Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : FT c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 754

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : F. T.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (451136) datée du 25 janvier 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Candace R. Salmon
Mode d’audience : Téléconférence
Date d’audience : Le 15 juin 2022
Personne présente à l’audience : Appelante

Date de la décision : Le 28 février 2022
Numéro de dossier : GE-22-353

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. Le Tribunal est d’accord avec la prestataire.

[2] La demande initiale de prestations parentales de l’assurance-emploi de la prestataire montre qu’elle avait choisi l’option prolongée.

[3] La prestataire affirme qu’elle a fait une erreur et qu’en fait elle voulait des prestations standards. En effet, la prestataire a démontré que son intention était de choisir cette option.

Aperçu

[4] Les personnes qui demandent des prestations parentales de l’assurance-emploi doivent choisir entre deux optionsNote de bas page 1. Dans la demande d’assurance‑emploi, ces options sont appelées « option standard » et « option prolongée ».

[5] L’option standard permet de recevoir un maximum de 35 semaines de prestations au taux normal. L’option prolongée permet de recevoir la même somme totale de prestations, mais à un taux moins élevé et pendant un maximum de 61 semaines. La somme reste donc la même. Elle est seulement répartie sur un nombre de semaines différent.

[6] Une fois que les paiements commencent, les personnes ne peuvent pas changer d’optionNote de bas page 2.

[7] Dans sa demande initiale, la prestataire a choisi les prestations parentales prolongées. Elle a confirmé à l’audience qu’elle a commencé à recevoir des prestations parentales la semaine du 17 septembre 2021. Toutefois, elle voulait plutôt recevoir des prestations standards.

[8] La prestataire affirme qu’elle a toujours voulu recevoir des prestations standards, mais a choisi la mauvaise option par erreur dans sa demande initiale.

[9] La Commission de l’assurance-emploi du Canada affirme que la prestataire avait fait son choix et qu’il était trop tard pour changer d’option. En effet, elle avait déjà commencé à recevoir des prestations parentales.

[10] La prestataire n’est pas d’accord. Elle affirme qu’il est possible qu’elle ait choisi de recevoir 52 semaines de prestations parentales prolongées, mais elle fait valoir qu’elle l’a fait seulement parce qu’elle avait eu de la difficulté à comprendre le formulaire de demande de la Commission. Elle ajoute qu’elle voulait manifestement un an de congé, parce qu’elle a indiqué une date de retour au travail dans la demande. Cette date montre qu’elle prévoyait de s’absenter du travail pendant un an.

Question en litige

[11] Quel type de prestations parentales la prestataire voulait-elle vraiment recevoir lorsqu’elle a fait son choix dans la demande initiale?

Analyse

[12] Les personnes qui demandent des prestations parentales de l’assurance-emploi doivent choisir entre l’option standard et l’option prolongéeNote de bas page 3. La loi dit qu’à partir du moment où la Commission commence à verser des prestations parentales, les prestataires ne peuvent plus changer d’optionNote de bas page 4.

[13] Pour savoir quel type de prestations parentales la prestataire voulait vraiment choisir quand elle a rempli sa demande initiale, il faut examiner les éléments de preuve liés à ce choix. Autrement dit, l’option que la prestataire a choisie en remplissant sa demande est importante, mais ce n’est pas la seule chose dont il faut tenir compte pour décider quel choix a été fait. À titre d’exemple, il peut aussi être nécessaire de tenir compte du nombre de semaines de prestations que la prestataire voulait recevoir ou de la longueur du congé qu’elle prévoyait de prendre.

[14] Le Tribunal a rendu plusieurs décisions où il a jugé que tous les éléments de preuve concernant le choix d’une personne sont importants pour décider de son véritable choix lorsqu’elle a rempli sa demande initialeNote de bas page 5. Je ne suis pas liée par ces décisions. Autrement dit, je n’ai pas l’obligation de m’en servir pour baser ma décision. Cependant, je les trouve convaincantes et je vais les suivre.

Le choix de la prestataire dans la demande initiale

[15] Ce qui est important, c’est l’intention de la prestataire au moment de la demande initiale. Quand elle a rempli sa demande initiale, avait-elle l’intention de choisir l’option standard ou l’option prolongée?

Les arguments des parties

[16] La Commission affirme que l’option que la prestataire a choisie dans la demande initiale nous dit quelle option elle voulait. Selon la Commission, il est maintenant trop tard pour changer d’option. La Commission note également que les renseignements relatifs à la demande étaient accessibles sur le portail en ligne Mon dossier Service Canada.

[17] La prestataire a déclaré qu’elle a lu le formulaire de demande, et qu’elle pensait qu’elle comprenait les différents types de prestations. Elle a signalé que dans son formulaire de demande, elle avait indiqué que son dernier jour travaillé était le 27 mai 2021 et que la date prévue de son retour au travail était le 30 mai 2022.

[18] La prestataire a convenu qu’elle a reçu son premier versement de prestations parentales aux alentours du 17 septembre 2021. Elle a affirmé qu’elle a attendu de voir si le taux moins élevé était une erreur, mais qu’après avoir reçu plusieurs paiements au taux inférieur, elle a communiqué avec la Commission. Elle a téléphoné le 21 octobre 2021 pour demander pourquoi ses prestations avaient diminué. La prestataire a déclaré qu’une fois que l’agente de la Commission a expliqué ce qui distingue les prestations standards et les prestations prolongées, elle a demandé de passer aux prestations standards, parce que c’était le type de prestation qu’elle avait l’intention de choisir. Elle a ajouté qu’elle s’est connectée au portail Mon dossier Service Canada, mais qu’elle ne se souvenait pas avoir vu de renseignements concernant une modification à son taux de prestations.

[19] La prestataire soutient qu’elle n’a pas su faire la différence entre les prestations parentales et les prestations de maternité, et que même si elle pensait la comprendre au moment de sa demande initiale, elle se rend maintenant compte que ce n’était pas le cas parce qu’elle a fait l’erreur de demander 52 semaines de prestations prolongées, alors qu’elle voulait seulement 52 semaines de prestations en tout.

[20] J’estime que la prestataire avait l’intention de choisir les prestations parentales standards. Elle a rempli la demande de prestations d’assurance-emploi elle-même. Au moment de sa demande, elle a fourni les dates de son absence prévue du travail. Les dates qu’elle a données confirment qu’elle avait l’intention de s’absenter du travail pendant un an. Elle a choisi de recevoir 52 semaines de prestations parentales prolongées. Lorsqu’elle a commencé à recevoir des prestations de maternité, elle recevait 55 % de sa rémunération hebdomadaire assurable. Elle s’attendait à recevoir cette somme durant sa période de congé de maternité et de congé parental. Les prestations parentales prolongées sont versées au taux de 33 % de la rémunération hebdomadaire assurable seulement. Lorsque ses prestations de maternité ont pris fin, son taux a été réduit aux 33 % prévus pour les prestations parentales prolongées.

[21] Lorsque la prestataire a commencé à recevoir un taux de prestations moins élevé, elle a communiqué avec la commission pour demander pourquoi le taux de prestations avait changé. Quand on lui a expliqué les types de prestations, elle a réalisé qu’elle avait fait une erreur. Elle a immédiatement demandé de passer aux prestations standards. L’agente de la Commission lui a dit qu’il était trop tard pour changer d’option, parce qu’elle avait déjà reçu des prestations parentales.

[22] La seule preuve indiquant que la prestataire avait l’intention de choisir les prestations prolongées est son choix de ce bouton d’option dans le formulaire de demande. Elle a déclaré qu’elle avait l’intention de prendre un an de congé du travail, et qu’elle pensait qu’elle devait choisir les prestations prolongées pour pouvoir choisir 52 semaines.

[23] Le formulaire demande à la partie prestataire si elle veut recevoir des prestations parentales tout de suite après les prestations de maternité. La prestataire a sélectionné « oui » dans le formulaire. Je lui ai demandé pourquoi elle avait choisi cette option si elle ne comprenait pas la différence entre les prestations de maternité et les prestations parentales. Elle a déclaré qu’elle ne comprenait pas, mais que la seule autre option était « Non, je veux seulement toucher jusqu’à 15 semaines de prestations de maternité ». Elle savait que cela ne suffirait pas à son année de congé. Elle a affirmé qu’elle a lu la demande et pensait qu’elle faisait le bon choix pour assurer un an de congé.

Quelle option de prestations la prestataire voulait-elle vraiment recevoir lorsqu’elle a fait son choix?

[24] J’ai déjà conclu que la prestataire avait prouvé qu’elle avait l’intention de choisir les prestations parentales standards dans sa demande initiale. Elle a fourni la date de son retour au travail dans la demande, soit un an après la date à laquelle elle a cessé de travailler. Elle a également choisi 52 semaines de prestations prolongées, qui est le nombre correspondant à un an. Puisque la prestataire ne s’est pas rendu compte que les prestations de maternité étaient une prestation distincte versée jusqu’à 15 semaines, elle ignorait qu’elle devait déduire ces 15 semaines de prestations des 52 semaines de congé désirées.

[25] Le formulaire de demande de la Commission ne dit pas que le congé de maternité est une période allant jusqu’à 15 semaines qui est distincte de la période de congé parental. La question demandant si les parties prestataires veulent toucher des prestations parentales tout de suite après les prestations de maternité y fait allusion, parce que la réponse négative dit « Non, je veux seulement toucher jusqu’à 15 semaines de prestations de maternité ». J’estime que cela ne dit pas clairement que les prestations de maternité sont un type de prestations distinct, et que les semaines de congé de maternité ne devraient pas être comptées dans le calcul du nombre de semaines de prestations parentales qu’une partie prestataire veut demander.

[26] Je suis d’avis que la prestataire n’a pas compris que les prestations parentales et les prestations de maternité étaient des prestations distinctes. Lorsqu’elle a commencé à recevoir des prestations de maternité au taux 55 %, elle ignorait devoir communiquer avec la Commission et poser des questions parce qu’elle pensait que sa période de prestations avait été établie correctement et qu’elle continuerait à recevoir cette somme d’argent. J’estime qu’il ne s’agit pas ici d’une prestataire qui manque de connaissances pour répondre à des questions sans équivoque, car la différence entre les prestations de maternité et les prestations parentales et le rapport entre les deux prestations n’est pas sans ambiguïté. De plus, la prestataire a lu la demande et croyait qu’elle la remplissait correctement au moment de sa demande initiale.

[27] J’estime que la prestataire s’est fiée à des renseignements erronés de la Commission lorsqu’elle a choisi les prestations prolongées dans le formulaire de demande. Plus précisément, la prestataire a fondé ses réponses sur le formulaire de demande de la Commission, auquel il manquait des renseignements critiques et à jour. C’est pourquoi je conclus qu’elle avait choisi de recevoir des prestations parentales standards. Si une personne est induite en erreur, comme la prestataire, et peut établir qu’elle s’est fiée à des renseignements erronés de la Commission au cours du processus de demande, certains recours juridiques s’offrent à elleNote de bas page 6.

Autres commentaires

[28] Bien que chaque affaire soit tranchée objectivement sur le fond, je dois ajouter que j’en ai traité plus de 35 de cette nature précise en 2021, et c’est sans compter les autres membres du Tribunal qui ont abordé la même question. Si la demande de prestations de maternité et de prestations parentales de l’assurance-emploi était claire et sans équivoque, il n’y aurait pas autant de dossiers ayant des scénarios factuels semblables.

[29] Bien que la Commission n’ait aucune obligation de vérification des renseignements contenus dans les formulaires de prestations parentales, et je suis consciente de la charge de travail avec laquelle elle compose déjà quotidiennement, il est évident que quelque chose cloche dans ce formulaire de demande. Lorsqu’une personne fournit des renseignements concernant son retour au travail montrant qu’elle prévoit de prendre congé pendant un an, et qu’elle choisit 52 semaines de prestations parentales en plus des 15 semaines de prestations de maternité, il y a manifestement un malentendu ou une erreur qui se produit. Même si une partie prestataire peut demander cette structure de prestations, elle choisirait alors de recevoir des prestations pendant une période plus longue que son congé. Certes, je ne peux pas ordonner à la Commission de prendre une mesure particulière, mais je l’invite à passer en revue l’ensemble des affaires similaires et à envisager des options pour corriger les incohérences et clarifier cette situation récurrente.

Conclusion

[30] La prestataire a choisi les prestations parentales standards.

[31] Cela signifie que l’appel est accueilli.

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