Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 604

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Appelante : C. P.
Intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (457881) datée du 17 mars 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Angela Ryan Bourgeois
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 25 mai 2022
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 30 mai 2022
Numéro de dossier : GE-22-1027

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Décision

[1] L’appel est accueilli en partie. L’appelant (le prestataire) a prouvé qu’il était disponible au 4 février 2022.

Aperçu

[2] Le prestataire est arrivé au Canada en avril 2021 en provenance de la Jamaïque. Il travaille en vertu d’un permis de travail pour un emballeur de poissons à Cap‑Pelé, au Nouveau‑Brunswick. L’employeur a mis le prestataire à pied en janvier 2022. Il l’a rappelé au travail en avril 2022.

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a décidé que le prestataire était inadmissible à des prestations régulières d’assurance‑emploi (AE) à compter du 3 janvier 2022 parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. Un prestataire doit être disponible pour travailler pour recevoir des prestations régulières d’AE. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie qu’un prestataire doit chercher un emploi.

[4] Je dois décider si le prestataire a prouvé qu’il était disponible pour travailler. Le prestataire doit faire cette preuve selon la prépondérance des probabilités, c’est-à-dire qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il était disponible pour travailler.

[5] La Commission affirme que le prestataire n’était pas disponible parce qu’il n’a fourni aucune preuve de recherche d’emploi lorsqu’on lui en a fait la demande.

[6] Le prestataire dit qu’il ne s’est rendu compte qu’il devait chercher un emploi que lorsque la Commission l’a appelé.

Question en litige

[7] Le prestataire était‑il disponible pour travailler au 3 janvier 2022Note de bas page 1?

Analyse

[8] Deux dispositions différentes de la loi exigent que les prestataires démontrent qu’ils sont disponibles pour travailler. La Commission a décidé que le prestataire était inadmissible en application des deux dispositions. Il doit donc satisfaire aux critères des deux dispositions pour obtenir des prestations.

[9] Premièrement, la Loi sur l’assurance‑emploi (Loi) prévoit qu’un prestataire doit prouver qu’il fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas page 2. Le Règlement sur l’assurance‑emploi (Règlement) énonce des critères qui contribuent à expliquer ce que sont des « démarches habituelles et raisonnables »Note de bas page 3. Je vais examiner ces critères ci‑dessous.

[10] La Loi dispose qu’un prestataire doit prouver qu’il est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais qu’il est incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas page 4. La jurisprudence énumère trois éléments qu’un prestataire doit prouver pour démontrer qu’il est « disponible » en ce sensNote de bas page 5. Je vais examiner ces facteurs ci‑après.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[11] La loi énonce les critères dont je dois tenir compte pour décider si les démarches du prestataire étaient habituelles et raisonnablesNote de bas page 6. Je dois déterminer si ses démarches ont été soutenues et si elles étaient orientées vers l’obtention d’un emploi convenable. Autrement dit, le prestataire doit avoir continué de chercher un emploi convenable.

[12] Je dois également tenir compte des efforts du prestataire pour trouver un emploi. Le Règlement dresse une liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte. Voici quelques exemples de ces activitésNote de bas page 7 :

  • l’évaluation des possibilités d’emploi,
  • l’inscription à des outils de recherche d’emploi ou auprès de banques d’emplois électroniques ou d’agence de placement.

[13] La Commission affirme que le prestataire n’a pas prouvé qu’il en a fait assez pour trouver un emploi parce qu’il n’a fourni aucune preuve de recherche d’emploi.

[14] Le prestataire affirme qu’avant que la Commission l’appelle, il ne s’est pas rendu compte qu’il pouvait chercher un autre emploi pendant qu’il était mis à pied. Après avoir parlé à la Commission, il a parlé à son employeur, qui lui a donné plus de renseignements.

[15] Je conclus que le prestataire a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un autre emploi convenable à compter du 4 février 2022, mais pas avant cette date. J’explique pourquoi dans les paragraphes suivants.

[16] Le prestataire ne savait pas qu’il pouvait occuper un autre emploi en attendant que l’employeur le rappelle pour travailler. Cela est compréhensible étant donné que le prestataire est au Canada muni d’un permis de travail pour la première fois. Mais comme il ne savait pas qu’il pouvait travailler, il est plus probable qu’improbable qu’il ne cherchait pas d’emploi. La personne qui ne cherche pas d’emploi ne peut pas faire de démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi.

[17] Je conclus que le prestataire a commencé à chercher un emploi le 4 février 2022, après que la Commission lui eut dit qu’il devait chercher un autre emploi. Le prestataire croyait que la Commission l’avait appelé pour la première fois en janvier 2022, mais lorsque j’ai souligné que la première communication consignée de la Commission avec lui remontait à février 2022, il n’était pas certain de la date. Le dossier indique que la Commission a appelé le prestataire pour la première fois le 3 février 2022. Le prestataire a déclaré qu’il cherchait un emploi dans sa demande de révision datée du 7 février 2022.

[18] Il a cherché du travail en appelant des employeurs de l’endroit, en s’inscrivant auprès de banques d’emplois et en faisant du réseautage avec des amis et des membres de sa famille. Plus particulièrement :

  • Il a appelé la maison de soins infirmiers pour savoir s’il y avait des postes vacants;
  • Il a appelé une usine de transformation du hareng de l’endroit;
  • Il s’est inscrit à Jooble en ligne;
  • Il a consulté des banques d’emplois électroniques et reçu des courriels au sujet de postes vacants;
  • Il a posé des questions à ses amis et à sa famille au sujet de postes vacants possibles (par exemple, il s’est informé auprès de son frère au sujet d’un emploi dans l’entreprise de construction pour laquelle il travaille et il a appelé son ami pour lui parler d’un emploi chez Tim Hortons);
  • Il a posé des questions sur les postes vacants chez Walmart à Moncton.

[19] Je conclus que les efforts du prestataire démontrent qu’il cherchait un emploi convenable et que ses efforts ont été soutenus après qu’il eut commencé à chercher du travail.

[20] Pour ces motifs, je conclus qu’il a prouvé que ses démarches pour trouver un emploi étaient raisonnables et habituelles au 4 février 2022.

Capable de travailler et disponible à cette fin

[21] La jurisprudence énonce trois facteurs que je dois prendre en considération pour décider si le prestataire était capable de travailler et disponible à cette fin, mais qu’il a été incapable d’obtenir un emploi convenable. Le prestataire doit prouver les trois éléments suivantsNote de bas page 8 :

  1. a) Le prestataire avait le désir de retourner au travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert.
  2. b) Il a fait des démarches pour trouver un emploi convenable.
  3. c) Il n’a pas établi de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment (en d’autres termes, trop) ses chances de retourner au travail.

[22] Lorsque j’examine chacun de ces facteurs, je dois me pencher sur l’attitude et la conduite du prestataireNote de bas page 9.

Désir de reprendre le travail

[23] Le prestataire a démontré qu’il voulait retourner au travail dès qu’un emploi convenable serait disponible.

[24] Le prestataire a trois enfants en Jamaïque qui comptent sur son soutien financier.

[25] Le besoin financier à lui seul ne démontre pas le désir de retourner au travail, mais il ajoute de la crédibilité à ses déclarations selon lesquelles il voulait travailler pour subvenir aux besoins de sa famille.

[26] Il a aussi démontré son désir de retourner au travail en renouvelant rapidement son permis de travail et en retournant au travail lorsqu’il a été rappelé.

Efforts pour trouver un emploi convenable

[27] Le prestataire n’a fait aucun effort pour trouver un emploi convenable avant le 4 février 2022, soit le jour suivant celui où il a appris qu’il pouvait travailler en attendant d’être rappelé par son employeur.

[28] Les efforts du prestataire pour trouver un nouvel emploi ont consisté notamment à chercher un emploi en ville, à parler avec des amis et des membres de sa famille, à chercher un emploi en ligne et à s’inscrire auprès de banques d’emplois.

[29] Le prestataire a besoin d’un permis de travail pour travailler au Canada. Il a un permis de travail fermé. Cela signifie qu’il ne peut travailler que pour l’employeur dont le nom figure sur son permis de travail. Pour travailler pour un autre employeur, il devrait demander un permis de travail différent.

[30] Dans la situation du prestataire, ses démarches de recherche d’emploi suffisent à satisfaire à ce deuxième facteur. Pour maximiser ses chances de retourner au travail le plus tôt possible, le prestataire devait maintenir sa relation avec l’employeur dont le nom figure sur son permis de travail, renouveler son permis de travail et chercher un autre travail entre‑temps. C’est ce qu’il a fait.

[31] Je suis convaincue que le prestataire n’aurait pu raisonnablement commencer un autre emploi avant d’être rappelé par son employeur. Il lui a fallu plus de trois mois pour obtenir le renouvellement de son permis de travail. Il est raisonnable de présumer qu’un nouveau permis pour un nouvel employeur prendrait encore plus de temps.

Limiter indûment les chances de retourner au travail

[32] Le prestataire n’avait pas de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment ses chances de retourner au travail.

[33] Ce que le prestataire peut faire avec son permis de travail est une question de droit et non une condition personnelle. Il ne peut demander un permis de travail pour un autre employeur tant qu’il ne trouve pas un autre employeur disposé à l’embaucher.

Le prestataire était-il capable de travailler et disponible à cette fin?

[34] D’après mes conclusions relatives aux trois facteurs, le prestataire a démontré qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin, mais qu’il était incapable d’obtenir un emploi convenable au 4 février 2022. Il n’était pas disponible avant cette date parce qu’il a commencé à chercher un emploi seulement après que la Commission lui eut dit qu’il pouvait travailler pendant sa mise à pied.

Conclusion

[35] Le prestataire a démontré qu’il était disponible pour travailler au sens de la loi au 4 février 2022. L’inadmissibilité prend donc fin le 4 février 2022. Elle est cependant maintenue du 3 janvier 2022 au 3 février 2022.

[36] L’appel est accueilli en partie.

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