Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision

Citation : SF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1096

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : S. F.
Représentante ou représentant : I. G.

Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (439560) datée du 22 novembre 2021 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Charline Bourque
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 25 janvier 2022
Personne présente à l’audience : Appelant
Représentante de l’appelant
Date de la décision : Le 27 janvier 2022
Numéro de dossier : GE-21-2562

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler pendant qu’il était aux études. Par conséquent, il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

[3] De plus, je n’ai pas compétence pour rendre une décision sur la question de la défalcation. J’estime néanmoins que la Commission devrait rendre une décision à ce sujet en prenant en considération le fait qu’elle avait toute l’information pertinente aux études dès le dépôt de la demande. Enfin, le fait de rendre une décision permettrait au prestataire de porter appel auprès de la Cour fédérale s’il le souhaite.

Aperçu

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que le prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi du 28 septembre 2020 au 18 décembre 2020 et du 4 janvier 2021 au 16 août 2021, parce qu’il n’était pas disponible pour travailler.

[5] Pour recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi, la partie prestataire doit être disponible pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie que la partie prestataire doit être à la recherche d’un emploi.

[6] Je dois décider si le prestataire a prouvé qu’il était disponible pour travailler. Le prestataire doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il était disponible pour travailler.

[7] La Commission affirme que le prestataire n’était pas disponible parce qu’il était aux études à temps plein.

[8] Le prestataire est en accord avec le fait qu’il était aux études à temps plein. Néanmoins, il est en désaccord avec le délai que la Commission a pris avant de rendre sa décision et souhaite que la dette soit annulée.

[9] Le prestataire explique que la Commission connaissait sa situation d’étudiant à temps plein depuis le dépôt de sa demande de prestation. Il a rempli à plusieurs reprises un questionnaire attestant de sa situation, a communiqué avec la Commission pour s’assurer de la conformité de son dossier et son droit aux prestations. Or, malgré ses contacts et les formulaires remplis, la Commission a pris plus d’un an avant de rendre sa décision.

Question en litige

[10] Le prestataire était-il disponible pour travailler pendant qu’il était aux études ?

[11] La dette peut-elle être annulée ?

Analyse

Question en litige no 1 : Le prestataire était-il disponible pour travailler pendant qu’il était aux études ?

[12] Deux articles de loi différents exigent que la partie prestataire démontre qu’elle était disponible pour travailler. La Commission a décidé que le prestataire était inadmissible selon ces deux articles. Ce dernier doit donc répondre aux critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[13] Premièrement, la Loi sur l’assurance-emploi dit qu’une partie prestataire doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 1. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente des critères qui aident à expliquer ce que signifie « démarches habituelles et raisonnablesNote de bas de page 2 ».

[14] Deuxièmement, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit aussi que la partie prestataire doit prouver qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais qu’elle est incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 3. La jurisprudence énonce trois éléments que la partie prestataire doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensNote de bas de page 4.

[15] La Commission a établi que le prestataire était inadmissible aux prestations parce qu’il n’était pas disponible pour travailler selon ces deux articles de loi.

[16] De plus, la Cour d’appel fédérale a déclaré que les parties prestataires qui sont aux études à temps plein sont présumées ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas de page 5. C’est ce qu’on appelle la « présomption de non-disponibilité ». Cela signifie qu’on considère que les personnes qui sont aux études ne sont probablement pas disponibles pour travailler quand la preuve montre qu’elles sont aux études à temps plein.

[17] Je vais d’abord voir si je peux présumer que le prestataire n’était pas disponible pour travailler. J’examinerai ensuite la question de la disponibilité.

Présumer que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler

[18] La présomption de non-disponibilité s’applique uniquement aux personnes qui étudient à temps plein.

Le prestataire ne conteste pas le statut d’étudiant à temps plein

[19] Le prestataire reconnaît qu’il étudie à temps plein, et rien ne démontre que ce n’est pas le cas. J’accepte donc le fait que le prestataire est aux études à temps plein.

[20] La présomption s’applique au prestataire.

Le prestataire est étudiant à temps plein

[21] Le prestataire étudie à temps plein. Par contre, la présomption selon laquelle les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler peut être réfutée (c’est-à-dire qu’on peut montrer qu’elle ne s’applique pas). Si la présomption est réfutée, elle ne s’applique pas.

[22] Le prestataire peut réfuter cette présomption de deux façons. Il peut démontrer qu’il a l’habitude de travailler à temps plein tout en étant aux étudesNote de bas de page 6. Sinon, il peut démontrer qu’il existe des circonstances exceptionnelles dans son casNote de bas de page 7.

[23] Le prestataire confirme qu’il ne travaille pas à temps plein. Son employeur aménage son horaire autour de ses études. Il confirme qu’il ne peut travailler que du vendredi au dimanche puisqu’il étudie à temps plein. Le prestataire confirme avoir fait part de sa situation d’étudiant à la Commission dès le dépôt de sa demande d’assurance-emploi et ne le remet pas en question.

[24] Le prestataire n’a pas réfuté la présomption selon laquelle il n’est pas disponible pour travailler.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[25] La jurisprudence établit trois éléments à examiner quand je dois décider si le prestataire était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 8. Le prestataire doit prouver les trois éléments suivantsNote de bas de page 9 :

  1. a) montrer qu’il veut retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert;
  2. b) faire des démarches pour trouver un emploi convenable;
  3. c) éviter d’établir des conditions personnelles qui limiteraient indûment (c’est-à-dire limiteraient trop) ses chances de retourner travailler.

[26] Au moment d’examiner chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite du prestataireNote de bas de page 10.

Vouloir retourner travailler

[27] Le prestataire n’a pas montré qu’il voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert.

[28] Le prestataire est aux études et il est disponible à travailler du vendredi au dimanche afin de lui permettre de poursuivre ses études à temps plein.

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[29] Le prestataire n’a pas fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable.

[30] Le prestataire a indiqué ne pas avoir repris son emploi en raison de la poursuite de ses études pendant la session d’été.

Limiter indûment ses chances de retourner travailler

[31] Le prestataire établit des conditions personnelles qui pourraient limiter indûment ses chances de retourner travailler.

[32] Le prestataire est aux études à temps plein et il n’a pas réfuté la présomption selon laquelle il n’est pas disponible à travailler.

Alors, le prestataire était-il capable de travailler et disponible pour le faire?

[33] Selon mes conclusions sur les trois éléments, je conclus que le prestataire n’a pas démontré qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable.

Question en litige no 2 : Le montant à rembourser peut-il être défalqué ?

[34] Le prestataire indique avoir fait part à la Commission de sa demande de ne pas avoir à rembourser le trop payé puisque la Commission avait en main toute l’information relative à ses études dès le départ. De plus, le prestataire affirme avoir redonné cette information à plusieurs reprises par l’entremise du formulaire sur les études et avoir communiqué avec la Commission plusieurs fois afin de s’assurer de son droit aux prestations.

[35] Je constate d’abord que la Commission n’a pas rendu de décision sur la question de la défalcation, ce qui permettrait au prestataire de porter appel de cette décision auprès de la Cour fédérale s’il le souhaite.

[36] De plus, je suis d’avis que je n’ai pas compétence pour statuer sur la question de défalcation.

[37] En effet, quiconque se croit lésé par une décision de révision de la Commission peut interjeter appel de cette décision devant le Tribunal de la sécurité socialeNote de bas de page 11.

[38] Néanmoins, les décisions de la Commission rendues en vertu du Règlement sur l’assurance-emploi qui concernent la défalcation de pénalités à payer, de sommes dues ou d’intérêts courus sur ces pénalités ou sommes ne peuvent faire l’objet de la révisionNote de bas de page 12.

[39] Ainsi, j’estime que je n’ai pas la compétence requise pour rendre une décision sur la question de défalcation, comme demandé par le prestataire puisque la Loi prévoit que la question de défalcation ne puisse pas faire l’objet d’une révision. Le prestataire doit donc s’adresser à la Cour fédérale puisque celle-ci a compétence pour entendre cette question.

[40] Je comprends l’incompréhension du prestataire face à au délai de la Commission ainsi que les difficultés causées par celle-ci. Néanmoins, mon rôle est d’appliquer la Loi et je ne peux modifier celle-ci ne serait-ce que pour plaire au prestataire qui se sent lésé. La Loi établit des critères précis auxquels un prestataire doit répondre pour être admissible à des prestationsNote de bas de page 13.

[41] Enfin, comme le prestataire le fait remarquer, je me questionne à savoir pourquoi la Commission met un prestataire dans une situation financièrement difficile en lui demandant de rembourser des sommes qu’elle lui a accordées tout en ayant toute l’information nécessaire pour rendre sa décision.

[42] Le prestataire a rempli à plusieurs reprises le questionnaire sur sa formation (octobre 2020Note de bas de page 14, janvier 2021Note de bas de page 15, juillet 2021Note de bas de page 16 et octobre 2021Note de bas de page 17). Il indique avoir parlé avec la Commission à plusieurs reprises concernant sa situation. La Commission a chaque fois réactivé sa demande de prestations suite à la transmission du formulaire des études. La Commission lui a aussi fait part que des assouplissements pour les étudiants avaient été mis en place, ce qui lui permettait de recevoir des prestations. Pourtant, ce n’est qu’en octobre 2021 que la Commission a rendu une décision concernant la non disponibilité du prestataire en raison de sa formation.

[43] Je comprends que la Commission peut réviser sa décision, mais je peux difficilement comprendre qu’elle prenne autant de temps pour le faire alors qu’elle a toute l’information nécessaire en main dès le départ. Cela a des conséquences majeures pour un prestataire qui se trouve à devoir rembourser une dette. Je suis d’avis que la Commission doit prendre en considération ces éléments lorsqu’elle rendra sa décision sur la question de la défalcation.

Conclusion

[44] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler au sens de la loi. C’est pourquoi je conclus qu’il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

[45] De plus, je n’ai pas compétence pour rendre une décision sur la question de la défalcation du trop payé. Néanmoins, j’invite la Commission à rendre une décision à ce sujet en prenant en considération les éléments précédemment mentionnés.

[46] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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