Assurance-emploi (AE)

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Citation : CM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1097

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Parties appelante : C. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante ou représentant : Julie Villeneuve

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 3 mai 2022 (GE-22-552)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 3 octobre 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentante de l’intimée

Date de la décision : Le 25 octobre 2022
Numéro de dossier : AD-22-325

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] L’appelante (prestataire) a été mise en congé sans solde (suspendue de son emploi). Elle a fait une demande de prestations d’assurance-emploi. L’intimée (Commission) a accepté la raison de la mise en congé que l’employeur a fourni. La Commission a conclu que la prestataire a été suspendue en raison d’une inconduite, soit de ne pas s’être conformée à la politique de vaccination (politique) de son employeur. La Commission l’a donc exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi. La prestataire a demandé la révision de sa demande. La Commission a rejeté sa demande de révision. La prestataire a interjeté appel de la décision en révision devant la division générale.

[3] La division générale a déterminé que la prestataire avait refusé de se conformer à la politique de l’employeur. Elle a conclu que la prestataire savait que l'employeur était susceptible de la suspendre dans ces circonstances et que son refus était volontaire, conscient et délibéré. La division générale a conclu que la prestataire a été suspendue en raison de son inconduite.

[4] La division d’appel a accordé à la prestataire la permission d’en appeler de la décision de la division générale. La prestataire fait valoir que la division générale a commis une erreur en droit lorsqu’elle a conclu à son inconduite puisqu’elle ne rencontre pas les critères jurisprudentiels permettant de qualifier un comportement d’inconduite.

[5] Je dois décider si la division générale a commis une erreur en droit lorsqu’elle a conclu que la prestataire a été suspendue en raison de son inconduite.

[6] Pour les raisons ci-après mentionnées, je rejette l’appel de la prestataire.

Question en litige

[7] Est-ce que la division générale a commis une erreur en droit lorsqu’elle a conclu que la prestataire a été suspendue en raison de son inconduite?

Analyse

Mandat de la division d’appel

[8] La Cour d’appel fédérale a déterminé que la division d’appel n’avait d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.Note de bas page 1

[9] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure. 

[10] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, Je dois rejeter l'appel.

Est-ce que la division générale a commis une erreur en droit lorsqu’elle a conclu que la prestataire a été suspendue en raison de son inconduite?

[11] La prestataire soutien que la division générale a commis une erreur en droit lorsqu’elle a conclu à son inconduite puisqu’elle ne rencontre pas les critères jurisprudentiels permettant de qualifier un comportement d’inconduite.

[12] La prestataire a réitéré devant la division d’appel les raisons présentées à la division générale a l’appui de sa position qu’il n’y a pas eu d’inconduite de sa part. Elle fait valoir que :

  • Il n’y a pas eu de conflit avec son employeur;
  • Elle n’a pas été réprimandée et aucune plainte n’a été déposée par son employeur;
  • Il y a eu modification de ses conditions de travail et bris de contrat de travail par son employeur;
  • La politique de l’employeur était déraisonnable et non justifiée;
  • L’employeur ne lui a pas offert d’accommodements;
  • L’employeur lui a imposé une sanction démesurée;
  • Elle avait le droit de refuser un vaccin expérimental;
  • Il ne pouvait y avoir de consentement libre et éclairé de sa part puisque son employeur refusait de répondre aux questions concernant les effets secondaires du vaccin;
  • Il y a eu violation de ses droits individuels et constitutionnels;
  • Dans ce contexte, elle ne pouvait pas savoir que son employeur irait jusqu’à la suspendre; il n’y a donc pas eu d’inconduite.

[13] La prestataire travaille aux département des services administratifs de son employeur. L’employeur a mis en place une politique de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs contre le danger de la COVID-19. La prestataire ne s’est pas conformée à la politique de l’employeur. Elle a été suspendue par l’employeur.

[14] La division générale devait décider si la prestataire a été suspendue (empêché temporairement de travailler) en raison de son inconduite.Note de bas page 2

[15] La notion d’inconduite ne prévoit pas qu’il est nécessaire que le comportement fautif résulte d’une intention coupable; il suffit que l’inconduite soit consciente, voulue ou intentionnelle. Autrement dit, pour constituer une inconduite, l’acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que la personne a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur son rendement.

[16] Le rôle de la division générale n’est pas de juger de la sévérité de la sanction de l’employeur ni de savoir si l’employeur s’est rendue coupable d’inconduite en suspendant la prestataire de sorte que sa suspension serait injustifiée, mais bien de savoir si la prestataire s’est rendue coupable d’inconduite et si celle-ci a entraîné sa suspension.

[17] La division générale a déterminé que la prestataire a été suspendue parce qu’elle ne s’est pas conformée à la politique de l’employeur en réponse à la pandémie.  La prestataire a été informée de la politique de l’employeur afin de protéger son personnel dans le contexte de la pandémie et a eu le temps de s’y conformer.

[18] La division générale a déterminé que la prestataire a volontairement refusé de suivre la politique de l’employeur, malgré que celle-ci était soutenue par les autorités compétentes. C’est ce qui a directement entraîné sa suspension. La division générale a déterminé que la prestataire savait que son refus de se conformer à la politique pourrait mener à sa suspension puisqu’elle avait été informée à plus d’une reprise des conséquences du non-respect de la politique.

[19] La division générale a conclu de la preuve prépondérante que le comportement de la prestataire constituait une inconduite.

[20] Il est bien établi que le non-respect délibéré de la politique d’un employeur est considéré comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).Note de bas page 3

[21] La question de savoir si la politique de l’employeur était déraisonnable, abusive, et discriminatoire, relève d'un autre forum. Ce Tribunal n'est pas le forum approprié par lequel la prestataire peut obtenir la réparation qu'elle demande.Note de bas page 4

[22] Il n’appartenait pas à la division générale de trancher les questions concernant l’efficacité du vaccin ou le caractère raisonnable de la politique de l’employeur.Note de bas page 5

[23] La preuve prépondérante démontre que la politique de l'employeur s'appliquait à la prestataire. Elle a refusé de se conformer à la politique. Elle savait que l'employeur était susceptible de la suspendre dans ces circonstances et son refus était volontaire, conscient et délibéré.

[24] La prestataire a fait un choix personnel et délibéré de ne pas suivre la politique de protection de l'employeur en réponse aux circonstances uniques et exceptionnelles créées par la pandémie et cela a entraîné sa suspension par son employeur.

[25] Je ne vois aucune erreur révisable commise par la division générale lorsqu'elle a tranché la question de l'inconduite uniquement selon les paramètres établis par la Cour d'appel fédérale, qui a défini l'inconduite en vertu de la Loi sur l'AE.Note de bas page 6

[26] Je suis pleinement conscient que la prestataire peut demander réparation devant une autre instance, si une violation est établie.Note de bas page 7 Cela ne change rien au fait qu'en vertu de la Loi sur l'AE, la Commission a prouvé selon la prépondérance des probabilités que la prestataire a été suspendue en raison de son inconduite.

Conclusion

[27] L’appel est rejeté.

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