Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : GW c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 921

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : G. W.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (455818) datée du 15 février 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Candace R. Salmon
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience  : Le 3 mai 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 6 mai 2022
Numéro de dossier : GE-22-797

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. Le Tribunal est d’accord avec la prestataire.

[2] La demande de prestations parentales de l’assurance-emploi de la prestataire montre qu’elle a choisi l’option des prestations prolongées.

[3] La prestataire soutient qu’elle a fait une erreur et qu’elle voulait en fait choisir l’option des prestations standards. De plus, à la suite d’un examen exhaustif du formulaire de demande, elle a démontré qu’elle avait effectivement choisi cette option.

Aperçu

[4] Les personnes qui demandent des prestations parentales de l’assurance‑emploi doivent choisir entre deux options. Dans le formulaire de demande, ces options sont appelées « option standard » et « option prolongéeNote de bas page 1 ».

[5] L’option standard permet de recevoir des prestations au taux normal pendant un maximum de 35 semaines. Quant à elle, l’option prolongée permet de recevoir la même somme totale de prestations, mais à un taux moins élevé et pendant un maximum de 61 semaines. Dans l’ensemble, le montant d’argent demeure presque le même; il est simplement réparti sur un nombre différent de semaines.

[6] Une fois que le versement de prestations parentales a commencé, il devient impossible de changer d’optionNote de bas page 2.

[7] Dans son formulaire de demande, la prestataire a choisi les prestations parentales prolongées. À l’audience, elle a confirmé qu’elle avait commencé à recevoir des prestations parentales la semaine du 31 décembre 2021. Cependant, elle voulait en fait recevoir les prestations standards.

[8] Selon la Commission de l’assurance‑emploi du Canada, la prestataire a déjà fait son choix et il est trop tard pour changer d’option parce qu’elle a commencé à recevoir des prestations.

[9] La prestataire n’est pas d’accord. Elle affirme qu’elle a peut-être choisi de recevoir 52 semaines de prestations parentales prolongées dans le formulaire, mais soutient que c’était uniquement parce que le formulaire de demande de la Commission n’était pas clair et qu’elle a fait sa demande de prestations seulement quelques heures après avoir eu un accouchement traumatique.

Question en litige

[10] Quel type de prestations parentales la prestataire a-t‑elle choisi lorsqu’elle a rempli son formulaire de demande?

Analyse

[11] Les personnes qui demandent des prestations parentales de l’assurance‑emploi doivent choisir entre l’option standard et l’option prolongéeNote de bas page 3. La loi précise qu’à partir du moment où la Commission commence à verser des prestations parentales, une partie prestataire ne peut plus changer d’option.

[12] Pour savoir quel type de prestations parentales la prestataire a choisi en remplissant sa demande, je dois examiner les éléments de preuve entourant son choix. Autrement dit, l’option que la prestataire a choisie en remplissant sa demande est importante, mais ce n’est pas la seule chose dont il faut tenir compte. Par exemple, on peut aussi regarder le nombre de semaines pendant lesquelles la prestataire voulait recevoir des prestations ou la durée du congé qu’elle prévoyait prendre.

[13] Dans de nombreuses décisions, le Tribunal a jugé important d’examiner tous les éléments de preuve qui portent sur le choix fait par une personne au moment où elle a rempli le formulaire de demandeNote de bas page 4. Je ne suis pas lié par ces décisions, mais je les trouve convaincantes, alors j’ai choisi de les suivre.

Ce que la prestataire a choisi dans sa demande

[14] L’option que la prestataire avait l’intention de choisir quand elle a rempli le formulaire de demande est importante. À ce moment-là, avait‑elle l’intention de choisir l’option standard ou l’option prolongée?

Les arguments des parties

[15] Selon la Commission, ce que la prestataire a sélectionné dans le formulaire de demande nous dit quelle option elle voulait choisir. Elle soutient qu’il est maintenant trop tard pour changer d’option. La Commission souligne également que l’information concernant la demande était disponible sur le portail en ligne Mon dossier Service Canada (MDSC).

[16] La prestataire a déclaré qu’elle avait lu le formulaire de demande et qu’elle croyait comprendre les différents types de prestations. Elle a fait remarquer que, dans le formulaire de demande, elle avait inscrit que son dernier jour de travail était le 8 septembre 2021, mais qu’elle n’avait pas fixé de date précise pour son retour au travail avant de présenter sa demande de prestations. Elle a aussi affirmé qu’elle avait parlé à son employeur de son congé de maternité avant d’arrêter de travailler et qu’elle avait l’intention de prendre un an de congé, ce qui, selon elle, se reflète dans le fait qu’elle a demandé 52 semaines de prestations parentales.

[17] La prestataire a reconnu que le premier paiement de prestations parentales lui avait été versé le 31 décembre 2021 ou environ. Elle a dit qu’elle avait attendu de voir si le taux inférieur était une erreur, mais qu’après avoir reçu quelques versements de prestations à ce taux, elle avait communiqué avec la Commission.

[18] Le 20 janvier 2022, elle a téléphoné à la Commission pour demander pourquoi ses prestations avaient diminué. Une fois que l’agent de la Commission a expliqué la différence entre les prestations standards et les prestations prolongées, la prestataire a déclaré qu’elle avait demandé à passer aux prestations standards, parce que c’était le type de prestations qu’elle avait l’intention de choisir. L’agent de la Commission lui a alors dit que son choix ne pouvait pas être modifié parce que des prestations parentales lui avaient déjà été versées.

[19] La prestataire a déclaré qu’elle avait été provoquée le 9 septembre 2021 et qu’elle avait subi une césarienne d’urgence. Elle a expliqué que l’intervention avait causé un traumatisme à son bébé, qui saignait du crâne et qui a été admis à l’unité de soins intensifs néonatals pendant 10 jours. De plus, la prestataire a subi des blessures durant l’accouchement, mais elle a obtenu son congé de l’hôpital le 11 septembre 2021. Elle a ensuite fait une demande de prestations d’assurance-emploi le 13 septembre 2021.

[20] Elle affirme qu’en plus de son état post-partum et des blessures qu’elle a subies, elle allait voir son nouveau-né à l’unité de soins intensifs néonatals chaque jour et elle était épuisée. Elle était également préoccupée par le dépôt de ses documents de prestations de maternité. Elle a dit qu’elle avait lu la demande et qu’elle croyait avoir compris les formulaires. Elle a ajouté qu’elle avait dû lire les documents à quelques reprises parce que [traduction] « ce n’était pas très clair », mais qu’elle pensait qu’elle devait choisir les prestations prolongées parce que les prestations standards permettaient seulement de recevoir jusqu’à 35 semaines de prestations parentales. Elle a dit que, parce qu’elle voulait 52 semaines, elle pensait devoir choisir l’option qui lui donnait jusqu’à 61 semaines de prestations. Elle a déclaré qu’elle n’avait pas communiqué avec la Commission pour poser des questions parce qu’elle pensait avoir répondu correctement à toutes les questions.

[21] La prestataire a également dit qu’elle n’avait pas compris la différence entre les prestations de maternité et les prestations parentales. Elle a dit [traduction] « Je n’avais pas réalisé, en remplissant le formulaire, qu’il y avait une différence entre les prestations de maternité et les prestations parentales ». Elle a dit qu’elle pensait que c’était [traduction] « tous des congés de maternité » et qu’elle ne savait pas qu’il s’agissait de deux prestations distinctes.

[22] Je conclus que la prestataire a choisi de recevoir les prestations parentales standards. Elle a elle-même rempli la demande de prestations d’assurance-emploi. Au moment où elle a présenté sa demande, elle n’a pas fourni de date de retour au travail, mais elle a demandé 52 semaines de prestations, ce qui correspond à une année. Lorsqu’elle a commencé à recevoir des prestations de maternité, elle recevait 55 % de sa rémunération hebdomadaire assurable. C’est ce qu’elle s’attendait à recevoir pendant sa période de congé de maternité et de congé parental. Les prestations parentales prolongées fournissent seulement 33 % de la rémunération hebdomadaire assurable. Lorsque ses prestations de maternité ont pris fin, son taux est tombé à 33 % puisqu’elle avait choisi les prestations parentales prolongées.

[23] Lorsque la prestataire a commencé à recevoir un taux de prestations inférieur, elle a communiqué avec la Commission pour demander pourquoi le taux de prestations avait changé. Lorsqu’on lui a expliqué les types de prestations, elle s’est rendu compte qu’elle avait fait une erreur. Elle a immédiatement demandé de passer aux prestations standards. L’agent de la Commission lui a dit qu’il était trop tard pour changer, car elle avait déjà reçu des prestations parentales.

[24] La seule preuve que la prestataire avait l’intention de choisir les prestations prolongées est le bouton radio qu’elle a sélectionné dans le formulaire de demande. Elle a déclaré qu’elle avait l’intention de s’absenter du travail pendant un an et qu’elle pensait devoir choisir les prestations prolongées pour pouvoir sélectionner 52 semaines.

[25] Le formulaire demande aux personnes si elles veulent recevoir des prestations parentales immédiatement après les prestations de maternité. La prestataire a sélectionné « oui » dans le formulaire. Je lui ai demandé pourquoi elle avait choisi cette option, si elle ne comprenait pas la différence entre les prestations de maternité et les prestations parentales. Elle a dit qu’elle voulait prendre un an de congé. Je remarque que pour cette question, la seule autre option était [traduction] « Non, je veux seulement toucher jusqu’à 15 semaines de prestations de maternité ». J’estime qu’il est raisonnable de conclure que si une personne n’a pas compris la différence entre les prestations de maternité et les prestations parentales, il est possible qu’elle sélectionne « oui » à cette question parce qu’elle veut plus de 15 semaines de prestations.

Quelle option la prestataire a-t-elle choisie au moment de présenter sa demande?

[26] J’ai déjà conclu que la prestataire a prouvé qu’elle avait choisi les prestations parentales standards lorsqu’elle a présenté sa demande. Elle a choisi 52 semaines de prestations prolongées, soit le nombre correspondant à une année, et elle a déclaré qu’elle avait pris des dispositions pour s’absenter du travail pendant un an. Comme la prestataire ne s’est pas rendu compte que les prestations de maternité étaient versées séparément pendant une période maximale de 15 semaines, elle ne savait pas qu’elle devait déduire les 15 semaines de maternité des 52 semaines de congé qu’elle souhaitait.

[27] Le formulaire de demande de la Commission ne précise pas que la période de maternité est une période allant jusqu’à 15 semaines qui est distincte de la période parentale. La question qui demande si la personne veut recevoir des prestations parentales immédiatement après les prestations de maternité y fait allusion, parce que la réponse négative dit [traduction] « Non, je veux seulement toucher jusqu’à 15 semaines de prestations de maternité ». J’estime que cela ne montre pas clairement que la maternité est une prestation distincte et que les semaines de maternité ne devraient pas être prises en compte dans le calcul du nombre de semaines de prestations parentales qu’une personne veut demander.

[28] J’estime que la prestataire n’a pas compris que les prestations parentales et les prestations de maternité étaient des prestations distinctes. Lorsqu’elle a commencé à recevoir des prestations de maternité au taux de 55 %, elle ne savait pas qu’elle devait communiquer avec la Commission et lui poser des questions parce qu’elle pensait que sa demande était établie correctement et qu’elle continuerait de recevoir ce montant. Elle a déclaré qu’elle n’avait pas vérifié son compte Mon dossier Service Canada en ligne, car elle n’avait aucune raison de se demander si sa demande avait été établie correctement jusqu’à ce qu’elle reçoive le premier paiement de prestations parentales. Je juge qu’il ne s’agit pas d’une affaire où la prestataire ne possède pas les connaissances nécessaires pour répondre à des questions qui ne sont pas ambiguës, parce que la différence entre les prestations de maternité et les prestations parentales ainsi que la relation entre les deux types de prestations sont ambiguës. De plus, la prestataire a lu le formulaire de demande et croyait qu’elle l’avait rempli correctement lorsqu’elle a présenté sa demande.

Autres commentaires

[29] Bien que chaque affaire soit tranchée selon son bien-fondé, je dois souligner que j’ai traité plus de 50 affaires de cette nature, ce qui n’indique pas combien d’autres membres du Tribunal ont abordé la même question. Si le formulaire de demande de prestations de maternité et de prestations parentales de l’assurance-emploi était clair et sans ambiguïté, il n’y aurait pas autant de dossiers dont les faits témoignent de scénarios semblables.

[30] La Cour fédérale s’est penchée sur cette question dans des circonstances limitées. Je reconnais que, dans l’affaire KarvalNote de bas page 5, la Cour a conclu que le formulaire de demande de la Commission n’était pas clair. La Cour ne semble pas avoir tenu compte du fait que le formulaire n’explique pas qu’il faut soustraire le nombre de semaines de prestations de maternité de la demande de prestations parentales. Voilà pourquoi je trouve que Karval se distingue de l’affaire qui nous occupe.

[31] Bien que la Commission ne soit pas tenue de vérifier les renseignements sur les formulaires de demande de prestations parentales, et je reconnais que sa charge de travail quotidienne est élevée, il y a manifestement quelque chose qui ne va pas dans ce formulaire de demande. Je ne peux pas ordonner à la Commission de prendre des mesures particulières, mais je l’encourage à examiner l’ensemble des affaires semblables et à envisager des options qui permettront de clarifier cette situation récurrente.

Conclusion

[32] Je conclus que la prestataire a choisi de recevoir les prestations parentales standards.

[33] Cela signifie que l’appel est accueilli.

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