Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

La division générale (DG) a conclu que le prestataire était capable de travailler et disponible pour le faire du 6 janvier 2021 au 23 avril 2021, alors qu’il fréquentait l’école à temps plein, et qu’il n’était pas inadmissible aux prestations régulières de l’assurance-emploi (AE). La Commission a fait appel de cette décision à la division d’appel (DA), soutenant que la DG avait mal interprété ce que signifie le fait d’être disponible. Elle a aussi fait valoir que la DG n’avait pas su reconnaître que le visa d’étudiant du prestataire limitait sa disponibilité pour le travail. De plus la Commission a soutenu que la DG avait ignoré certaines des preuves en examinant si le prestataire était disponible pour le travail.

La DG a conclu que ni l’horaire de cours du prestataire ni son visa d’étudiant n’entravait sa disponibilité. Elle a accepté que les cours du prestataire étaient en ligne. Ainsi, la DG a conclu que l’horaire scolaire du prestataire était flexible et qu’il pouvait travailler à tout moment n’importe quel jour. Puisqu’il n’y avait aucune exigence relative à la présente en classe, rien n’aurait pu limiter le temps de travail du prestataire. Ne serait-ce que pour cette seule raison, la AD a conclu que la DG n’avait pas mal interprété ce que signifie le fait d’être disponible. La DA a ensuite examiné les décisions rendues par la Cour d’appel fédérale (CAF) et par la DA sur la question de la disponibilité. La DA a conclu qu’il était évident, depuis la décision de la CAF dans l’affaire Faucher que, lorsque les limites à la disponibilité d’un prestataire sont d’une telle importance, elles peuvent être concluantes dans la détermination de sa disponibilité. Elles peuvent l’être, et ce même si leprestataire veut retourner au travail aussitôt qu’un emploi convenable est offert et qu’il a fait des démarches pour trouver un emploi convenable.

Dans la présente affaire, la DG n’a pas considéré le visa d’étudiant du prestataire comme une entrave à sa disponibilité. La DA en est arrivée à une conclusion semblable, quoique pour des motifs différents. Être disponible pour plus de 20 heures de travail par semaine peut rendre un prestataire admissible aux prestations, mais cela dépend des faits. Certaines limites sont d’une telle importance qu’il n’est pas nécessaire d’examiner chacun des facteurs de la décision Faucher. Même si un visa d’étudiant constitue une limite importante, il ne rend pas automatiquement un prestataire inadmissible aux prestations. Il faudra cependant examiner les faits et déterminer la portée d’autres restrictions que la personne peut avoir.

La DA a ensuite conclu que la DG avait ignoré des éléments de preuve essentiels. Elle a constaté que la DG n’avait pas interrogé le prestataire au sujet des incohérences dans la preuve qu’il a fournie concernant sa disponibilité. La DA a jugé que l’horaire du prestataire était peut-être relativement flexible, mais que le reste de la preuve montrait qu’il existait d’autres limites étant donné qu’il était incapable de travailler (ou qu’il n’était pas prêt à le faire) certains matins et après-midis de la semaine. La DA a conclu que le prestataire n’était pas disponible pendant les heures de travail régulières pour chaque jour ouvrable de la semaine du 6 janvier 2021 au 25 mars 2021.

Par conséquent, la DA a accueilli l’appel et a conclu que le prestataire n’était pas disponible pour le travail entre le 6 janvier 2021 et le 25 mars 2021 en raison de son horaire de cours. La DA a renvoyé l’affaire à la DG pour que celle-ci aborde la question de la disponibilité du prestataire du 25 mars 2021 au 24 avril 2021.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : DP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 820

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie demanderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Tiffany Glover (avocate)
Partie défenderesse : D. P.

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 6 janvier 2022 (GE-21-2394)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Téléconférence
Date de la décision : Le 31 mai 2022
Personnes présentes à l’audience : Représentante de l’appelant
Partie défenderesse

Date de la décision : Le 26 août 2022
Numéro de dossier : AD-22-45

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] Le prestataire n’était pas disponible pour travailler du 6 janvier 2021 au 25 mars 2021 étant donné son horaire de cours. Par conséquent, il était inadmissible aux prestations d’assurance-emploi pendant cette période.

[3] La disponibilité du prestataire du 25 mars 2021 au 24 avril 2021 est indéterminée à ce stade. Je renvoie cette affaire à la division générale afin qu’elle puisse aborder cette question non résolue.

Aperçu

[4] La partie appelante, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, fait appel de la décision de la division générale.

[5] La division générale a conclu que la partie défenderesse, D. P. (le prestataire), était capable de travailler et disponible pour le faire du 6 janvier 2021 au 23 avril 2021 pendant qu’il étudiait à temps plein. La division générale a conclu que le prestataire n’était pas inadmissible au bénéfice de prestations régulières d’assurance-emploi.

[6] La Commission soutient que la division générale a commis des erreurs de droit et de fait. En particulier, la Commission soutient que la division générale a mal interprété ce que signifie être disponible pour travailler. La Commission affirme qu’elle n’a pas reconnu que le visa d’étudiant du prestataire l’empêchait d’être disponible pour travailler. La Commission soutient également que la division générale n’a pas tenu compte de certains éléments de preuve lorsqu’elle a examiné si le prestataire était disponible pour travailler.

[7] La Commission demande à la division d’appel d’accueillir l’appel et de conclure que le prestataire n’était pas disponible pour travailler. La Commission affirme que le prestataire ne devrait pas être admissible aux prestations. Si le prestataire n’est pas admissible aux prestations, cela entraînerait effectivement un trop-payé des prestations que la Commission a déjà versées au prestataire.

[8] Le prestataire demande à la division d’appel de rejeter l’appel. Sinon, il demande à la division d’appel de conclure qu’il était complètement disponible après que son cours a pris fin le 25 mars 2021.

Questions en litige

[9] Les questions en litige dans le présent appel sont les suivantes :

  1. a) La division générale a-t-elle mal interprété ce que signifie être disponible pour travailler?
  2. b) La division générale a-t-elle omis de tenir compte de certains éléments de preuve lorsqu’elle a examiné si le prestataire était disponible pour travailler?

Analyse

[10] La division d’appel peut intervenir dans les décisions de la division générale s’il y a des erreurs de compétence, de procédure, de droit ou certains types d’erreurs de faitNote de bas page 1. Dans cette affaire, la Commission soutient que la division générale a commis des erreurs à la fois de droit et de fait.

La division générale a-t-elle mal interprété ce que signifie être disponible au sens de la Loi sur l’assurance-emploi?

[11] La Commission soutient que la division générale a mal interprété ce que signifie être disponible pour travailler au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. La Commission soutient que si une partie prestataire impose une quelconque restriction à sa disponibilité, elle n’est pas disponible pour travailler et n’a donc pas droit à une prestation.

[12] La Commission soutient que le prestataire n’était pas disponible pour deux raisons :

  1. Son horaire de cours – il n’était pas en mesure de travailler le matin et l’après-midi les jours de semaine parce que cela entrait en conflit avec son horaire scolaire.
  2. Son visa d’étudiant – Son visa d’étudiant l’empêchait de travailler plus de 20 h par semaine.

[13] La Commission soutient que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a conclu que le prestataire n’avait pas de conditions personnelles qui limitaient indûment ses chances de trouver du travail.

La décision de la division générale

[14] La division générale a écrit ce qui suit :

[35] Le prestataire affirme que le fait de devoir assister à un cours n’était pas une condition personnelle qui limitait ses heures de travail. Ses cours devaient être offerts en personne, mais en raison de la COVID-19, tous les cours étaient en ligne. Donc, s’il manquait un cours en raison de son emploi, il pourrait se rattraper plus tardNote de bas page 2.

[36] Le prestataire déclare que pendant sa période d’examen du 26 mars 2021 au 23 avril 2021, il aurait été encore plus disponible pour travailler. Cependant, son visa d’étudiant international ne lui permettait de travailler que 20 heures par semaine pendant le semestre.

[37] Donc, ce sont les conditions du visa d’étudiant du prestataire — non pas les exigences de présence en classe — qui l’ont empêché de travailler plus de 20 heures par semaine.

[15] La division générale a conclu que ni l’horaire scolaire du prestataire ni son visa d’étudiant ne nuisaient à sa disponibilité. La division générale a conclu que le prestataire était disponible pour travailler au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[16] En ce qui concerne l’horaire scolaire du prestataire, la division générale a accepté que les cours du prestataire étaient offerts en ligne. Elle a donc constaté que son horaire scolaire était flexible et qu’il pouvait travailler n’importe quand. Il n’y avait aucune exigence de présence en classe qui aurait pu empêcher le prestataire de travailler. De ce seul point de vue, la division générale n’a pas mal interprété ce que signifie être disponible. Bien entendu, cela met de côté la question du visa d’étudiant et la question de savoir si la division générale a commis des erreurs de fait.

[17] Quant au visa d’étudiant du prestataire, il l’interdisait de travailler plus de 20 h par semaine.

[18] La division générale a conclu que ce n’était pas le prestataire qui s’était imposé la limite de 20 h de travail. Il n’avait aucun contrôle sur le nombre d’heures qu’il pouvait travailler en vertu de son visa d’étudiant, et il n’avait pas dit combien d’heures il pouvait travailler en vertu de ce visa. La restriction n’était donc pas une « condition personnelleNote de bas page 3 ».

[19] La division générale a constaté que la restriction de 20 h était différente des conditions comme la présence en classe, le type de travail, le lieu de travail ou la rémunération. Il y aurait eu un certain contrôle sur ce genre de restrictions. Par exemple, le prestataire aurait pu limiter sa recherche d’emploi à des emplois rémunérés à un certain salaire horaire. Cela aurait été considéré comme une « condition personnelle » parce que c’était quelque chose qu’il pouvait choisir et contrôler.

[20] Étant donné son visa d’étudiant, le prestataire ne pouvait pas travailler plus de 20 h par semaine, peu importait s’il pouvait ou voulait travailler davantage. Donc, la division générale n’a pas vu cela comme une condition personnelle.

[21] La division générale a également conclu que la restriction des heures du prestataire n’était pas une condition qui limitait indûment ses chances de retourner sur le marché du travail. La division générale a expliqué que la restriction n’était pas indûment limitative parce que le prestataire était tout aussi disponible qu’il l’avait été lorsqu’il travaillait auparavant.

[22] Mon analyse de la question de savoir si la division générale a mal interprété ce que signifie être disponible portera sur le visa d’étudiant du prestataire.

Les arguments du prestataire

[23] Le prestataire soutient que la division d’appel [sic] n’a commis aucune erreur. Il souligne qu’il est demeuré disponible autant qu’avant les mesures de confinement liées à la COVID-19. Il avait travaillé 20 h par semaine. Il prétend que la preuve a démontré que ses heures de travail étaient flexibles et qu’il aurait pu travailler à tout moment. Sa disponibilité n’était assujettie qu’aux limites de son visa d’étudiant qui le limitaient à 20 h par semaine.

Les arguments de la Commission

[24] La Commission soutient que la division générale a mal interprété la disponibilité en omettant de suivre la jurisprudence exécutoire de la Cour d’appel fédérale. La Commission s’appuie sur deux cas en particulier : LavitaNote de bas page 4 et LeblancNote de bas page 5.

[25] Dans la décision Leblanc, la Cour a conclu que le prestataire n’était pas disponible pour travailler. Un incendie de maison avait détruit tous ses biens, y compris ses vêtements et ses bottes de travail. Il voulait aller travailler, mais il n’a pas pu le faire parce qu’il n’avait pas les vêtements appropriés et était incapable de se rendre au travail. La Cour a conclu que la volonté de travailler n’est pas synonyme de la disponibilité.

[26] La Cour a cité une autre décision en concluant que lorsqu’il décide si une personne est disponible, le juge de faits doit

… déterminer s’il se trouve aux prises avec des empêchements ayant pour effet d’entraver sa volonté de travailler. Par empêchement, on entend toute contrainte de nature à priver quelqu’un de son libre choix… Il va sans dire qu’une personne ne peut être considérée comme étant disponible lorsqu’elle avoue ne pas l’être ou lorsqu’elle se trouve dans une situation qui l’empêche de l’être. Le versement des prestations est subordonné à la disponibilité d’une personne, non à la justification de son indisponibilitéNote de bas page 6.

[27] La Commission note que la division générale n’a pas fait référence à Leblanc ni aux principes énoncés dans cette affaire.

[28] La commission se fie également à la décision RJ. que j’ai rendue en avril 2022Note de bas page 7.

R.J. – un examen des décisions de la Cour d’appel fédérale et de la division d’appel

[29] Dans l’arrêt R. J., j’ai examiné une série de décisions de la Cour d’appel fédérale sur la question de la disponibilité. Il s’agissait de Gagnon,Note de bas page 8 Primard,Note de bas page 9 Duquet,Note de bas page 10 et BertrandNote de bas page 11.

[30] À part Bertrand, toutes ces décisions portaient sur la disponibilité d’un étudiant pour travailler. Dans l’affaire Gagnon, le prestataire ne s’était borné à être disponible que le vendredi et la fin de semaine. La Cour a conclu qu’au sens de l’article 18 de la Loi sur l’assurance-emploi, Gagnon n’était pas disponible les jours ouvrables d’une période de prestations.

[31] Comme je l’ai souligné dans l’arrêt R.J., la Cour a tiré cette conclusion en raison de l’article 32 du Règlement sur l’assurance-emploi. L’article définit chaque jour de la semaine, sauf le samedi et le dimanche, comme un jour ouvrable :

32. Pour l’application de l’article 18 de la Loi, est un jour ouvrable chaque jour de la semaine sauf le samedi et le dimanche.

[32] De même, dans l’affaire Primard, la prestataire était disponible le soir et la fin de semaine en raison de son horaire de cours. La Cour a conclu que cela montrait qu’elle imposait des conditions personnelles qui pourraient limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail. Finalement, dans l’affaire Duquet, le prestataire n’était disponible qu’à certains moments certains jours, ce qui limitait sa disponibilité.

[33] L’affaire Bertrand ne portait pas sur un étudiant. La prestataire n’était disponible que le soir de 16 h à 22 h, ou minuit, cinq jours par semaine. Elle avait été incapable de trouver une gardienne fiable pendant la journée. La Cour a conclu que, même si Bertrand était disponible pour travailler de 30 à 40 heures par semaine le soir, elle n’était pas disponible pour travailler aux fins de la Loi sur l’assurance-emploi.

[34] Bertrand établit qu’une partie prestataire doit être disponible pendant les heures normales de travail pour chaque jour ouvrable de la semaine. Il n’est pas pertinent qu’une partie prestataire ne peut travailler que le soir parce qu’elle est incapable de trouver une gardienne.

[35] J’ai également examiné J.D.Note de bas page 12, une décision de 2019 de la division d’appel. La prestataire, J.D., n’a cherché que du travail à temps partiel qui ne nuisait pas à son horaire de cours à temps plein. La division d’appel a conclu que J.D. n’avait pas indûment limité ses chances de retourner sur le marché du travail. En effet, elle est demeurée disponible pour travailler autant qu’auparavant. Ses études ne limitaient pas ses perspectives d’emploi plus qu’elles ne le faisaient avant sa perte d’emploi. La division d’appel a conclu que J.D. était disponible pour travailler.

[36] Selon la Commission, l’affaire J.D. est distincte, car la décision ne comprend pas de détails importants sur la disponibilité de J.D. Elle était disponible de 16 à 20 heures par semaine, mais on ne savait pas sur quel jour de la semaine ces heures étaient réparties.

[37] À la suite de mon examen de ces décisions, j’ai conclu que le fait de limiter sa disponibilité à certaines heures seulement certains jours, y compris le soir et la fin de semaine, créait des conditions personnelles qui pourraient limiter indûment les chances de retourner sur le marché du travail. En fin de compte, une partie prestataire doit être disponible pendant les heures normales de travail pour chaque jour ouvrable de la semaine.

Examen des décisions récentes de la division d’appel sur la disponibilité

[38] Depuis avril 2022, la division d’appel a rendu d’autres décisions sur la question de la disponibilité des étudiants.

R.V.Note de bas page 13

[39] Le prestataire suivait une formation à temps plein. Il consacrait 35 h par semaine, soit environ cinq heures par jour, à ses études. Il n’était pas disponible pour travailler de deux à trois jours par semaine. Il n’avait pas à suivre de cours, mais il suivait habituellement une formation entre 9 h et 17 h pendant la semaine.

[40] La division d’appel a examiné les décisions de la Cour d’appel fédérale. En plus de Bertrand, Primard et Duquet, la division d’appel s’est également fiée à VézinaNote de bas page 14, RideoutNote de bas page 15 et GauthierNote de bas page 16, les résumant ainsi :

  • Dans l’affaire Vézina, la Cour a suivi la décision Bertrand et a conclu que l’intention du prestataire de travailler le soir et la fin de semaine démontrait un manque de disponibilité pour travailler au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.
  • Dans l’affaire Rideout, la Cour a conclu que le fait que le prestataire était disponible pour travailler seulement deux jours par semaine et la fin de semaine limitait sa disponibilité pour un travail à temps plein.
  • Dans l’affaire Gauthier, la Cour a souligné qu’un jour ouvrable excluait la fin de semaine aux termes du Règlement sur l’assurance-emploi et elle a conclu que la limitation de la disponibilité pour le travail au soir et à la fin de semaine constitue une condition personnelle pouvant limiter indûment les chances de retourner sur le marché du travail.

[41] Dans l’affaire R.V. la division d’appel a tiré les mêmes conclusions que j’ai tirées dans l’affaire R.J. Selon le membre, bien qu’une partie prestataire puisse présenter une demande de prestations fondée sur un travail à temps partiel, elle ne peut pas établir de conditions personnelles qui pourraient limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail. Le fait de chercher un emploi qui conviendrait à un horaire scolaire constitue une condition personnelle qui pourrait limiter indûment les chances du prestataire de retourner sur le marché du travail.

K.J. et S.S.

[42] La division d’appel a rendu ses conclusions relatives aux affaires K.J.Note de bas page 17 et S.S.Note de bas page 18 des semaines après R.V. Dans les deux cas, la division d’appel a conclu que la définition de la disponibilité était désuète. La division d’appel a conclu que le marché de travail avait évolué depuis Bertrand et qu’il n’était plus raisonnable d’exiger nécessairement qu’une partie prestataire soit disponible pendant les heures normales de travail pour chaque jour ouvrable de la semaine.

[43] La division d’appel a conclu qu’une partie prestataire qui limitait sa disponibilité au travail à temps partiel ou à des heures irrégulières pouvait toujours être disponible pour travailler, surtout s’il pouvait établir un lien entre son emploi habituel (travail antérieur) et les restrictions actuellesNote de bas page 19. La division d’appel a conclu qu’une personne qui restreint sa disponibilité d’une façon pourrait être en mesure de compenser en faisant preuve de flexibilité d’une autre façonNote de bas page 20.

[44] La division d’appel a déclaré qu’il demeurait important de savoir si une partie prestataire avait imposé des restrictions personnelles qui limitaient indûment ses chances de retourner au travail. Mais la division d’appel a dit qu’il était tout aussi important de se demander si la partie prestataire avait démontré qu’elle voulait retourner au travail le plus tôt possible. Il est tout aussi important de se demander si la partie prestataire a fait des efforts sérieux et intensifs pour trouver un nouvel emploi convenable.

[45] La division d’appel a conclu que cette approche était conforme à Faucher. Dans cette affaire-là, la Cour d’appel fédérale a établi trois facteurs qui, selon elle, doivent tous être pris en compte au moment d’évaluer la disponibilitéNote de bas page 21. Voici les facteurs :

  • La personne souhaite retourner travailler dès qu’un emploi convenable est disponible.
  • La personne a fait des démarches raisonnables pour obtenir un emploi convenable.
  • La personne a établi des conditions personnelles qui pourraient limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.

[46] La division d’appel a conclu qu’il s’agissait d’une erreur que d’ignorer un seul de ces facteursNote de bas page 22. Selon cette approche, la division d’appel a décidé qu’il était possible qu’une partie prestataire établisse des conditions ou des obstacles à sa recherche d’emploi, tout en demeurant disponible pour travailler.

S.S.

[47] Dans l’affaire S.S., le prestataire avait des restrictions importantes, notamment un horaire de classe inflexible et un permis d’études qui le limitaient à un maximum de 20 h de travail par semaineNote de bas page 23. Cependant, la division d’appel a déclaré que les restrictions n’étaient pas déterminantes quant à la disponibilité du prestataire, une fois évaluées en rapport avec d’autres considérations.

[48] Ces considérations comprenaient le fait que S.S. avait l’habitude d’étudier tout en travaillant et à trouver des emplois dont l’horaire de travail s’adaptait à son horaire de cours. De plus, S.S. avait effectué une recherche d’emploi approfondie, en dehors de sa profession habituelle, dans une vaste région géographique. Il y avait beaucoup de possibilités d’emploi dans son domaine. Finalement, sa disponibilité n’a pas changé après avoir perdu son emploi.

[49] La division d’appel a reconnu la série de décisions issues de la Cour fédérale d’appelNote de bas page 24. Toutefois, la division d’appel a conclu que les faits et la preuve dans ces cas étaient largement différents, surtout en ce qui a trait aux antécédents professionnels et aux démarches pour obtenir un emploi.

[50] La division d’appel a conclu que l’affaire Leblanc n’était pas liée de façon pertinente à la question de la disponibilité. La division d’appel a conclu que cette affaire ne portait pas sur les considérations de l’arrêt Faucher. Elle a plutôt conclu que l’affaire portait sur la volonté de la personne à travailler, laquelle est infirmée par son incapacité à travaillerNote de bas page 25.

[51] La division d’appel a décidé que l’analyse de la disponibilité est fortement axée sur les faits et qu’elle repose sur une « approche contextuelle ». Ainsi, lors de l’évaluation de la disponibilité, les antécédents professionnels et les efforts de recherche d’emploi du prestataire pourraient l’emporter sur toute restriction. La division d’appel a reconnu que, bien que l’approche soit flexible, elle pourrait se faire au détriment de la prévisibilitéNote de bas page 26.

K.J.

[52] La division d’appel a également adopté une approche contextuelle dans l’affaire K.J. La division d’appel a écrit ce qui suit : « L’évaluation de la disponibilité d’une personne nécessite une analyse hautement contextuelle et axée sur les faitsNote de bas page 27 ».

[53] Le permis d’études de K.J. imposait une limite de 20 h de travail. La division d’appel a conclu que l’horaire de formation flexible et les antécédents professionnels de K.J. constituaient des facteurs importants à prendre en considération. La division d’appel a souligné que les parties étaient d’accord pour dire que ces facteurs auraient dû être inclus dans l’analyse de la disponibilité. La division d’appel a conclu qu’il aurait été erroné de limiter l’analyse à la question de savoir s’il y avait des restrictions qui limitaient indûment les chances du prestataire de retourner sur le marché du travailNote de bas page 28.

[54] La division d’appel a conclu qu’il était également important de savoir si certaines restrictions étaient imposées par les prestataires. La division d’appel a reconnu que, parfois, une partie prestataire n’a aucun contrôle sur les facteurs qui limitent sa disponibilité.

[55] La division d’appel a conclu que les restrictions de K.J., y compris celles imposées par son permis d’études, ne limitaient pas trop ses chances de retourner au travail. Voici pourquoi :

  • K.J. avait l’habitude d’étudier et de travailler régulièrement à temps partiel.
  • K.J. n’a eu aucune difficulté à trouver du travail peu après son arrivée au Canada.
  • Sa disponibilité est demeurée la même avant et après la perte de son emploi.
  • K.J. avait un horaire de formation flexible qui ne présentait aucun obstacle au retour au travail.
  • Il a fait des efforts sérieux et intensifs pour trouver un nouvel emploi, tant dans son domaine habituel que dans plusieurs autres domaines.

Interprétation de la disponibilité au sens de la Loi sur l’assurance-emploi

[56] Lorsqu’il y a des différences d’approche dans ces affaires, je m’en remets à la Cour d’appel. Je suis liée par les motifs énoncés dans ces décisions. Certains concepts et lignes directrices ont ressurgi :

  • La définition du concept de disponibilité comporte une question de droit : Primard, qui renvoie à Vézina et FaucherNote de bas page 29, et RideoutNote de bas page 30. Son application est une question à la fois de droit et de faitNote de bas page 31. Dans l’affaire Faucher, la Cour a déclaré que la disponibilité d’une partie prestataire est une question de fait et qu’elle exige une évaluation de la preuveNote de bas page 32.
  • La question de la disponibilité est objective. Cela ne peut pas dépendre des raisons pour lesquelles il y a des restrictions à la disponibilité, sinon cela entraînerait « une exigence très variable, tributaire des raisons particulières qu’invoque l’intéressé pour expliquer son manque relatif de disponibilitéNote de bas page 33 ».
  • Une partie prestataire doit être disponible pendant les heures régulières de travail chaque jour ouvrable de la semaineNote de bas page 34.
  • En général, les trois facteurs de l’arrêt Faucher doivent être pris en compte, sinon cela pourrait mener à un résultat qui n’a aucun lien réel avec toutes les circonstancesNote de bas page 35.
  • Si les restrictions sont importantes, cela peut signifier qu’il n’est plus nécessaire d’analyser les deux facteurs Faucher restantsNote de bas page 36. Cela a été le résultat de certaines décisions de la Cour d’appel fédérale rendues après l’arrêt Faucher.

[57] Bien que l’arrêt Faucher exige que l’on tienne compte des trois facteurs, la Cour d’appel fédérale a rendu depuis plusieurs décisions qui n’ont pas tenu compte de tous les facteurs.

[58] Dans Loder, par exemple, la Cour a remarqué que la prestataire avait imposé des restrictions quant au salaire qu’elle serait prête à accepter pour un emploi à temps plein (bien que la Cour ait pris note des conclusions du conseil arbitral. Le conseil a conclu que la prestataire avait l’habitude de travailler tout en étudiant et qu’elle cherchait activement un emploi à temps plein.) Dans Gagnon, Gauthier et encore dans Duquet, la Cour a signalé les restrictions des prestataires, mais n’a rien dit sur les autres facteurs de Faucher.

[59] Il est clair, d’après les décisions qui font autorité depuis l’arrêt Faucher, que lorsque les restrictions imposées par la partie prestataire sont importantes, elles peuvent être déterminantes quant à la question de la disponibilité. Elles peuvent être décisives, même lorsque la personne veut retourner travailler dès qu’un emploi convenable est disponible, et même lorsqu’elle a fait des efforts pour trouver un emploi convenable.

[60] Dans l’affaire Faucher, le prestataire avait mis sur pied une petite entreprise dans le domaine de la toiture que le conseil arbitral et le juge-arbitre ont considéré comme restrictive. Le conseil arbitral a conclu que le développement d’une petite entreprise de couverture était une restriction parce qu’il limiterait les chances du prestataire d’être embauché de nouveau par des concurrents. Le juge-arbitre a conclu que l’entreprise bornerait le prestataire au domaine de l’installation et réparation de toitures.

[61] Mais Faucher a mis sur pied l’entreprise à la mi-février, lorsque la plupart des couvreurs étaient au chômage. Faucher avait un désir continu de trouver un emploi, et il n’y avait pas de doute non plus qu’il cherchait du travail.

[62] La Cour s’est demandé en quoi le développement d’une petite entreprise limitait nécessairement les possibilités d’emploi de Faucher. Il est clair que la Cour doutait que le développement d’une petite entreprise équivalait à une restriction.

[63] La nature de la restriction n’était pas très claire ou importante dans le cas de Faucher. Pour cette raison, il convenait d’examiner les deux autres facteurs de l’arrêt Faucher dans ce contexte. Autrement dit, la restriction personnelle dans cette affaire n’était pas si importante qu’elle aurait indûment limité les chances du prestataire de retourner au travail. La Cour a conclu que Faucher était disponible pour travailler.

Il n’est pas nécessaire que la restriction soit imposée par la partie prestataire pour que celle-ci ne soit pas considérée comme disponible

[64] La division générale a conclu que le prestataire n’avait pas le contrôle des conditions imposées par son visa d’étudiant. Par conséquent, comme il n’a pas établi la condition, elle a conclu qu’il n’avait pas de conditions personnelles qui limitaient indûment ses chances de trouver un emploi. En fait, il est demeuré disponible autant qu’auparavant.

[65] Bien que cette logique présente un certain attrait, elle ne reflète pas ce que la Cour a dit dans l’arrêt Leblanc sur la question de la disponibilité. La Cour a adopté les commentaires du juge-arbitre dans l’arrêt Sarkis. Ces commentaires méritent d’être répétés :

Il va sans dire qu’une personne ne peut être considérée comme étant disponible lorsqu’elle avoue ne pas l’être ou lorsqu’elle se trouve dans une situation qui l’empêche de l’être. (Je souligne)

[66] Autrement dit, peu importe la façon dont la restriction est formulée, qu’elle soit imposée par la personne ou non. Ce qui importe, c’est que la personne « se trouve dans une situation qui l’empêche d’être disponible ».

La Cour d’appel fédérale n’a pas traité des cas de visa d’étudiant

[67] Aucune des parties ne m’a renvoyé à des décisions de la Cour d’appel fédérale ni de la Cour fédérale qui traitent d’un étudiant ayant un nombre limité d’heures de disponibilité pour travailler en raison d’un visa ou d’un permis d’études. Jusqu’à présent, les causes portaient sur les horaires scolaires.

[68] Dans l’affaire Primard, la Cour d’appel fédérale a conclu que la prestataire n’était pas disponible parce qu’elle limitait sa disponibilité au soir et à la fin de semaine.

[69] Mais il y avait aussi la question du prêt étudiant de Primard. Les conditions de son prêt ne l’autorisaient pas à travailler. La Cour a indiqué que le conseil arbitral aurait dû tenir compte de ce fait dans son analyse de la disponibilité. La Cour a laissé entendre qu’une telle restriction signifiait que la partie prestataire n’était pas disponible.

[70] La Cour n’a pas indiqué si, hypothétiquement, Primard aurait été disponible si les conditions de son prêt d’études l’avaient autorisée à travailler à temps partiel.

[71] Les cours fédérales ne semblent pas avoir traité des cas de visa d’étudiant. La division d’appel a examiné cette question dans K.J. et S.S.

[72] À l’exception des décisions K.J. et S.S., il existe au moins une autre décision qui traite directement de la situation du prestataire. C’est le cas de la décision Graveline, dans laquelle le juge-arbitre a rejeté l’appel :

À notre avis, le conseil arbitral a soit laissé de côté soit négligé des preuves fort claires et non contestées de l’université où le requérant était inscrit comme étudiant de doctorat à plein temps, à savoir que ce dernier, lorsqu’il était inscrit à ce titre, ne pouvait effectuer plus de 16 heures de travail par semainesNote de bas page 37.

[73] On a rendu la décision de Graveline avant Faucher. Le juge-arbitre n’a pas indiqué si le prestataire voulait retourner au travail dès qu’un emploi convenable était disponible, ni s’il avait fait des efforts raisonnables pour trouver un emploi convenable. Malgré cela, le seul facteur décisif quant au rejet de la disponibilité du prestataire était le fait qu’il ne pouvait travailler plus de 16 h par semaine.

[74] Il est clair d’après Graveline qu’une partie prestataire n’est pas disponible pour travailler au sens de la Loi sur l’assurance-emploi si on ne la permet pas de travailler un certain nombre d’heures.

[75] Cependant, il y avait peu de renseignements généraux dans l’affaire Graveline; on n’a pas su si le prestataire était disponible pendant les heures régulières de travail chaque jour ouvrable de la semaine. Ces renseignements auraient été utiles. Si ce prestataire n’avait pas été disponible pendant les heures régulières de travail pour chaque jour ouvrable de la semaine, cela aurait mis fin à la discussion. De toute évidence, il n’aurait pas été disponible.

[76] La plupart des affaires de la Cour d’appel fédérale portent en grande partie sur la disponibilité de la partie prestataire en termes d’heures et de jours de la semaine pendant lesquels elle est prête à travailler ou est en mesure de le faire. Toutefois, le visa d’étudiant du prestataire impose un type de restriction très différent. Ce type de restriction est semblable au fait de se limiter à un travail à temps partiel, étant donné le nombre limité d’heures que le prestataire est disponible. Pour cette raison, je vais maintenant me concentrer sur les prestataires qui se limitent au travail à temps partiel.

Le travail à temps partiel n’entraîne pas automatiquement l’inadmissibilité

[77] Je prends note des arguments de la Commission sur le travail à temps partiel. La Commission affirme que le fait d’être disponible pour un emploi à temps partiel ou de chercher exclusivement un emploi à temps partiel peut permettre à une partie prestataire d’avoir droit à des prestations d’assurance-emploiNote de bas page 38. La division d’appel accepte que les étudiants qui cherchent un emploi à temps partiel puissent avoir droit à des prestationsNote de bas page 39.

[78] Mais la Commission dit que l’analyse doit être axée sur les faits, de sorte que ce ne sont pas tous les étudiants à temps partiel qui auront droit à des prestations. L’admissibilité dépendra des faits.

[79] D’après ce que je comprends de ces observations, le fait de chercher un emploi à temps partiel, par exemple, en fonction d’un horaire scolaire, signifierait qu’une personne n’est pas disponible. Mais, si elle cherche un emploi à temps partiel sans aucune restriction de ce genre, cela devrait vraisemblablement signifier qu’elle est disponible.

Résumé et conclusions concernant la question du visa d’étudiant du prestataire

[80] Les prestataires qui ont des heures de travail limitées en raison d’un visa d’étudiant sont traités comme les personnes qui cherchent un emploi à temps partiel. De toute évidence, les deux ne cherchent pas à travailler à temps plein et ne sont pas disponibles pour le faire.

[81] Tout comme un étudiant qui cherche à travailler à temps partiel ou qui est disponible pour un travail à temps partiel, un prestataire qui a un visa d’étudiant le limitant à 20 h de travail par semaine ne devrait pas être automatiquement inadmissible aux prestations.

[82] Si un étudiant qui cherche à travailler à temps partiel ou qui est disponible pour travailler à temps partiel peut avoir droit à des prestations, on ne sait pas pourquoi un prestataire qui a un visa d’étudiant n’est pas admissible aux prestations, alors que les deux sont disponibles pour travailler dans environ la même mesure.

[83] La Commission affirme qu’un étudiant qui cherche un emploi à temps partiel peut avoir droit à des prestations, selon les faits. Si la personne est disponible pendant les heures régulières de travail chaque jour ouvrable de la semaine, il semblerait qu’elle pourrait avoir droit à des prestations. Selon ce raisonnement, il semblerait qu’une partie prestataire qui a un visa d’étudiant pourrait également avoir droit aux prestations, si elle aussi est disponible pendant les heures régulières de travail chaque jour ouvrable de la semaine et si elle n’a pas d’autres restrictions qui limiteraient indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.

[84] En l’espèce, outre le fait de limiter le prestataire à 20 h de travail par semaine, son visa d’étudiant ne précisait pas quand il pouvait travailler. Par exemple, il ne se limitait pas à travailler le soir ou la fin de semaine. En ce qui concerne le visa d’étudiant, le prestataire aurait pu travailler pendant les heures régulières de travail chaque jour ouvrable de la semaine. Il affirme qu’il aurait pu travailler [traduction] « à n’importe quel moment… [Il] n’avait pas de temps fixe pour [ses] cours. C’était flexibleNote de bas page 40 ».

[85] Bref, le visa d’étudiant d’une partie prestataire ne peut à lui seul l’empêcher de recevoir des prestations d’assurance-emploi, s’il n’y a pas d’autres restrictions. L’analyse du cas des prestataires qui ont un visa d’étudiant doit être axée sur les faits, tout comme celle qui porte sur les prestataires qui cherchent à travailler à temps partiel ou qui ne sont disponibles qu’à temps partiel.

[86] La division générale n’a pas cru que le visa d’étudiant du prestataire nuisait à sa disponibilité. Je suis arrivée à une conclusion semblable, mais pour des raisons différentes. Le fait d’être disponible pour travailler jusqu’à 20 h par semaine peut permettre à une partie prestataire d’avoir droit à des prestations, mais cela dépend des faits.

[87] Certaines restrictions sont si importantes qu’il est inutile d’examiner chacun des facteurs de l’arrêt Faucher. Bien qu’un visa d’étudiant constitue une restriction importante, il n’empêche pas automatiquement une personne de recevoir des prestations. Cependant, il sera nécessaire d’examiner les faits et de connaître la portée de toute autre restriction que le prestataire pourrait avoir.

La division générale a-t-elle négligé certains éléments de preuve lorsqu’elle a examiné la disponibilité pour travailler du prestataire?

[88] La Commission soutient également que la division générale a négligé des éléments de preuve. La Commission affirme que ces éléments de preuve montrent que le prestataire a établi des conditions personnelles qui ont indûment limité ses chances de trouver un emploi.

[89] La Commission affirme que ces éléments de preuve étaient importants, car ils pouvaient démontrer que le prestataire n’était pas disponible pour travailler. Une partie prestataire doit être disponible pour travailler, sinon elle n’a pas droit aux prestations d’assurance-emploi.

[90] Ainsi, si la division générale n’a pas tenu compte des éléments de preuve montrant que le prestataire a établi des conditions personnelles qui pourraient limiter ses chances de retourner au travail, elle aurait pu décider que le prestataire n’était pas disponible pour travailler. Dans ce cas, il aurait fallu conclure qu’il n’avait pas droit à des prestations d’assurance-emploi.

La décision de la division générale

[91] La division générale a conclu que le prestataire n’avait pas établi de conditions personnelles qui auraient pu indûment limiter ses chances de réintégrer le marché du travail, comme l’exigence de la présence en classeNote de bas page 41.

[92] La division générale a conclu que la seule restriction à laquelle le prestataire faisait face était le nombre d’heures qu’il pouvait travailler chaque semaine en raison de son visa d’étudiant. Son visa d’étudiant ne lui permettait de travailler que 20 h par semaine. J’ai déjà abordé la question du visa d’étudiant, alors je me concentrerai sur l’horaire scolaire du prestataire.

[93] La division générale a conclu que les étudiants n’ont pas à être plus disponibles qu’ils l’étaient dans leur emploi précédent. Pour le prestataire, la division générale a conclu que cela signifiait qu’il n’avait pas à chercher un emploi à temps plein. La division générale a conclu que le prestataire n’avait pas limité indûment ses chances de retourner au travail alors qu’il n’était disponible que pour un travail à temps partiel.

La preuve négligée par la division générale selon la Commission

[94] La division générale a examiné le visa d’étudiant du prestataire pour savoir s’il représentait une condition personnelle qui pourrait limiter ses chances de retourner au travail. Mais la Commission soutient qu’il y avait d’autres éléments de preuve que la division générale devait également prendre en considération.

[95] La Commission soutient qu’il y avait d’autres éléments de preuve montrant que le prestataire avait établi des conditions personnelles. La Commission soutient que la division générale a négligé les éléments de preuve suivants :

  • Demande de prestations d’assurance-emploi – le formulaire de demande demandait au prestataire s’il était obligé d’assister à des cours ou séances prévus. Le prestataire a répondu « ouiNote de bas page 42 ».
  • Document Renseignements supplémentaires – Le prestataire aurait dit à la Commission au téléphone qu’il ne quitterait pas sa formation ni son cours si un ou l’autre l’empêchait d’avoir un emploi à temps pleinNote de bas page 43.
  • Questionnaire d’information sur le cours de formation – Le prestataire a répondu qu’il avait l’intention de trouver un emploi à temps plein tout en suivant un cours d’instruction. Il a également répondu qu’il n’était pas disposé à modifier son horaire de cours pour accepter du travailNote de bas page 44.
  • Dans le même questionnaire, le prestataire a indiqué les jours et les heures qu’il était prêt à travaillerNote de bas page 45. Il a dit qu’il était disponible le mardi et le jeudi de 15 h à minuit, et du vendredi au dimanche de 8 h à midi. Il n’a pas dit qu’il était prêt à travailler le lundi ou le mercredi.
  • Document Renseignements supplémentaires – le prestataire aurait dit à la Commission au téléphone qu’il n’était disponible pour travailler que le soir et la fin de semaine parce que ses études étaient prioritaires pendant la journée. Il a déclaré qu’il n’était pas en mesure de travailler à temps plein parce que son horaire scolaire était trop chargé. Il n’avait pas assez de temps pour travailler à temps pleinNote de bas page 46.

[96] En général, un décideur n’a pas à se référer à tous les éléments de preuve qui lui sont présentés. Mais le décideur doit tenir compte de tout élément de preuve qui pourrait avoir une certaine incidence sur les enjeux, voire en changer le résultat. La Commission soutient que cet élément de preuve répond à ce critère.

Les arguments de la Commission

[97] La Commission dit que la preuve était critique. Elle aurait pu changer le résultat.

[98] La Commission soutient également que la preuve [traduction] « contredisait directement les conclusions de la division générale au sujet des restrictions personnelles du prestataire quant à sa disponibilité, ce qui en fait une erreur de fait abusive et arbitraireNote de bas page 47 ».

[99] Pour toutes ces raisons, la Commission estime que la division générale aurait dû se pencher sur cette preuveNote de bas page 48.

La division générale a négligé certains éléments de preuve

[100] Devant division générale, le prestataire a soutenu qu’il n’avait pas de conditions personnelles à part son visa d’étudiant. Il a nié avoir dû suivre des cours. En raison de la COVID-19, tous ses cours étaient en ligne. Il pouvait suivre des cours en tout temps.

[101] Toutefois, les arguments et la preuve du prestataire à l’audience de la division générale ne rejoignaient pas les déclarations qu’il avait faites dans sa demande ni les déclarations qu’il avait faites à la Commission. La division générale n’a pas abordé les incohérences dans la preuve présentée à l’audience ni celles qui se trouvent dans sa décision.

[102] Il y a aussi la question des appels téléphoniques du prestataire avec la Commission en septembre et en novembre 2021. Trois mois avant l’audience devant la division générale, le prestataire a déclaré qu’il ne quitterait pas sa formation ni son cours si un ou l’autre l’empêchait d’avoir un emploi à temps plein. Le dernier appel téléphonique a eu lieu dans les six semaines suivant l’audience devant la division générale, et le prestataire a déclaré qu’il ne pouvait travailler que le soir et la fin de semaine.

[103] Le membre de la division générale n’a fait référence à aucun de ces éléments de preuve de septembre ou de novembre 2021. La division générale aurait dû s’en occuper parce qu’elle a laissé entendre que le prestataire avait imposé des restrictions personnelles qui limitaient ses chances de trouver du travail. La preuve semble également contredire les déclarations que le prestataire a faites à l’audience devant la division générale.

Réparation

[104] Ayant conclu que la division générale a négligé des éléments de preuve essentiels, je dois décider comment corriger cette erreur.

[105] J’ai deux options : je peux renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen, ou je peux substituer ma propre décision. D’habitude, je substitue ma propre décision lorsque les faits sous-jacents ne sont pas contestés et le dossier de preuve est complet. Je dois également être convaincue qu’aucune des parties n’allègue qu’elle n’a pas eu droit à une audience équitable devant la division générale ou qu’elle n’a pas eu une chance raisonnable de présenter son cas devant la division générale.

[106] Les parties ne s’entendent pas sur la preuve concernant les engagements scolaires du prestataire, mais je peux réévaluer la preuveNote de bas page 49. Malgré le désaccord des parties au sujet de la preuve, j’estime qu’il y a un dossier de preuve suffisant pour que je puisse trancher la plupart des questions.

[107] Aucune des parties n’a laissé entendre que le processus devant la division générale était injuste. La division générale a donné aux parties une occasion équitable de présenter leurs arguments et d’expliquer la preuve.

[108] La division générale n’a pas demandé au prestataire pourquoi il y avait des incohérences dans sa preuve concernant sa disponibilité. Mais le prestataire a reconnu qu’il avait dit que son horaire scolaire était fixe. Il a essayé d’expliquer pourquoi il avait présenté ce témoignageNote de bas page 50. Il a expliqué que, même s’il avait donné un horaire de cours, les cours étaient asynchrones. Il a expliqué qu’il était tout à fait flexible et qu’il était prêt à travailler à tout moment.

La preuve concernant la disponibilité du prestataire

[109] Le visa d’étudiant du prestataire le limitait à un maximum de 20 h de travail par semaine. À lui seul, le visa d’étudiant du prestataire ne l’aurait pas rendu inadmissible. Le prestataire aurait pu travailler ou demeurer disponible pendant les heures régulières de travail chaque jour ouvrable de la semaine, sous réserve des restrictions que son horaire scolaire aurait pu imposer. Par conséquent, la disponibilité du prestataire dépendra des restrictions que son horaire de cours aurait pu avoir.

[110] La preuve concernant l’horaire scolaire du prestataire est mitigée. Les éléments de preuve qui ont démontré que son horaire scolaire limitait sa disponibilité comprennent ce qui suit :

  • Du 6 janvier au 24 avril 2021, le prestataire a passé de 20 à 30 h par semaine en formation et de 20 à 30 h aux études. Cela comprenait, entre autres, le temps en classe, les études, les devoirs, les laboratoires de recherche, l’apprentissage à distanceNote de bas page 51.
  • Le prestataire a déclaré que du 6 janvier au 30 avril 2020, il suivait des cours :
    • Lundi : 8 h 30 à 15 h 30
    • Mardi et jeudi : 13 h à 14 h 30
    • Mercredi : 13 h à 15 h 30
  • Le prestataire était prêt à travailler le mardi et jeudi de 15 h à minuit et la fin de semaine, y compris le vendredi, de 8 h à minuit. Le prestataire n’était pas prêt à modifier son horaire de cours pour accepter du travailNote de bas page 52.

  • Le questionnaire de formation du prestataire a indiqué qu’il consacrait au moins 25 h par semaine à ses étudesNote de bas page 53.
  • Lors d’un appel téléphonique avec la Commission en novembre 2021, le prestataire a confirmé qu’il n’était disponible pour travailler que le soir et la fin de semaine parce que ses études étaient prioritaires pendant la journée. Il aurait dit qu’il était prêt à travailler et que la seule restriction était qu’il ne pouvait pas travailler le matin et l’après-midi les jours de semaine et qu’il ne pouvait pas travailler plus de 20 h par semaineNote de bas page 54.

[111] Les éléments de preuve qui ont démontré que le prestataire avait un horaire scolaire flexible comprennent ce qui suit :

  • Dans sa demande de révision de la fin d’octobre 2021, le prestataire a écrit que tous ses cours étaient asynchrones et flexibles. Cela signifie qu’il pouvait travailler pendant les heures régulières de travail de la semaine. Il a noté qu’il avait 35 h de cours et d’études. Il a écrit qu’il était prêt à travailler à tout moment [traduction] « malgré l’horaire qu’il a fourniNote de bas page 55 ». Le prestataire a joint cette lettre à son avis d’appel à la division généraleNote de bas page 56.
  • À l’audience devant la division générale en janvier 2022, le prestataire a déclaré qu’il [traduction] « était disposé à chercher n’importe quand. [Il] n’avait pas de temps fixe pour ses cours. C’était tout à fait flexibleNote de bas page 57 ».
  • Le prestataire a déclaré qu’une fois ses cours terminés, son visa d’étudiant n’imposait plus une limite de 20 h de travail par semaine. Il était autorisé à travailler à temps plein. Ses cours ont pris fin le 25 mars 2021Note de bas page 58. Il a passé des examens après cette date. Il a déclaré que ses examens avaient lieu [traduction] « principalement après 19 h », ce qui n’a pas nui à sa disponibilitéNote de bas page 59.

La disponibilité du prestataire du 6 janvier 2021 au 25 mars 2021

[112] Tout au long du mois de mars 2021, le prestataire a déclaré qu’il avait un horaire scolaire fixe. Il a dit précisément quand il pouvait travailler. Cela se limitait au mardi, au jeudi et à la fin de semaine.

[113] Plus tard cette année-là, à la fin d’octobre 2021, alors que la Commission avait déjà rejeté sa demande de prestations, le prestataire a déclaré qu’il avait un horaire flexible et qu’il aurait pu travailler à tout moment.

[114] Pourtant, un mois plus tard, le prestataire est revenu à ses déclarations antérieures concernant le moment où il était disponible.

[115] L’horaire du prestataire était peut-être doté d’une certaine flexibilité, mais le reste de la preuve montre que le prestataire avait certaines restrictions, en ce sens qu’il n’était pas en mesure ou n’était pas préparé à travailler certains matins et après-midis les jours de semaine. Je trouve particulièrement convaincant le fait que le prestataire ait précisé les dates et les heures auxquelles il était prêt à travailler.

[116] De ce fait, je suis obligée de conclure que le prestataire n’était pas disponible pendant les heures normales de travail chaque jour ouvrable de la semaine du 6 janvier 2021 au 25 mars 2021.

La disponibilité du prestataire après le 25 mars 2021

[117] Le prestataire déclare qu’après la fin de son semestre, il ne faisait plus l’objet de restrictions. Son visa d’étudiant ne limitait plus le nombre d’heures qu’il pouvait travailler. Il n’avait pas non plus de cours.

[118] Le prestataire a subi des examens après le 25 mars 2021. Il dit que la preuve montre que ses examens ont eu lieu surtout après 19 h, de sorte que, à ce moment-là, il était disponible pour travailler à temps plein pendant les heures normales de travail chaque jour ouvrable de la semaineNote de bas page 60.

[119] Toutefois, il est évident que le prestataire n’aurait pas été disponible pour travailler aux dates et aux heures où ses examens ont eu lieu pendant les heures normales de travail. Le prestataire aurait dû passer les examens au moment prévu.

[120] Toutefois, l’information qui portait sur le calendrier d’examen du prestataire n’a pas été présentée durant les procédures de la division générale. Il n’y a aucune preuve portant sur le nombre d’examens que le prestataire a subis ni sur le moment où chaque examen a eu lieu. Pour cette raison, je ne suis pas en mesure de connaître la disponibilité du prestataire après le 25 mars 2021.

[121] Je renvoie l’affaire à la division générale en vue de trancher une seule question –la disponibilité du prestataire après le 25 mars 2021. La division générale peut cerner le nombre d’examens que le prestataire a subis du 25 mars 2021 au 24 avril 2021, et si l’un ou l’autre de ces examens a eu lieu lors des heures normales de travail pendant la semaine.

Conclusion

[122] J’accueille l’appel.

[123] Le prestataire n’était pas disponible pour travailler du 6 janvier 2021 au 25 mars 2021 étant donné son horaire de cours.

[124] La disponibilité du prestataire du 25 mars 2021 au 24 avril 2021 est indéterminée à ce stade. Je renvoie cette affaire à la division générale afin qu’elle puisse aborder cette question non résolue.

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