Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : NF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 742

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : N. F.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 3 juin 2022 (GE 22-1227)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 10 août 2022
Numéro de dossier : AD-22-409

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Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’rai donc pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse (prestataire) travaillait comme réceptionniste. Elle se rendait au bureau au besoin. En septembre 2021, l’employeur a mis en place une politique sur la COVID-19 qui obligeait les employés à se faire vacciner contre la COVID-19 ou à se soumettre à des tests de dépistage réguliers. L’employeur a d’abord suspendu la prestataire, puis l’a congédiée parce qu’elle ne se conformait pas à sa politique. Selon l’employeur, la prestataire a refusé de recevoir le vaccin contre la COVID-19 ou de se soumettre à des tests réguliers de dépistage. La prestataire a ensuite demandé des prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a conclu que la prestataire avait volontairement quitté son emploi sans justification et qu’elle ne pouvait donc pas lui verser des prestations. Après le rejet de sa demande de révision, la prestataire a fait appel auprès de la division générale.

[4] La division générale a conclu que la prestataire avait plutôt été congédiée après avoir refusé de se conformer à la politique de l’employeur. La politique exigeait qu’elle reçoive le vaccin contre la COVID-19 ou qu’elle présente un résultat négatif à un de dépistage toutes les 72 heures. La division générale a jugé que la prestataire savait que l’employeur était susceptible de la congédier dans ces circonstances. Elle a conclu qu’elle avait été congédiée en raison d’une inconduite.

[5] La prestataire cherche maintenant à obtenir la permission de porter la décision de la division générale en appel devant la division d’appel. Elle soutient que le refus d’une employée ou d’un employé de subir un traitement médical particulier n’équivaut pas à un refus d’exécuter un aspect de ses fonctions ou de se présenter au travail. La prestataire fait valoir qu’elle a droit à l’autonomie corporelle et à la liberté de choix. Elle avance que la politique de vaccination était illégale et allait à l’encontre de son contrat de travail. Elle soutient que le fait de la forcer à se faire vacciner est une violation de ses droits constitutionnels.

[6] Je dois décider si la prestataire a soulevé une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès.

[7] Je refuse la permission de faire appel puisque l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès?

Analyse

[9] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prévoit les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Il s’agit des erreurs révisables que voici :

  1. 1. Le processus de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. 2. La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher ou elle a tranché une question sans avoir le pouvoir de le faire.
  3. 3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. 4. La division générale a commis une erreur de droit en rendant sa décision.

[10] La demande de permission de faire appel est une étape préliminaire à l’examen sur le fond. C’est une première étape que la prestataire doit franchir, mais où le fardeau est inférieur à celui dont elle devra s’acquitter durant l’instruction de l’appel sur le fond. À l’étape de la permission de faire appel, la prestataire n’a pas à prouver ses prétentions. Elle doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur révisable. Autrement dit, elle doit démontrer qu’il est possible de soutenir qu’il y a eu une erreur révisable pouvant faire que l’appel soit accueilli.

[11] Par conséquent, pour accorder la permission de faire appel, je dois être convaincu que les motifs de l’appel correspondent à l’un des moyens d’appel susmentionnés et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès.

La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès?

[12] La prestataire soutient que le refus d’une employée ou d’un employé de subir un traitement médical particulier n’équivaut pas à un refus d’exécuter un aspect de ses fonctions ou de se présenter au travail. La prestataire fait valoir qu’elle a droit à l’autonomie corporelle et à la liberté de choix. Elle dit que la politique de vaccination était illégale et allait à l’encontre de son contrat de travail. Elle soutient que le fait de la forcer à se faire vacciner est une violation de ses droits constitutionnels.

[13] La prestataire travaillait comme réceptionniste. Elle se rendait au bureau au besoin. En septembre 2021, l’employeur a mis en place une politique qui exigeait que les employés reçoivent le vaccin contre la COVID-19 ou se soumettent à des tests de dépistage réguliers. La prestataire ne s’est pas conformée à la politique.

[14] La division générale a conclu que l’employeur avait amorcé la cessation d’emploi de la prestataire. Elle a accordé de l’importance aux déclarations constantes de la prestataire selon lesquelles l’employeur l’a mise son congé, puis congédiée. La division générale a jugé que la lettre de congédiement et le relevé d’emploi préparés l’employeur appuyaient son témoignage.

[15] La division générale a jugé que la prestataire avait été suspendue et congédiée après avoir refusé de se conformer à la politique de l’employeur. Elle a estimé que la prestataire savait que l’employeur était susceptible de la suspendre et de la congédier dans ces circonstances. La division générale a conclu que la prestataire avait été suspendue et congédiée en raison d’une inconduite.

[16] La notion d’inconduite ne veut pas nécessairement dire que le comportement fautif résulte d’une intention coupable. Il suffit que l’inconduite soit consciente, voulue ou intentionnelle. Autrement dit, pour qu’il y ait inconduite, l’acte reproché doit avoir été délibéré ou, à tout le moins, être d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que la personne a volontairement décidé d’ignorer les répercussions de ses actes sur son rendement au travail.

[17] Le rôle de la division générale n’est pas de juger de la sévérité de la sanction imposée par l’employeur ni de décider si l’employeur s’est rendu coupable d’inconduite en suspendant ou en congédiant la prestataire de telle manière que sa suspension ou son congédiement était injustifié. Son rôle est plutôt de décider si la prestataire était coupable d’inconduite et si l’inconduite a mené à sa suspension et à son congédiementNote de bas de page 1.

[18] À la lumière de la preuve, la division générale a établi que la prestataire avait été suspendue et congédiée parce qu’elle avait refusé de se faire vacciner conformément à la politique mise en œuvre par l’employeur en réponse à la pandémie. Elle avait été informée à plusieurs reprises de la politique mise en place par l’employeur pour protéger la santé et la sécurité de tous ses travailleurs et a eu de nombreuses occasions de s’y conformer.

[19] Le refus de la prestataire était intentionnel. C’était un refus délibéré. La division générale a estimé qu’elle savait que son refus de se conformer à la politique pouvait entraîner une suspension et son congédiement éventuel parce que l’employeur avait refusé ses demandes de mesures d’adaptation. C’était la cause directe de sa suspension et de son congédiement.

[20] La division générale a conclu, à partir de la preuve prépondérante, que la conduite de la prestataire constituait une inconduite.

[21] Il est bien établi qu’une violation délibérée d’une politique d’un employeur est considérée comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 2.

[22] La prestataire soulève en outre l’argument selon lequel la politique de l’employeur était illégale et allait à l’encontre de son contrat d’emploi. Elle maintient que le fait de la forcer à se faire vacciner est une violation de ses droits constitutionnels.

[23] Je ne vois pas en quoi la division générale aurait fait une erreur susceptible de révision lorsqu’elle a expliqué qu’elle devait trancher la question de l’inconduite uniquement d’après les paramètres établis par la Cour d’appel fédérale, qui a défini l’inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 3.

[24] Comme il a été mentionné précédemment, la question dont la division générale était saisie n’était pas de savoir si l’employeur s’est rendu coupable d’une inconduite en congédiant injustement la prestataire, mais plutôt si la prestataire est coupable d’une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi ayant entraîné la perte de son emploi. La majorité des éléments de preuves tendent à prouver que la prestataire a refusé de suivre la politique de l’employeur en réponse à la pandémie, ce qui lui a fait perdre son emploi.

[25] Je suis pleinement conscient que la prestataire peut demander réparation au titre d’une autre loi, si l’existence d’une violation est établieNote de bas de page 4. Cela ne change rien au fait qu’aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission a prouvé selon la prépondérance des probabilités que la prestataire a été suspendue et congédiée en raison d’une inconduite.

[26] Dans sa demande de permission de faire appel, la prestataire n’a relevé aucune erreur révisable comme une erreur de compétence ou un manquement à la justice naturelle de la part de la division générale. Elle n’a pas non plus relevé d’erreur de droit que la division générale aurait commise ni de conclusion de fait erronée qu’elle aurait tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance pour en arriver à sa décision.

[27] Après avoir révisé le dossier d’appel, la décision de la division générale et les arguments que la prestataire a présentés pour appuyer sa demande de permission de faire appel, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[28] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira donc pas de l’avant.

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