Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : EH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 900

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission d’en appeler

Partie demanderesse : E. H.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 27 juin 2022 (GE-22-1087)

Membre du Tribunal : Charlotte McQuade
Date de la décision : Le 14 septembre 2022
Numéro de dossier : AD-22-462

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Décision

[1] Je refuse la permission de faire appel, ce qui met un terme à l’appel.

Aperçu

[2] E. H. est le prestataire. Le 11 janvier 2022, la Commission de l’assurance-emploi a décidé qu’il n’avait pas droit aux prestations à compter du 2 mai 2021, parce qu’il n’avait pas prouvé sa disponibilité pour le travail pendant qu’il était aux études à temps plein. Cette décision a entraîné un trop-payé pour les prestations que le prestataire avait reçues.

[3] Le prestataire a porté la décision de la Commission en appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a décidé que le prestataire étudiait à temps plein et qu’il n’avait pas réfuté la présomption de non-disponibilité qui s’applique en droit aux étudiants à temps plein. La division générale a également décidé que le prestataire n’avait pas prouvé sa disponibilité pour le travail à partir du 2 mai 2021.

[4] Le prestataire veut maintenant porter la décision de la division générale en appel devant la division d’appel du Tribunal. Cependant, il doit obtenir la permission pour que son appel puisse aller de l’avant. Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de fait importante lorsqu’elle a décidé qu’il n’était pas disponible pour le travail. Il dit qu’il était bel et bien disponible pour travailler à temps plein parce qu’il avait eu l’habitude de le faire de mars à avril 2021, pendant qu’il suivait des cours d’études secondaires en ligne. Il ajoute que, du 2 mai à la fin de juin 2021, il ne suivait que deux cours en ligne, alors il pouvait travailler à temps plein.

[5] Je suis convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Je refuse donc la permission de faire appel. Par conséquent, l’appel du prestataire n’ira pas de l’avant.

Question en litige

[6] La division générale a décidé que le prestataire n’était pas disponible pour travailler à partir du 2 mai 2021. Peut-on soutenir qu’elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importante?

Analyse

[7] La procédure de la division d’appel comporte deux étapes. Le prestataire doit d’abord obtenir la permission de faire appel. Si la permission est refusée, l’appel s’arrête là. Si la permission est accordée, l’appel passe à la seconde étape, qui est l’examen sur le fond.

[8] Je dois refuser la permission de faire appel si je suis convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 1.

[9] La loi m’autorise à me pencher seulement sur certains types d’erreursNote de bas de page 2 :

  • Le processus d’audience de la division générale était inéquitable d’une certaine façon.
  • La division générale a commis une erreur de compétence (elle n’a pas décidé d’une question qu’elle aurait dû trancher ou a décidé d’une question qui dépassait sa compétence).
  • La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  • La division générale a commis une erreur de droit.

[10] Une chance raisonnable de succès signifie qu’il est possible de soutenir que la division générale a pu commettre au moins une des erreurs ci-dessusNote de bas de page 3.

On ne peut pas soutenir que la division générale a fondé sa décision à propos de la disponibilité du prestataire sur une erreur de fait importante

[11] On ne peut pas soutenir que la division générale a fondé sa décision, selon laquelle le prestataire n’était pas disponible pour travailler à partir du 2 mai 2021, sur une erreur de fait importante.

[12] La Commission a déclaré le prestataire inadmissible aux prestations à compter du 2 mai 2021, car il n’avait pas prouvé sa disponibilité pour le travail pendant qu’il était aux études à temps plein.

[13] Le prestataire en a appelé devant la division générale du Tribunal.

[14] La division générale devait décider si le prestataire avait prouvé sa disponibilité pour le travail à partir du 2 mai 2021Note de bas de page 4.

[15] La loi dit que les personnes qui étudient à temps plein sont présumées ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas de page 5.

[16] Cependant, elles peuvent réfuter la présomption (montrer qu’elle ne s’applique pas) si elles peuvent prouver qu’elles ont l’habitude de combiner le travail à temps plein et les études à temps pleinNote de bas de page 6. Une personne peut aussi réfuter la présomption en démontrant la présence de circonstances exceptionnellesNote de bas de page 7.

[17] Si la présomption est réfutée, la personne doit quand même prouver qu’elle est capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable.

[18] Pour évaluer la disponibilité, il faut examiner les trois éléments suivantsNote de bas de page 8 :

  • Le prestataire voulait-il retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert?
  • Le prestataire a-t-il fait des démarches pour trouver un emploi convenable?
  • Le prestataire a-t-il établi des conditions personnelles qui auraient pu limiter excessivement ses chances de retourner travailler?

[19] La division générale a conclu que le prestataire étudiait à temps plein lorsqu’il était au secondaire en mai et en juin 2021, puis au postsecondaire, qu’il a commencé en septembre 2021. Pour en arriver à cette décision, la division générale a déclaré que le prestataire n’avait pas contesté ce statut et que rien ne montrait le contraireNote de bas de page 9. Ainsi, la présomption de non-disponibilité s’appliquait au prestataire.

[20] La division générale s’est demandé si le prestataire avait réfuté cette présomption, mais a décidé que non parce qu’il n’a pas démontré qu’il avait réellement l’habitude de travailler à temps plein pendant qu’il étudiait à temps plein. Il n’a pas démontré de circonstance exceptionnelle non plusNote de bas de page 10.

[21] La division générale a ensuite examiné si le prestataire avait prouvé qu’il était disponible pour le travailNote de bas de page 11. Selon la division générale, le prestataire souhaitait sincèrement retourner sur le marché du travail. Elle estimait également qu’il avait fait assez de démarches pour trouver un emploi en mai et en juin 2021, et après décembre 2021, mais pas de juillet à décembre 2021. Selon la division générale, le prestataire avait aussi établi une condition personnelle qui faisait qu’il accordait la priorité à ses études, tant au secondaire qu’au postsecondaire, ce qui limitait excessivement ses chances de retourner sur le marché du travail. La division générale a donc conclu que le prestataire n’avait pas prouvé sa disponibilité pour le travail à partir du 2 mai 2021.

[22] Le prestataire soutient que la division générale a fondé sa décision, selon laquelle il n’était pas disponible pour travailler à partir du 2 mai 2021, sur des erreurs de fait importantes. Il dit qu’il était disponible pour travailler à temps plein pour les raisons suivantes :

  • Il avait travaillé à temps plein de mars à avril 2021, alors qu’il étudiait à l’école secondaire à distance.
  • Il n’avait que deux cours en ligne à l’école secondaire du 2 mai 2021 à la fin de juin 2021, alors il aurait pu travailler à temps plein.

[23] Ce ne sont pas toutes les erreurs de fait qui permettent à la division d’appel d’intervenir dans une affaire. Pour que la division d’appel intervienne dans un cas d’erreur de fait, il faut que la division générale ait fondé sa décision sur cette erreur. Il doit être question d’un fait essentiel. De plus, la conclusion de fait erronée doit avoir été tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments disponiblesNote de bas de page 12.

[24] La division générale savait que le prestataire avait seulement deux cours au secondaire du 2 mai 2021 à la fin de juin 2021, lorsqu’elle a établi qu’il était étudiant à temps plein.

[25] La division générale a précisé dans sa décision que le prestataire avait déclaré n’avoir que deux cours en mai et en juin 2021Note de bas de page 13.

[26] La preuve appuyait la conclusion de la division générale selon laquelle le prestataire était étudiant à temps plein. Le prestataire a déclaré dans un questionnaire sur sa formation daté du 14 mai 2021 qu’il suivait deux cours à l’école secondaire, l’un du 6 mai au 29 juin 2021 et l’autre du 29 avril au 22 juin 2021. Il a mentionné dans ce questionnaire qu’il consacrait de 15 à 24 heures par semaine à ses études et que son école considérait qu’il s’agissait d’un programme à temps pleinNote de bas de page 14.

[27] Le prestataire a également déclaré dans ce questionnaire que son programme postsecondaire, qui se déroulerait du 1er septembre 2021 au 1er juin 2022, était considéré comme un programme à temps plein et que sa participation était requise du lundi au vendredi en matinée et en après-midiNote de bas de page 15.

[28] L’enregistrement audio de l’audience de la division générale confirme que le prestataire a déclaré qu’il étudiait à temps plein, tant au secondaire qu’au postsecondaireNote de bas de page 16.

[29] Il n’est donc pas possible de soutenir que la division générale ait mal interprété ou mal compris le fait que le prestataire avait seulement deux cours au secondaire lorsqu’elle a décidé qu’il était étudiant à temps plein.

[30] La division générale savait aussi que le prestataire avait déjà travaillé à temps plein pendant ses études à temps plein.

[31] Plus précisément, la division générale a reconnu que le prestataire avait eu l’habitude de travailler à temps plein pendant ses études. Après avoir examiné les heures et les périodes de paie sur le relevé d’emploi de l’employeur du prestataire, du 29 mars au 4 mai 2021, la division générale a accepté que le prestataire ait travaillé presque à temps plein pendant quelques semaines. Cependant, la division générale a conclu que cette période de travail à temps plein parallèle à ses études à temps plein n’était pas suffisante pour réfuter la présomption de non-disponibilitéNote de bas de page 17.

[32] La division générale s’est aussi demandé si le prestataire avait démontré des circonstances exceptionnelles pour réfuter la présomption de non-disponibilité. La division générale a examiné sa charge de cours en mai et en juin 2021, mais aussi le fait que le prestataire devait suivre ces deux cours le matin, à différents jours. De plus, la division générale a tenu compte de la preuve du prestataire selon laquelle son horaire de cours lui permettait de travailler plus de 30 heures par semaine si l’on comprenait les fins de semaine. La division générale a également pris en considération que le prestataire a déclaré dans son questionnaire sur sa formation que s’il trouvait un emploi qui entrait en conflit avec ses cours, il préférerait se concentrer sur ses études. Compte tenu de ces faits, la division générale a décidé que le prestataire n’avait pas démontré de circonstance exceptionnelle. Elle a plutôt conclu que la priorité du prestataire était de terminer ses étudesNote de bas de page 18.

[33] La division générale est arrivée à une conclusion semblable pour la période où le prestataire était au postsecondaire, à compter du 8 septembre 2021. La division générale a tenu compte du fait que le prestataire devait suivre ses cours en personne les mardis et mercredis, et en ligne les jeudis et vendredis, de 9 h à 13 h chaque jour. Elle a aussi tenu compte de la preuve du prestataire qui indiquait qu’il travaillait les samedis et les lundis au même emploi qu’il avait quitté en mai 2021 et qu’il pouvait travailler après ses cours. La division générale a aussi noté que le prestataire avait indiqué, dans un questionnaire sur sa formation, qu’il préférerait terminer ses études plutôt qu’accepter un travail à temps plein qui entrait en conflit avec ses cours. Selon la division générale, ces faits montraient que la priorité du prestataire était les études. Il n’avait pas démontré de circonstance exceptionnelle qui permettait de réfuter la présomption de non-disponibilité.

[34] Quand la division générale a évalué si le prestataire avait réfuté ou non la présomption de non-disponibilité, elle a bel et bien tenu compte de son horaire d’études et de son habitude antérieure à combiner le travail à temps plein et les études. Par conséquent, il n’est pas possible de soutenir que la division générale a ignoré ces faits.

[35] À la limite, comme la division générale a conclu que le prestataire n’avait pas réfuté la présomption de non-disponibilité pendant ses études à temps plein, elle devait évaluer seulement s’il avait prouvé sa disponibilité pour le travail pendant la période où il n’était pas aux études, du 30 juin au 7 septembre 2021. Toutefois, elle a tout de même évalué si le prestataire avait prouvé sa disponibilité pendant toute la période d’inadmissibilité.

[36] Selon la division générale, le prestataire souhaitait sincèrement trouver du travail.

[37] La division générale a tenu compte des démarches de recherche d’emploi du prestataire et du fait qu’il est retourné à son emploi saisonnier à temps partiel où il a travaillé du 16 octobre au 12 décembre 2021. La division générale a décidé que, pour les mois de mai et de juin 2021, et après décembre 2021, le prestataire avait fait assez de démarches pour trouver un emploi convenable, mais que ce n’était pas le cas de juillet à décembre 2021. En fait, il n’a postulé à aucun emploi pendant cette période.

[38] La conclusion de la division générale selon laquelle le prestataire n’a présenté aucune demande d’emploi de juillet à décembre 2021 concordait avec la preuve dont elle disposait. Plus précisément, le prestataire a confirmé dans des documents fournis après l’audience qu’en juillet et en août, il n’avait postulé à aucun emploi. Il a expliqué que son ex-employeur lui avait demandé en septembre s’il voulait travailler à temps partiel d’octobre à décembre 2021, où il a travaillé à temps partiel les lundis et les samedis. Le prestataire mentionne qu’il a fait un suivi auprès de deux agences de placement temporaire après la fin de cet emploiNote de bas de page 19.

[39] La division générale a conclu que le prestataire avait limité excessivement ses chances de travailler, étant donné qu’il n’était pas prêt à abandonner ses études pour un emploi à temps plein si celui-ci était incompatible avec son horaire. Le prestataire considérait ses études comme sa priorité.

[40] C’est une conclusion que la division générale était en droit de tirer. Sa conclusion était conforme à la jurisprudence suivante de la Cour d’appel fédérale : le fait d’être disponible seulement pour travailler à des heures irrégulières, en dehors d’un horaire de cours qui limite beaucoup la disponibilité, ne correspond pas aux exigences de disponibilité de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 20. Je suis convaincue que la division générale a tenu compte de la situation particulière du prestataire. Elle était au courant de l’horaire de cours du prestataire, de sa présence requise aux cours et de son refus d’accepter un emploi à temps plein qui entrerait en conflit avec ses études.

[41] J’ai examiné le dossier et écouté l’enregistrement audio de l’audience de la division générale, et je n’ai trouvé aucun élément de preuve clé que la division générale a ignoré ou mal interprété lorsqu’elle a décidé que le prestataire n’était pas disponible pour travailler à compter du 2 mai 2021Note de bas de page 21.

[42] On ne peut pas soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, qu’elle aurait tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[43] Je comprends que le prestataire n’est pas d’accord avec la décision de la division générale et qu’il trouve le résultat injuste. Le prestataire me demande essentiellement de réévaluer la preuve et d’en arriver à une conclusion différente. Mais ce n’est pas le rôle de la division d’appel. Pour que l’appel puisse aller de l’avant, le prestataire doit démontrer qu’il est possible de soutenir que la division générale a commis une erreur révisable.

[44] Je ne peux pas intervenir dans une affaire lorsque la division générale applique des règles de droit bien établies aux faits, comme c’est le cas iciNote de bas de page 22.

[45] Dans sa demande à la division d’appel, outre les erreurs de fait alléguées, le prestataire n’a soulevé aucune autre erreur révisable, comme une erreur de compétence ou de droit. Il n’a signalé aucune iniquité procédurale, et je ne vois aucune preuve que la division générale a procédé de façon inéquitable.

[46] Après avoir examiné le dossier, la décision de la division générale et les arguments du prestataire pour appuyer sa demande de permission de faire appel, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Par conséquent, je refuse la permission de faire appel.

Conclusion

[47] Je refuse la permission de faire appel, donc l’appel n’ira pas de l’avant.

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