assurance-emploi, une demande de prestations ou un arrêt de rémunération seul ne donne pas droit à des prestations. Pour qu’une période de prestations soit établie, la partie prestataire doitNote de bas de page 24 :

  • présenter une demande initiale de prestations;
  • avoir eu un arrêt de rémunération;
  • avoir le nombre d’heures requis au cours de sa période de référence.

[58] Ces conditions forment un tout. Elles ne fonctionnent pas indépendamment.

[59] Comme la Commission l’a mentionné, une « demande initiale de prestations » signifie dans la Loi sur l’assurance-emploi une « demande formulée aux fins d’établir une période de prestations au profit du prestataireNote de bas de page 25 ». Ainsi, la demande initiale est étroitement liée au début de la période de prestations.

[60] La période de prestations débute, selon le casNote de bas de page 26 :

  1. a) le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération;
  2. b) le dimanche de la semaine au cours de laquelle est formulée la demande initiale de prestations, si cette semaine arrive après celle de l’arrêt de rémunération.

[61] La période de prestations commence toujours le dimanche. Si une personne arrêtait de travailler pendant la semaine qui finit le 25 septembre 2021 et présentait une demande le 24 septembre 2021, comme la prestataire, la période de prestations commencerait le 19 septembre 2021. En comparaison, si une personne arrêtait de travailler pendant la semaine qui finit le 25 septembre 2021 et présentait une demande le 26 septembre 2021 ou après, la période de prestations commencerait le 26 septembre 2021.

[62] Si on a arrêté de travailler pendant la semaine qui finit le 25 septembre 2021 et présenté une demande de prestations le 24 septembre 2021, comme la prestataire, il est impossible que la période de prestations commence le 26 septembre 2021. La date d’une demande initiale et la date de début d’une période de prestations sont dépendantes l’une de l’autre.

[63] La date de début de la période de prestations est importante. La partie prestataire doit avoir accumulé des heures d’emploi assurable pendant sa période de référence, soit la période de 52 semaines qui précède le début de la période de prestationsNote de bas de page 27. Autrement dit, on doit connaître la date de début de la période de prestations pour établir la période de référence.

[64] Quelle est l’importance des dates? Elles importent puisque le crédit d’heures dont il est question à l’article 153.17 s’applique à la période de référence d’une période de prestations précise (les 52 semaines qui précèdent immédiatement cette période de prestations).

[65] Bref, tous les éléments suivants sont interreliés :

  • les énoncés de la Loi sur l’assurance-emploi qui portent sur la demande initiale;
  • la date de l’arrêt de rémunération;
  • la date potentielle de début de la période de prestations;
  • l’établissement de la période de référence (période à laquelle s’applique le crédit d’heures).

[66] Sous cet angle, la date de la demande seule ou même la date de l’arrêt de rémunération seule ne peut pas servir à décider de l’application du crédit d’heures. La demande initiale et l’arrêt de rémunération sont interreliés à l’établissement de la période de prestations et de la période de référence à laquelle le crédit s’appliquera.

[67] Pour bien comprendre, il faut placer les mots de l’article 153.17 de la Loi dans ce contexte. Ainsi, une période de prestations doit clairement commencer au plus tard le 25 septembre 2021 pour que le crédit s’applique.

[68] Sauf que ce n’est pas la fin de l’histoire. Je dois aussi tenir compte de la disposition de transition connexe, selon laquelle l’article 153.17 continue de s’appliquer même après être arrivé à terme le 25 septembre 2021Note de bas de page 28.

[69] Cette disposition de transition établit que l’article 153.17 continue de s’appliquer aux parties prestataires dont la période de prestations commence durant la période allant du 27 septembre 2020 au 25 septembre 2021.

[70] Étant donné que l’article 153.17 « continue » de s’appliquer aux périodes de prestations commençant durant la période allant du 27 septembre 2020 au 25 septembre 2021, il est clair que cet article était destiné à s’appliquer seulement aux périodes de prestations dont le début arrivait dans la période allant du 27 septembre 2020 au 25 septembre 2021.

[71] La division générale a décidé que la prestataire avait droit au crédit, car sa période de référence débutait avant le 26 septembre 2021. J’aimerais exprimer respectueusement mon désaccord. Cette interprétation va à l’encontre de la disposition de transition exigeant l’établissement de la période de prestations au plus tard le 25 septembre 2021.

[72] J’estime que le crédit s’applique seulement aux périodes de prestations commençant durant la période allant du 27 septembre 2020 au 25 septembre 2021.

[73] Je suis arrivée à cette conclusion après avoir examiné :

  • l’objectif de l’article 153.17;
  • le texte;
  • le contexte de la définition de « demande initiale de prestations »;
  • le contexte des dispositions sur l’établissement de la période de prestations;
  • le contexte de la disposition de transition décrivant que l’article 153.17 continuerait de s’appliquer même après être arrivé à terme le 25 septembre 2021.

[74] La division générale a mal interprété l’article 153.17 de la Loi en pensant que le crédit d’heures pouvait s’appliquer à la prestataire avec une période de prestations qui commençait le 26 septembre 2021.

Façon de corriger l’erreur

[75] Je peux renvoyer l’appel à la division générale pour réexamen ou rendre la décision que la division générale aurait dû rendreNote de bas de page 29.

[76] En général, lorsque les faits pertinents ne sont pas contestés et qu’il y a eu erreur de droit, la division d’appel rendra la décision que la division générale aurait dû rendre.

[77] À l’audience, la Commission et la prestataire étaient d’accord pour que je rende la décision que la division générale aurait dû rendre, si je concluais que la division générale avait commis une erreur de droit. Je suis d’avis que c’est la façon la plus appropriée de corriger l’erreur.

La prestataire n’a pas assez d’heures d’emploi assurable pour qu’une période de prestations soit établie

[78] La prestataire n’a pas assez d’heures d’emploi assurable pour qu’une période de prestations commence le 19 ou le 26 septembre 2021.

[79] Comme je l’ai mentionné plus haut, la période de prestations de la prestataire commencerait le 19 septembre 2021. Cela signifie que sa période de référence est du 20 septembre 2020 au 18 septembre 2021Note de bas de page 30.

[80] La Commission avait informé la division générale que la prestataire avait 100 heures d’emploi assurable dans sa période de référenceNote de bas de page 31. La Commission affirme que la prestataire ne l’a pas contesté devant la division générale.

[81] La Commission avait préparé un relevé d’emploi provisoire en fonction des données fournies par la prestataire, car son employeur n’avait pas encore créé son relevé d’emploi. Le relevé d’emploi provisoire montre que la prestataire a travaillé 124 heures du 31 août 2021 au 24 septembre 2021Note de bas de page 32. Le relevé d’emploi réel que l’employeur a fourni plus tard montre que la prestataire a travaillé 100 heures du 31 août 2021 au 20 septembre 2021Note de bas de page 33.

[82] J’ai écouté l’enregistrement audio de l’audience de la division générale. Dans son témoignage, la prestataire semble être en désaccord avec le relevé d’emploi créé par son employeur. Elle acceptait les 100 heures inscrites, mais soutenait que ce relevé d’emploi ne reflétait pas la formation qu’elle avait suivie le 23 septembre 2021, puis son travail le 24 septembre 2021Note de bas de page 34.

[83] Tout bien considéré, je ne vois pas le besoin de renvoyer cette affaire à la division générale pour demander une décision de l’Agence du revenu du Canada sur les heures de la prestataire pour le 23 ou 24 septembre 2021. En fait, ces heures sont en dehors de sa période de référence, alors elles ne peuvent pas être prises en compte de toute façon.

[84] Pour la même raison, on ne peut pas prendre en compte les 35 heures que la prestataire a accumulées chez un autre employeur du 19 au 24 septembre 2021Note de bas de page 35.

[85] J’accepte que la prestataire ait travaillé et accumulé 100 heures au cours de sa période de référence du 20 septembre 2020 au 18 septembre 2021.

[86] Après l’application du crédit de 300 heures, la prestataire a 400 heures d’emploi assurable, ce qui est moins que les 420 requises pour être admissible aux prestations.

[87] Si la période de prestations de la prestataire commençait le 26 septembre 2021, elle n’aurait toujours pas assez d’heures d’emploi assurable pour être admissible. Sa période de référence serait du 27 septembre 2020 au 25 septembre 2021. La prestataire a accumulé 35 heures du 19 au 24 septembre 2021. Elle a 100 heures du 31 août 2021 au 20 septembre 2021. Tout compte fait, elle a 135 heures, ce qui est moins que les 420 requises.

[88] Comme je l’ai mentionné plus haut, la prestataire a soulevé que les heures des 23 et 24 septembre 2021 n’apparaissaient pas dans le relevé d’emploiNote de bas de page 36. Le relevé d’emploi provisoire montre 124 heures du 31 août 2021 au 24 septembre 2021. Même si c’était le bon nombre d’heures, ce serait toujours insuffisant. Étant donné les 100 heures accumulées au 20 septembre 2021, quel que soit le nombre d’heures pour le 23 ou 24 septembre 2021, la prestataire n’aurait pas pu accumuler les heures manquantes sur deux jours seulement.

[89] Je suis consciente de la situation malheureuse de la prestataire. Comme la prestataire l’a expliqué à la division générale, elle a été informée par la Commission qu’elle serait admissible au crédit si elle présentait sa demande au plus tard le 25 septembre 2021. Le site Web de la Commission ne clarifiait pas que sa période de prestations devait être établie au plus tard le 25 septembre 2021. La prestataire pensait qu’elle était admissible avec ses heures accumulées.

[90] Je suis sensible à la situation de la prestataire. Malheureusement, je ne peux pas outrepasser la loi, même si les circonstances sont convaincantesNote de bas de page 37.

Conclusion

[91] J’accueille l’appel de la Commission.

[92] La division générale a commis une erreur de droit. La prestataire ne peut pas commencer une période de prestations le 19 ou le 26 septembre 2021, parce qu’elle n’a pas assez d’heures d’emploi assurable pour être admissible.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.