Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : Commission de l’assurance-emploi du Canada c ML, 2022 TSS 828

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante :

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Représentante :

A. Fricker

Partie intimée : M. L.
Représentante : B. L.

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 27 avril 2022 (GE-22-821)

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 13 juillet 2022
Personnes présentes à l’audience :

Représentante de l’appelante
Intimée
Représentant de l’intimée

Date de la décision : Le 29 août 2022
Numéro de dossier : AD-22-290

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. La prestataire a choisi de recevoir les prestations parentales prolongées et le choix était irrévocable.

Aperçu

[2] L’intimée, M. L. (prestataire), a demandé et reçu des prestations de maternité, puis des prestations parentales de l’assurance-emploi. Dans son formulaire de demande, elle a sélectionné les prestations parentales prolongées. Cette option permet de recevoir des prestations à un taux moins élevé sur une plus longue période.

[3] La prestataire a demandé des prestations en octobre 2021. Dans son formulaire de demande, elle a indiqué qu’elle voulait recevoir des prestations parentales pendant 52 semaines. Elle a reçu son premier versement de prestations parentales vers le 8 février 2022. Ce jour-là, elle a communiqué avec l’appelante, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, pour lui demander pourquoi le montant du paiement avait baissé. On lui a dit qu’elle recevait les prestations parentales prolongées.

[4] La prestataire a voulu faire remplacer les prestations prolongées par les prestations standards. Elle avait prévu prendre seulement un an de congé. La Commission a rejeté sa demande. Elle a expliqué à la prestataire qu’il était trop tard pour changer d’option parce que les premières prestations parentales avaient déjà été versées. La prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision. Cette dernière a maintenu sa décision.

[5] L’appel de la prestataire à la division générale du Tribunal a été accueilli. La division générale a décidé que la prestataire avait fait une erreur en sélectionnant les prestations parentales prolongées dans le formulaire de demande. Elle a conclu que la prestataire voulait en fait choisir les prestations parentales standards et qu’elle voulait toucher des prestations de maternité et des prestations parentales au total pendant un an. Compte tenu de l’intention de la prestataire, la division générale a décidé qu’elle avait choisi les prestations parentales standards.

[6] La Commission porte maintenant la décision de la division générale en appel à la division d’appel du Tribunal. Elle soutient qu’en accueillant l’appel, la division générale a dépassé sa compétence, fait des erreurs de droit et fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée.

[7] J’ai décidé que la division générale avait fait une erreur de droit. J’ai aussi décidé de rendre la décision qu’elle aurait dû rendre, soit que la prestataire a choisi de recevoir les prestations parentales prolongées et que ce choix était irrévocable (impossible à changer).

Questions en litige

[8] Je me suis concentrée sur les questions suivantes :

  1. a) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en ne respectant pas la jurisprudence ayant un caractère obligatoire?
  2. b) Si oui, quelle est la meilleure façon de corriger l’erreur de la division générale?

Analyse

[9] Je peux modifier l’issue de la présente affaire seulement si la division générale a commis une erreur pertinente. Je dois donc regarder si la division générale a fait l’une des choses suivantesNote de bas de page 1 :

  • elle a mené une procédure inéquitable;
  • elle n’a pas décidé d’une question qu’elle aurait dû trancher ou a décidé d’une question qu’elle n’aurait pas dû trancher;
  • elle a mal interprété ou mal appliqué la loi;
  • elle a fondé sa décision sur une erreur importante au sujet des faits de l’affaire.

Contexte

[10] Il y a deux types de prestations parentales :

  • Les prestations parentales standards – le taux des prestations s’élève à 55 % de la rémunération hebdomadaire assurable des prestataires, jusqu’à concurrence d’un montant maximal, et un parent peut toucher des prestations pendant un maximum de 35 semaines.
  • Les prestations parentales prolongées – le taux des prestations s’élève à 33 % de la rémunération hebdomadaire assurable des prestataires, jusqu’à concurrence d’un montant maximal, et un parent peut toucher des prestations pendant un maximum de 61 semaines.

[11] La prestataire a demandé des prestations de maternité et des prestations parentales à compter du 17 octobre 2021Note de bas de page 2.

[12] Elle a précisé qu’elle voulait recevoir les prestations parentales immédiatement après les prestations de maternité. Elle a choisi les prestations parentales prolongées. À la question sur le nombre de semaines pendant lesquelles elle désirait recevoir des prestations, elle a choisi 52 semaines dans le menu déroulantNote de bas de page 3. 

[13] Les premières prestations parentales prolongées ont été versées à la prestataire le 4 février 2022Note de bas de page 4. Elle a reçu le paiement dans son compte le 8 février. Elle a communiqué avec la Commission ce jour-là pour demander de passer à l’option standardNote de bas de page 5. 

[14] La Commission a rejeté la demande de la prestataire. La Commission a expliqué qu’il était trop tard pour modifier son choix parce qu’elle avait déjà reçu des prestations parentales. La prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision. Cette dernière a maintenu sa décision.

Décision de la division générale

[15] La division générale a accueilli l’appel de la prestataire. Elle a conclu que la prestataire avait fait une erreur lorsqu’elle a choisi l’option prolongée dans son formulaire de demande et qu’elle avait plutôt l’intention de choisir l’option standardNote de bas de page 6.

[16] La division générale a conclu que la prestataire avait choisi l’option prolongée dans son formulaire, mais que certains éléments de preuve venaient contredire ce choixNote de bas de page 7. Elle a accepté le témoignage de la prestataire, qui a expliqué que son intention était de s’absenter du travail pendant un an et qu’elle a sélectionné l’option prolongée en croyant choisir de recevoir des prestations parentales et des prestations de maternité au total pour 52 semainesNote de bas de page 8.

[17] La division générale a conclu que, comme la prestataire a communiqué avec la Commission dès qu’elle a reçu le premier versement de prestations prolongées, son intention était de choisir les prestations standardsNote de bas de page 9. La division générale a admis que la prestataire avait prévu prendre un congé d’un an. Cette dernière a présenté une lettre de son employeur qui confirmait qu’elle avait l’intention de partir en congé pendant un anNote de bas de page 10.

[18] La division générale a conclu qu’il faut tenir compte de tous les éléments de preuve pertinents pour déterminer l’option que la prestataire a choisie dans son formulaire de demandeNote de bas de page 11. Elle a conclu que la prestataire avait l’intention de choisir les prestations parentales standardsNote de bas de page 12.

[19] La division générale a conclu que la prestataire avait choisi les prestations prolongées dans son formulaire de demande, mais qu’il s’agissait du seul élément de preuve indiquant qu’elle avait l’intention de choisir les prestations prolongéesNote de bas de page 13. Elle a conclu que cet élément était moins convaincant que la preuve démontrant son intention de recevoir des prestations de maternité et des prestations parentales au total pendant un anNote de bas de page 14.

[20] S’appuyant sur l’ensemble de la preuve, la division générale a conclu que la prestataire avait eu l’intention de choisir les prestations standards. Étant donné cette intention, elle a décidé que la prestataire avait en fait choisi de recevoir les prestations parentales standardsNote de bas de page 15.

Appel de la Commission à la division d’appel

[21] La Commission fait valoir que la division générale a fait plusieurs erreurs dans sa décision. Elle avance les arguments suivants :

  • La division générale a fait une erreur de droit en modifiant effectivement le choix de la prestataire de l’option prolongée à l’option standard après le versement des premières prestations.
  • La division générale a outrepassé sa compétence en déterminant l’option que la prestataire a choisie.
  • La division générale a fait une erreur de droit, car elle n’a pas tenu la prestataire responsable de la connaissance de ses droits.
  • La division générale a commis une erreur de droit, car elle n’a pas suivi la jurisprudence pertinente de la Cour fédérale.

La division générale a fait une erreur de droit, car elle n’a pas suivi la jurisprudence obligatoire

[22] Dans sa décision, la division générale s’est penchée sur la décision rendue par la Cour fédérale dans l’affaire KarvalNote de bas de page 16. La division générale a conclu qu’il y avait de grosses différences entre les faits décrits dans la décision Karval et la situation de la prestataireNote de bas de page 17. Elle n’a toutefois pas mentionné ni appliqué les conclusions de la Cour fédérale sur la clarté des énoncés décrivant le taux des prestations et l’irrévocabilité des choix faits dans le formulaire de demande.

[23] Selon la Commission, il s’agit d’une erreur de droit. La prestataire soutient plutôt que la division générale a examiné la décision Karval et qu’elle a correctement relevé les différences entre les faits des deux affaires. La prestataire souligne que la preuve dans l’affaire Karval ne démontre pas une intention claire de choisir les prestations standards. Dans la présente affaire, la preuve démontre de façon concluante que la prestataire a toujours eu l’intention de prendre un congé d’un an.

[24] La prestataire souligne aussi le fait qu’elle a communiqué avec la Commission le jour où elle a reçu le versement. Dans l’affaire Karval, la prestataire a attendu de nombreux mois avant de communiquer avec la Commission. Selon la prestataire, la division générale a tenu compte de la décision Karval et elle a constaté les différences qui s’y trouvaient. Il n’y a donc aucune erreur de droit.

[25] Dans l’affaire Karval, la Cour fédérale a conclu que c’est la responsabilité des prestataires d’analyser soigneusement les options possibles et de tenter de les comprendre. En cas de doutes, les prestataires doivent poser des questions à la Commission. La Cour a constaté que les questions du formulaire de demande n’étaient pas nébuleuses d’un point de vue objectif et qu’il ne manquait pas de détails dans les explications du formulaireNote de bas de page 18.

[26] Dans la décision Karval, la Cour fédérale a déclaré que les différents taux de prestations (55 % de la rémunération hebdomadaire pour l’option standard et 33 % pour l’option prolongée) et le fait que le choix ne peut pas être modifié étaient énoncés clairement dans le formulaire de demandeNote de bas de page 19.

[27] La décision Karval est une jurisprudence d’application obligatoire. Cela veut dire que la division générale n’a pas le choix d’en tenir compte. Si la division générale a choisi de ne pas suivre les principes décrits dans la décision Karval, il faut qu’elle explique pourquoiNote de bas de page 20. 

[28] La division générale a expliqué que les faits dans l’affaire Karval étaient différents parce que la prestataire dans cette affaire avait demandé 61 semaines de prestations prolongées et qu’elle avait attendu six mois après le début du versement des prestations parentales pour demander de passer à l’option standard. La prestataire dans l’affaire Karval n’avait aucune preuve montrant qu’elle avait toujours eu l’intention de prendre un congé d’un an.

[29] La division générale a mentionné ce que dit la décision Karval, soit qu’il incombe fondamentalement aux prestataires d’analyser soigneusement les options possibles et de tenter de les comprendre. Comme je l’ai déjà souligné, la décision précise que si des doutes subsistent, les prestataires doivent s’adresser à la CommissionNote de bas de page 21.

[30] La division générale a fait référence à ces passages de la décision Karval, mais elle a ensuite conclu que la situation de la prestataire était différente. Elle a décidé que la prestataire avait choisi 52 semaines de prestations prolongées parce qu’elle avait trouvé que les questions dans le formulaire de demande étaient mêlantesNote de bas de page 22. La division générale n’a pas expliqué pourquoi elle avait décidé de ne pas suivre l’orientation donnée par la Cour fédérale, soit que les prestataires qui ont du mal à comprendre le formulaire doivent communiquer avec la Commission.

[31] Dans la décision Karval, il est écrit que les prestataires qui analysent soigneusement le formulaire de demande vont voir que le taux des prestations prolongées est moins élevé, c’est-à-dire qu’il est de 33 % de la rémunération hebdomadaire. Les prestataires peuvent aussi voir que leur choix est irrévocable après le début du versement des prestationsNote de bas de page 23.

[32] Dans une décision rendue récemment dans l’affaire Hull, la Cour d’appel fédérale a conclu que les principes tirés de la décision Karval s’appliquent malgré les différences factuelles. Dans l’affaire Hull, la prestataire avait aussi demandé 52 semaines de prestations parentales prolongées, car elle voulait recevoir des prestations de maternité et des prestations parentales au total pendant un an. La Cour a confirmé le principe énoncé dans la décision Karval : [traduction] « les prestataires qui fondent leur choix sur une mauvaise compréhension du régime de prestations parentales n’ont aucun recours possible en droitNote de bas de page 24 ».

[33] La division générale a conclu que la prestataire avait sélectionné par erreur les prestations prolongées alors qu’elle voulait demander des prestations de maternité et des prestations parentales pendant un total de 52 semaines. Lorsqu’elle a rendu cette décision, la division générale a fait une erreur de droit, car elle n’a pas suivi la décision d’application obligatoire rendue par la Cour fédérale dans l’affaire Karval.

[34] Comme j’ai constaté que la division générale a commis une erreur, il n’est pas nécessaire que j’examine les autres arguments de la Commission.

Je vais corriger l’erreur de la division générale en rendant la décision qu’elle aurait dû rendre

[35] À l’audience, les deux parties ont fait valoir que, si la division générale avait fait une erreur, je devais rendre la décision qu’elle aurait dû rendreNote de bas de page 25.

[36] Je suis d’accord. Je conclus que, dans la présente affaire, il convient de remplacer la décision de la division générale par ma propre décision. Les faits ne sont pas contestés et la preuve au dossier est suffisante pour me permettre de rendre une décision.

La prestataire a choisi de recevoir des prestations parentales prolongées et son choix était irrévocable

[37] La division d’appel et la division générale ont rendu un certain nombre de décisions abordant le choix des prestations parentales prolongées. Dans bon nombre de ces décisions, le Tribunal a regardé le type de prestations que les prestataires ont effectivement choisi. Lorsque le formulaire de demande contenait des renseignements contradictoires, le Tribunal a déterminé le choix qui était le plus probable. Dans d’autres affaires, il a tenu compte de l’intention des prestataires au moment de faire leur choix.

[38] Dans la décision Hull, rendue récemment, la Cour d’appel fédérale s’est penchée sur la bonne façon d’interpréter les articles 23(1.1) et 23(1.2) de la Loi sur l’assurance-emploi. L’article 23(1.1) est celui qui dit que les prestataires choisissent l’option standard ou prolongée dans leur demande de prestations parentales. L’article 23(1.2) prévoit que le choix est irrévocable dès que les prestations sont versées.

[39] Dans l’affaire Hull, la prestataire avait sélectionné l’option prolongée dans son formulaire de demande et elle avait demandé 52 semaines de prestations parentales, qu’elle voulait recevoir après les prestations de maternité. La prestataire a touché des prestations parentales prolongées pendant plusieurs mois avant de se rendre compte de son erreur. Elle avait trouvé le formulaire de demande déroutant et son intention était de recevoir des prestations de maternité et des prestations parentales pendant un an au total. La division générale a conclu, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle avait choisi les prestations parentales standards.

[40] Dans la décision Hull, la Cour a déclaré :

[traduction]
La question de droit aux fins de l’article 23(1.1) de la Loi sur l’assurance-emploi est la suivante : le mot « choisit » désigne-t-il ce que les prestataires indiquent comme choix de prestations parentales dans le formulaire de demande ou désigne-t-il ce que les prestataires « avaient l’intention » de choisirNote de bas de page 26?

[41] La Cour a conclu que le choix des prestataires est en fait l’option choisie dans leur formulaire de demande, et non l’option que les prestataires avaient peut-être l’intention de choisirNote de bas de page 27. Elle a aussi confirmé qu’une fois que le versement des prestations parentales a commencé, le choix ne peut pas être révoqué, que ce soit par les prestataires, la Commission ou le TribunalNote de bas de page 28.

[42] Lorsqu’on applique les principes énoncés par la Cour dans la décision Hull à la situation de la prestataire, il est évident qu’elle a choisi de recevoir les prestations parentales prolongées. C’est l’option sélectionnée dans le formulaire de demande. Elle a choisi de recevoir des prestations parentales prolongées pendant 52 semaines. Après le premier versement de ces prestations, le choix est devenu irrévocable.

[43] La prestataire soutient que la preuve démontre de façon concluante qu’elle avait l’intention de choisir de recevoir des prestations pour un total d’un an. Son relevé d’emploi indique clairement qu’elle prend un congé d’un an. Une lettre de son employeur confirme cette information. Elle a choisi 52 semaines de prestations dans le menu déroulant du formulaire de demande parce que ce chiffre correspondait au nombre total de semaines pendant lesquelles elle prévoyait s’absenter du travail.

[44] La prestataire affirme que le formulaire de demande n’est pas clair, sans quoi il n’y aurait pas autant d’appels portant sur la même question. Elle explique avoir fait une erreur en choisissant les prestations prolongées. Contrairement à ce qui s’est passé dans l’affaire Karval, elle a toujours eu l’intention de prendre un congé d’un an. Elle a communiqué avec la Commission le jour où l’argent pour les prestations parentales prolongées a été déposé dans son compte. Sa situation est donc différence des circonstances décrites dans les décisions Hull et Karval.

[45] La prestataire fait valoir qu’elle a subi un préjudice. Lorsqu’elle retournera au travail en octobre 2022, elle aura touché beaucoup moins de prestations que ce à quoi elle a droit.

[46] La prestataire a aussi fait référence à l’objet de la loi dont la Cour d’appel fédérale a discuté dans l’affaire Hull. Elle affirme que personne ne subira de préjudice si on lui permet de toucher des prestations parentales standards, car c’est exactement ce à quoi son employeur et elle s’attendaient.

[47] La prestataire fait valoir que le formulaire de demande n’est pas clair et ne précise pas que le choix est irrévocable, seulement qu’il ne peut pas être modifié une fois que des prestations sont versées. Elle dit que les gens ordinaires ne devraient pas avoir à lire des textes de loi compliqués pour comprendre leurs droits. Elle soutient que le fait de conclure qu’elle ne peut pas modifier son choix parce qu’elle a reçu un paiement va à l’encontre de l’objet de la loi.

[48] Il est clair que la prestataire n’avait pas l’intention de demander 52 semaines de prestations parentales prolongées après les 15 semaines de prestations de maternité. Je suis d’accord avec la division générale et la prestataire sur un point : la preuve donne à penser qu’elle a toujours eu l’intention de s’absenter du travail pendant un an. Malheureusement, dans l’affaire Hull, la Cour d’appel fédérale a clairement confirmé que l’option cochée dans le formulaire de demande et le nombre de semaines indiqué constituent le choix, peu importe l’intention des prestataires.

[49] Je me suis demandé si l’élément de preuve produit par l’employeur et déposé par la prestataire, qui confirme qu’elle prévoit retourner au travail après un an, a une incidence quelconque sur son choix. La lettre en question et le témoignage de la prestataire confirment qu’elle voulait toucher des prestations de maternité et des prestations parentales pendant un an au total. Une telle preuve contredit aussi le choix de recevoir des prestations prolongées pendant 52 semaines après les prestations de maternité, ce qui donne un total de 67 semaines de prestations.

[50] Dans la décision Hull, la Cour a déclaré que l’article 23(1.1) de la Loi sur l’assurance-emploi donne lieu à une seule interprétation raisonnableNote de bas de page 29. Elle a conclu que la sélection de l’option standard ou prolongée dans le formulaire de demande et le nombre de semaines pendant lesquelles les prestataires désirent recevoir des prestations constituent leur choix. Elle a décidé que c’est la preuve du choix fait par les prestataires et que la Commission n’a rien à voir dans la question de savoir si les prestataires ont fait ou non le bon choixNote de bas de page 30.

[51] Dans la décision Hull, la Cour a confirmé que le choix des prestataires est l’option choisie dans leur formulaire de demande : les prestations parentales standards ou prolongées. Je comprends que la date où la prestataire prévoyait retourner au travail contredit son choix. Cependant, la loi exige que le choix entre les prestations standards et prolongées se fasse au moment de demander les prestations. De plus, la Cour d’appel fédérale a déclaré que c’est là le choix de la prestataire, même si ce n’est pas ce qu’elle avait l’intention de choisirNote de bas de page 31.

[52] Le Parlement n’a prévu aucune exception à l’irrévocabilité du choix de prestations. Il est malheureux pour la prestataire qu’une simple erreur dans un formulaire de demande puisse avoir des répercussions importantes sur sa situation financière. Cela éveille la compassion. Mais je dois appliquer la loi telle qu’elle est écriteNote de bas de page 32. Je conclus donc que la loi et la jurisprudence confirment qu’un choix ne peut pas être révoqué sur la base d’une erreur.

[53] J’ai aussi considéré les arguments de la prestataire voulant que sa situation soit différente de celle décrite dans l’affaire Hull parce qu’elle a communiqué avec la Commission le jour où elle a reçu le premier versement de prestations prolongées. Dans l’affaire Hull, la Cour a confirmé que le choix des prestataires ne peut pas être modifié après la réception du paiement. Rien dans la loi ou dans la jurisprudence ne laisse croire qu’on peut appliquer la loi différemment parce qu’un seul paiement a été versé.

[54] Dans l’affaire Hull, la Cour a déclaré ceci :

[traduction]
[…] une fois que le type de prestations parentales et le nombre de semaines sont choisis sur le formulaire de demande, et dès le versement de ces prestations, il est impossible de modifier, de changer, d’annuler ou de révoquer le choix. Ainsi, le versement des prestations rend le choix irrévocableNote de bas de page 33.

[55] Les prestataires peuvent modifier leur choix après avoir envoyé le formulaire de demande, mais avant de recevoir des prestations parentales. Les prestataires peuvent créer un compte auprès de Service Canada pour vérifier le taux et la date du début de leurs prestations de maternité et de leurs prestations parentales. Cela leur permet donc de vérifier si le choix fait dans le formulaire de demande correspond à leur intention.

[56] Je comprends que la prestataire a fait une erreur en choisissant les prestations parentales prolongées. Elle avait l’intention de choisir l’option standard. Mais la Cour d’appel fédérale a indiqué clairement que l’intention au moment de remplir le formulaire n’est pas pertinente pour déterminer le choix de la prestataire.

[57] La prestataire a choisi les prestations parentales prolongées dans son formulaire de demande. C’est le choix qu’elle a fait et, dès que des prestations lui ont été versées, il est devenu irrévocable.

Conclusion

[58] L’appel est accueilli. La prestataire a choisi les prestations parentales prolongées et son choix était irrévocable. 

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