Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 799

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission d’en appeler

Parties demanderesse : M. P.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 31 mai 2022 (GE-22-693)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 23 août 2022
Numéro de dossier : AD-22-412

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Décision

[1] La permission d’en appeler est refusée. L’appel n’ira donc pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse (prestataire) travaillait comme infirmière auxiliaire autorisée. L’employeur a suspendu et congédié la prestataire parce qu’elle ne s’était pas conformée à leur politique de vaccination contre la COVID-19. La prestataire a ensuite demandé des prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] La défenderesse (Commission) a conclu que la prestataire avait été suspendue et congédiée en raison d’une inconduite. La Commission ne pouvait donc pas lui verser de prestations. Après une révision infructueuse, la prestataire a fait appel auprès de la division générale.

[4] La division générale a conclu que la prestataire avait été suspendue et congédiée à la suite de son refus de se conformer à la politique de l’employeur une fois que sa demande d’exemption fondée sur ses croyances religieuses avait été rejetée. Elle a jugé que la prestataire savait que l’employeur était susceptible de la congédier dans ces circonstances. La division générale a conclu que la prestataire avait été congédiée en raison d’une inconduite.

[5] La prestataire cherche à obtenir la permission de porter la décision de la division générale en appel devant la division d’appel. Elle soutient que la division générale n’a pas tenu compte de la lettre d’exemption religieuse de son prêtre. La prestataire affirme que l’employeur n’a pas respecté ses droits fondamentaux. Elle dit que la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation de l’inconduite parce qu’elle a prouvé que sa demande d’exemption était fondée sur des croyances religieuses. La prestataire soutient qu’elle a déposé un grief au travail contestant la position de l’employeur.

[6] Je dois décider si la prestataire a invoqué une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès.

[7] Je refuse la permission de faire appel puisque l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès?

Analyse

[9] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social précise les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Il s’agit des erreurs révisables que voici :

  1. 1. La procédure de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. 2. La division générale n’a pas décidé d’une question qu’elle aurait dû trancher ou elle a décidé d’une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.
  3. 3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. 4. La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit.

[10] La demande de permission de faire appel est une étape préliminaire à l’examen sur le fond. C’est une première étape que la prestataire doit franchir, mais où la barre est moins haute que celle qu’il faut franchir durant l’instruction de l’appel sur le fond. À l’étape de la permission de faire appel, la prestataire n’a pas à prouver ses prétentions. Elle doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur révisable. En d’autres termes, elle doit démontrer la possibilité de soutenir qu’il y a eu une erreur révisable pouvant faire que l’appel soit accueilli.

[11] Par conséquent, pour accorder la permission, je dois être convaincu que les motifs de l’appel correspondent à l’un ou l’autre des moyens d’appel mentionnés plus haut et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès.

La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès?

[12] La prestataire soutient que la division générale n’a pas tenu compte de la lettre d’exemption religieuse de son prêtre. La prestataire affirme que l’employeur n’a pas respecté ses droits fondamentaux. Elle dit que la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation de l’inconduite parce qu’elle a prouvé que sa demande d’exemption était fondée sur des croyances religieuses. La prestataire soutient qu’elle a déposé un grief au travail contestant la position de l’employeur.

[13] La prestataire travaillait comme infirmière auxiliaire autorisée. L’employeur a mis en place une politique visant à protéger la santé et la sécurité des travailleurs contre les risques liés à la COVID-19Note de bas de page 1. La politique prévoyait une procédure pour accorder des exceptions fondées sur les croyances religieuses sincères d’une personne. La politique est entrée en vigueur vers septembre 2021.

[14] La prestataire a demandé une exemption fondée sur ses croyances religieuses. L’employeur a rejeté la demande et la prestataire n’a pas respecté la politique. L’employeur l’a suspendue et congédiée. La prestataire a ensuite déposé un grief contre son employeur.

[15] La division générale devait décider si la prestataire avait été congédiée en raison de son inconduite.

[16] La notion d’inconduite ne veut pas nécessairement dire que le comportement fautif résulte d’une intention coupable. Il suffit que l’inconduite soit consciente, voulue ou intentionnelle. Autrement dit, pour qu’il y ait inconduite, l’acte reproché doit avoir été délibéré ou, à tout le moins, être d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que la personne a volontairement décidé d’ignorer les répercussions de ses actes sur son rendement au travail.

[17] Il est bien établi dans la jurisprudence que le rôle de la division générale n’est pas de juger de la sévérité de la sanction de l’employeur ni de décider si l’employeur était coupable d’inconduite en suspendant ou en congédiant la prestataire de telle manière que sa suspension ou son congédiement était injustifié, mais plutôt de décider si la prestataire était coupable d’inconduite et si cette inconduite a mené à sa suspension et à son congédiementNote de bas de page 2.

[18] À la lumière de la preuve, la division générale a conclu que la prestataire avait été suspendue et congédiée parce qu’elle refusait de suivre la politique de l’employeur. Elle avait été informée de la politique de l’employeur et avait eu le temps de s’y conformer. Le refus de la prestataire était intentionnel. C’était un refus délibéré. Il s’agissait de la cause directe de sa suspension et de son congédiement. La division générale a conclu que la prestataire savait, après le refus de l’exemption demandée, que son refus de se conformer à la politique pourrait entraîner son congédiement.

[19] La division générale a conclu, à partir de la preuve prépondérante, que le comportement de la prestataire constituait une inconduite.

[20] Il est bien établi qu’une violation délibérée de la politique de l’employeur est considérée comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 3.

[21] La question de savoir si l’employeur a fait preuve de discrimination à l’égard de la prestataire et s’il aurait dû accepter sa demande d’exemption de la politique de vaccination fondée sur ses croyances religieuses relève d’une autre tribune. Le présent Tribunal n’est pas la tribune appropriée par laquelle la prestataire peut obtenir la réparation qu’elle demandeNote de bas de page 4.

[22] Je ne vois pas en quoi la division générale aurait fait une erreur révisable lorsqu’elle a expliqué qu’elle devait trancher la question de l’inconduite uniquement d’après les paramètres établis par la Cour d’appel fédérale, qui a défini l’inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 5 .

[23] Je suis pleinement conscient que la prestataire peut demander réparation devant une autre tribune, si l’existence d’une violation est établieNote de bas de page 6. Cela ne change rien au fait qu’aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission a prouvé selon la prépondérance des probabilités que la prestataire a été congédiée en raison d’une inconduite.

[24] Dans sa demande de permission de faire appel, la prestataire n’a relevé aucune erreur révisable comme la compétence de la division générale ou le non-respect d’un principe de justice naturelle. Elle n’a cerné dans la décision aucune erreur de droit ou conclusion de fait erronée, que la division générale aurait pu tirer de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[25] Après avoir révisé le dossier d’appel et la décision de la division générale et compte tenu des arguments que la prestataire a présentés pour appuyer sa demande de permission de faire appel, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[26] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira donc pas de l’avant.

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