Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CW c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 598

Tribunal de la sécurité sociale du Canada

Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Appelante : C. W.
Intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (456760) datée du 19 février 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Linda Bell
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 30 mai 2022
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 3 juin 2022
Numéro de dossier : GE-22-1262

Sur cette page

Décision

[1] J’accueille l’appel. Je suis d’accord avec le prestataire.

[2] L’indemnité tenant lieu de préavis de 17 121,16 $ que le prestataire a reçue est une rémunération. Cette dernière doit être appliquée (répartie) sur ses demandes hebdomadaires d’assurance‑emploi (AE) du 25 août 2019 à la semaine commençant le 1er décembre 2019.

[3] L’indemnité de départ de 27 195,30 $ que le prestataire a reçue est une rémunération. Cette dernière doit être répartie sur ses demandes hebdomadaires d’AE du 3 mai 2020 à la semaine commençant le 13 septembre 2020.

Aperçu

[4] Le prestataire a demandé des prestations d’AE lorsque son employeur a éliminé son emploi à compter du 28 juin 2019. La Commission a initialement établi que la période de prestations prenait effet le 25 août 2019.

[5] L’employeur a délivré un relevé d’emploi (RE) indiquant que le dernier jour payé était le 23 août 2019. Le RE indique également que l’employeur a versé au prestataire une indemnité tenant lieu de préavis de 17 035,82 $. La Commission a réparti cette somme d’argent sur les demandes d’AE du prestataire du 25 août 2019 à la semaine commençant le 1er décembre 2019Footnote 1.

[6] Le 23 septembre 2019, l’employeur a délivré un RE modifié indiquant que le dernier jour payé était le 28 juin 2019. Ce RE indique également que l’indemnité tenant lieu de préavis versée par l’employeur est de 17 121,16 $Footnote 2.

[7] En réponse au RE modifié du 23 septembre 2019, la Commission a informé le prestataire que la date de début de sa période de prestations était le 30 juin 2019. La Commission a également modifié la répartition de l’indemnité tenant lieu de préavis de 17 121,16 $ et établi qu’elle allait du 30 juin 2019 à la semaine commençant le 22 septembre 2019Footnote 3.

[8] L’employeur a délivré un troisième RE le 13 mai 2020Footnote 4. Ce RE modifié indique que le dernier jour payé est le 28 juin 2019. Il indique également qu’une indemnité tenant lieu de préavis de 17 121,16 $ a été versée ainsi qu’une indemnité de départ de 27 195,30 $.

[9] La Commission a établi que l’indemnité de départ avait été versée en raison de la cessation d’emploi le 28 juin 2019. Elle a ajouté l’indemnité de départ de 27 195,30 $ à l’indemnité tenant lieu de préavis de 17 121,16 $ et a réparti le montant total à partir du début de la période de prestations, compte tenu de la rémunération hebdomadaire normale de 1 363 $ du prestataire. La Commission a réparti le total de la rémunération à la cessation d’emploi de 44 316,46 $ du 30 juin 2019 au 15 février 2020Footnote 5. Cette répartition modifiée donne lieu à un trop‑payé de 7 306,00 $ au titre des prestations d’AE.

[10] Le prestataire n’est pas d’accord et interjette appel devant le Tribunal de la sécurité sociale. Il affirme que son indemnité de départ n’a pas été versée en raison de sa mise à pied le 28 juin 2019. Il soutient plutôt que l’employeur a versé l’indemnité de départ en mai 2020, date à laquelle ses droits de rappel ont expiré, conformément à sa convention collective.

Questions que je dois examiner en premier

Documents tardifs

[11] Dans l’intérêt de la justice, j’ai accepté les documents soumis tardivement par le prestataire après l’audience du 30 mai 2022Footnote 6. Voici ce dont j’ai tenu compte pour déterminer si j’accepterais les documents tardifs.

[12] Le Tribunal dispose d’une directive de pratique décrivant la procédure à suivre en ce qui concerne l’envoi de documents justificatifsFootnote 7. Selon cette directive, le membre du Tribunal peut accorder à une partie la permission de soumettre des documents tardifs après l’ouverture de l’audience.

[13] L’appelant a comparu à l’audience du 30 mai 2022, sans représentation. Il a demandé la permission de soumettre des documents supplémentaires portant sur l’expiration de ses droits de rappel et le paiement de son indemnité de départ.

[14] J’ai reçu des documents tardifs de l’appelant le 2 juin 2022Footnote 8. Le Tribunal a fourni des copies à la Commission.

[15] Les documents tardifs de l’appelant sont pertinents relativement aux questions faisant l’objet de l’appel. Je conclus donc que l’acceptation des documents tardifs ne causerait aucun préjudice à l’une ou l’autre partie. Je conclus plutôt qu’il serait dans l’intérêt de la justice d’accepter les documents tardifs.

Questions en litige

[16] L’indemnité de départ de 27 195,30 $ et l’indemnité tenant lieu de préavis de 17 121,16 $ s’entendent‑elles au sens du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement)?

[17] Dans l’affirmative, comment cette rémunération doit‑elle être répartie sur les demandes d’AE du prestataire?

Rémunération

[18] Selon la loi, la totalité du revenu d’emploi est une rémunérationFootnote 9. Tout revenu pécuniaire ou non pécuniaire qui est ou qui « sera » reçu d’un employeur est un revenuFootnote 10.

[19] Les deux parties sont d’accord pour dire que l’indemnité de départ de 27 195,30 $ et l’indemnité tenant lieu de préavis de 17 121,16 $ constituent une rémunération. Effectivement, il s’agit d’un revenu provenant directement de l’emploi du prestataire.

[20] Par conséquent, je considère comme avéré que l’indemnité de départ de 27 195,30 $ et l’indemnité tenant lieu de préavis de 17 121,16 $ correspondent à la définition de rémunération énoncée précédemment.

Répartition

[21] La rémunération versée ou payable à un prestataire est appliquée sur ses demandes et déduite de ses prestations d’AE. C’est ce qu’on appelle la répartition. La rémunération est ainsi répartie afin d’éviter la double indemnisationFootnote 11.

[22] La rémunération est répartie selon sa nature : pourquoi la rémunération a‑t‑elle été versée? La rémunération est répartie en fonction de la rémunération hebdomadaire normale du prestataire.

[23] Certaines dispositions de la loi décrivent la répartition faite à l’égard de la rémunération payée en raison d’une cessation d’emploi temporaire. La rémunération payée en raison d’une cessation d’emploi temporaire est répartie sur un nombre de semaines qui commence par la semaine suivant le dernier jour de travail du prestataire s’il a travaillé une semaine entière au cours de sa dernière semaine de travail. La répartition commence par cette semaine abstraction faite de la date à laquelle la rémunération a été payée ou était payableFootnote 12.

[24] La loi énonce également la manière dont est répartie la rémunération payée en raison d’une cessation d’emploi permanente. La Cour d’appel fédérale a précisé qu’un paiement est effectué « en raison » d’une cessation d’emploi au moment de la cessation d’emploi. Autrement dit, le paiement est « déclenché » par l’écoulement du temps d’emploi, qui survient à la date d’expiration des droits de rappelFootnote 13.

[25] La Commission soutient qu’une fois qu’il est établi que les sommes sont une rémunération payée ou payable en raison d’une mise à pied ou d’une cessation d’emploi, la répartition commence toujours par la semaine de la mise à pied ou de la cessation d’emploi, quelle que soit la raison du paiement. Je ne suis pas d’accord parce que, comme il est indiqué ci‑dessus, la différence entre une mise à pied temporaire et une cessation d’emploi permanente détermine la date de début de la répartition.

[26] Le prestataire confirme que sa rémunération hebdomadaire normale était de 1 363 $. Il n’est pas d’accord avec la répartition de son indemnité de départ par la Commission parce que cette indemnité n’était payable qu’à la date à laquelle il a démissionné et renoncé à ses droits de rappel.

[27] Le prestataire a présenté des éléments de preuve supplémentaires après l’audience. Ces éléments de preuve confirment que l’employeur a versé l’indemnité de départ en raison de l’expiration de ses droits de rappel le 4 mai 2020Footnote 14. Ils comprennent un courriel du syndicat du prestataire daté du 27 septembre 2019, qui énonce en des termes clairs les détails du dernier jour de travail du prestataire ainsi que l’indemnité tenant lieu de préavis et l’indemnité de départ qui sont devenues payables à l’expiration des droits de rappel du prestataire.

[28] Après avoir soigneusement examiné ce qui précède, je considère comme avéré que le prestataire a été mis à pied temporairement le 28 juin 2019. Le prestataire avait droit à une indemnité tenant lieu de préavis au 28 juin 2019 en raison de la mise à pied temporaire. Il s’agissait d’une mise à pied temporaire parce que le prestataire a conservé des droits de rappel auprès de l’employeur.

[29] Dès lors que ses droits de rappel ont expiré, du fait de sa lettre de démission écrite, sa cessation d’emploi est devenue permanente le 4 mai 2020. Cette cessation d’emploi permanente a mis fin aux droits de rappel du prestataire et a « déclenché » le paiement de l’indemnité de départ.

Répartition de l’indemnité tenant lieu de préavis

[30] Après avoir soigneusement examiné la preuve, énoncée ci‑dessus, je conclus que l’indemnité tenant lieu de préavis de 17 121,16 $ était payable au prestataire en raison de sa mise à pied temporaire le 28 juin 2019. L’indemnité tenant lieu de préavis doit donc être répartie sur ses demandes de prestations commençant le 30 juin 2019Footnote 15.

[31] Le prestataire a travaillé une semaine entière de travail se terminant le 28 juin 2019. Sa rémunération hebdomadaire normale était de 1 363 $. Cela signifie donc que la somme de 17 121,16 $ est répartie du 30 juin au 21 septembre 2019 (12 x 1 363,00 $ = 16 356,00 $)Footnote 16. Le solde de 765,16 $ est réparti sur la semaine commençant le 22 septembre 2019.

Répartition de l’indemnité de départ

[32] Comme il est indiqué ci‑dessus, l’indemnité de départ de 27 195,30 $ est devenue payable à l’expiration des droits de rappel du prestataire le 4 mai 2020, conformément à sa convention collective.

[33] C’est l’expiration des droits de rappel, par suite de la démission du prestataire, qui a entraîné la cessation permanente de son emploi. L’expiration des droits de rappel est ce qui a déclenché le paiement de l’indemnité de départFootnote 17. Cela signifie que l’indemnité de départ est répartie à compter de la semaine du 3 mai 2020.

[34] La rémunération hebdomadaire normale du prestataire était de 1 363,00 $. Cela signifie donc que l’indemnité de départ de 27 195,30 $ est répartie du 3 mai 2020 au 12 septembre 2020 (19 x 1 363,00 $ = 25 897,00 $). Le solde de 1 298,30 $ est réparti sur la semaine commençant le 13 septembre 2020.

[35] Selon la feuille de calcul des paiements fournie par la Commission, le prestataire n’a pas touché de prestations d’AE après le 4 janvier 2020Footnote 18. Tel qu’il est indiqué ci‑dessus, la répartition de son indemnité de départ commence quatre mois plus tard, soit le 3 mai 2020. Cela signifie que l’indemnité de départ répartie à compter du 3 mai 2020 jusqu’à la semaine commençant le 13 septembre 2020 n’entraîne pas un trop‑payé de prestations d’AE.

Conclusion

[36] L’appel est accueilli.

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