Assurance-emploi (AE)

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Citation : AA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 910

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (459375) datée du 17 mars 2022 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Manon Sauvé
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 29 juin 2022
Personne présente à l’audience :

L’appelant

Date de la décision : Le 19 juillet 2022
Numéro de dossier : GE-22-1218

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Décision

[1] L’appel est rejeté. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Par conséquent, le prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[2] Depuis plus de 15 ans, le prestataire travaille à titre d’opérateur de machine. Le 22 octobre 2021, il est congédié pour avoir refusé l’affectation de son employeur à un autre poste de travail. 

[3] Le prestataire présente une demande pour recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[4] La Commission refuse de lui verser des prestations d’assurance-emploi, parce qu’il a perdu son emploi en raison de son inconduite. Il devait savoir qu’il serait congédié après ne pas avoir accepté d’aller travailler à un autre poste de travail.

[5] Le prestataire n’est pas d’accord avec la Commission. L’employeur a trouvé un prétexte pour le congédier. Personne ne veut travailler au poste qu’il lui a assigné. De plus, il pouvait exécuter les tâches d’opérateur à un autre poste dans son département.

Question en litige

[6] Le prestataire a-t-il perdu son emploi en raison d’une inconduite ?

Analyse

[7] Pour décider si le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison le prestataire a perdu son emploi. Ensuite, je dois décider si la loi considère cette raison comme une inconduite.

[8] Pour y parvenir, je dois répondre à trois questions ; quels sont les gestes reprochés au prestataire ; est-ce qu’il a commis les gestes et est-ce qu’il s’agit d’une inconduite au sens de la Loi ?

Quels sont les gestes reprochés au prestataire ?

[9] Le prestataire travaille à titre d’opérateur machistes aux coupons. Selon la convention collective, l’employeur peut assigner un employé à un autre poste, lorsqu’il n’y a pas suffisamment de travail.

[10] Le 22 octobre 2021, le prestataire est rencontré par son employeur concernant des mesures disciplinaires pour, entre autres, refus d’exécuter un travail.

[11] Le jour même, l’employeur informe le prestataire qu’il n’y a pas de travail à exécuter dans son département. Il doit aller travailler dans le département de la meulerie. Il refuse l’affectation et retourne à son domicile. Ce n’est pas la première fois que le prestataire refuse d’être assigné à un autre poste de travail.

[12] Le 25 octobre 2021, le prestataire est rencontré pour revoir les derniers manquements disciplinaires. L’employeur suspend le prestataire de façon indéfinie, afin de rendre une décision dans son dossier. Finalement, l’employeur congédie le prestataire, parce qu’il ne veut pas travailler selon les règles de l’entreprise.  

[13] Le prestataire reconnait que ce sont les gestes qu’on lui reproche.

[14] J’estime qu’il s’agit effectivement des gestes qu’on reproche au prestataire.

Est-ce que le prestataire a commis les gestes qu’on lui reproche ?

[15] J’estime que le prestataire a commis les gestes que lui reproche l’employeur. En effet, il a admis avoir refusé de se rendre au poste de meulage. En fait, l’employeur lui a dit d’aller travailler dans le département de meulage ou de rentrer chez lui. Il est retourné à son domicile.  

Est-ce que les gestes reprochés constituent de l’inconduite ?

[16] Pour être considérée comme une inconduite selon la loi, la façon d’agir doit être délibérée. Cela signifie qu’elle était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 2. Une inconduite comprend aussi une conduite qui est tellement insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 3. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que le prestataire ait eu une intention coupableNote de bas de page 4.

[17] Il y a inconduite si le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’il soit congédié pour cette raisonNote de bas de page 5.

[18] La Commission doit prouver que le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite, selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas de page 6.

[19] Selon la Commission, en refusant d’aller travailler dans un autre département, et ce, immédiatement après avoir été informé qu’il serait congédié s’il refusait de nouveau, le prestataire a volontairement agi de façon à perdre son emploi.

[20] L’employeur avait le droit de transférer le prestataire dans un autre département, lorsqu’il y avait un manque de travailNote de bas de page 7. Le prestataire conservait ses avantages, même si le poste qu’il devait occuper était moins rémunéré.

[21] Toujours selon la Commission, le prestataire a reçu plusieurs avis disciplinaires pour insubordination en lien avec le refus de travail.

[22] Pour sa part, le prestataire soutient qu’il ne savait pas qu’il serait congédié en refusant d’aller travailler dans un autre département. Il a reçu plusieurs avis indiquant qu’il pourrait être congédié, mais il n’a jamais été congédié. Il ne pensait donc pas qu’il pouvait être congédié, après avoir refusé de changer de département.

[23] Il soutient également que l’employeur cherchait un prétexte pour le congédier. Le département du meulage est très difficile physiquement. Les employés ne veulent pas aller travailler dans ce département.

[24] Par ailleurs, le prestataire allègue qu’il aurait pu exécuter les tâches d’un collègue qui travaille dans le même département que lui. L’employeur n’a pas démontré qu’il ne pouvait pas exécuter les tâches de ce collègue de travail, qui aurait moins d’expérience. Il maintient qu’il a les compétences pour exécuter les tâches.

[25] Après avoir étudié le dossier, avoir entendu le prestataire et tenu compte des arguments des parties, je suis d’avis que le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite. En fait, le prestataire savait ou aurait dû savoir qu’en refusant de travailler au département de meulerie, parce qu’il n’y avait pas de tâches à exécuter dans son département, il serait congédié.

[26] En effet, au fil des ans, le prestataire a reçu plusieurs rapports disciplinaires ou avertissements, notamment, pour insubordination. Il a été rencontré le 22 octobre 2021 par son employeur qui l’a avisé qu’un autre refus de travail mènerait à son congédiement. Il a été averti verbalement et par lettre qu’il serait congédié s’il refusait la prochaine affectation.

[27] Le 25 octobre 2021, il a refusé de nouveau l’affectation. L’employeur a suspendu le prestataire, afin de déterminer quelle serait sa décision. Il a finalement congédié le prestataire.

[28] Dans ce contexte, j’estime que la Commission s’est acquittée de son fardeau de preuve ; elle a démontré que le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite.

[29] Mon rôle n’est pas de déterminer si le congédiement est justifié ou représente une sanction adéquate. Je dois décider si le geste posé constitue une inconduite. Ainsi, en refusant d’aller travailler dans un département, parce qu’il n’y avait pas de travail à exécuter dans son département, le prestataire a fait de l’insubordination.

[30] Je n’ai pas à me demander si l’employeur a agi correctement ou nonNote de bas de page 8, mais est-ce que les gestes commis par le prestataire constituent de l’inconduite ? Je suis d’avis qu’en refusant de travailler dans un autre département, alors que l’employeur a le droit de le faire, le prestataire a commis une insubordination. Il devait s’attendre à être congédié, parce qu’il avait été avisé le 25 octobre 2021 des conséquences d’un nouveau refus. Je tiens compte que le prestataire a eu plusieurs avertissements et rapports disciplinaires pour de l’insubordination ou un refus de travail.

[31] Le prestataire prétend que l’employeur n’a pas démontré qu’il ne pouvait pas travailler dans son département et remplacer son collègue de travail. Il n’a pas fait la preuve des compétences de ce dernier pour occuper les fonctions du deuxième poste. Le prestataire aurait donc pu prendre son poste.

[32] Selon les informations recueillies par la Commission auprès du syndicat et l’employeur, le prestataire n’aurait pas été en mesure d’occuper le poste de travail, parce qu’il n’est pas de formation en programmation.

[33] De toute façon, il s’agit d’une décision de gestion de son employeur. Le prestataire dispose de moyens pour contester une décision de l’employeur avec son syndicat. Je comprends que plusieurs griefs ont été déposés, mais ce n’est pas mon rôle de déterminer si l’employeur était justifié de procéder comme il l’a fait.

[34] Il faut se pencher sur le comportement du prestataire. Ce n’est pas mon rôle de décider si le congédiement était justifié ou non.

[35] Dans ce contexte, je suis d’avis que la Commission a prouvé qu’il y a une inconduite de la part du prestataire et c’est ce qui a entrainé son congédiement.

Alors, le prestataire a-t-il perdu son emploi en raison d’une inconduite ?

[36] Selon mes conclusions précédentes, je suis d’avis que le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[37] La Commission a prouvé que le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi le prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[38] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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