Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : LB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 776

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de permission d’en appeler

Partie demanderesse : L. B.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 31 mai 2022
(GE-22-982)

Membre du Tribunal : Neil Nawaz
Date de la décision : Le 17 août 2022
Numéro de dossier : AD-22-396

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Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La prestataire travaillait en tant que commis aux comptes créditeurs pour une entreprise de fabrication. Le 18 novembre 2020, elle a quitté son emploi et a demandé des prestations d’assurance-emploi. Elle a déclaré qu’elle n’avait pas d’autre choix que de quitter son emploi pour pouvoir rester à la maison et s’occuper de sa fille, que l’école renvoyait fréquemment à la maison en raison d’éclosions de cas de COVID-19.

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons de la prestataire pour avoir quitté son emploi. Elle a décidé que la prestataire avait volontairement quitté son emploi sans justification et qu’elle n’avait donc pas à lui verser de prestations d’assurance-emploi. La Commission a maintenu sa décision initiale après révision. La prestataire a donc fait appel de la décision de révision devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[4] La division générale a conclu que la prestataire avait quitté volontairement son emploi sans justification. Elle a jugé que la prestataire avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi :

  • Elle aurait pu se conformer à la demande de son employeur de fournir une note de l’école de son enfant confirmant les éclosions et les fermetures liées à la COVID-19;
  • Elle aurait pu rencontrer son employeur pour discuter d’un plan d’action;
  • Elle aurait pu demander congé;
  • Elle aurait pu obtenir un nouvel emploi avant de quitter son poste.

[5] La prestataire demande maintenant la permission de faire appel de la décision de la division générale. Elle soutient que la division générale a fondé sa décision sur des preuves documentaires et n’a pas tenu compte de son témoignage concernant les exigences déraisonnables de son ancien employeur. Elle insiste sur le fait qu’elle n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi. Elle affirme avoir immédiatement transmis à son employeur le seul document que l’école de son enfant a mis à sa disposition : une directive générique sur la pandémie émise par le gouvernement. Elle soutient que son employeur n’exigeait rien de plus précis que cela de la part des autres parents. 

[6] J’ai décidé de refuser à la prestataire la permission de faire appel parce que son appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[7] Il existe quatre moyens d’appel devant la division d’appel. Une partie prestataire doit démontrer que la division générale a commis l’une des erreurs suivantes :

  • Elle a agi de façon inéquitable;
  • Elle a excédé ses pouvoirs ou a refusé de les utiliser;
  • Elle a mal appliqué la loi;
  • Elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas de page 1.

Un appel peut seulement être instruit si la division d’appel accorde d’abord la permission de faire appelNote de bas de page 2. À ce stade, la division d’appel doit être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 3. Il s’agit d’un critère relativement facile à satisfaire, et cela signifie qu’une partie prestataire doit présenter au moins un argument défendableNote de bas de page 4.

[8] Je devais décider si l’un des motifs d’appel de la prestataire relevait d’un ou de plusieurs des moyens d’appel susmentionnés et, dans l’affirmative, s’il soulevait un argument défendable.

Analyse

[9] Les arguments que la prestataire soumet à la division d’appel sont essentiellement les mêmes que celles qu’elle a présentées à la division générale. Elle insiste sur le fait qu’elle n’a eu d’autre choix que de démissionner de son poste en raison de la pression croissante exercée par son employeur. Elle affirme avoir fait tout ce qui était raisonnablement possible pour montrer à son employeur que sa fille était régulièrement renvoyée à la maison en raison de précautions liées à la COVID-19. Elle affirme que son employeur lui a injustement imposé des normes plus strictes qu’aux autres employés ayant des enfants.

[10] J’estime qu’il n’existe pas de cause défendable relativement à ces observations. Premièrement, la division d’appel ne réentend pas les preuves qui ont déjà été entendues par la division générale. Deuxièmement, la division générale est présumée avoir tenu compte de l’ensemble de la preuve dont elle disposait.

La division d’appel ne tient pas compte de nouveaux éléments de preuve

[11] Pour qu’une personne puisse avoir gain de cause à la division d’appel, elle ne doit pas seulement être en désaccord avec la décision de la division générale. La prestataire doit également relever des erreurs précises que la division générale a commises en rendant sa décision et expliquer comment ces erreurs, le cas échéant, correspondent à l’un ou plusieurs des quatre moyens d’appel prévus par la loi. Un appel devant la division d’appel n’est pas censé être une [traduction] « reprise » de l’audience devant la division générale. Il ne suffit pas de présenter les mêmes éléments de preuve et arguments à la division d’appel dans l’espoir qu’elle rende une décision différente.

La division générale est présumée avoir pris en considération l’ensemble de la preuve

[12] L’une des tâches de la division générale est de tirer des conclusions de fait. Pour ce faire, elle est présumée avoir examiné tous les éléments de preuve dont elle disposaitNote de bas de page 5. Dans la présente affaire, rien n’indique que la division générale n’a pas tenu compte du témoignage de la prestataire. En fait, la division générale a longuement discuté de son témoignage dans sa décision, mais l’a finalement trouvé peu convaincant.

La division générale a tenu compte de la preuve de la prestataire

[13] La question de savoir si une partie prestataire est fondée à quitter son emploi dépend de nombreux facteurs. Dans cette affaire, la division générale a conclu que la prestataire avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi au moment où elle l’a fait. Elle est arrivée à cette conclusion pour les raisons suivantes :

  • La prestataire n’a pas fait de tentatives sérieuses pour obtenir une preuve à l’appui du fait qu’elle devait rester à la maison pour surveiller ses enfants, comme l’avait demandé son employeur;
  • La prestataire n’a pas fourni de preuve, autre que son propre récit anecdotique, qu’elle était la seule employée à devoir produire une lettre personnalisée de l’école de ses enfants;
  • La prestataire n’était pas une témoin crédible en raison de plusieurs incohérences dans son témoignage. En voici quelques exemples :
    • Elle a fourni des déclarations changeantes sur la question de savoir si et quand son employeur lui permettait de travailler de la maison;
    • Elle a témoigné que son employeur ne lui a jamais dit que la lettre générique de l’école était insuffisante. Toutefois, dans des déclarations antérieures, elle a dit que son employeur l’avait ciblée en exigeant qu’elle soit la seule à fournir des renseignements précis au sujet des absences scolaires de son enfant.
  • La prestataire s’est plainte d’un environnement de travail négatif, y compris de harcèlement et d’intimidation. Pourtant, sa lettre de démission ne fait aucune mention d’allégations de mauvais traitements de la part de son employeur.

[14] Rien ne me permet de penser que la division générale a agi de façon inéquitable, qu’elle n’a pas tenu compte d’éléments de preuve ou qu’elle a mal interprété la loi en fondant sa décision sur les facteurs mentionnés ci-dessus. Comme l’a noté à juste titre la division générale, une personne peut avoir une bonne raison de quitter un emploi sans toutefois être fondée à quitter un emploi. La prestataire peut ne pas être d’accord avec la façon dont la division générale a examiné les éléments de preuve, mais cela ne constitue pas un moyen d’appel prévu par la loi.

La division générale a le droit d’apprécier la preuve

[15] L’un des rôles de la division générale est d’établir les faits. Pour ce faire, elle a droit à une certaine marge de manœuvre dans l’appréciation de la preuve. La prestataire peut estimer que son témoignage prouvait le bien-fondé de sa cause, mais ce n’était qu’un des nombreux éléments que la division générale devait prendre en considération.

[16] La Cour d’appel fédérale a abordé ce point dans la décision SimpsonNote de bas de page 6, dans laquelle la prestataire a fait valoir que le tribunal avait accordé trop de poids à certains éléments de preuve. En rejetant la demande de contrôle judiciaire, la Cour a déclaré ce qui suit :

[...] le poids accordé à la preuve, qu’elle soit orale ou écrite, relève du juge des faits. Ainsi, une cour qui entend un appel ou une demande de contrôle judiciaire ne peut pas en règle générale substituer son appréciation de la valeur probante de la preuve à celle du tribunal qui a tiré la conclusion de fait contestée.

[17] Dans la présente affaire, la division générale a fait un effort complet et réel pour trier les éléments de preuve pertinents et évaluer leur qualité. Je ne vois aucune raison de remettre en question la décision de la division générale d’accorder plus de poids à certains éléments de preuve.

Conclusion

[18] Pour les motifs susmentionnés, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. La permission de faire appel est refusée.

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