Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : BJ c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 752

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : B. J.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (451157) datée du 27 janvier 2022 rendue par la Commission de l’assurance emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 13 avril 2022
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 5 mai 2022
Numéro de dossier : GE-22-760

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était fondé (c’est-à-dire qu’il avait une raison acceptable selon la loi) à prendre volontairement congé.

Aperçu

[3] Le prestataire travaille comme assistant en réadaptation dans un hôpital.

[4] Il a pris congé pour terminer son diplôme en kinésiologie.

[5] Son programme d’études était à temps plein, donc il ne pouvait pas continuer à travailler à temps plein tout en le suivant. Il a demandé à l’université de lui permettre de suivre ses cours en ligne, mais on lui a répondu que ce n’était pas possible.

[6] Le prestataire a donc pris congé et s’est inscrit au bassin des employés occasionnels pour pouvoir travailler en dehors de ses heures de cours.

[7] Le prestataire affirme qu’il a appelé la Commission avant de commencer programme universitaire et qu’on lui a dit qu’il pourrait recevoir des prestations tout en le terminant. Il dit que l’assurance qu’il devait recevoir des prestations est la raison pour laquelle il a pris congé.

[8] La Commission soutient que le prestataire n’était pas fondé à prendre congé, car il avait d’autres solutions raisonnables dont il n’a pas profité. Elle l’a donc déclaré inadmissible au bénéfice des prestations.

Question que je dois examiner en premier

[9] Le prestataire a affirmé catégoriquement qu’il avait reçu de la Commission l’approbation de toucher des prestations pendant qu’il terminait son programme.

[10] Il n’y avait pas d’information directe dans le dossier à savoir si c’était le cas, alors j’ai demandé à la Commission plus d’informations pour clarifier si le prestataire avait reçu l’approbation de toucher des prestations pendant ses études universitaires.

[11] La Commission a répondu à mes questionsNote de bas de page 1 et ses réponses détaillées ont permis de clarifier cette question.

[12] J’ai tenu compte de ces informations pour rendre ma décision, car elles sont directement liées à l’argument principal du prestataire concernant la raison pour laquelle il a pris congé.

Question en litige

[13] Le prestataire était-il fondé à prendre volontairement congé?

Analyse

[14] La loi dit qu’une partie prestataire qui prend congé sans justification n’est pas admissible au bénéfice des prestations si ce congé a été autorisé par l’employeur avant ou après qu’il ne débute et si l’employeur et la partie prestataire ont convenu d’une date de reprise d’emploiNote de bas de page 2.

[15] Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de prendre congé pour prouver qu’on est fondé à le faire.

[16] La loi explique ce qu’on entend par une personne « est fondée à » faire quelque chose. Elle dit qu’une personne est fondée à prendre congé si celui-ci était la seule solution raisonnable dans son cas. La loi précise qu’il faut tenir compte de toutes les circonstances au moment où la partie prestataire a pris congéNote de bas de page 3.

[17] Le prestataire est responsable de prouver qu’il était fondé à prendre congéNote de bas de page 4. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que prendre congé était la seule solution raisonnable dans son cas.

[18] Le prestataire affirme qu’il ne lui était pas possible de terminer son diplôme tout en travaillant à temps plein, car ses cours universitaires entraient en conflit avec son horaire de travail.

[19] Il a demandé à l’université s’il pouvait suivre ses cours en ligne, mais on lui a répondu qu’on ne pouvait pas modifier les cours de cette façon.

[20] Le prestataire dit avoir parlé à la Commission à la mi-août 2021, avant de prendre congé, pour voir s’il pouvait obtenir des prestations pendant ses études universitaires parce qu’il a besoin d’un revenu pour couvrir ses dépenses.

[21] Il soutient que la Commission lui a dit qu’il pouvait obtenir des prestations pendant qu’il fréquentait l’université dans le cadre du programme d’apprentissage continu.

[22] Le prestataire s’est ensuite rendu en personne dans un Centre Service Canada pour leur parler de cette question et on lui a dit qu’il n’avait qu’à remplir un formulaire et le soumettre pour qu’on puisse ensuite passer au processus d’approbation.

[23] Le prestataire affirme qu’il a rempli et présenté sa demande et qu’il a reçu l’approbation de toucher des prestations pendant ses études universitaires, comme on le lui avait dit.

[24] Il soutient que c’est en raison de cette assurance de la Commission qu’il a pris un congé, car il ne pouvait pas survivre sans un revenu quelconque.

[25] Le prestataire dit qu’il s’est également inscrit au bassin des employés occasionnels au travail afin de pouvoir prendre des quarts de travail en dehors de ses heures de cours.

[26] La Commission soutient qu’elle a autorisé le prestataire, dans le cadre du programme d’apprentissage continu, à fréquenter l’université du 30 août 2021 au 29 avril 2022, mais que c’était une erreurNote de bas de page 5.

[27] Elle affirme également qu’elle n’a approuvé les études du prestataire que le 21 septembre 2021, soit après qu’elles avaient déjà commencéNote de bas de page 6.

[28] La Commission dit que quoi qu’il en soit, le prestataire est considéré comme disponible pour travailler pendant ses études. Il n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations parce qu’il n’est pas disponible pour travailler parce qu’elle ne modifiera pas l’approbation qu’elle lui a donnée à ce stade-ci, mais cela ne veut pas dire qu’il était fondé à prendre congé.

[29] La Commission soutient également que le prestataire n’était pas fondé à prendre congé pour suivre son programme simplement parce qu’elle lui a donné l’approbation de toucher des prestations pendant ses études, à moins qu’une autorité désignée ne lui ait donné l’autorisation de le faireNote de bas de page 7.

[30] La Commission fait valoir que même si c’est elle qui a donné au prestataire l’approbation de toucher des prestations pendant ses études, elle n’autorise ni ne conseille à quiconque de quitter son emploi pour suivre un cours. Cette autorisation doit être accordée par une autorité provinciale, puis présentée à la Commission qui prendra alors une décision.

[31] La Commission affirme que le prestataire avait la solution raisonnable de continuer à travailler tout en suivant ses cours lorsqu’il ne travaillait pas, dans la mesure où il était possible pour lui de le faire, ou peut-être pendant une période de mise à pied.

[32] Après avoir examiné les arguments des deux parties, j’estime qu’il y a quelques sous-questions qu’il faut régler avant de passer à la question principale de savoir si le prestataire était fondé à prendre congé.

[33] La première sous-question consiste à savoir si le prestataire a besoin ou non d’une autorisation quelconque d’une autorité désignée pour prendre congé, comme la Commission l’a fait valoir.

[34] La deuxième sous-question est celle de savoir quand le prestataire a reçu l’approbation de toucher des prestations pendant ses études, puisqu’il y a un profond désaccord entre les parties sur le moment où cela s’est produit.

[35] Il s’agit d’une question importante qui concerne le moment précis où le prestataire a pris congé. Selon la jurisprudence, une personne qui choisit de suivre un cours sans y avoir été dirigée fait un choix contraire aux principes mêmes qui sont à la base du régime d’assurance-emploiNote de bas de page 8. Donc, si le prestataire a été dirigé vers son programme avant de prendre congé, la jurisprudence ne s’applique pas et il pourrait avoir été fondé à prendre congé. Cependant, s’il n’a pas été dirigé vers son programme et qu’il a décidé de prendre congé de toute façon, la jurisprudence indique clairement qu’il n’était pas fondé à le faire.

Recommandation de prendre congé

[36] En ce qui concerne la question de savoir si le prestataire a reçu l’autorisation de prendre congé pour fréquenter l’université, il arrive parfois que les programmes vers lesquels une personne est dirigée lui remettent une lettre ou une autorisation indiquant qu’elle peut quitter son emploi pour poursuivre ses études. La Commission accepte souvent cette lettre ou cette autorisation comme preuve que la personne était fondée à prendre congé.

[37] Toutefois, il s’agit seulement d’une pratique de la Commission. Ce n’est pas la loi, et je dois appliquer la loi. En d’autres termes, la question de savoir si le prestataire était fondé à prendre congé ne dépend pas de l’existence d’une lettre ou d’une autorisation disant qu’il pouvait prendre congé pour étudier. Je dois plutôt examiner toutes les circonstances et décider si prendre congé lorsqu’il la fait constituait la seule solution raisonnable dans son cas.

À quel moment le prestataire a-t-il reçu une approbation de toucher des prestations pendant ses études?

[38] Le prestataire soutient qu’il a parlé à la Commission à la mi-août 2021, avant de prendre congé, et qu’on lui a dit qu’il pouvait obtenir des prestations pendant ses études universitaires dans le cadre du programme d’apprentissage continu.

[39] Il affirme qu’il s’est ensuite rendu en personne dans un Centre Service Canada pour leur parler de cette question et qu’on lui a dit qu’il devait remplir un formulaire et le soumettre.

[40] Le prestataire dit qu’il a rempli et présenté sa demande en septembre 2021 et qu’il a reçu l’approbation de toucher des prestations pendant ses études universitaires, comme on lui avait dit.

[41] La Commission affirme que ce n’est que le 21 septembre 2021, après le début de ses études et après qu’il a quitté son emploi, que le prestataire a reçu l’approbation de toucher des prestations pendant ses études.

[42] Je suis d’accord l’argument de la Commission selon lequel ce n’est que le 21 septembre 2021 que le prestataire a reçu l’approbation de toucher des prestations pendant ses études.

[43] Bien que j’accepte que le prestataire ait appelé la Commission en août 2021, avant le début de ses études universitaires, et qu’un agent lui ait dit qu’il pouvait obtenir des prestations pendant ses études dans le cadre du programme d’apprentissage continu, cela ne signifie pas que sa demande avait été approuvée à ce moment-là.

[44] Comme le prestataire l’a déclaré, il n’a rempli sa demande pour le programme qu’en septembre 2021. Il est donc clair que sa demande de prestations n’était pas approuvée lorsqu’il a appelé en août 2021.

[45] J’estime que l’agent de la Commission a dit au prestataire qu’il pouvait obtenir des prestations dans le cadre du programme d’apprentissage continu. Il ne s’agissait pas d’une approbation ou d’une garantie.

[46] Ce n’est pas parce qu’un agent de la Commission a donné au prestataire une piste à explorer qu’il s’agissait d’une certitude.

[47] Je juge que ce n’est que le 21 septembre 2021, lorsque le prestataire a été informé qu’une décision avait été prise et qu’il avait reçu l’approbation de toucher des prestations pendant ses études, qu’il pouvait être certain de recevoir des prestations pendant ses étudesNote de bas de page 9.

Le prestataire était-il fondé à prendre congé?

[48] Non, le prestataire n’était pas fondé à prendre congé.

[49] La jurisprudence mentionne clairement qu’une personne qui prend congé simplement pour suivre un cours sans y avoir été dirigée n’est pas fondée à le faireNote de bas de page 10.

[50] La Commission n’a autorisé le prestataire à étudier que le 21 septembre 2021, soit après qu'il a quitté son emploi, car son relevé d’emploi indique que son dernier jour de travail était le 7 septembre 2021Note de bas de page 11, et je ne peux prendre en considération que les circonstances qui existaient au moment où le prestataire a pris congéNote de bas de page 12.

[51] Le prestataire a choisi de prendre congé uniquement pour terminer son diplôme universitaire. La jurisprudence selon laquelle une personne qui quitte son emploi simplement pour suivre un cours vers lequel elle n’a pas été dirigée n’est pas fondée à le faire s’applique donc au prestataireNote de bas de page 13. Cela signifie que le prestataire n’était pas fondé à prendre congé.

[52] Je comprends que le prestataire peut avoir de bonnes raisons d’avoir pris congé pour terminer son diplôme universitaire. Il s’agit cependant d’un choix personnel contraire aux principes mêmes qui sont à la base du régime d’assurance-emploi parce qu’il avait la solution raisonnable de continuer à travailler pour son employeur et de chercher à suivre son programmer universitaire d’une façon qui ne le plaçait pas dans une situation de chômageNote de bas de page 14.

Conclusion

[53] L’appel est rejeté. J’estime que le prestataire n’a pas démontré qu’il était fondé à prendre congé lorsqu’il l’a fait. L’inadmissibilité aux prestations est maintenue.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.