Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AY c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 708

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une prorogation de délai et à une demande de permission d’en appeler

Partie demanderesse : A. Y.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 25 avril 2022
(GE-22-557)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 4 août 2022
Numéro de dossier : AD-22-394

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Décision

[1] J’accepte de proroger le délai de présentation de la demande de permission d’en appeler. Toutefois, je refuse la permission d’en appeler. Cela signifie que l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le prestataire travaillait en tant que technologue de laboratoire médical et était employé par l’Autorité provinciale des services de santé. L’employeur a suspendu et plus tard congédié le prestataire parce qu’il ne s’était pas conformé à sa politique de vaccination contre la COVID-19. Le prestataire a ensuite fait une demande de prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] La partie défenderesse (Commission) a décidé que le prestataire a été licencié en raison de son inconduite donc elle n’était pas en mesure de lui verser des prestations. Après l’échec d’une révision, le prestataire a fait appel auprès de la division générale.

[4] La division générale a conclu que le prestataire a été congédié après avoir refusé de se conformer à la politique de l’employeur. Elle a conclu que le prestataire savait que l’employeur allait probablement le congédier dans ces circonstances. La division générale a conclu que le prestataire avait été congédié de son emploi en raison de son inconduite.

[5] Le prestataire souhaite maintenant obtenir la permission de porter la décision de la division générale en appel devant la division d’appel. Il soutient que la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation de l’inconduite. Le prestataire soutient qu’il a un droit à l’autonomie corporelle et à la liberté de choix. Le prestataire fait valoir que la politique de vaccination était illégale et allait à l’encontre de son contrat de travail. Il soutient que le fait de le contraindre à se faire vacciner constitue une violation de ses droits constitutionnels.

[6] Je dois décider si j’accorde au prestataire une prorogation du délai pour déposer sa demande de permission d’en appeler. Si je l’accorde, je dois ensuite décider si le prestataire a soulevé une quelconque erreur révisable que la division générale aurait commise et qui conférerait une chance de succès à l’appel.

[7] J’accorde au prestataire une prorogation du délai pour présenter sa demande de permission d’en appeler. Toutefois, je refuse la permission d’en appeler puisque l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Questions en litige

[8] Est-ce qu’une prorogation du délai devrait être accordée pour que le prestataire puisse présenter sa demande de permission d’en appeler?

[9] Si c’est le cas, le prestataire a-t-il soulevé une quelconque erreur révisable que la division générale aurait commise et qui conférerait une chance de succès à l’appel?

Analyse

[10] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social précise les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Les erreurs révisables sont les suivantes :

  1. 1. La procédure de la division générale était inéquitable d’une façon quelconque.
  2. 2. La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher ou elle a tranché une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.
  3. 3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. 4. La division générale a commis une erreur de droit en rendant sa décision.

[11] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à l’examen sur le fond. C’est une première étape que le prestataire doit franchir, mais où la barre est moins haute que celle qu’il faut franchir durant l’instruction de l’appel sur le fond. À l’étape de la permission de faire appel, le prestataire n’a pas à prouver ses prétentions. Il doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur révisable. En d’autres mots, il doit démontrer qu’il est possible de soutenir qu’il y a eu une erreur révisable pouvant faire en sorte que l’appel soit accueilli.

[12] Par conséquent, avant d’accorder la permission, je dois être convaincu que les motifs de l’appel correspondent à l’un des moyens d’appel mentionnés plus haut et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès.   

Est-ce qu’une prorogation du délai devrait être accordée pour que le prestataire puisse présenter sa demande de permission d’en appeler?

[13]  Le prestataire explique qu’il a présenté son appel en retard puisqu’il était bouleversé par la décision de la division générale. Il a eu besoin de temps pour trouver la force de demander un conseil juridique et de déposer sa demande de permission d’en appeler.

[14] Je conclus qu’étant donné les circonstances et compte tenu du fait que le retard n’est pas considérable, il est dans l’intérêt de la justice que le prestataire bénéficie d’une prorogation du délai pour déposer sa demande de permission d’en appeler sans préjudice à la CommissionNote de bas de page 1.  

Le prestataire a-t-il soulevé une quelconque erreur révisable que la division générale aurait commise et qui conférerait une chance de succès à l’appel?

[15] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation de l’inconduite. Il soutient qu’il a un droit à l’autonomie corporelle et à la liberté de choix. Il fait valoir que la politique de vaccination était illégale et allait à l’encontre de son contrat de travail. Le prestataire soutient que le fait de le contraindre à se faire vacciner constitue une violation de ses droits constitutionnels.

[16] Le prestataire travaillait pour X comme technologue de laboratoire médical. L’employeur a suspendu et ensuite congédié le prestataire parce qu’il n’a pas respecté leur politique.

[17] La division générale devait décider si le prestataire avait été congédié en raison de son inconduite.

[18] La notion d’inconduite ne signifie pas que la conduite doit nécessairement découler d’une mauvaise intention; il suffit que l’inconduite soit consciente, délibérée ou intentionnelle. Autrement dit, l’acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins procéder d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que l’employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur son rendement.

[19] Le rôle de la division générale est de décider si le prestataire était coupable de l’inconduite qui a mené à son licenciement, non pas de juger de la sévérité de la sanction de l’employeur ni de déterminer si l’employeur est coupable d’inconduite lui-même puisqu’il a suspendu et congédié le prestataire, de sorte ce que ces actions seraient injustifiéesNote de bas de page 2.

[20] En se basant sur la preuve prépondérante, la division générale a conclu que le prestataire a été congédié parce qu’il avait refusé de se faire vacciner conformément à la politique de l’employeur en réponse à la pandémie. Il avait été informé de la politique de l’employeur mise en place pour protéger la santé et la sécurité de tous ses employés dans le milieu de travail et on lui a donné la chance à se conformer. Le prestataire a choisi de refuser; ce refus était délibéré. La division générale a conclu que cela était la cause directe de son congédiement. Il savait ou du moins aurait dû savoir que son refus de se conformer à la politique pouvait entraîner son congédiement.

[21] La division générale a conclu, à partir de la preuve prépondérante, que le comportement du prestataire constituait une inconduite selon la Loi sur l’assurance-emploi.

[22] Il est bien établi dans la jurisprudence qu’une violation délibérée d’une politique d’un employeur est considérée comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 3.

[23] Le prestataire soutient que la politique de vaccination de son employeur était illégale et allait à l’encontre de son contrat de travail. Il soutient aussi que le fait de le contraindre à se faire vacciner constitue une violation de ses droits constitutionnels.

[24] Je ne vois pas d’erreur révisable commise par la division générale lorsqu’elle a déclaré qu’elle devait trancher la question de l’inconduite uniquement en fonction des paramètres établis par la Cour d’appel fédérale, laquelle a défini l’inconduite en vertu de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 4.

[25] Je suis bien conscient que le prestataire pourrait chercher à obtenir réparation par le truchement d’une autre instance, si une violation a eu lieuNote de bas de page 5. Cela ne change pas le fait qu’au titre de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission a prouvé selon la prépondérance des probabilités que le prestataire a été congédié en raison de son inconduite.

[26] Dans sa demande de permission de faire appel, le prestataire n’a soulevé aucune erreur susceptible de révision comme une erreur de compétence ou un manquement de la division générale à un principe de justice naturelle. Il n’a pas cerné d’erreur de droit ni de conclusion de fait erronée que la division générale pourrait avoir tirée de façon abusive ou arbitraire, ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance au moment de rendre sa décision.

[27] Après avoir examiné le dossier d’appel, la décision de la division générale et les arguments du prestataire pour soutenir sa demande de permission d’en appeler, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[28] La permission d’en appeler est refusée. Cela signifie que l’appel n’ira pas de l’avant.

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